Comptes rendus

De Waele, Michel. L’affirmation du fait colonial dans les relations internationales. La guerre franco-anglaise de 1627-1629 (Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2022), 330 p.

  • Jérôme Jue

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  • Jérôme Jue
    Lycée du Golfe de Saint-Tropez

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Couverture de Volume 77, numéro 3, hiver 2024, p. 1-213, Revue d’histoire de l’Amérique française

La lecture de cet ouvrage est plaisante d’abord par la longue familiarité que l’on sent, chapitre après chapitre, entre l’auteur et son sujet. Historien spécialiste de l’Europe moderne, Michel De Waele a déjà consacré plusieurs articles au sort de l’Amérique française du 17e siècle, mais c’est un cadre chronologique explicitement recentré sur la guerre franco-anglaise de 1627-1629 qui donne sens à la présente publication. Celle-ci se consacre en effet très largement à une meilleure compréhension des origines et des enjeux du conflit. La postface revendique d’ailleurs la nécessité de ne pas en limiter la connaissance aux seuls événements bien connus de la descente anglaise sur l’île de Ré et du siège de La Rochelle. Comme la lecture du titre le suggère, l’auteur développe la thèse d’une relégation de la question religieuse dans les relations internationales au profit d’une affirmation du fait colonial à la faveur de ce conflit. Ce projet d’exposer les prémisses d’une évolution de long terme donne un ouvrage non seulement convaincant mais passionnant, dans lequel la clarté et la structure de l’écriture font rapidement oublier les coquilles. L’argument principal repose sur le fait que, les Britanniques s’étant emparés en 1629 de Québec et de l’Acadie, la question des territoires français d’Amérique s’immisce pour la première fois au coeur des relations entre les deux royaumes. Ce livre replace les hostilités franco-anglaises dans le contexte plus large de la guerre de Trente ans, puis examine comment les négociations autour de la restitution de ses colonies à la France retardent pendant plusieurs mois la signature des traités de paix en 1632. En introduction, l’auteur annonce vouloir contribuer à l’écriture d’une histoire de l’Europe au 17e siècle dégagée de l’angle national au profit d’une nouvelle approche de l’histoire coloniale atlantique ouverte à la sphère diplomatique. L’ampleur et la diversité des recherches archivistiques effectuées en Europe, des archives danoises et autrichiennes entre autres, témoignent de cette volonté de décloisonnement renforcée par le recours aux chroniques et la maîtrise d’une abondante bibliographie. Le plan, bien que non linéaire, suit largement la chronologie. Après une ouverture axée sur quelques éléments de contexte, le lecteur découvre au long de neuf chapitres thématiques les ressorts du conflit franco-anglais pour progressivement en faire surgir la question coloniale. Les six premiers chapitres s’attachent à identifier les origines profondes du conflit et les enjeux de la situation internationale en Europe. L’auteur pointe ici les difficultés d’un rapprochement autour de la question religieuse entre une France catholique et une Angleterre protestante aux objectifs divergents sur la scène internationale comme intérieure, où chaque souverain cherche à contrôler sa minorité religieuse. Si l’année 1625, annus mirabilis de l’Espagne, marque un tournant aux yeux de l’auteur dans les relations internationales, c’est avant tout parce qu’elle s’accompagne de la montée des tensions entre l’Angleterre et la France à la suite de la victoire remportée sur l’escadre de Soubise par l’alliance entre Hollandais et Français en 1625. Les sollicitations des huguenots pour obtenir la protection de Charles Ier ne suffisent pas à expliquer le déclenchement du conflit, car l’étude met en évidence l’importance des prises et contre-prises en mer qui perturbent les activités commerciales des marchands anglais et français. Un second temps de l’étude dépeint le court conflit franco-anglais de 1627-1629 et ses conséquences en trois chapitres. Le croisement des sources nationales permet une lecture fine des événements, depuis l’arrivée de la flotte anglaise devant La Rochelle jusqu’au succès de Louis XIII. L’intervention de Charles Ier lui a non seulement permis de restaurer son honneur bafoué, mais l’incline surtout à se retirer des affaires continentales pour réorienter les ambitions de la …