L’ouvrage de Daniel Rück, professeur d’histoire de l’Université d’Ottawa, se penche sur les relations entre les Mohawks de Kahnawake et les instances gouvernementales en ce qui concerne la délimitation des réserves au Canada, leurs modifications et les injustices subies. La sélection des sources est bien coordonnée puisqu’une vaste disponibilité d’archives, de recherches et d’analyses précédentes sont disponibles depuis le 18e siècle sur le sujet. L’auteur a reçu le soutien de l’Osgoode Society for Canadian Legal History, promouvant l’histoire du droit canadien et les archives d’histoire orale. L’angle choisi par l’auteur, répugné par les procédures administratives et politiques des instances gouvernementales à l’égard de Kahnawake, est axé sur des visions soutenues par des analyses comparatives avec les théories variées d’historiens, anthropologues et ethnologues, tant allochtones qu’autochtones, comme William B. Newell, Arthur Parker, Lewis Morgan, Elizabeth Tooker, et ce, tout au long de l’ouvrage. Il analyse les mouvements internes et les réactions des Mohawks lors de l’organisation du bornage et les ingérences gouvernementales dans leur communauté. Les titres sobres et concis des chapitres définissent clairement les étapes analysées, lesquelles sont d’abord mises en contexte comme dans les trois premiers chapitres, qui s’attardent aux développements historiques et juridiques des relations allochtones-autochtones découlant des premiers segments de l’histoire ayant mené à l’instauration des missions, de Kentake-La Prairie (1667) à Caughnawaga-Kahnawake (1716), jusqu’à l’abolition du régime seigneurial. Le chapitre 2 traite de la période de 1790-1815 dans laquelle les relations de collaboration de nation à nation prennent graduellement fin, puisque la gérance des missions devient un fardeau pour l’État. C’est la période durant laquelle les Mohawks conçoivent qu’un plan semble organisé par l’État pour les assujettir à l’autorité coloniale par l’établissement du système de propriété immobilière. Le chapitre 3 (1815-1850) aborde les redéfinitions des droits de résidence, des droits de propriété et de l’administration même des missions autochtones. Pour saisir le contexte, la période couverte nécessite un survol des instances gouvernementales devenues responsables des terres destinées à la création des réserves au Bas-Canada. Cette séquence temporelle, souvent omise, présente un point qui aurait pu être exposé davantage par Rück pour situer les lecteurs. Il s’agit de l’archaïsme de la constitution du postulat philosophique ultraconservateur, de 1815 à 1825, agglomérant des aristocrates intellectuels et des poètes d’origine anglaise, écossaise et irlandaise siégeant en grande partie à l’Assemblée législative du Haut-Canada. Cette entité élitiste connue sous l’appellation de family compact favorisait un développement colonial d’immigrants anglo-saxons et les privilèges accordés à l’Église anglicane. S’étant dissocié de ce groupuscule, l’ancien réformiste anglais John Rolph (1824-1838), revenu à l’Assemblée législative en 1851, fut désigné commissaire responsable des Terres de la Couronne, déléguant 230 000 acres de terres (environ 57 000 ha) pour organiser la création des réserves indiennes au Bas-Canada, le tout dans le contexte de l’abolition du régime seigneurial en 1854. Il a précédemment promu et mis en oeuvre la naturalisation d’immigrants américains (1824-1838), alors établis dans les terres de la Couronne aux abords des Grands Lacs. Au chapitre 4, pendant la transition entre la province du Canada et la Confédération canadienne (1850-1875), Rück présente l’analyse du détachement graduel des alliances et des relations de l’État avec les Autochtones. Centrés sur la première industrialisation accompagnée du développement du chemin de fer, les dirigeants perçoivent désormais les peuples autochtones comme un fardeau et non comme des alliés ou des partenaires. Le sujet est objet de débats à la Chambre des communes de 1870 à 1890, le nouvel État faisant la promotion de l’émancipation et la « civilisation » des Indiens par le biais de lois et du droit à la propriété. Rück expose ensuite « les conséquences de …
Rück, Daniel. The Laws and the Land. The Settler Colonial Invasion of Kahnawà:ke in Nineteenth-Century Canada. Vancouver, UBC Press, 2021, 336 p.[Notice]
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Eric Pouliot-Thisdale
Université de Montréal