Comptes rendus

Fisette, Serge. L’homosexualité masculine au Québec de la Nouvelle-France à nos jours. Montréal, Québec Amérique, 2021, 310 p.[Notice]

  • Dominic Dagenais

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  • Dominic Dagenais
    Chercheur indépendant

Les ouvrages sur l’histoire de l’homosexualité au Québec ne sont pas légion, et chaque nouvelle publication sur le sujet est la bienvenue. Cette synthèse de Serge Fisette succède à celles de Ross Higgins (De la clandestinité à l’affirmation, Lux, 1999) et de Patrice Corriveau (La répression des homosexuels au Québec et en France, Septentrion, 2006). En intégrant divers renseignements tirés des plus récents travaux sur le sujet et à partir de ses propres recherches, l’auteur nous propose l’ouvrage de vulgarisation le plus à jour sur l’histoire de l’homosexualité masculine québécoise. À la barre du magazine Espace sculpture pendant plus de vingt-cinq ans, Fisette est avant tout historien de l’art. Le champ d’expertise initial de l’auteur est perceptible tout au long de l’ouvrage, comme en font foi les nombreuses références à la littérature, au cinéma, à la télévision et à la chanson, en plus de la préface du metteur en scène Robert Lepage. Le troisième chapitre, consacré aux années 1960, marque une rupture. Il est maintenant question des balbutiements de la lutte pour la reconnaissance, qui culmine avec l’adoption du fameux « bill omnibus » de 1969, qui dépénalise l’homosexualité au Canada. Pour la première fois depuis les débuts de la colonisation française, les rapports sexuels entre adultes de même sexe ne sont plus réprimés. Officiellement du moins. Car comme le démontre le chapitre 4, la discrimination continue de sévir et la résistance, incarnée notamment par le Front de libération homosexuel, est plus nécessaire que jamais. Les célèbres rafles policières dans les bars montréalais Truxx et Mystique, en 1977, et l’importance de la contestation qui s’ensuit en témoignent. Consacré à l’apparition du VIH/SIDA au sein de la communauté gaie au début des années 1980 et à ses ravages, le chapitre 5 constitue en quelque sorte une parenthèse dans la longue marche vers l’émancipation. Imprévisible, la pandémie emporte avec elle de nombreux membres de la communauté, au Québec comme ailleurs, et laisse à jamais sa marque dans l’imaginaire. Fisette recense d’ailleurs quantité d’oeuvres de différents genres artistiques consacrées à ce thème. Renouant avec les chapitres consacrés à une décennie complète, le chapitre 6 décrit la visibilité croissante dont jouit l’homosexualité au sein de la culture populaire dans les années 1980. Il aborde également les débuts du Village gai montréalais, ceux du quartier gai de Québec et l’apparition de campings gais dans différentes régions de la province. Le chapitre consacré aux années 1990 fait pour sa part état des nombreuses initiatives qui contribueront à une certaine normalisation de l’homosexualité. La décennie voit effectivement naître nombre d’organismes et associations voués à la défense et à la représentation de la communauté, qu’il n’est désormais plus possible d’ignorer. C’est ainsi que sont créés par exemple Divers/Cité et la Chambre de commerce gaie du Québec. Fisette évoque dans ce chapitre aussi un éventail d’oeuvres littéraires et cinématographiques dans lesquelles l’homosexualité est représentée. Finalement, le huitième et dernier chapitre, sur les années 2000, aborde la légalisation des unions civiles puis du mariage gai, de même que la multiplication et la diversification des regroupements LGBT. Encore une fois, les représentations artistiques de l’homosexualité font l’objet d’une attention particulière. Fisette nous offre ainsi, en moins de 300 pages, un condensé de l’histoire de l’homosexualité masculine au Québec depuis la Nouvelle-France. On termine la lecture de cet ouvrage avec un certain éreintement, tant les événements, à peine évoqués, s’y enchaînent sans fin. C’est bien sûr le propre de toute synthèse que de se contraindre à effleurer les différents faits marquants afin d’offrir un récit digeste. Toutefois, il aurait peut-être été préférable de passer sous silence certains éléments …