Résumés
Résumé
En 1957, à Chicoutimi, le barbier Arthur Villeneuve commence à recouvrir de peintures au style naïf les murs de sa maison d’ouvrier. Trente-sept ans plus tard, le domicile du « peintre-barbier » est détaché de ses fondations pour être transporté à l’intérieur du Musée du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Dans l’intervalle, une longue suite de différends médiatisés a accompagné la reconnaissance patrimoniale de ce monument atypique. Cet article les analyse pour comprendre le rôle des émotions qui, d’après l’anthropologue Daniel Fabre, prennent pour prétexte le patrimoine en même temps qu’elles le constituent comme tel. Les passions soulevées par la maison Arthur-Villeneuve, en pointant son inadéquation avec les structures en place, apparaissent comme un révélateur des mutations du patrimoine dans la seconde moitié du 20e siècle.
Abstract
In 1957, in Chicoutimi, Québec, barber Arthur Villeneuve began covering the walls of his working-class house with naive paintings. Thirty-seven years later, the abode of the « painter-barber » was being lifted off its foundations and moved inside the Musée du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Between these two moments, a long series of public disputes accompanied the recognition of this atypical work of art as “heritage”. This article analyzes the disputes to understand the role of emotions, which, according to anthropologist Daniel Fabre, take heritage as a pretext while at the same time constituting the heritage object as such. The passions aroused by the Maison Arthur-Villeneuve, given the inadequacy of this house/museum with the existing cultural structures, reveals the mutations in notions of heritage during the second half of the 20th century.
Corps de l’article
Le 9 novembre 1994, un étrange cortège s’ébranle le long de la rue Taché, dans le quartier ouvrier du Bassin à Chicoutimi. Sous le regard de badauds et de journalistes, un tracteur routier entraîne à sa suite une petite maison posée sur une plateforme élévatrice actionnée par un système hydraulique. Avec son plan carré, son revêtement de bois et sa toiture à deux versants coiffant une véranda, l’habitation construite vers 1885 est typique des maisons québécoises de la fin du 19e siècle. Elle ne s’en démarquerait guère si ce n’était des peintures au style naïf qui recouvrent quasiment tous ses murs intérieurs et deux façades extérieures. C’est son ancien occupant, le barbier et artiste autodidacte Arthur Villeneuve, qui a fait d’elle une oeuvre monumentale à la fin des années 1950. Ouverte au public par ses propriétaires-occupants, la maison peinte est devenue célèbre, si bien qu’après la mort du « peintre-barbier » en 1990, le Musée du Saguenay–Lac-Saint-Jean en a fait l’acquisition pour la relocaliser à l’intérieur d’un bâtiment de l’ancienne Compagnie de pulpe de Chicoutimi dans le cadre du renouvellement de son projet muséal. C’est là, à 1,4 km de son emplacement d’origine, qu’elle se dirige lentement en ce jour d’automne 1994 (figure 1).
La muséalisation de la maison Arthur-Villeneuve ne s’est pas faite sans heurts : « La maison-musée du peintre Arthur Villeneuve se meurt », « La petite maison dans la tourmente », « Une oeuvre d’art à l’agonie » ; tels sont quelques-uns des grands titres ayant alerté le public sur le péril qui guettait ce bien culturel. Au lecteur d’aujourd’hui, ce genre de formule choc apparaîtra comme une chose familière. Si familière qu’il en oublierait presque l’historicité du phénomène. Depuis la montée en puissance du concept de patrimoine à partir des années 1970, les spécialistes nous invitent heureusement à redonner toute son épaisseur historique à ce terme[1] et à rester attentifs aux changements qui ont façonné les pratiques de valorisation des traces du passé. En liant le patrimoine à la mémoire et à la reconnaissance des identités qu’il met en scène — celle de la nation d’abord, celle de communautés d’appartenance plus fragmentées ensuite —, ces travaux ont montré que le patrimoine est affaire d’engagement individuel et collectif, et qu’à ce titre son histoire peut être placée sous le signe de la « passion[2] » ou du « combat[3] ».
Constatant « que la passion patrimoniale innerve très profondément et de manière fort diverse notre société », des ethnologues se sont intéressés à leur tour à « ce phénomène dans lequel on peut s’accorder à reconnaître un trait culturel majeur de notre modernité[4] », écrivait l’anthropologue français Daniel Fabre en 1997. Ils ont délaissé le patrimoine ethnologique ou immatériel traditionnellement assigné à leur discipline[5] et ont reporté leur attention sur les monuments et des objets patrimoniaux en tout genre afin de les interroger comme des constructions sociales marquées par une histoire, par des usages. En étudiant les acteurs qui interagissent avec eux, ils reconnaissaient que, pour le citoyen, le visiteur, le bénévole, le propriétaire, le professionnel ou les pouvoirs publics, un monument est « une présence signifiante, un objet de pensée, d’affection ou d’aversion[6] ».
Fabre a formalisé ce chantier de recherche au sein de son Laboratoire d’anthropologie et d’histoire de l’institution de la culture (affilié à l’EHESS de Paris), où il lui a donné une de ses principales impulsions avec l’idée d’« émotions patrimoniales ». Dans un texte-bilan, il dresse en 2013 une typologie de ces émotions qui prennent pour prétexte le patrimoine en même temps qu’elles le constituent comme tel[7]. Allant du plus « tiède » au plus « ardent », il identifie : le transport, au double sens d’émoi et de déplacement sur le terrain pour appréhender soi-même le patrimoine ; la dispute, qui peut éclater à tout moment où une polémique entoure l’objet du patrimoine, ses acteurs ou ses cadres — le « quoi », le « qui » et le « comment » ; la déploration, où l’émotion devient unanime dans la mobilisation ou dans l’indignation ; et enfin la sédition, où l’exaltation collective devient extrême. Cette échelle de l’émotion patrimoniale, qui a l’avantage de nous sortir d’une lecture purement chronologique des événements, est riche de possibilités analytiques au moment où les études patrimoniales mettent de plus en plus l’émotion à l’honneur, mais souvent en la ramenant à l’expérience vécue par les visiteurs[8].
Appliquée à la maison Arthur-Villeneuve, la grille de lecture de Fabre nous permet de comprendre les effusions de 1994 au regard de la spécificité de cette oeuvre atypique. Quelques auteurs et autrices se sont déjà intéressés à la patrimonialisation de cette maison, mais toujours succinctement, et moins pour dévoiler ses enjeux particuliers que pour comprendre les conditions de son succès[9], voire pour relater son dénouement administratif (dans le cas d’un conseiller du ministère de la Culture ayant personnellement participé au projet[10]). Reflet de l’évolution de la notion de patrimoine dans la deuxième moitié du 20e siècle, la maison Arthur-Villeneuve doit pourtant être comprise en relation avec les principales structures du domaine culturel créées durant cette période, comme le Conseil des arts du Canada (1957), le ministère des Affaires culturelles (1961), la Loi sur les biens culturels et la Commission des biens culturels, organisme consultatif créé en vertu de cette loi (1972), et même la convention du patrimoine mondial de l’Unesco (1972). C’est en grande partie en référence à ces institutions, et souvent en tenant compte de leur inadéquation avec le cas de la maison Arthur-Villeneuve, qu’il nous faut interpréter son traitement tumultueux dans l’espace public entre 1957 et 1994.
La genèse de l’émotion : se déplacer pour ressentir
La démarche artistique de Villeneuve est à la source de l’émotion patrimoniale entourant sa maison, car le domicile n’a pu devenir un objet de considération esthétique qu’après que ses surfaces ont été utilisées comme support de création. Mais le coeur du problème est ailleurs. Il réside dans l’insistance de Villeneuve et de son épouse, Hélène Morin, à soumettre l’oeuvre au regard des autres. Ils l’ont fait dans un premier temps en ouvrant leur porte à des étrangers, notamment des journalistes, afin de leur montrer l’oeuvre dans son intégralité. L’hebdomadaire régional Le Lingot est vraisemblablement le premier à s’être intéressé à eux. Dès décembre 1957, un court article y révèle que le barbier, photographié le pinceau à la main devant un mur du rez-de-chaussée de sa maison, peint dans ses temps libres depuis maintenant un an. Son épouse l’encourage dans cette voie, il a beaucoup de projets en tête et regrette seulement de ne pas pouvoir y consacrer tout son temps dans un lieu plus adéquat[11].
Huit mois plus tard, nouvelle apparition médiatique de Villeneuve, cette fois pour annoncer qu’après 1 500 heures de travail, sa maison sera dorénavant ouverte au public sous le nom de Musée de l’artiste[12]. Des « personnalités civiles et religieuses » sont attendues chez lui le 9 août 1958[13] pour l’ouverture officielle, après quoi le grand public pourra venir juger du résultat. Le 30 septembre, toujours animés du même sens de l’initiative sinon de l’autopromotion, les époux se présentent au conseil municipal de Chicoutimi pour solliciter le soutien de la Ville et pour prier tous les conseillers de visiter le Musée de l’artiste, comme l’ont déjà fait certains d’entre eux en compagnie du maire. Dans le cahier régional du Soleil, on rapporte le lendemain que tous les échevins leur ont finalement promis une visite[14]. Or le 18 octobre, pour une raison inconnue, Villeneuve donne avis dans Le Progrès du Saguenay que le musée sera fermé jusqu’à nouvel ordre[15]. Douze jours plus tard, il annonce sa réouverture ; les personnes intéressées peuvent se présenter tous les soirs, de 20 heures à 22h30[16].
Depuis le début, la maison-oeuvre de Villeneuve est donc un lieu qui se donne à voir avec ostentation. Brouillant la frontière entre espace domestique et espace public, les propriétaires revendiquent pour leur domicile la qualité de musée, le présentent comme tel dans les journaux et invitent expressément les gens à venir sur place. Cette tendance à s’introduire dans l’espace public devient plus marquée dans un second temps, quand le peintre commence à travailler sur les façades extérieures du bâtiment. À l’instar des autres artistes « indisciplinés » étudiés par Valérie Rousseau, Villeneuve s’affiche alors au-dehors sans aucune réserve ; dans un décor quotidien, il déploie une oeuvre saturée et tape-à-l’oeil qui interpelle le passant par une multiplication de sollicitations visuelles[17].
La presse régionale n’est pas insensible à cette attraction. Pour l’année 1959, nous comptons deux articles, tous deux anonymes et reprenant le ton engageant du reportage de 1957[18]. Mais à compter de 1960, la presse commence à faire entendre des voix qui insistent plutôt sur la bizarrerie de l’affaire. Qu’un simple barbier se proclame artiste, qu’une maison d’ouvrier soit érigée en musée et que des peintures foisonnantes et bigarrées, au trait malhabile et à la perspective faussée commencent à connaître du succès (maintenant que des spécialistes leur accolent l’appellation d’art naïf ou primitif), cela ne tient-il pas au mieux de la loufoquerie, au pire de l’aberration ? Ce contre-discours connaîtra une fortune considérable et affectera durablement l’image publique de Villeneuve, en reléguant dans l’oubli la couverture somme toute clémente des débuts. Le changement doit être mis en relation avec un déplacement de l’attention : progressivement, celle-ci s’est portée sur les occupants de la maison plutôt que sur l’oeuvre elle-même. Deux journalistes, l’un du Progrès du Saguenay et l’autre du Phare, sont les premiers, en 1960, à écrire à la suite de rencontres avec les Villeneuve des textes où flotte un fort parfum d’ironie. Eux aussi pressent leurs lecteurs de visiter les lieux, mais une part de moquerie entre dans cette invitation[19]. L’afflux de journalistes venus s’entretenir avec les époux ne se dément pas par la suite, notamment en provenance de Québec et de Montréal, en partie grâce à un court-métrage documentaire de l’ONF filmé sur place et sorti en 1964[20]. Leur renommée à l’échelle nationale grandit d’autant, contribuant à faire de la maison un incontournable pour les touristes et les politiciens de passage à Chicoutimi (figure 2).
Les incursions médiatiques dans l’intimité des Villeneuve ont laissé une littérature assez homogène sur le fond. Elle s’appuie sur la grande familiarité des époux avec leurs interlocuteurs, le pittoresque de leur situation et parfois un certain mépris de classe. Nombre de journalistes commencent par mettre en scène leur arrivée à la maison et leur face-à-face avec les maîtres des lieux. Les deux sceptiques mentionnés plus haut évoquent le sourire narquois du chauffeur de taxi qui les dépose rue Taché, ou encore l’attitude empressée de leurs hôtes quand ils voient qu’ils ont affaire à des journalistes. Après que les Villeneuve auront commencé à attirer fortement l’attention, plusieurs décriront la méfiance ou l’agacement que le couple leur témoigne. Ils diront aussi l’effacement du peintre devenu réservé à force de laisser les relations publiques aux soins de son épouse, notoire pour son franc-parler et son caractère bien trempé. Bien au fait du mythe qui a fini par entourer les Villeneuve, une journaliste écrit être entrée chez eux en se faisant passer pour une simple visiteuse[21] ; un autre avoue son appréhension au moment de cogner à leur porte[22].
Une fois l’ambiance campée, les auteurs racontent quelques anecdotes qui sont le sel de leur histoire. Citations d’Hélène Morin ou de Villeneuve à l’appui, ils expliquent que la première a vigoureusement défendu la chambre conjugale contre les pulsions de l’artiste, que tantôt elle s’estime privilégiée de cuisiner dans un musée, tantôt rêve de murs aux couleurs unies. Quant au second, très croyant, il accomplit une mission et s’en remet à la Providence. La vie personnelle des Villeneuve s’entoure de mille conjectures plus ou moins liées à l’activité créatrice du peintre : madame manipule-t-elle son mari comme une marionnette, lui donnant le signal de peindre quand elle veut qu’il fasse apparaître les dollars au bout de son pinceau[23] ? Serait-il resté un inconnu s’il ne l’avait pas épousée[24] ? A-t-il commencé à peindre parce que le caractère de sa femme l’empêchait de s’exprimer d’une autre manière[25] ? Les jaloux ne leur en veulent-ils pas parce qu’elle est originaire de Rimouski et qu’elle a privé les Chicoutimiennes d’un bon parti[26] ? Villeneuve est-il près de la mort après sa troisième crise cardiaque[27] ?
Enfin, les journalistes rapportent les moyens que déploient les époux pour faire mousser leurs succès et défendre la légitimité de leur travail. Il y a leurs livres d’or couverts de signatures, leurs statistiques sur le nombre d’entrées enregistrées depuis l’inauguration du musée[28] et sur le nombre de toiles vendues depuis que Villeneuve s’est mis à la peinture de chevalet[29], les récriminations d’Hélène Morin, qui détaille les brimades infligées à sa famille jusqu’à ce que Villeneuve, porté par sa légende d’artiste martyr et de mystique, ne devienne une personnalité moins clivante dans les années 1980. À partir de 1972, il y a le buste du peintre qu’une admiratrice a sculpté et qui trône dans le salon[30]. Il y a, pour finir, le volumineux cahier de coupures de presse que les Villeneuve mettent à la disposition de tout un chacun, à commencer par les journalistes qui viendront garnir ses pages avec leurs propres articles après avoir puisé dans cette mine d’informations toute prêtes.
Le tout est appuyé par maintes photographies prises à l’intérieur du foyer. C’est ainsi qu’au fil d’une trentaine d’années la presse construit le personnage du peintre-barbier, et en même temps l’attrait d’une maison où il faut se rendre soi-même pour appréhender le phénomène. D’après une estimation invérifiable relayée après le décès de Villeneuve en 1990, environ 225 000 personnes auraient visité le Musée de l’artiste depuis son ouverture en 1958.
La dispute : repousser les limites de l’art et du patrimoine
Pour bien comprendre la publicité tapageuse entourant le Musée de l’artiste et ses propriétaires, il faut s’attarder à la circulation des toiles de Villeneuve sur le marché de l’art et dans les réseaux professionnels[31]. « Vitrines mobiles d’une structure immobile[32] », pour reprendre l’expression de Valérie Rousseau, ces oeuvres acquièrent une notoriété qui nourrit celle de la maison et vice-versa. C’est en 1959 que des toiles de Villeneuve sont exposées pour la première fois dans un cadre conventionnel. Cette année-là, l’une d’elles reçoit le second prix au seizième Salon du printemps d’Arvida, un concours organisé par le Comité des arts et métiers de la ville. Deux ans plus tard, pris sous l’aile d’un marchand de tableaux nommé George Waddington, Villeneuve fait ses débuts professionnels dans la galerie du même nom, rue Sherbrooke à Montréal. Des expositions individuelles ou collectives suivent dans des galeries ou des bâtiments publics de Montréal, de Québec, du Saguenay–Lac-Saint-Jean et même de Toronto. Selon nos calculs, Villeneuve a participé à au moins 19 expositions jusqu’à ce qu’en 1972 il reçoive la consécration muséale grâce à une rétrospective ultramédiatisée réunissant 250 de ses oeuvres au Musée des beaux-arts de Montréal, puis au Musée du Québec (actuel Musée national des beaux-arts du Québec) et à la Vancouver Art Gallery.
Les liens entre la maison Arthur-Villeneuve et le reste de l’oeuvre peint ne concernent pas seulement la visibilité. Ils opèrent aussi sur le plan de la réception critique. En s’insérant dans les structures instituées du monde de l’art, la production de Villeneuve fait l’objet de jugements qui mettent à l’épreuve sa valeur artistique et, partant, celle de la maison. Or, la question de la valeur des oeuvres de Villeneuve est à l’origine d’un certain nombre de conflits qui vont teinter les passions soulevées par le sauvetage de la maison. Un premier conflit concerne l’autorité du jugement ; il oppose de façon assez typique les connaisseurs et les profanes. Mais dans le cas de Villeneuve, cette opposition est renforcée par l’asymétrie entre grandes villes et régions. Car, bien qu’il faille se garder de toute dichotomie simpliste entre le centre et la périphérie, lieux supposés de l’audace créatrice pour le premier et de la tradition pour la seconde, il est vrai que les infrastructures culturelles et la critique artistique sont moins développées au Saguenay dans les années 1950 et 1960. L’idée que la population de la région, étant éloignée des foyers d’innovation artistique, est forcément en retard sur les nouvelles tendances n’a pas encore été battue en brèche par l’émergence de la « nouvelle culture régionale » telle que définie par Andrée Fortin et Fernand Harvey[33]. À cela s’ajoute la couverture médiatique soutenue qui a entouré localement la percée du peintre-barbier « de chez nous » sur la scène nationale. Oscillant longtemps entre l’incrédulité et la fierté, elle a focalisé l’attention du grand public régional sur un courant artistique dont les codes étaient plus susceptibles d’être connus et goûtés par un public cultivé dont l’artiste lui-même n’était pas issu, ce qui a amené le débat à s’enrichir d’un nouveau conflit, cette fois-ci entre l’élite et le populaire.
Ce clivage territorial autant que social s’observe très nettement dans les premières années du Musée de l’artiste. Les principaux soutiens des Villeneuve sont alors des spécialistes venus de l’extérieur, tandis que leurs concitoyens réagissent majoritairement par de l’indifférence, du scepticisme ou la moquerie. Les certitudes sont ébranlées à partir de 1961. L’exposition à la galerie Waddington recueille des critiques unanimement positives à Montréal, en contraste avec le traitement médiatique peu flatteur des médias régionaux étant donné les sarcasmes dont le peintre a été l’objet dans sa ville natale : « […] ceux qui appellent Villeneuve “le fou de Chicoutimi” et qui le raillent feraient mieux de mettre en sourdine leurs jugements prématurés[34] », écrit par exemple le critique d’art de La Presse. Cet ascendant du centre sur la périphérie continue de se faire sentir tout au long des années 1960 et 1970. Il est entretenu par les menaces répétées des Villeneuve de quitter Chicoutimi pour aller s’installer dans une ville plus propice aux arts, ainsi que par la rumeur persistante selon laquelle le peintre serait sur le point d’être exposé à New York ou Paris, suite logique de ses succès montréalais. Lorsque le Musée des beaux-arts de Montréal lui ouvre ses portes en 1972, l’opinion publique régionale lui est désormais acquise, si l’on en croit les élites journalistiques et politiques saguenéennes. Celles-ci sont d’autant plus enclines à se ranger derrière leur concitoyen que les commissaires de l’exposition rappellent avec insistance ses premiers déboires pour donner à l’événement les airs d’une réparation à l’endroit d’un génie, figure incomprise à ses débuts, et pour mieux dénoncer le conformisme de notre « société bourgeoise[35] » dans une décennie où souffle au Québec un vent de contestation[36].
L’art de Villeneuve n’a jamais fait l’unanimité pour autant, en partie à cause des questions monétaires en jeu. Passée la méfiance initiale des Saguenéens face à des galeristes étrangers soupçonnés de vouloir exploiter un homme de peu, l’aspect marchand a permis de discréditer le succès du peintre-barbier comme un effet de mode créé par des professionnels intéressés, ou encore de déplorer la corruption d’un artiste qui, victime de son succès, perdrait en naïveté et ne livrerait plus qu’une production monotone et commerciale par appât du gain. Un moment fort de cette dispute implique l’ancien député unioniste de Chicoutimi Jean-Noël Tremblay. Pendant son mandat comme ministre des Affaires culturelles (1966-1970), ce politicien pétri de culture classique[37] a visité la maison de Villeneuve et présidé le vernissage d’une exposition de ses oeuvres à Québec[38]. Mais en 1976, devenu chroniqueur au Progrès-Dimanche, il pourfend son art et la détérioration du goût dont son succès serait un symptôme[39]. Son texte suscite des réactions mitigées dans la région[40] et la colère d’Hélène Morin. La contre-attaque de cette dernière témoigne de la concurrence engendrée par l’intervention grandissante du gouvernement fédéral dans la culture, un champ de compétence que le ministre Tremblay a toujours cherché à protéger contre les intrusions d’Ottawa[41] : « “Ça fait trois ans que mon mari reçoit des bourses d’Ottawa ; s’ils l’ont fait, ça prouve qu’il vaut ! Jean-Noël Tremblay a toujours été contre lui. Quand il était ministre, on a demandé des bourses, et il nous les a toujours refusées…”[42] »
C’est donc sur fond de débat sur la valeur artistique de l’oeuvre en général que se développe celui sur la sauvegarde de la maison Arthur-Villeneuve. Dotés de l’esprit d’entreprise que nous leur connaissons, les Villeneuve n’attendent pas que l’oeuvre soit pleinement reconnu pour suggérer que le Musée de l’artiste mérite d’être conservé pour la postérité. Il faut replacer cette idée dans son époque des années 1960 et 1970. Alors que l’art populaire se pare d’une nouvelle légitimité culturelle au Québec, les pratiques patrimoniales connaissent elles aussi de profondes mutations. L’État accroît son intervention dans ce secteur grâce à la création du ministère des Affaires culturelles (1961) et la notion même de patrimoine s’élargit pour englober des éléments de plus en plus récents, moins uniques que typiques (ils sont représentatifs d’un style ou d’une série) et moins prestigieux qu’excentriques ou modestes : tantôt ils présentent une esthétique inusitée, tantôt ils témoignent du quotidien ou de quelque secteur de la vie sociale[43]. Ces mutations sont visibles par exemple en 1969 dans le classement au titre des Monuments historiques de France du célèbre Palais idéal de Ferdinand Cheval, improbable ensemble de constructions naïves érigées par un facteur rural à partir de matériaux récupérés. Pratiquement contemporaines, les tentatives de classement de la maison Arthur-Villeneuve apportent un éclairage intéressant sur cet élargissement de la notion de patrimoine en montrant à quel point il va de pair avec le développement du tourisme.
La dispute : une reconnaissance patrimoniale portée par le tourisme
L’idée d’une forme de patrimonialisation de la maison Arthur-Villeneuve apparaît à cause de l’affluence de visiteurs. Après avoir envisagé pendant un temps de construire une annexe pour peindre plus à son aise[44], Villeneuve, de même que son épouse, ne peut se voir mener une vie de famille normale qu’en déménageant dans une nouvelle maison pour laisser à l’autre sa fonction de musée[45]. Pendant la première moitié des années 1960, les époux en font une marotte dans leurs entrevues avec les journalistes. Ils espèrent obtenir une aide financière pour réaliser ce projet. L’évocation d’un départ pour une ville plus accueillante fait partie de ces manoeuvres : dans l’éventualité où ils quitteraient Chicoutimi, la maison serait également du voyage. Dès 1962, ils se disent sur le point de mettre leur menace à exécution. Forts du soutien d’Alfred Pellan, qu’ils ont rencontré à son domicile de Laval et qui a envoyé une lettre de soutien à des personnalités influentes de la région[46], ils prétendent que la maison sera déménagée par voie maritime à Montréal, où elle deviendrait un centre d’art[47]. Cela ne se produit pas, non plus que l’achat de la maison par le gouvernement provincial, éventualité entrevue par Villeneuve en 1966[48], ni son déménagement à l’Expo 67, possibilité qu’Hélène Morin fait miroiter dans une nouvelle sortie relayée par des médias rarement crédules mais souvent prompts à souligner l’esprit mercantile qui selon eux motive ses bravades[49].
La mise en patrimoine commence à s’opérer plus concrètement lorsque la maison obtient une forme de reconnaissance officielle. Celle-ci vient non pas de l’échelon national comme l’escomptaient les Villeneuve, mais de l’échelon local, à la faveur de campagnes de promotion du tourisme. À cet égard, soulignons qu’à au moins trois reprises entre 1966 et 1973 des citoyens proposent que Chicoutimi ajoute le Musée de l’artiste à ses dépliants touristiques[50]. Seule la première occurrence est potentiellement attribuable aux Villeneuve eux-mêmes. Nous ignorons si la Ville a effectivement apporté son concours, mais cette forme de reconnaissance, bien qu’encore loin d’un statut légal, aurait signalé efficacement la maison comme candidate à la patrimonialisation.
Les autorités municipales se font beaucoup plus présentes au moment de la grande rétrospective du Musée des beaux-arts de Montréal, en 1972. Elles saisissent rapidement cette occasion de maximiser les retombées d’un événement qui promet de faire une publicité avantageuse à la région saguenéenne — fréquemment représentée dans les toiles de Villeneuve — et qui incitera les étrangers à se déplacer pour une visite au Musée de l’artiste — les portes du salon de la maison ont d’ailleurs été transportées à Montréal pour l’exposition. Le maire de Chicoutimi, Henri Girard, est présent au banquet du vernissage pour dire à l’artiste son admiration devant un parterre de Montréalais et d’invités venus nombreux de la région. Il annonce aussi publiquement son intention de faire de la maison un musée ou un monument national[51], conformément à la terminologie consacrée de longue date par la Loi sur les monuments historiques (la Loi sur les biens culturels lui succédera cette année-là). Il prend cet engagement après que des journalistes montréalais l’ont interrogé sur ce que la municipalité comptait faire pour conserver cette attraction touristique et l’ont informé de la possibilité qu’elle soit transportée hors de Chicoutimi[52].
Quelques semaines plus tard, le maire formalise sa promesse en créant un comité et en signant, à l’occasion d’une réception en l’honneur de celui qu’il appelle le « meilleur ambassadeur de la région[53] », un protocole d’entente offrant à la Ville un premier droit de refus, valable pour cinq ans, sauf si la vente de la maison se fait au bénéfice du gouvernement du Québec, selon la presse[54]. L’année suivante, au printemps 1973, le comité conclut que la valeur artistique de la maison justifie l’étude d’un projet touristique ; il estime aussi que la maison sera nécessairement amenée à être déménagée « dans un contexte touristique et historique[55] ». En novembre 1975, Chicoutimi présente au ministère des Affaires culturelles un mémoire plaidant pour le classement de la maison à titre de bien culturel au nom de son appartenance au patrimoine québécois et du risque qu’elle se détériore ou passe entre des mains étrangères[56].
Les démarches officielles de la Ville donnent une nouvelle épaisseur au conflit. Elles le déplacent sur une scène où experts et politiques revendiquent leur légitimité à dire ce qui fait patrimoine. D’emblée, le cadre juridique amoindrit l’autorité municipale au profit d’une instance supérieure centralisée, car les municipalités ne seront habilitées à attribuer un statut à leur patrimoine qu’après une modification de la Loi sur les biens culturels en 1985. D’où le besoin pour la Ville d’adresser une demande au ministère à Québec. Or, l’idée de classer la maison Villeneuve est rapidement discréditée par la Direction générale du patrimoine (DGP). Alors que la maison peut être considérée comme un immeuble en raison de ses caractéristiques architecturales, les fonctionnaires de la DGP concluent qu’elle correspond plutôt à la définition d’une oeuvre d’art contemporain. Ce domaine n’est pas de leur ressort pour plusieurs raisons : sans le recul du temps, l’importance patrimoniale d’une oeuvre d’art est difficile à évaluer ; un classement reviendrait à reconnaître la valeur d’un artiste encore actif et du reste contesté ; toujours vivant, celui-ci devrait demander un permis s’il voulait apporter des retouches à son oeuvre. Les fonctionnaires s’appuient en outre sur une prise de position récente de la Commission des biens culturels selon laquelle une maison de personnage célèbre n’a pas en soi valeur de bien culturel[57].
L’affaire aurait pu se terminer là si, en juin 1977, la DGP n’avait reçu la demande expresse du sous-ministre des Affaires culturelles de dresser un avis d’intention de classement[58]. C’est le député de Chicoutimi (et ministre de la Justice) Marc-André Bédard qui a demandé la production de cet avis à l’occasion de la Semaine du patrimoine. Cet événement de sensibilisation citoyenne est géré par la Direction des communications du ministère ; il est surnommé la « semaine des commandes spéciales[59] » au sein de la Direction générale du patrimoine. C’est ainsi que, le jour de la fête nationale du Québec, à l’occasion d’une célébration tenue à l’hôtel de ville de Chicoutimi pour le vingtième anniversaire de carrière de Villeneuve dans le cadre de cette Semaine du patrimoine, le ministre des Affaires culturelles Louis O’Neill, par la voix du député Bédard, annonce son intention de classer la maison en vertu de l’avis qu’il a signé deux jours plus tôt[60]. Selon le communiqué de presse, « cela permettrait d’éviter que les spéculateurs s’approprient le bâtiment après la mort du peintre et le démantèlent pour le vendre en pièces détachées[61] ».
Le ministre O’Neill, toutefois, n’exercera pas son droit de classer la maison. Vu les circonstances, son annonce était entachée du double soupçon de récupération politique et de populisme. Sollicitée une seconde fois sur cette question, la DGP résout encore de ne pas recommander ce classement[62]. Consultée par le ministre[63], la Commission des biens culturels formule la même recommandation en novembre — elle exclut également la « reconnaissance », un statut de protection inférieur[64]. Déboutée, confrontée à des catégories administratives et à une logique experte incompatibles avec son désir de valoriser une de ses principales attractions, la Ville de Chicoutimi revient à la charge quelques mois plus tard en demandant au ministère de déterminer à quelle « classe » la maison-oeuvre pourrait s’intégrer[65].
L’inadéquation entre le patrimoine immobilier et l’art contemporain n’est pas le seul facteur expliquant les réticences de l’administration à se plier aux attentes du politique. Le droit de propriété y est pour beaucoup. Cette question est au coeur du système patrimonial, dès lors qu’on admet le principe qu’un bien investi de valeur à l’échelle collective appartient sinon légalement, du moins moralement, à tous. Le législateur s’est récemment saisi de la question puisque, depuis l’adoption de la Loi sur les biens culturels (1972), il n’est plus nécessaire d’obtenir le consentement du propriétaire pour procéder au classement d’un bien. De plus, suivant la tendance à étendre la notion de patrimoine à des ensembles et à tenir compte de l’inscription du bâti dans son environnement, la loi prévoit que les édifices classés soient entourés d’une aire de protection.
Ainsi entérinée par la loi, cette conception du patrimoine affecte directement la maison peinte des époux Villeneuve, dont nous avons vu combien elle entretenait un flou entre l’espace privé et l’espace public. En témoigne le fait que, dans son mémoire de 1975, Chicoutimi envisageait explicitement d’exproprier des résidents du quartier pour désenclaver la maison et faciliter le stationnement des visiteurs ; il faudrait toutefois « garder intact l’environnement immédiat et typique de la maison de l’artiste[66] », lisait-on. Au moment même du dépôt du mémoire, la Ville faisait déjà un pas dans cette direction. Ayant appris qu’un commerce adjacent à la maison risquait d’être transformé en brasserie, la Commission d’urbanisme se disait d’avis qu’il fallait accorder un statut spécifique à la zone entourant le bâtiment dans un rayon de 500 pieds (150 m) afin de prévenir tout changement indu[67]. Or, cette proposition a soulevé la contestation dans le voisinage et n’a pas connu de suite.
Ces événements en mémoire, Villeneuve s’inquiète de la zone similaire prévue par la Loi sur les biens culturels. Il s’en ouvre dans une lettre à la Commission des biens culturels, comme le lui permet la loi[68]. Le procès-verbal des délibérations des commissaires révèle qu’ils sont sensibles à ses représentations : il s’agit du premier attendu de leur recommandation négative. L’opinion défavorable émise par la DGP arrive en second[69]. Les réserves du peintre créent un malaise d’autant plus grand que la demande de classement n’émane pas de lui, portant la Commission à se demander si Villeneuve est « manipulé dans cette affaire[70] ». Elle rend sa décision en sachant que celui-ci souhaite continuer d’habiter les lieux, qu’il peut être considéré comme le meilleur gardien de son oeuvre et qu’il ne semble pas avoir besoin d’aide immédiate. L’appartenance de la maison au patrimoine québécois ne sera donc jamais officialisée[71].
Le ministère des Affaires culturelles se retrouve sur la sellette pour son incapacité à protéger un bien que ses fonctionnaires considèrent eux-mêmes comme « très important » mais qui, selon sa position officielle, fait partie « d’une catégorie si rare » qu’aucun de ses programmes ne s’y applique[72]. Il souhaite donc approfondir la réflexion. En 1980, une courte étude de la Direction générale des arts et des lettres préconise l’institutionnalisation du Musée de l’artiste grâce à la concertation entre plusieurs intervenants : la municipalité, le réseau des musées privés, le milieu du tourisme[73]… C’est là ce que la DGP a toujours favorisé, au lieu de la seule attribution du statut légal tant convoité par les élus. Bien que particulièrement porteuse à une époque où les musées se développent en région et où l’administration culturelle se décentralise et se rapproche des milieux locaux dans une optique de développement territorial[74], cette avenue n’est pas sans embûches. En 1988, un premier projet de déménagement de la maison concocté par le professeur d’art Denys Tremblay dans le contexte du réaménagement de la zone portuaire de Chicoutimi connaît une fin abrupte[75]. L’expérience préfigure les disputes qui éclateront après la mort de Villeneuve. Les noeuds du problème sont les mêmes. Nous les analysons au regard des enjeux de conservation, de restauration et de mise en valeur de la maison, trois impératifs dont le chevauchement dans un court laps de temps permet de mesurer tout le potentiel polémique du patrimoine.
La dispute : comment conserver, restaurer et valoriser une oeuvre d’art habitable ?
La disparition de Villeneuve en 1990 ramène à l’avant-plan la nécessité d’assurer la conservation du Musée de l’artiste. La question met toujours en tension le privé et le public, mais dans une configuration quelque peu différente : les héritiers du peintre étant les nouveaux propriétaires de son grand oeuvre et les gardiens de ses dernières volontés[76], la maison se trouve désormais à la jonction du patrimoine familial et du patrimoine culturel. Cette ambivalence transparaît sous la plume d’un journaliste qui désigne en 1992 la maison comme un héritage légué « à la communauté chicoutimienne[77] », oubliant qui sont les véritables légataires ou faisant d’eux de simples intermédiaires. De fait, si des discussions entre la direction régionale du ministère des Affaires culturelles, la Ville et la succession ont permis d’élaborer un plan de travail, sa mise en oeuvre suppose bel et bien que la maison sorte du giron familial. D’un côté, la Ville refuse de contribuer financièrement aux premières phases du projet — relevé photographique, enquête orale, examen des peintures murales et mise en sûreté des toiles — en invoquant les revenus que la famille tire des visites[78] ; de l’autre, le ministère ne peut intervenir directement sur un bien privé ni lui consacrer une aide financière s’il n’est pas protégé en vertu de la loi. Pour contourner ce problème, les Villeneuve et leurs soutiens commencent par former un organisme à but non lucratif en 1991. Dissociant les intérêts personnels des propriétaires et l’intérêt collectif servi par une mission d’intérêt public, cette structure soumise à des règles de gouvernance permet aux Affaires culturelles de consacrer un peu plus de 40 000 dollars à l’étude, la mise en valeur et la stabilisation de la maison entre 1991 et 1993, et ce, en vertu d’un programme d’aide aux organismes en matière de patrimoine et d’un programme d’aide aux municipalités (dans ce cas-ci, la Corporation de la Maison-Musée Arthur-Villeneuve est mandataire de la Ville).
Plus fondamentalement, on s’interroge sur la fonction domestique du bâtiment et sur son possible transfert de propriété en vue d’une mise en valeur pérenne. La réflexion est compliquée par les intérêts divergents auxquels donne prise la maison, à la fois bien culturel, lieu imprégné de la mémoire familiale et part importante des avoirs des héritiers. Trois semaines après le décès de Villeneuve, sa veuve confirme au Quotidien que la propriété continue d’être accessible au public. « Merci, Hélène, pour tous les visiteurs qui ne manqueront pas d’affluer au musée de la rue Taché[79] », peut-on lire dans le journal. Sept mois plus tard, la famille dit accuser le choc et n’avoir pas encore déterminé comment la maison serait mise en valeur. Chose certaine, elle veut demeurer propriétaire des lieux tout en faisant en sorte « que les personnes intéressées par l’oeuvre de [Villeneuve] ne se retrouvent pas devant une porte close[80] ». Hélène Morin n’a pas l’intention de déménager : « Ça fait trop longtemps. Je ne pourrais pas vivre dans une maison dont les murs sont unis[81]. » Du reste, elle retrouve le goût d’accueillir les visiteurs et se propose de le faire avec l’aide d’un autre membre de la famille pendant la saison touristique de 1991, si sa santé le lui permet. Elle a cependant accepté de partir en maison de retraite, de sorte que, avec son « acceptation émotive », l’organisme présidé par son fils Réal peut embaucher trois guides salariés pour animer les visites à l’été 1993 — une guide avait épaulé la femme de quatre-vingts ans en 1992 également. Cette régularisation permet d’ouvrir la propriété dix heures par jour, six jours par semaine, tandis que durant la même période l’année précédente, 60 pour cent des visiteurs ont été éconduits selon Réal Villeneuve, sa mère n’ayant pu suffire à la demande[82].
En parallèle, des pourparlers visent à faire entrer la maison dans les collections du musée régional. Son déménagement s’est finalement imposé dans la mesure où la survie des peintures supposait qu’elles soient conservées dans des conditions contrôlées. L’option de mettre la maison sous cloche a été écartée pour des raisons de coûts et d’aménagement[83]. Il ne restait donc plus qu’à la déraciner. Or, cela a pour inconvénient de l’éloigner de l’environnement sur lequel certains fondent une partie de sa valeur. Cette opinion est désormais renforcée par son âge centenaire ; depuis le milieu des années 1980, la presse y fait souvent référence pour suggérer tantôt sa valeur historique en tant que maison ancienne, tantôt sa fragilité en tant que vieille maison. Dans le débat sur sa mise en valeur, cette longévité suggère surtout son ancrage de longue date dans un quartier où elle prend dès lors une valeur de typicité[84]. C’est pourquoi le ministère, qui privilégie pour sa part l’approche muséologique dans le cadre de la reconversion de la pulperie de Chicoutimi, prend soin de distinguer l’oeuvre d’art de l’édifice dans ses communications ; le second ne doit être considéré que comme le support de la première.
Laborieuses, les négociations pour la vente achoppent notamment sur une question d’argent. Les parties peinent à s’entendre sur le prix de la maison, les droits d’auteur et les redevances sur les reproductions et les produits dérivés. Au terme d’une conciliation, en octobre 1993, le ministère offre 425 000 dollars pour que le Musée du Saguenay–Lac-Saint-Jean acquière la maison et les droits d’auteurs afférents. La famille rejette l’offre. Elle invoque le manque de garanties quant à l’avenir de la maison, car son achat s’inscrirait dans un projet en plusieurs phases — déménagement, restauration, installation dans un bâtiment à requalifier en espace d’exposition — dont le financement n’est pas assuré et semble soumis à des remous ministériels au niveau provincial et à des considérations partisanes dans le contexte d’une élection fédérale imminente. En outre, la famille veut un droit de regard sur l’animation et le concept de mise en valeur[85]. Éloignant le débat du plan économique pour le recentrer sur le plan domestique, les enfants Villeneuve se posent en défenseurs de l’esprit du lieu, un lieu intimement lié à leurs propres vies : « On ne veut pas que les visiteurs entrent par une porte et sortent par l’autre. Ce lieu a été habité, il recèle une foule d’anecdotes[86] », dit Réal Villeneuve.
À ce stade, les négociations ont pris un caractère d’urgence en raison de la dégradation continue de la maison. Déjà en 1991, un an après le décès de l’artiste, la détérioration des fresques extérieures commençait à susciter l’inquiétude. Dans le cadre du plan de travail du ministère des Affaires culturelles, des diagnostics réalisés par le Centre de conservation du Québec, une firme d’ingénieurs et les services municipaux ont révélé la vulnérabilité de l’oeuvre. La structure elle-même est en cause. Les fondations de la maison doivent être renforcées et les murs se contractent sous le poids d’un toit trop lourd et qui fuite. En août 1992, à la suite de l’effondrement partiel de la toiture, une nouvelle expertise sonne l’alarme. Sans intervention, dit en substance le rapport du Centre de conservation du Québec, les oeuvres extérieures disparaîtront en quelques années[87]. Conseillée par les restaurateurs de l’État, la Corporation de la Maison-Musée Arthur-Villeneuve réalise des travaux dans les mois suivants afin de parer au plus pressé : construction de solariums pour protéger les peintures extérieures des rayons du soleil et des précipitations, solidification de la toiture, remplacement du système de chauffage non sécuritaire. Mais au moment où les négociations piétinent, des interventions à caractère permanent évaluées à 176 000 dollars sont toujours nécessaires pour garantir la conservation à long terme de la maison, qui ne pourra pas être déménagée avant la saison froide[88]. Le ministère refuse de verser sa part du coût de l’intervention au Musée du Saguenay–Lac-Saint-Jean avant d’avoir la certitude que le bien passera dans le domaine public et que cet investissement ne contribuera pas à faire monter les enchères, comme l’explique la ministre Liza Frulla en commission parlementaire[89].
La déploration et la sédition : « La famille se bat »
À la fin de l’année 1993, les conditions sont donc réunies pour rendre le dossier explosif. Grâce aux médias régionaux qui en relatent ponctuellement les développements, l’affaire a déjà interpellé l’opinion au fil d’un feuilleton fait de mises à jour sur l’état de dégradation de l’oeuvre[90], d’un coup d’éclat du député fédéral du comté qui affirme prendre en main le dossier[91] ou encore de prises de position plus ou moins critiques à l’endroit de la famille ou du gouvernement. Mais un point de bascule est atteint en octobre et en novembre quand les médias donnent un fort retentissement à une situation qui commençait à faire scandale. Cette prise de conscience débute avec la parution d’un éditorial de Lise Bissonnette dans Le Devoir[92]. Protestant contre le sort réservé à la maison, l’influente journaliste offre dans son article un condensé exemplaire des arguments utilisés pour déplorer les atteintes au patrimoine et susciter l’indignation de la population : elle dépeint le bâtiment comme une personne vulnérable (« Il y a, rue Taché à Chicoutimi, une âme qui affronte l’hiver sans tuque et sans mitaines ») ; convoque des figures d’autorité (« Depuis longtemps, les sommités souhaitent un sort glorieux à cette humble demeure ») ; dénonce l’incurie des pouvoirs publics, pris pour cible en raison des lourdeurs de l’administration, des maigres budgets alloués à la culture et des querelles découlant du partage des compétences ; souligne l’urgence d’agir (« la bicoque centenaire … s’apprête à cesser de résister ») ; appelle, enfin, à la mobilisation (« Nous nous récrions et nous écrions en choeur, à l’unanimité : il faut la sauver ! »). Trois semaines plus tard, la famille Villeneuve tient à peu près le même discours lors d’une conférence de presse convoquée par la corporation, non sans théâtralisme, « dans les futures ruines de la très célèbre maison-musée du peintre Arthur Villeneuve ». Reprenant le vocabulaire martial de Réal Villeneuve, les journaux annoncent que la famille part « en croisade » pour rallier le soutien du plus grand nombre : « Nous avons tous collectivement l’obligation morale de protéger ce bien et si ce dernier disparaissait nous devrions tous en porter l’odieux », assène le fils.
Sur l’échelle des émotions patrimoniales définie par Daniel Fabre, la conférence de presse de novembre 1993 marque l’atteinte du point culminant. Les Villeneuve puisent dans l’arsenal de l’action militante pour annoncer que la maison sera fermée au public jusqu’à ce qu’ils obtiennent gain de cause. Ils menacent aussi de faire appel à l’Unesco[93] et, ravivant le spectre d’une dépossession de la région, de vendre la maison à Montréal ou Ottawa, quitte à découper ses murs[94]. Sur ce dernier point, rappelons que la muséalisation de la maison s’inscrit dans un projet culturel et touristique censé générer des revenus. Les bienfaits attendus de la requalification des bâtiments de l’ancienne Compagnie de pulpe sont régulièrement invoqués pour parer aux critiques sur ce projet de plusieurs millions de dollars, dont les élus insistent d’ailleurs pour qu’il soit confié en priorité à des entrepreneurs et firmes de la région. Promesses de développement économique et esprit de clocher concourent donc à rendre inacceptable l’éventuel dépeçage de la maison, ce patrimoine régional intimement lié au territoire jusque dans son iconographie.
Les intervenants trouvent finalement un terrain d’entente peu avant Noël 1993[95]. Le montage financier complété, les médias peuvent annoncer en février 1994 que la maison est sauvée[96]. Or le coût de ce sauvetage atteint le seuil symbolique du million de dollars[97], ce qui frappe les esprits et déplace la controverse vers une autre question hautement polémique, celle de la valeur de l’art contemporain. Nous avons vu que la concordance entre la valeur monétaire et la valeur artistique des oeuvres de Villeneuve était sujette à débat depuis leur entrée dans le circuit marchand dans les années 1960. Mais en 1994, dans une économie qui se remet d’une récession, l’importance des sommes engagées et leur provenance — il s’agit de fonds publics — donnent à la question une dimension éthique[98]. Elle attise les passions, comme en témoignent les lignes ouvertes où elles trouvent leur meilleur exutoire. Aux accusations de gaspillage, les défenseurs du projet opposent principalement des arguments économiques et réputationnels faisant appel au même sens commun ; la qualité artistique, elle, n’est guère invoquée en dehors des communiqués officiels, à moins de l’indexer sur la célébrité de l’artiste, gage de l’attrait que la ville exercera une fois dotée d’équipements culturels dignes de sa gloire locale[99]. La présence de médias nationaux et étrangers dépêchés pour couvrir le déménagement ainsi que l’annonce d’un projet de film ou de télésérie sur la vie de l’artiste laissent déjà espérer des retombées à la hauteur de l’investissement[100].
Le déménagement s’accompagne d’une autre forme de déploration. Elle vise la décontextualisation de l’oeuvre. Le bâtiment a certes échappé au sectionnement de ses murs, qu’on aurait pu exposer au musée comme un polyptyque[101]. Mais, coupé des autres maisons ouvrières, il n’offre plus de contraste entre la fantaisie des fresques et le modeste milieu auquel son occupant à la simplicité proverbiale est resté fidèle jusqu’à la fin[102]. La spoliation maintes fois redoutée à l’échelle de la région, c’est le quartier du Bassin qui la subit aujourd’hui. Aussi la translation de la « dépouille » prend-elle les airs d’une « marche funèbre » dans ce quartier « en deuil », d’après un témoin[103]. L’analogie funéraire est poussée à son comble par un autre Chicoutimien, selon qui Villeneuve pensait que son art partirait en même temps que lui ; étant donné que, pour Villeneuve, sa maison était sa vie, il aurait fallu laisser mourir les peintures sur place, quitte à les reproduire sur un autre support[104]. Ici, la poétique des ruines joue à plein grâce à la personnalisation du monument, auquel son triple statut d’oeuvre d’art, de demeure d’homme illustre et d’atelier d’artiste permet d’incarner pleinement le disparu, gardé présent à travers cette relique manifestant de façon sensible son vécu, sa vision, sa mémoire[105]. Il faut voir dans cette mystique de la relique un des principaux facteurs ayant permis à la maison d’Arthur Villeneuve de finalement faire son entrée à la Pulperie le 11 novembre 1994.
* * *
Dans l’histoire de la maison Arthur-Villeneuve, le déménagement est l’épisode qui a le plus marqué les consciences. Partie intégrante de la légende du peintre-barbier, il en constitue souvent l’épilogue et représente la victoire d’un homme du peuple sur les forces contraires qui ont fait obstacle à sa vocation[106]. En dépassant la légende pour réinsérer ce geste dans la trajectoire de l’artiste et de sa production, nous avons montré que la maison avait acquis le statut de patrimoine culturel au fil d’une longue suite de différends médiatisés, signe et condition du fort investissement personnel et collectif qu’elle a suscité. Loin de nuire à son avènement patrimonial, ces différends en ont été partie prenante, le patrimoine devant être conçu comme un lieu de « dissonance » qui suppose la négociation de conflits, comme l’a souligné Laurajane Smith dans une perspective critique[107] : l’espace domestique est entré en conflit avec l’espace public, le goût cultivé avec le goût populaire, la grande ville avec la région, l’expert avec le profane, le politique avec le fonctionnaire, tel palier de gouvernement avec tel autre, la propriété privée avec le bien commun, la singularité de l’art contemporain avec la typicité de l’architecture vernaculaire. En somme, la maison Arthur-Villeneuve était éminemment propice à l’expression et au partage d’émotions patrimoniales de plus en plus vives. Maintenant que nous avons retracé l’intensification de ces émotions depuis le transport ressenti par ses visiteurs jusqu’à la sédition de ses défenseurs, en passant par les disputes autour de sa valeur et la déploration de ses malheurs, nous pouvons tenter d’en cerner quelques spécificités.
Le chantier de recherche sur les émotions patrimoniales s’est principalement déployé autour de monuments et lieux historiques. Bien qu’on l’ait associé dès le début à la sphère patrimoniale en raison de son architecture et de son appellation, le « Musée de l’artiste » de Chicoutimi répond en vérité tout autant à la logique de l’art contemporain. Sa particularité est d’avoir multiplié les occasions de dissensus en brouillant la frontière entre ces deux domaines à maints égards incompatibles au vu des registres de valeurs qu’ils mobilisent[108]. Nous l’avons constaté avec le débat sur la conservation in situ de la maison, avec les tentatives ratées pour lui obtenir un statut patrimonial officiel et avec sa difficile émancipation des intérêts financiers propres au marché de l’art. Au plus fort de la controverse, les héritiers disent craindre qu’elle se retrouve au musée régional « entre le squelette d’Alexis Le Trotteur et la vieille armoire de la collection Dubuc[109] ». Cela traduit bien la difficulté à réconcilier le grand oeuvre d’un artiste dont la famille veut souligner l’universalisme pour entretenir sa réputation à l’international et un musée qui risque de tendre vers l’histoire et l’ethnographie pour promouvoir une identité régionale à l’intention des touristes. Cette contradiction est à l’oeuvre dans la personne même de Villeneuve : il fait son entrée dans le panthéon régional à la faveur d’une spectacularisation de sa vie qui a soutenu sa carrière artistique, tout en lui attirant des reproches au Saguenay–Lac-Saint-Jean. La célébrité de l’artiste apparaît ainsi comme un ressort important de l’émotion patrimoniale. Car, pour un historien de ce phénomène né avec les Lumières, la diffusion massive de discours et d’images concernant la vie privée d’une personne a pour effet de produire des publics, conçus non pas uniquement comme des instances de discussion critique et rationnelle dans la lignée de Jürgen Habermas, mais comme des lieux parcourus de « réactions affectives puissantes », d’« engouements collectifs brusques et parfois éphémères[110] ».
L’éventuel déménagement de la maison hors de la région, redouté pendant trente ans, est directement lié à ce grand écart entre l’art contemporain et le patrimoine. D’une part, c’est dans les galeries et musées de la métropole et de la capitale que Villeneuve a connu ses succès les plus retentissants, et entretenir la possibilité d’exposer la maison indépendamment de son contexte était en soi une façon de la faire exister en tant qu’oeuvre d’art[111]. D’autre part, c’est à Chicoutimi que se trouve le très couru — mais parfois mal-aimé — Musée de l’artiste. Or si les toiles peuvent circuler, la petite maison faite monument appartient au territoire ; la perspective de sa délocalisation choque à chaque fois grâce à sa capacité à convoquer un imaginaire du pillage bien établi depuis le texte fondateur de Quatremère de Quincy sur le déplacement des monuments artistiques italiens (1796). Si le propre du patrimoine est d’engager un certain rapport de la société non seulement au temps, mais aussi à l’espace et à l’Autre, pour reprendre la triade de Lucie K. Morisset, alors la crainte sans cesse réactivée de la confiscation de la maison Arthur-Villeneuve nous invite à interroger davantage la façon dont une région comme le Saguenay–Lac-Saint-Jean a pu se concevoir au miroir de la « grande ville », là où le Québec a pu se concevoir autrefois au miroir des « Américains » qui sillonnaient ses routes touristiques ou convoitaient ses antiquités[112].
Un autre facteur d’intensification de l’émotion est le double statut patrimonial de la maison. Le concept moderne de patrimoine est le produit d’une analogie avec la transmission de biens de famille. C’est dans la foulée des saisies révolutionnaires en France qu’il s’est étendu aux richesses qui représentent la nation et lui appartiennent symboliquement. Dans le cas de la maison Arthur-Villeneuve, le patrimoine au sens propre et le patrimoine au sens figuré ne sont pas seulement liés sur le plan conceptuel, ils se recoupent dans un même bien. Cet héritage puise au sentiment d’appartenance familiale des Villeneuve en même temps qu’à l’attachement de la collectivité au lieu — au quartier, à la ville, à la région. À ce titre, il est soumis à un impératif de conservation à deux échelles différentes, ce qui n’a pas manqué de faire se confronter les attentes différentes des uns et des autres. Le statut profondément ambigu de la maison autorisait la famille à défendre ses prérogatives en tant qu’ayant droit du peintre et que gardienne morale de son legs, non sans risquer de contrarier le processus de patrimonialisation. Il faudrait détailler le nouveau chapitre qui s’ouvre après la muséalisation de la maison et qui voit une détérioration des relations entre la famille et les autres partenaires du projet jusqu’au milieu des années 2000. En matière d’héritage, les non-dits sont toutefois trop nombreux pour que nous puissions faire l’économie d’une enquête basée sur les méthodes de l’ethnologie[113]. Il ne faudrait pas non plus ignorer les perturbations qui ont affecté le Musée du Saguenay–Lac-Saint-Jean dans la deuxième moitié des années 1990, à commencer par son difficile mariage avec l’organisme responsable de la pulperie de Chicoutimi, ainsi que les dommages causés au site par le « déluge » de 1996 — catastrophe qui a d’ailleurs propulsé à l’avant-scène une autre maison ouvrière : la Petite Maison Blanche ayant résisté aux inondations. Il faut donc espérer que la destinée de la maison Arthur-Villeneuve nous apparaisse un jour dans toute sa complexité en étant replacée dans l’histoire encore méconnue de son nouvel écrin et de la muséologie saguenéenne en général.
Parties annexes
Note biographique
Benoit Vaillancourt est étudiant au doctorat en muséologie, médiation et patrimoine à l’Université du Québec à Montréal. Intéressé par les approches ethnologiques du patrimoine, il explore les croisements entre le patrimoine, les arts visuels et les identités à l’échelle familiale et régionale. Avec le soutien financier du CRSH, il prépare une thèse sur l’histoire des expositions artistiques et de la culture visuelle au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Il a fait paraître des articles dans Recherches sociographiques, Ethnologies et Rabaska.
Notes
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[1]
Françoise Choay, L’allégorie du patrimoine (Paris, Seuil, 1992) ; Jean-Pierre Babelon et André Chastel, La notion de patrimoine (Paris, L. Levi, 1994) ; André Desvallées, « Émergence et évolution du mot patrimoine », Musées et collections publiques de France, no 208 (1995), p. 6-29.
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[2]
Jacques Le Goff (dir.), Patrimoine et passions identitaires (Paris, Fayard et Éditions du Patrimoine, 1998) ; Alain Gelly, Louise Brunelle-Lavoie et Cornelius Kirjan, La passion du patrimoine. La Commission des biens culturels du Québec, 1922-1994 (Québec, Septentrion, 1995).
-
[3]
Martin Drouin, Le combat du patrimoine à Montréal, 1973-2003 (Sainte-Foy, Presses de l’Université du Québec, 2005).
-
[4]
Daniel Fabre, « Le patrimoine, l’ethnologie », dans Pierre Nora (dir.), Science et conscience du Patrimoine (Paris, Fayard, 1997), p. 71-72.
-
[5]
Nathalie Hamel, « Du “patrimoine ethnologique” à une approche ethnologique du patrimoine », dans Étienne Berthold et Nathalie Miglioli (dir.), Patrimoine et histoire de l’art au Québec. Enjeux et perspectives (Québec, Presses de l’Université Laval, 2011), p. 27-42.
-
[6]
Daniel Fabre, « L’ethnologie devant le monument historique », dans Daniel Fabre (dir.), Domestiquer l’histoire. Ethnologie des monuments historiques (Paris, Maison des sciences de l’homme, 2000), p. 3.
-
[7]
Daniel Fabre, « Le patrimoine porté par l’émotion », dans Daniel Fabre (dir.), Émotions patrimoniales (Paris, Maison des sciences de l’homme, 2013), p. 13-98.
-
[8]
Voir par exemple Gaëlle Crenn et Jean-Christophe Vilatte (dir.), « L’émotion dans les expositions », Culture et Musées, no 36 (2020) ; Laurajane Smith, Emotional Heritage. Visitor Engagement at Museums and Heritage Sites (Londres, Routledge, 2021).
-
[9]
Valérie Rousseau, « L’environnement d’art de Léonce Durette ou L’insertion des environnements d’art indisciplinés dans l’étude des arts et la problématique de leur sauvegarde », mémoire de maîtrise (étude des arts), Université du Québec à Montréal, 1999, p. 83-98 ; Valérie Rousseau, Vestiges de l’indiscipline. Environnements d’art et anarchitectures (Gatineau QC, Musée canadien des civilisations, 2007), p. 47-51.
-
[10]
Gaston Gagnon, « Le défi Villeneuve. Dix ans de conservation d’un patrimoine atypique », dans Michaël La Chance (dir.), L’imaginaire du territoire dans l’art d’Arthur Villeneuve (Québec, Presses de l’Université Laval, 2007), p. 57-67.
-
[11]
Anonyme, « Peindre devient le passe-temps idéal d’un barbier-coiffeur de Chicoutimi », Le Lingot, 19 décembre 1957, p. 4.
-
[12]
Anonyme, « 1 500 heures de travail pour peindre sa maison », Le Progrès du Saguenay, 9 août 1958, p. 8 ; anonyme, « Visite du Musée de l’artiste », Le Soleil au Saguenay, 13 août 1958.
-
[13]
Profitons de l’occasion pour rectifier une simple erreur de date. Villeneuve a ouvert sa maison au public en 1958 et non en 1959, comme l’indiquent toutes les sources depuis les années 1970. La méprise vient, selon toute vraisemblance, d’un cahier de coupures de presse que l’artiste mettait à la disposition de chercheurs.
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[14]
Anonyme, « Le Musée de l’artiste intéresse le conseil », Le Soleil au Saguenay, 1er octobre 1958.
-
[15]
Arthur Villeneuve, « Avis », Le Progrès du Saguenay, 18 octobre 1958, p. 5.
-
[16]
Arthur Villeneuve, « Avis », Le Progrès du Saguenay, 30 octobre 1958, p. 5.
-
[17]
Rousseau, Vestiges de l’indiscipline, p. 161.
-
[18]
La première est une photo des Villeneuve devant un groupe de jeunes en visite scolaire à leur domicile ; selon la légende, ils leurs expliquent une des « oeuvres remarquables » ornant les murs, à savoir une scène historique revêtant pour l’occasion un caractère pédagogique. La seconde est un reportage dans lequel la maison est décrite comme « une des plus intéressantes attractions touristiques de Chicoutimi », et la plus récente fresque extérieure comme une oeuvre « remarquable pour son originalité » ; tous ceux qui voulaient l’admirer étaient les bienvenus. Voir Le Progrès du Saguenay, 2 mai 1959, p. 1 ; anonyme, « M. A. Villeneuve ajoute un tableau à sa collection déjà impressionnante », Le Progrès-Dimanche, 13 juin 1959, p. 4.
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[19]
Magella Soucy, « Une visite au “Musée de l’artiste”. Rencontre avec... », Le Progrès du Saguenay, 27 février 1960, p. 5 ; anonyme, « Il peinture ses murs depuis trois ans... “Si ma maison brûle, mon oeuvre sera détruite” », Le Phare, 5 août 1960, p. 5.
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[20]
Marcel Carrière, Arthur Villeneuve, peintre-barbier, Office national du film, 1964, 16 min.
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[21]
Lily Tasso, « Visite au barbier-peintre de Chicoutimi », La Presse, 22 juin 1965, p. 22.
-
[22]
Louis-Marie Lapointe, « Arthur Villeneuve : “Je savais que je ferais le tour du monde” », Le Progrès-Dimanche, 6 septembre 1981, p. 49.
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[23]
Pierre Demers, « La vie simple du peintre Arthur Villeneuve. Tête dans la légende et pieds sur terre », Magazine Perspectives, 12 février 1978, p. 13.
-
[24]
Don Bell, « The Many Painted Visions of Arthur Villeneuve », Weekend Magazine, vol. 22, no 15 (8 avril 1972), p. 20.
-
[25]
Denise Gagnon-Boutin, « Arthur Villeneuve. La réussite après des débuts difficiles », Le Progrès Régional, 8 mars 1972, p. 19.
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[26]
Jean-Paul Soulié, « Arthur Villeneuve, “naïf” mais célèbre », La Presse, 2 janvier 1988, p. A14.
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[27]
Léon Bernard, « Le peintre Villeneuve (3e crise cardiaque) à notre reporter : “C’est peut-être la dernière photo que vous prenez de moi” », Le Petit-Journal, 19 mai 1968, p. 24.
-
[28]
Selon les estimations des Villeneuve : plus de 2 500 (1959), 4 000 (1960), 5 000 (1961), 80 000 (1975), etc.
-
[29]
Toujours selon leurs estimations : plus de 650 (1963), plus de 700 (1963), 900 (1964), 950 (1965), 965 (1965), plus de 1 000 (1966), 1 300 (1968), 4 300 (1989), etc.
-
[30]
Gilles Paradis, « Grâce à Horta van Hoye. Arthur Villeneuve est immortalisé », Le Soleil, 26 août 1972, p. 26.
-
[31]
Cette partie de l’article reprend des éléments développés plus en détail dans Benoit Vaillancourt, « La reconnaissance artistique en métropole et en région, de la divergence à la convergence : autour de l’exposition-événement Les chroniques du Québec d’Arthur Villeneuve (1972) », Recherches sociographiques, vol. 61, no 1 (2020), p. 137-161.
-
[32]
Rousseau, L’environnement d’art de Léonce Durette, p. 102.
-
[33]
Andrée Fortin et Fernand Harvey, La nouvelle culture régionale (Québec, Institut québécois de recherche sur la culture, 1995).
-
[34]
Jean Sarrazin, « Un douanier Rousseau du Saguenay ?... », La Presse, 4 mars 1961, p. 24.
-
[35]
Denise Boutin-Grégoire, « Avec des peintres comme Villeneuve. Il est possible de renouveler l’art par les racines (François-Marc Gagnon) », Le Progrès-Régional, 8 mars 1972, p. 18 ; collectif, Les chroniques du Québec d’Arthur (Montréal, Musée des beaux-arts de Montréal, 1972).
-
[36]
Pierre Landry et Marie-Charlotte De Koninck (dir.), Déclics. Art et société. Le Québec des années 1960 et 1970 (Saint-Laurent et Québec, Fides et Musée de la civilisation, 1999).
-
[37]
Fernand Harvey, « Le ministère des Affaires culturelles sous Jean-Noël Tremblay : turbulences et réalisations, 1966-1970 », Les Cahiers des Dix, no 70 (2016), p. 304-305, 339.
-
[38]
Le Progrès-Dimanche, 25 décembre 1966, p. 22 ; Roch Poisson, « Les arts en bref », Photo-Journal, 17 avril 1968, p. 60.
-
[39]
Jean-Noël Tremblay, « Le génie à rabais », Le Progrès-Dimanche, 22 février 1976, p. 55.
-
[40]
Noël Boily, « Réponse à Mme Villeneuve et Jean-Noël Tremblay », Le Progrès-Dimanche, 14 mars 1976, p. 54.
-
[41]
Harvey, « Le ministère des Affaires culturelles sous Jean-Noël Tremblay », p. 292-300.
-
[42]
Anonyme, « Villeneuve vs Tremblay. La bataille continue ? », Le Progrès-Dimanche, 29 février 1976, p. 61.
-
[43]
Pour le Québec, voir Fernand Harvey, « La production du patrimoine », dans Andrée Fortin (dir.), Produire la culture, produire l’identité ? (Québec, Presses de l’Université Laval, 2000), p. 9-13. Pour la France, voir Nathalie Heinich, La fabrique du patrimoine. « De la cathédrale à la petite cuillère » (Paris, Maison des sciences de l’Homme, 2009), p. 17-21.
-
[44]
Anonyme, « M. A. Villeneuve ajoute un tableau à sa collection déjà impressionnante » ; anonyme, « Il peinture ses murs depuis trois ans... ».
-
[45]
Jocelyne Lapointe, « Mme Arthur Villeneuve, hôtesse du “Musée de l’artiste” », Le Progrès du Saguenay, 4 février 1961, p. 5 ; Léon Bernard, « Le peintre-barbier. La maison d’Arthur Villeneuve est un immense tableau », Le Soleil, cahier « Perspective », 29 avril 1961, p. 2-4 ; Gaston L’Heureux, « Depuis huit ans, Arthur Villeneuve a peint quelque 900 tableaux », Le Soleil, 31 décembre 1964, p. 31.
-
[46]
Une copie de l’une d’elles est conservée au musée régional. Lettre d’Alfred Pellan à Albert Jean, 9 août 1962, Archives de la Pulperie de Chicoutimi, fonds Corporation du Musée du Saguenay–Lac-Saint-Jean et du site de la Pulperie (Pu), Pu-103, dossier 4.
-
[47]
Benoit Lavoie, « La peinture de Villeneuve serait meilleure que celle de Pellan ? », Le Soleil au Saguenay-Lac-Saint-Jean, 6 août 1962, p. 1 ; Magella Soucy, « Arthur Villeneuve renouvellera son contrat avec la galerie Waddington », Le Progrès du Saguenay, 16 août 1962, p. 5 ; anonyme, « Arthur Villeneuve revient au peigne et aux ciseaux », Le Soleil au Saguenay-Lac-Saint-Jean, 20 octobre 1962, p. 18 ; Gilles Goyette et Bernard Cleary, « Mme Arthur Villeneuve : j’en ai assez de Chicoutimi... », Le Phare, 16 janvier 1963, p. 11-13 ; anonyme, « Conférence de presse nouveau genre. Les Saguenéens ont voulu mieux connaître Arthur Villeneuve », Le Progrès du Saguenay, 24 janvier 1963, p. 12 ; anonyme, « Le peintre-naïf est déçu. Arthur Villeneuve renie sa ville », Le Progrès-Dimanche, 10 janvier 1965, p. 7.
-
[48]
René Berthiaume, « Brève rencontre avec le peintre-barbier de Chicoutimi. Arthur Villeneuve : “Je laisse aux experts le soin de juger de la valeur de mes tableaux” », La Tribune de Sherbrooke, 20 août 1966, p. 16-17.
-
[49]
Lily Tasso, « Visite au peintre-barbier de Chicoutimi », La Presse, 22 juin 1965, p. 22 ; Bill Bantey, « Expo 67 : Man and His House », The Gazette, 21 septembre 1965, p. 13 ; Léon Bernard, « Le barbier-peintre Villeneuve rêve de transporter sa maison à l’Exposition », Le Petit-Journal, 6 mars 1966, p. 8.
-
[50]
Anonyme, « Démarches du Conseil de Ville pour que le musée soit ajouté aux dépliants touristiques », Le Lingot, 11 août 1966 ; anonyme, « Arthur sur le dépliant », Le Progrès Régional, 13 février 1974, p. 65 ; anonyme, « De mairie en mairie. Suggestion », Le Soleil du Saguenay-Lac-Saint-Jean, 1er juillet 1973.
-
[51]
Anonyme, « Villeneuve expose à Montréal », Le Soleil, 8 mars 1972, p. 77 ; Don Bell, « The Many Painted Visions of Arthur Villeneuve ».
-
[52]
Bertrand Genest, « Chicoutimi a l’intention de convertir la maison du peintre en musée », Le Soleil du Saguenay-Lac-Saint-Jean, 7 mars 1972, p. 3.
-
[53]
Denise Boutin-Grégoire, « Arthur Villeneuve, “Ambassadeur de la région” », Le Progrès Régional, 8 mars 1972, p. 20.
-
[54]
Anonyme, « De mairie en mairie. Maison du peintre », Le Soleil du Saguenay-Lac-Saint-Jean, 21 mars 1972, p. 10 ; anonyme, « Hommage à Villeneuve », Le Progrès Régional, 3 mai 1972, p. 19 ; anonyme, « Geste posé en vue de conserver la maison du peintre barbier », Le Soleil du Saguenay-Lac-Saint-Jean, 29 avril 1972, p. 5.
-
[55]
Anonyme, « Chicoutimi cherche à conserver au patrimoine régional la maison du peintre Arthur Villeneuve », Le Soleil du Saguenay-Lac-Saint-Jean, 18 avril 1973, p. 3.
-
[56]
« La maison du peintre Arthur Villeneuve. Rapport présenté par la Cité de Chicoutimi », juin 1975, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Archives nationales à Saguenay (ANQ-SA), fonds Ministère de la Culture et des Communications (E6), 1989-03-002/31.
-
[57]
Mémos sur le classement de la maison Arthur-Villeneuve, 12 et 20 septembre 1975, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5. Les conclusions de 1975 sont rapportées d’après un compte rendu ultérieur. Voir note de la DGP, 15 juin 1977, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5.
-
[58]
Mémos sur la préparation de l’avis d’intention de classement de la maison d’Arthur Villeneuve, 9 et 15 juin 1977, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5.
-
[59]
Note de la DGP, 6 avril 1978, ANQ-SA, E6, 1989-03-002/8.
-
[60]
Avis d’intention de procéder au classement d’un bien culturel, 22 juin 1977, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5.
-
[61]
Communiqué de presse : « Avis d’intention de classer la maison d’Arthur Villeneuve », 24 juin 1977, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5.
-
[62]
Extrait du procès-verbal de la deuxième réunion du Comité des recommandations, 19 août 1977, et Rapport de la DGP sur la maison d’Arthur Villeneuve, 23 août 1977, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5.
-
[63]
Demande d’avis à la Commission des biens culturels, 1977, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5.
-
[64]
Extrait du procès-verbal de la Commission des biens culturels, 4 novembre 1977, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5.
-
[65]
Extrait des minutes d’une séance spéciale du conseil de ville de Chicoutimi, 27 février 1978, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5.
-
[66]
« La maison du peintre Arthur Villeneuve. Rapport présenté par la Cité de Chicoutimi », juin 1975, p. 3, ANQ-SA, E6, 1989-03-002/31.
-
[67]
Extrait des minutes d’une séance spéciale du conseil de la cité de Chicoutimi, 10 novembre 1975, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5.
-
[68]
Lettre d’Arthur Villeneuve à Louis O’Neill, 19 juillet 1977, Archives de la Pulperie de Chicoutimi, Pu-103, dossier 3.
-
[69]
Extrait du procès-verbal de la Commission des biens culturels, 4 novembre 1977, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5.
-
[70]
Note de la DGP, 5 janvier 1978, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5.
-
[71]
Lettre de Louis O’Neill à Arthur Villeneuve, 31 janvier 1978, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5. Les conseillers municipaux voudront citer la maison et demander à nouveau son classement en 1990, au moment de la mort de Villeneuve. Échaudés par une tentative de classement qui avait mal tourné faute de consultation du propriétaire , ils résoudront de demander l’autorisation de la famille avant d’aller de l’avant. Encore en deuil, la veuve du peintre ne se montrera pas intéressée (La Presse Canadienne, « Chicoutimi veut que la maison soit bien culturel. La veuve du peintre Villeneuve croit les démarches trop hâtives », Le Soleil, 20 juin 1990, p. B7). On lit parfois que la maison bénéficie d’un statut patrimonial ; cette prétention se fonde sur une attestation délivrée en 1994 par la Commission canadienne d’examen des exportations de biens culturels.
-
[72]
Note de la DGP, 27 octobre 1980, ANQ-SA, E6, 1989-03-002/8.
-
[73]
Note de la Direction générale des arts et des lettres, 18 novembre 1980, ANQ-SA, E6, 1989-03-002/8.
-
[74]
Fernand Harvey, « Le patrimoine de proximité dans les régions du Québec : une perspective historique », dans Paul-André Linteau et Johanne Burgess (dir.), Histoire et patrimoine. Pistes de recherche et de mise en valeur (Québec, Presses de l’Université Laval, 2019), p. 83-85.
-
[75]
Au sujet de cet épisode, voir Jean-Paul Soulié, « Le port de Chicoutimi deviendra incubateur culturel », La Presse, 2 janvier 1988, p. A14 ; Bertrand Tremblay, « Arthur Villeneuve quittera sa maison », Le Quotidien, 5 janvier 1988, p. 8 ; Ann Ouellet, « La maison d’Arthur Villeneuve sur le port d’ici deux ans », Le Réveil à Chicoutimi, 19 avril 1988 ; Daniel Côté, « Déménagement vers le port. L’entente Villeneuve-UQAC demeure valide », Le Progrès-Dimanche, 3 juillet 1988, p. 5 ; Gilles Paradis, « Option de vente de leur maison. Hélène et Arthur veulent rester chez eux », Le Progrès-Dimanche, 4 septembre 1988, p. 9.
-
[76]
Le testament de Villeneuve exprime son désir de voir sa maison contribuer au développement du patrimoine culturel de son pays, idéalement en étant conservée sur place. Cité dans Rousseau, Vestiges de l’indiscipline, p. 49.
-
[77]
Denis Villeneuve, « Un déménagement rapide nécessaire », Le Réveil à Chicoutimi, 20 décembre 1992, p. 5.
-
[78]
Denis Villeneuve, « Maison Arthur Villeneuve. Les intervenants doivent tout faire pour s’entendre », Le Réveil à Chicoutimi, 26 mars 1991.
-
[79]
Anonyme, « La maison du peintre naïf toujours ouverte au public », Le Quotidien, 13 juin 1990, p. 12.
-
[80]
Daniel Côté, « La maison de la rue Taché ne bougera pas », Le Progrès-Dimanche, 6 janvier 1991, p. A10.
-
[81]
Daniel Côté, « Arthur Villeneuve disparu. La famille accuse le choc de la disparition », Le Progrès-Dimanche, 6 janvier 1991, p. A10.
-
[82]
Denis Villeneuve, « L’ouverture se fera sur sept jours », Le Réveil à Chicoutimi, 20 janvier 1992, p. 5 ; Denis Villeneuve, « Déménagement de la maison Arthur-Villeneuve à la Pulperie. La famille Villeneuve entend soumettre son concept d’exposition », Le Réveil à Chicoutimi, 27 juin 1993, p. 6.
-
[83]
GID Design, « Maison Arthur-Villeneuve. Analyse d’hypothèse de mise en valeur », mars 1992, Archives de la Pulperie de Chicoutimi, fonds Corporation du Musée du Saguenay–Lac-Saint-Jean (Mu), Mu-20.
-
[84]
Cette ambivalence du patrimoine, qui peut tirer sa valeur de sa typicité autant que de son unicité, s’observe dans le Macro-inventaire des biens culturels du Québec. Dans le cadre de ce projet phare mené par la Direction générale du patrimoine entre 1977 et 1983, la maison Arthur-Villeneuve n’est pas intégrée au corpus artistique de Chicoutimi, mais au corpus ethnologique, soit un ensemble de manifestations représentatives de la culture populaire et du mode de vie des groupes sociaux. Voir Direction générale du patrimoine, Macro-inventaire des biens culturels du Québec. Comté de Chicoutimi : ethnologie (Québec, Ministère des Affaires culturelles, 1982).
-
[85]
Anonyme, « Protection de la Maison-Musée. La famille Villeneuve se bat », Le Quotidien, 12 novembre 1993, p. 6 ; Denis Villeneuve, « Mise en valeur de la maison-musée. La famille Villeneuve exaspérée par les démarches », Le Réveil à Chicoutimi, 14 novembre 1993, p. 6.
-
[86]
François Bourque, « La maison-musée du peintre Arthur Villeneuve se meurt », Le Journal de Québec, 12 novembre 1993.
-
[87]
Centre de conservation du Québec, Rapport d’examen de la maison Arthur-Villeneuve, 7 mai 1991 et 18 août 1992, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/6.
-
[88]
Johanne St-Pierre, « Déménagement et rénovation. L’opération frise les 2 millions $ », Le Quotidien, 12 novembre 1993, p. 6.
-
[89]
Verbatim d’une séance de la commission de la Culture, 19 octobre 1993, ANQ-SA, E6, 2002-08-002/5.
-
[90]
Denis Villeneuve, « Les oeuvres extérieures sont dangereusement menacées », Le Réveil à Chicoutimi, date et page inconnues ; Carol Néron, « La Maison Villeneuve est dans un état critique », Le Quotidien, 12 mars 1992, p. 8.
-
[91]
Denis Villeneuve, « André Harvey prend en charge le dossier de la maison Arthur Villeneuve », Le Réveil à Chicoutimi, 29 octobre 1991.
-
[92]
Lise Bissonnette, « La maison Villeneuve », Le Devoir, 18 octobre 1993, p. 8.
-
[93]
Denis Villeneuve, « Si rien ne bouge. Les Villeneuve menacent de faire appel à l’UNESCO », Le Réveil à Chicoutimi, 14 novembre 1993.
-
[94]
Denise Pelletier, « Cri d’alarme de la famille. La maison Arthur-Villeneuve est menacée », Le Progrès Dimanche, 14 novembre 1993, p. 41 ; Martine Corrivault, « Une affaire de gros sous menace la maison du peintre-barbier », Le Soleil, 22 novembre 1993, p. B6 ; Hélène de Billy, « La petite maison dans la tourmente », L’Actualité, 1er mars 1994, p. 58-61.
-
[95]
Nathalie Ménard, « L’avenir de la maison Villeneuve se dessine », Le Progrès-Dimanche, 2 janvier 1994, p. 6.
-
[96]
La Presse Canadienne, « 450 000 $ : la maison Villeneuve est sauvée », La Presse, 4 février 1994, p. C3.
-
[97]
Soit 450 000 $ pour l’achat de la maison, 176 000 $ pour sa restauration et 374 000 $ pour son déménagement, sommes partagés entre le ministère de la Culture et des Communications (600 000 $), le ministère du Patrimoine canadien (300 000 $) et la Ville de Chicoutimi (100 000 $).
-
[98]
Une controverse emblématique et à peu près contemporaine concerne l’achat, pour 1,8 million de dollars, de la toile Voice of Fire de Barnett Newman par le Musée national des beaux-arts du Canada en 1989. Voir Bruce Barber, Serge Guilbaut et John O’Brian, Voice of Fire. Art, Rage, Power, and the State (Toronto, University of Toronto Press, 1996).
-
[99]
Bertrand Tremblay, « La Maison Villeneuve », Le Quotidien, 23 avril 1994, p. 8 ; Catherine Delisle, « Les Villeneuve victimes de railleries. Grand jour pour la famille ! », Le Quotidien, 8 novembre 1994, p. 4 ; Diane Tremblay, « La maison d’Arthur Villeneuve prête pour le “voyage” », Le Journal de Québec, 8 novembre 1994 ; Denise Pelletier, « Déménagement de la maison Villeneuve. Enfin un geste pertinent et nécessaire ! », Le Progrès-Dimanche, 13 novembre 1994, p. 51.
-
[100]
Catherine Delisle, « La vie du peintre portée à l’écran ? », Le Quotidien, 9 novembre 1994, p. 3 ; Carol Néron, « L’art, Villeneuve, CNN... », Le Quotidien, 12 novembre 1994, p. 8 ; Pierre Bourdon, « Déjà des retombées de la Maison Villeneuve », Le Quotidien, 22 novembre 1994, p. 8.
-
[101]
GID Design, « Maison Arthur-Villeneuve. Analyse d’hypothèse de mise en valeur », mars 1992, p. 8, Archives de la Pulperie de Chicoutimi, Mu-20.
-
[102]
Denise Pelletier, « Déménagement de la maison Villeneuve. Enfin un geste pertinent et nécessaire ! », Le Progrès-Dimanche, 13 novembre 1994, p. 51.
-
[103]
Gervais Villeneuve, « Tout un quartier est en deuil », Le Quotidien, 14 novembre 1994, p. 8.
-
[104]
Andrée Rainville, « La relocalisation de la Maison Villeneuve suscite une polémique », Revue activité économique, janvier 1994, p. 22-23.
-
[105]
Voir Nathalie Heinich, « Les objets-personnes. Fétiches, reliques et oeuvres d’art », Sociologie de l’art, vol. 6 (1993) ; Marco Folin et Monica Preti (dir.), « Maisons-musées. La patrimonialisation des demeures des illustres », Culture & Musées, vol. 34 (2019) ; Laurier Lacroix, « L’atelier-musée, paradoxe de l’expérience totale de l’oeuvre d’art », Anthropologie et Sociétés, vol. 30, no 3 (2006), p. 29-44 ; Martine Dubreuil, « L’acquisition de l’atelier maison Pellan, confirmation d’un déplacement expographique vers le Sujet », Muséologies : les cahiers d’études supérieures, vol. 6, no 1 (2012), p. 101-117.
-
[106]
Voir par exemple Nathalie Boudreault et Micheline Marion, Villeneuve. Un homme et sa maison (Chicoutimi QC, JCL, 2012), p. 117-128.
-
[107]
Laurajane Smith, Uses of Heritage (Londres et New York, Routledge, 2007), p. 80-82.
-
[108]
Sur une telle « indétermination ontologique », voir Nathalie Heinich, « Les colonnes de Buren au Palais-Royal : ethnographie d’une affaire », Ethnologie française, vol. 25, no 4 (1995), p. 525‑541 ; Nathalie Heinich, Le Pont-Neuf de Christo. Ouvrage d’art, oeuvre d’art ou comment se faire une opinion (Vincennes, Thierry Marchaisse, 2020).
-
[109]
Denise Pelletier, « Maison Arthur-Villeneuve. Subvention gelée ? », Le Progrès-Dimanche, 21 novembre 1993, p. 45.
-
[110]
Antoine Lilti, Figures publiques. L’invention de la célébrité, 1750-1850 (Paris, Fayard, 2014), p. 16-18, 67.
-
[111]
Sur le déplacement comme facteur d’artification, voir Roberta Shapiro et Nathalie Heinich (dir.), De l’artification. Enquêtes sur le passage à l’art (Paris, EHESS, 2012), p. 73-76, 283-284.
-
[112]
Lucie K. Morisset, Des régimes d’authenticité. Essai sur la mémoire patrimoniale (Rennes et Québec, Presses universitaires de Rennes et Presses de l’Université du Québec, 2007).
-
[113]
Nous avons privilégié cette approche dans notre mémoire de maîtrise. Voir Benoit Vaillancourt, « De l’héritage au patrimoine : trajectoires intergénérationnelles de quatre environnements d’art populaire au Québec », mémoire de maîtrise (ethnologie et patrimoine), Université Laval, 2020.