Comptes rendus

Gagnon, Monica Kin et Lesley Johnstone (dir.). In Search of Expo 67. Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2020, 230 p.[Notice]

  • Van Troi Tran

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  • Van Troi Tran
    Université du Québec à Montréal

Depuis quelques années, les expositions universelles jouissent d’un regain d’intérêt, comme en témoignent la création toute récente de l’Institute for the Study of International Exhibitions (ISIE) qui a tenu son premier congrès en mars 2022, et l’ouverture en 2015 du World Expo Museum à Shanghai sur le site de l’Exposition de 2010. Ce renouveau se traduit d’ailleurs par une collaboration plus serrée entre les milieux académiques et professionnels, où l’analyse historique et culturelle de ces événements entre en dialogue avec les architectes, gestionnaires et plasticiens directement impliqués dans la conception des expositions. L’ouvrage collectif In Search of Expo 67 dirigé par Monica Kin Gagnon, professeure en communication à l’Université Concordia, et Lesley Johnstone, conservatrice au Musée d’art contemporain de Montréal, illustre bien cette tendance, moins analytique que performative dans l’appréhension des expositions. La publication de ce livre prolonge la tenue de l’exposition éponyme qui a été présentée en 2017 au Musée d’art contemporain de Montréal à l’occasion du 50e anniversaire d’Expo 67, et qui rassemblait les oeuvres de 19 artistes d’aujourd’hui. L’ensemble des contributions de ce livre montrent ainsi comment une réflexion muséographique sur les implications d’un événement marquant, pour ne pas dire mythique, dans le parcours historique du Québec contemporain peut amener chercheurs et créateurs à explorer différentes facettes et des dimensions souvent occultées des expositions universelles, celles-ci ayant malgré tout vocation d’être des manifestations à saveur officielle et consensuelle. Mais ces contributions témoignent aussi du développement d’expérimentations plastiques permettant de mettre au jour une pluralité de voix et d’archives qui ont pu se déliter dans le tumulte de l’événement. Le titre du livre présente d’emblée le fil conducteur des différents textes. Partir « à la recherche d’Expo 67 » implique, comme les auteures le soulignent d’entrée de jeu dans leur introduction, qu’il subsiste aujourd’hui de nombreux filaments historiques encore inexplorés, et que notre mémoire collective d’Expo 67 reste partielle et fragmentaire. Un traitement artistique de l’héritage d’Expo 67, inspiré notamment dans plusieurs contributions par les réflexions récentes en histoire de l’art et en étude des médias sur la théorie critique de l’archive, permet précisément de déterrer des témoignages matériels se situant aux marges du passé institutionnalisé dans l’archivage officiel. Le livre se divise en cinq sections distinctes. La première section, intitulée « Materialities and Temporalities », fait écho à de nombreuses réflexions actuelles animant les activités du Bureau international des expositions et l’organisation d’expositions universelles récentes et futures, notamment la question de la trace environnementale de l’événement, de son inscription et de son héritage dans le paysage. Les différents artistes explorent ainsi via le film, la capture d’images par drone, le son ou la photographie, les traces matérielles d’Expo 67 de manière à mettre en valeur à la fois l’impact toujours tangible de l’événement sur la transformation du paysage montréalais, et la progressive détérioration des artéfacts architecturaux et artistiques du site. Les deux sections suivantes présentent respectivement des projets artistiques sur le pavillon du Canada et les représentations des communautés autochtones. Le pavillon canadien était constitué de plusieurs structures distinctes, parmi lesquelles la pyramide inversée Katimavik de neuf étages, « l’Arbre des gens » dont les feuilles rouges et orangées présentaient des photographies de Canadiens, et le Centre de Créativité, et chaque installation proposait une reconstruction créative de l’imaginaire national mis en scène à l’Expo. Les contributions suivantes des artistes Duane Linklater et Krista Belle Stewart constituent un point fort du livre, en ce qu’elles ouvrent à une réinterprétation de la représentation muséographique des communautés autochtones à la lumière des récentes discussions sur l’héritage historique des pensionnats et leur rôle dans l’effacement historique des communautés. Linklater met …