Comptes rendus

Lajeunesse, Marcel, Éric Leroux et Marie D. Martel (dir.). Pour une histoire des femmes bibliothécaires au Québec. Portraits et parcours de vies professionnelles. Québec, Presses de l’Université du Québec, 2020, 178 p.[Notice]

  • Pierre Hébert

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  • Pierre Hébert
    Université de Sherbrooke

« À ce jour, aucune étude produite au Québec n’a porté sur le rôle joué par les femmes au sein des bibliothèques, que ce soit dans une perspective historique ou contemporaine » (p. 2). C’est en ces mots que les responsables de ce recueil d’études expliquent la pertinence de leur entreprise, qui dresse le portrait de huit femmes ayant eu un parcours notable dans les bibliothèques ou dans l’enseignement du métier de bibliothécaire : Éva Circé-Côté, Mary Sollace Saxe, Marie-Claire Daveluy, Hélène Grenier, Paule Rolland-Thomas, Céline Robitaille-Cartier, Hélène Charbonneau et Louise Guillemette-Labory. Ce champ inexploré exigeait au préalable une courte mise en contexte. Les responsables rappellent dans leur introduction qu’au 19e siècle « les bibliothèques engagent très peu de femmes » (p. 2), situation qui changera au début du siècle suivant, ce que le chapitre sur Circé-Côté démontrera d’entrée de jeu. Mais « c’est surtout à partir des années 1940 et 1950 que le nombre de femmes occupant des postes de direction ira en augmentant » (p. 3). Enfin, troisième constat liminaire, « on rencontre surtout les femmes confinées dans des postes de subalternes, pour ensuite gravir les échelons de la structure hiérarchique pour assumer des fonctions de dirigeantes » (p. 4). Il revenait à Andrée Lévesque, auteure de Éva Circé-Côté, libre-penseuse (2010), de présenter cette femme qui mena de front deux carrières : celle de bibliothécaire et celle de journaliste. Éva Circé (1871-1949) a été la première bibliothécaire de la Ville de Montréal, occupant ce poste à la Bibliothèque technique de Montréal de 1903 à 1932, poste qui semblait précaire au début : « plus tard, lorsque les besoins du service l’exigeront, on nommera un homme », précise le journal La Presse (p. 9). Le ton est donné, et Andrée Lévesque décrit ensuite avec soin les conditions matérielles d’un tel emploi, les entraves mises par le clergé pour le choix des livres, le souci pour Circé-Côté que les enfants aient accès à la bibliothèque, entre autres. Elle résume bien ce véritable apostolat, laïque faut-il le préciser, auquel se livre la « libre penseuse » : « La bibliothèque est donc essentielle au progrès et à la régénération de la société pour les mêmes raisons que l’éducation, pour s’ouvrir au monde et aiguiser son jugement » (p. 13). Lévesque affirme, en exagérant quelque peu, que Circé-Côté est tombée dans l’oubli. Marcel Lajeunesse aurait pu en dire autant de Mary Sollace Saxe, dont il fait pourtant « une figure de proue dans le monde des bibliothèques publiques au Québec » (p. 29). Mon ignorance aura disparu à la fin de ce chapitre. L’ouverture de la bibliothèque publique de Westmount a eu lieu au mois de juin 1899. Mary Sollace Saxe (1868-1942) n’a pas été retenue parmi les 250 candidats au poste de bibliothécaire. Qu’à cela ne tienne, elle suit un programme de perfectionnement et l’obtient en 1901, à la suite de la démission de Béatrice Moore. Elle occupera cet emploi jusqu’en 1931. L’une de ses contributions les plus notables a été une bibliothèque pour enfants. L’article le plus fouillé porte sur Marie-Claire Daveluy (1880-1968). Il faut dire que celle-ci est déjà connue comme pionnière de la littérature pour la jeunesse avec ses Aventures de Perrine et Charlot (1923), comme biographe de Jeanne Mance et comme fondatrice principale de l’École des bibliothécaires. Johanne Biron retrace avec soin les étapes de la vie de cette femme des plus prolifiques, surtout à la Bibliothèque de la Ville de Montréal et à l’École des bibliothécaires, et elle relève avec raison qu’elle « a contribué dans une large mesure à la professionnalisation du rôle de …