Une première biographie de Lionel Groulx. DiscussionCOURTOIS, Charles-Philippe, Lionel Groulx. Le penseur le plus influent de l’histoire du Québec (Montréal, Les Éditions de l’Homme, 2017), 584 p.[Notice]

  • Éric Bédard,
  • Julien Goyette,
  • Marie-Pier Luneau,
  • François-Olivier Dorais et
  • Charles-Philippe Courtois

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  • Éric Bédard
    Université TÉLUQ

  • Julien Goyette
    Département des lettres et humanités, Université du Québec à Rimouski

  • Marie-Pier Luneau
    Département des lettres et communications, Université de Sherbrooke

  • François-Olivier Dorais
    Département des sciences humaines et sociales, Université du Québec à Chicoutimi

  • Charles-Philippe Courtois
    Collège militaire royal de Saint-Jean

Au fil des années, les études groulxiennes se sont enrichies de monographies savantes, d’articles spécialisés, d’éditions critiques, d’écrits intimes et d’essais d’interprétation. Intellectuel de choc, penseur traditionaliste, historien prolixe, Lionel Groulx a tant écrit, tant participé aux débats de son temps, tant choqué et dérangé, tant inspiré et marqué ses contemporains, que l’étude de sa pensée et de son action ne peut qu’éclairer des pans importants de l’histoire du Québec et du Canada français. Viendra le jour où un chercheur fera le bilan de ces décennies de recherches savantes et d’écrits engagés : parions qu’un tel panorama permettra de comprendre l’évolution de notre rapport au Canada français d’Ancien Régime. On y verra défiler les herméneutes bienveillants, les critiques implacables et une série de chercheurs nés après le décès du chanoine, curieux de comprendre les diverses facettes de son oeuvre : la nature de son nationalisme et de sa pensée religieuse, sa contribution à l’historiographie, ses stratégies d’auteur, etc. En attendant un tel bilan critique, la publication de Lionel Groulx. Le penseur le plus influent de l’histoire du Québec (Éditions de l’Homme, 2017), première véritable biographie du chanoine, nous semblait digne d’intérêt. Spécialiste de l’histoire intellectuelle du XXe siècle canadien-français, l’auteur, Charles-Philippe Courtois, a voulu offrir au grand public une ambitieuse synthèse, la fresque d’une vie d’études et d’engagements qui couvre une très longue période de notre histoire récente (1878 à 1967). En historien sérieux, Courtois ne s’est pas contenté de produire une banale chronique qui fourmillerait de ces « anecdotes » dont raffolent les éditeurs (et nombre de lecteurs !). Il fait des choix, oriente son récit vers des enjeux qu’il juge importants, soutient même certaines thèses audacieuses : les origines nationalistes de la Révolution tranquille, par exemple, ou l’indépendantisme précoce de Groulx. Vu la richesse des études groulxiennes, il m’apparaissait opportun de discuter de ces choix et de l’ensemble du livre. Avec l’accord du biographe, j’ai proposé de réunir quelques spécialistes. Le cadre choisi fut celui d’une table ronde tenue le 20 octobre 2018 au campus de Drummondville de l’Université du Québec à Trois-Rivières lors du 71e congrès de l’Institut d’histoire de l’Amérique française – vénérable institution fondée par le chanoine. Je remercie les organisateurs du congrès d’avoir accepté ma proposition, ainsi que Marie-Pier Luneau, Julien Goyette et François-Olivier Dorais de s’être prêtés à l’exercice. Leurs textes attestent d’une lecture fine et rigoureuse de cette première biographie de Lionel Groulx. Je remercie aussi Charles-Philippe Courtois de s’être montré réceptif à une critique qui n’a pas manqué d’afficher ses désaccords et de soulever des questions exigeantes. Comme cette « évaluation par les pairs » se faisait visière levée, il fallait au biographe une bonne dose d’humilité pour recevoir ces divers commentaires et pour livrer ses réactions à chaud. Parmi les legs du chanoine, on compte la Revue d’histoire de l’Amérique française – appellation ô combien groulxienne ! Que les réflexions autour de cette première synthèse biographique du personnage y soient publiées, cela tombait sous le sens. Lionel Groulx est une figure encombrante de la mémoire collective québécoise et un objet historique aux propriétés thermiques pour le moins fluctuantes. Le climat qui entoure la réception de son oeuvre n’est certes plus aussi ardent et toxique en 2018 qu’il y a vingt ans, alors que l’historien en herbe que j’étais publiait fébrilement une anthologie de ses oeuvres commandée par la Fondation Lionel-Groulx. La mémoire de l’historien national avait clairement, à ce moment-là, des fers aux pieds et aux poignets. On entendait encore, dans les buissons, des rumeurs de « dé-baptisation » de la station de métro qui porte son nom. …

Parties annexes