Comptes rendus

Baum, Gregory, Truth and Relevance. Catholic Theology in French Quebec since the Quiet Revolution, Montréal, McGill-Queen’s University Press, 2014, 248 pages[Notice]

  • Maxime Allard

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  • Maxime Allard
    Facultés de philosophie et de théologie, Collège universitaire dominicain

Un ouvrage de Gregory Baum : a priori, cela a de quoi exciter ! Un ouvrage de G. Baum qui brosse un portrait de la théologie catholique au Québec depuis la Révolution tranquille : cela soulève bien des attentes, car le professeur Baum est un acteur important sur cette scène depuis longtemps. Sa formation, les lieux où il pratiqua la théologie, ses options théologiques lui offrent des atouts pour proposer une interprétation personnelle de ce parcours théologique québécois. Le titre de l’ouvrage Truth and Relevance titille l’imagination théorique. Il pourrait y avoir du vrai qui ne serait pas pertinent. Il pourrait y avoir exclusion mutuelle du vrai et de la pertinence. La vérité de la pertinence et la pertinence de la vérité pourraient être mises en question. Traduire « relevance » par « pertinence » est déjà un choix, mais la traduction offre deux autres possibilités, « intérêt » et « justesse », qu’il pourrait être intéressant de ne pas taire trop rapidement afin de saisir les nuances du propos offert à la lecture… Dès l’introduction, pourtant, une question hante le lecteur : quel est le genre littéraire adopté ici ? Est-ce un livre d’histoire ? La théologie catholique au Québec, depuis la Révolution tranquille, aurait subi et se serait engagée dans des déplacements méthodologiques, institutionnels, épistémologiques à cause d’un contexte sociologique et historique en mouvement qui seront exposés et analysés dans l’ouvrage. Divers faits et événements sont évoqués : Vatican II, la transformation des formes et du rapport à la pratique dominicale ainsi que les transformations institutionnelles des lieux de la pratique de la théologie, le « catholicisme culturel », la Révolution tranquille… En ce sens, l’histoire de la théologie catholique au Québec francophone est inscrite dans un milieu qui l’affecte. Est-ce bien le cas ? Car, à l’orée de l’introduction, explicitement, Gregory Baum annonce que le livre sera composé de portraits de théologiens et de théologiennes qu’il a connus et que ces portraits seront peints à partir de ses souvenirs, de ses lectures, de son propre prisme théologique qui diffère explicitement de celui de bien de ses modèles. Ainsi, ce n’est plus tout à fait d’une histoire comme reconstruction et analyse méthodique du passé dont il s’agit, mais d’une relation plus personnelle, fruit d’interactions situées. Les éléments sociologiques et historiques mobilisés au début des chapitres ne viennent, en fait, que cadrer les présentations. Le livre serait donc à apprécier comme des « confessions ». D’ailleurs la conclusion de l’ouvrage introduit explicitement l’idée de « confession » (p. 19), réservant quelques surprises qu’on peut considérer comme autant de clés pour parcourir à rebours – à nouveau – le livre avec un autre oeil. Je note cette instabilité quant au genre littéraire du livre afin de prévenir le lecteur : si vous vous attendez à une approche historique systématique, vous serez déçu car plusieurs présupposés sont « datés » et ne tiennent pas toujours compte des travaux récents sur la Révolution tranquille ! Par ailleurs, si vous vous attendez à une série de portraits fidèles aux personnes mentionnées, vous risquez quelques irritations, car on trouve parfois des raccourcis déformants afin de faire entrer les gens dans les cadres de la thèse. Par exemple, le portrait d’Anne Fortin me semble témoigner d’une mécompréhension du parcours, des choix et des enjeux de l’écriture de cette théologienne. Les pages sur Risquer l’avenir (p. 156-162) offrent un bel exemple d’une interprétation et de la réception critique d’une production théologique et pastorale qui pourrait surprendre quelqu’un de ma génération. Cela dit, les chapitres 2 à 4 sont tout à fait intéressants. Je passe le …