En retraçant l’histoire de l’île Jésus et de la ville qui s’y trouve, cet ouvrage vise à saisir les éléments définitionnels de l’identité lavalloise. D’entrée de jeu, les auteurs reconnaissent que Laval ne constitue pas une région culturelle au même titre que d’autres régions du Québec comme Charlevoix, le Saguenay ou encore la Gaspésie. Malgré cela, le livre fournit des pistes pour établir les traits de l’identité de la région de Laval. Partant du découpage des régions administratives du Québec pour mettre en lumière le processus de construction identitaire, les auteurs relèvent trois conditions ayant déterminé son caractère : l’arrivée massive de jeunes ménages en quête d’espace et de verdure à partir des années 1940, la constitution de la Ville de Laval en 1965 lors de la fusion de 14 municipalités et l’essor d’activités économiques fournissant des emplois aux Lavallois. Devenue une « région économique à part entière » (p. 229) depuis quelques décennies, Laval serait aussi une région d’appartenance et « un endroit où il fait bon vivre » (p. 290). Cette dernière caractéristique relève plus du slogan publicitaire que d’un fait historique scientifiquement démontré. À l’instar des régions qui sont dans l’aire d’influence de la métropole, les auteurs soulignent le caractère ambivalent relié à la double appartenance identitaire : à leur propre région et à celle de Montréal. Retraçant l’histoire de l’occupation humaine du territoire de l’île Jésus, l’ouvrage vise à montrer comment, au fil des décennies, ses habitants en sont venus à se différencier de ceux de la région de Montréal, du moins en partie. La création de la Ville de Laval en 1965 constituerait un tournant dans la mise en forme d’une identité régionale. Par rapport aux autres régions du Québec, celle de Laval aurait émergé comme région culturelle tardivement, c’est-à-dire dans la seconde moitié du xxe siècle avec l’arrivée massive de jeunes ménages montréalais à la recherche d’un cadre de vie favorable à l’épanouissement de la vie familiale et dont l’habitat pavillonnaire, des loisirs organisés et le recours à l’automobile comme mode de transport constituent les ingrédients clés. Il est dommage que les auteurs n’aient pas eu davantage recours aux travaux sur l’histoire de la banlieue au Canada et en Amérique du Nord pour mieux faire ressortir les traits distincts du processus lavallois. D’autres enjeux ayant récemment marqué les villes de banlieue comme la diversification ethnique, la détérioration des infrastructures urbaines ainsi que le vieillissement démographique sont abordés dans l’ouvrage mais dans une perspective très locale. Divisée en sept chapitres, l’étude fait ressortir trois types d’organisations sociospatiales qui ont marqué l’histoire de Laval depuis sa colonisation au xviie siècle : « campagne », entre « campagne et banlieue », puis « ville ». La vocation suburbaine du territoire est façonnée à partir de 1940, alors que des milliers de ménages montréalais viennent s’établir dans les nouveaux secteurs résidentiels. Entre 1941 et 1966, la population de l’île Jésus passe de 21 631 à 196 088 habitants (p. 189). Cette croissance démographique effrénée crée une demande de services publics que les petites municipalités n’arrivent pas à combler de manière satisfaisante. Dès lors, l’intégration des municipalités de l’île apparaît comme une solution aux problèmes que génèrent l’éparpillement urbain et le manque de planification. Mais l’ouvrage ne nous dit pas si la fusion a atteint tous ses objectifs. Bien qu’un chapitre soit consacré à la géographie physique et à l’environnement naturel, le cadre bâti et l’environnement construit sont peu traités. Quelques pages sur les enjeux environnementaux contemporains auraient été utiles pour faire le pont entre le passé et le présent. Une question dont j’aurais aimé trouver la …
FORTIN, Jean-Charles, Jacques SAINT-PIERRE et Normand PERRON, Histoire de Laval (Québec, Les Presses de l’Université Laval, coll. « Les régions du Québec », 2008), 341 p.[Notice]
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Claire Poitras
INRS-Urbanisation, Culture et Société