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Revue Gouvernance
Governance Review
Volume 1, numéro 2, 2004
Sommaire (6 articles)
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Lettre du rédacteur en chef
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The public-private-partnership “fetish”: moving beyond the rhetoric
Daniel Cohn
RésuméEN :
Public-private partnerships (P3s) encompass a broad range of commercial and financial activity involving state engagement of for-profit firms to either provide or partially finance publicly prescribed services through long-term contracts. Following Marx’s analysis of commodities, P3s can also be understood as a fetish - objects considered valuable because of the imaginary social relations that they imply as opposed to their usefulness. In this case, it refers to the transformation of instruments for meeting public obligations into some form or another of private property. It must be acknowledged that states have long employed P3 arrangements to provide instruments needed to meet their obligations. However, the scope of activities which governments are willing to consider open to P3s has grown to unprecedented levels. So eager are states to do deals and so prominent are such deals in their financial rhetoric, that P3s can now also be considered a fetish in the second sense of the word : Some thing or some activity that people have an irrational desire to have or to do. Most political-economy studies of P3s have focused on this rhetoric. They are attempting to understand the trend by relating this fetish to the political ideological agenda of neoliberalism. While valuable, this concentration has caused an equally critical question to be neglected. Why would investors want to take part in P3s ? The paper argues that to understand the P3 fetish we have to consider the dilemma facing pension fund managers during the late 1990s. An imbalance in supply and demand for high quality bonds and dividend paying stocks emerged due to declining public debts, management practices at large corporations, and an increasingly aging population. P3s provided a solution to this dilemma. The evaporation of this economic context and a growing public awareness of the costs of these deals likely mean that P3s will lose their status as a fetish in both senses of the word.
FR :
Les partenariats public-privé (P3) embrassent un large éventail d’activités commerciales et financières par lesquelles l’État charge des entreprises sans but lucratif soit de fournir soit de financer en partie, en vertu de contrats à long terme, des services prescrits par la loi. Dans la perspective de l’analyse marxiste des produits de base, les P3 peuvent également être considérés comme des fétiches, à savoir des objets dont la valeur n’est pas tirée de leur utilité mais bien des rapports sociaux imaginaires qui leur sont implicites. Dans le cas qui nous occupe, il s’agit de la mutation d’instruments par lesquels le gouvernement tient ses obligations en une forme donnée de biens privés. Force est de reconnaître que les États recourent de longue date à des P3 pour mettre en place les instruments dont ils ont besoin pour tenir leurs engagements. Toutefois, l’étendue des activités que les gouvernements sont disposés à envisager de confier à des parties à des P3 a atteint des niveaux sans précédent. Les États sont à ce point avides de conclure des ententes et celles ci sont si en évidence dans leur rhétorique financière que les P3 peuvent désormais être considérés comme un fétiche au deuxième sens du mot : c’est à dire un objet que les gens convoitent ou une activité à laquelle ils souhaitent se livrer de manière irrationnelle. La plus grande part des études politico économiques des P3 ont été centrées sur cette rhétorique et ont voulu faire la lumière sur la tendance en établissant des rapports entre les fétiches et le programme politique idéologique du néo-libéralisme. Bien que cette démarche très focalisée soit utile, elle a fait en sorte qu’une question capitale a été négligée : celle de savoir pourquoi les investisseurs voudraient participer à des P3. L’auteur fait valoir que l’interprétation juste du fétiche des P3 passe obligatoirement par un examen du dilemme auquel faisaient face les gestionnaires de caisses de retraites à la fin des années 1990. Il s’est produit un déséquilibre entre l’offre et la demande d’obligations et d’actions bénéficiaires de qualité à cause du recul de la dette publique, des pratiques de gestion des grandes entreprises et d’une population dont le vieillissement allait s’accélérant. Or les P3 offrent une solution au dilemme. La volatilisation du contexte économique précité et la sensibilisation croissante du public aux coûts des P3 donnent à entendre que ces derniers sont voués à perdre leur qualité de fétiche, aux deux sens du mot.
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Bringing the transgovernmental in: the public service in the Canada-United States relationship
Monica Gattinger
RésuméEN :
This article examines an often-overlooked dimension of Canada-United States relations : relations between Canadian and American public servants. Meetings between political leaders of Canada and the US may make front-page headlines, but it is the myriad of networks and interconnections between Canadian and American public servants that constitute the lion’s share of bilateral activity. Notwithstanding the multitude of daily cross-border, inter-departmental, and inter-agency interactions, there has been relatively little systematic theoretical or empirical attention to the public sector dimension of Canada-US relations. Public administration scholars tend to train their sights on the domestic level and pay little or no attention to the public management dimension of international affairs. A recently edited volume studying contemporary Canadian public administration does not examine these relations. International relations scholars, for their part, tend to oversimplify domestic politics and policy institutions. This text contributes to bridging this gap in the literature. It builds on the concept of transgovernmentalism, relations between legislative, executive, regulatory, and judicial players with their international counterparts. It examines the mechanisms and processes by which public sector players interact across borders (e.g., informal relations, formal agreements, joint organizations, etc.). The article explores the relationship between the degree of bilateral policy coordination in a policy field or issue area and the mechanisms of transgovernmental activity characterizing cross-border relations in that policy domain.
FR :
L’auteure se penche sur une dimension très souvent négligée des relations canado américaines, c’est à dire le rapport entre les fonctionnaires des deux pays. Les rencontres des dirigeants politiques du Canada et des États Unis font peut être la manchette, mais la très grande part de l’activité bilatérale est le fait des nombreux réseaux et interconnections qui lient les fonctionnaires canadiens et américains. Malgré le volume important de l’interaction transfrontalière entre les ministères, départements et organismes des deux pays, l’aspect des relations canado américaines qui concerne la fonction publique a suscité relativement peu d’attention théorique ou empirique systématique. Les spécialistes de l’administration publique ont tendance à se concentrer sur l’activité intérieure et à se pencher peu, sinon aucunement, sur la gestion publique des affaires internationales. À témoin, un ouvrage paru récemment sur l’administration publique contemporaine du Canada passe sous silence les relations de cet ordre. Pour leur part, les spécialistes des relations internationales tendent à simplifier à outrance la politique intérieure et les institutions stratégiques. Le présent article contribue à combler la lacune dans les écrits spécialisés. Il prend appui sur le concept du transgouvernementalisme - rapports entre autorités législatives, exécutives et judiciaires et organismes de réglementation et leurs vis à vis étrangers - et examine les mécanismes et les processus qui président à l’interaction transfrontalière (relations sans formalité, accords officiels, organismes mixtes, et ainsi de suite) des acteurs du secteur public. L’auteure examine le rapport entre le degré de coordination bilatérale des politiques dans un domaine stratégique ou problématique et les mécanismes de l’activité transgouvernementale qui caractérisent les rapports transfrontaliers dans le même domaine.
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Gouvernance et fusions d’établissements sociosanitaires
Alain Dupuis, Luc Farinas et Louis Demers
RésuméFR :
Dans cet article, nous nous demandons quel est ce « problème de coordination » pour lequel les fusions d’établissements seraient une solution. Nous tentons de répondre à cette question en nous inspirant des théories de l’organisation et du design organisationnel, ce que font peu les études qui dénoncent les problèmes de coordination et qui appellent à l’intégration des établissements et des services. Ces théories nous apprennent qu’il existe, au-delà de la populaire trilogie marché-hiérarchie-réseau, une multitude de mécanismes de gouvernance et de coordination aux propriétés partiellement distinctes. Les systèmes sociosanitaires combinent de diverses façons ces mécanismes. Les fusions ont pour effet d’accentuer l’importance de certains mécanismes tels que l’autorité centrale, la hiérarchie et les règles formelles. Ces mécanismes ont leur importance, mais il reste à faire la preuve que les renforcer puisse améliorer le fonctionnement du système sociosanitaire québécois, car ils ont des limites importantes en situation de complexité. Dans cet article, nous analysons les fusions d’établissements sociosanitaires sous l’angle des mécanismes de gouvernance et de coordination qui sont en jeu.
EN :
The authors raise the question of which “coordination problems” are likely to be resolved by the merger of establishments. They attempt a response to this question on the basis of organizational theory and design, an approach rarely taken by studies which shed light on coordination problems and call for the integration of institutions and services. From the theories in point we learn that there is a multitude of governance and coordinate mechanisms with partially distinctive properties beyond the popular market/hierarchy/network trilogy. Socio-sanitary systems create various combinations of these mechanisms. Mergers accentuate the importance of some of these mechanisms such as central authority, hierarchy, and formal rules. These mechanisms are indeed important, though it remains to be seen if the Quebec socio-sanitary system can be improved by strengthening them, as they have significant limitations in complex situations. The article analyzes the merger of socio-sanitary establishments from the perspective of the governance and coordination mechanisms involved.
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Les leviers de contrôle des actionnaires majoritaires
T. Biebuyck, A. Chapelle et A. Szafarz
RésuméFR :
La littérature académique en gouvernance d’entreprise étudie en particulier la séparation entre propriété et contrôle au sein de l’actionnariat des entreprises privées. Cet article propose une synthèse critique et des illustrations internationales des résultats les plus récents en la matière. En particulier, il détaille les mécanismes permettant aux actionnaires dominants d’accroître leur contrôle d’une société, parmi lesquels : les structures pyramidales, les participations croisées et les actions à droits de vote multiples, qui offrent la possibilité de découpler le contrôle de la part effectivement détenue dans le capital de l’entreprise. Ces phénomènes, plus ou moins présents dans les différentes régions du monde, jouent un rôle fondamental puisqu’ils contribuent à l’accroissement des asymétries entre actionnaires d’une même entreprise et engendrent des opportunités de bénéfices privés en faveur de certains d’entre eux. Leur impact s’étend bien au-delà de la sphère de l’entreprise concernée et peut affecter le fonctionnement même des marchés financiers. La quantification du niveau de contrôle au sein d’un empire industriel peut être obtenue à l’aide de diverses méthodes. Les développements récents en la matière sont résumés et l’application à des cas internationaux réels est discutée.
EN :
The academic literature on corporate governance has taken a particular interest in the separation of property and control within bodies of corporate shareholders. This article provides a critical synthesis and international examples of the most recent results in this area. More particularly, it outlines the mechanisms through which controlling shareholders increase their control over a corporation (including pyramid structures), cross-shareholding, and shares with multiple voting rights. All of these mechanisms potentially provide the means of divorcing control from the proportion of corporate capital stock effectively held. These phenomena, present to a lesser or greater degree across the planet, play a fundamental role as they increasingly skew the relationship among shareholders of the same corporation while also creating opportunities for private benefits for some. Their impact extends well beyond the sphere of the corporation itself and may even affect the operation of financial markets. There are several ways of quantifying the level of control within an industrial empire. Recent developments in this field are summarized, and their application to true international cases is discussed.
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Débat et déliberation : la réingénerie de l’État québécois