Résumés
Résumé
S’il peut sembler paradoxal de parler de manifeste aujourd’hui, dans un contexte d’éclatement des pratiques artistiques et de disparition des mouvements, l’on observe pourtant un retour aux manifestes à la fin du XXe siècle, à l’époque de la « crise de l’art contemporain ». À titre d’exemple, le critique d’art Nicolas Bourriaud publie, en 1995, le livre Esthétique relationnelle : l’ouvrage expose une nouvelle théorie, rassemblant a posteriori des oeuvres très diverses sur le plan des sujets abordés et des styles. Nous constaterons ici que l’entreprise de légitimation par un appui théorique rapproche, dans un premier temps, l’Esthétique relationnelle du manifeste avant-gardiste. Cependant, nous verrons par la suite que l’approche quasi sociologique de Bourriaud et sa revendication d’un héritage s’opposent au ton polémique et à la tabula rasa propres aux avant-gardes. Nous expliquerons ces différences majeures en nous appuyant sur le changement de contexte historique : à l’ère de la globalisation, les artistes contemporains élaborent de nouvelles formes d’engagement et d’utopies, très éloignées de celles de leurs aînés, modifiant, par là même, les modalités et les finalités du manifeste.
Abstract
Although it may seem paradoxical to mention manifestoes given today’s disintegration of artistic activities and movements, there was a late twentieth century return to the genre that paralleled a “crisis in contemporary art”. To wit, art critic Nicolas Bourriaud published Esthétique relationnelle in 1995, a book outlining a new theory based on a wide selection of stylistically and topically diverse previous works. While its theoretical approach links the book to the “avant-garde” manifesto, Bourriaud’s quasi-sociological slant and his reliance on a legacy contrast with the polemical tone and the “tabula rasa” that characterise the “avant-garde”. Changes in the historical context can explain that important difference: in today’s global village, contemporary artists create new forms of engagement and utopias far removed from their elders’, thereby changing the modalities and finalities of the manifesto.
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Parties annexes
Note biographique
Elisabeth Spettel est doctorante en arts à l’Université Bordeaux 3, où elle enseigne la philosophie de l’art et l’histoire de l’architecture. Elle prépare une thèse portant sur le « Double jeu de la subversion : entre dadaïsme, surréalisme et art actuel » sous la direction de Pierre Sauvanet (Bordeaux 3) et de Miguel Egana (Paris 1). Elle a écrit des articles universitaires traitant de l’humour dans les oeuvres dadaïstes et contemporaines, de la transgression et de la provocation. Elle a aussi publié dans des revues d’art comme Artension et Le Journal des Arts. Elle a organisé une journée d’étude, « Utopies concrètes », et une exposition, Tangentes, en partenariat avec le Conseil régional d’Aquitaine et le Centre Pompidou mobile, en décembre 2012. Parallèlement à ses recherches, elle a assisté le directeur adjoint du Musée national d’art moderne, Didier Ottinger, pour la préparation de l’exposition « Le surréalisme et l’objet », présentée au Centre Pompidou du 30 octobre 2013 au 3 mars 2014.
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