Résumés
Résumé
Comment distinguer le verset du vers libre ? Comment le distinguer de la prose ? Suspendu entre ces deux catégories qui souvent se l’annexent et en effacent le nom, le verset apparaît sur la carte moderne du vers comme une réalité intersticielle, hantée par son aspect volatile, presque impossible à isoler à l’état pur. Loin de vouloir combler ce vide d’essence, cet article voudrait interroger le sens qu’il pourrait prendre dans la modernité qui est la nôtre. Chez Jean Grosjean, notamment, c’est le verset qui sert d’icône prosodique au « dieu en perdition » : l’épuisement de la voix qu’entraîne souvent sa récitation recoupe l’ontologie d’un dieu défaillant, dont l’expiration est le principal mode d’existence. « Verset » n’est donc pas seulement le nom d’un type de vers, c’est aussi la proposition d’une forme de pensée historique dont on cherche ici à interroger la fécondité.
Abstract
What distinguishes the “verset” from free verse ? From prose ? Barely existing, located between these two categories, the “verset” has always been understood as an elusive verbal reality, almost impossible to isolate in itself. Instead of trying to fill this void by a strict definition, we would like here to question its significance. What can it reveal about modernity ? In Jean Grosjean’s work, for instance, the “verset” can be viewed as the prosodic icon of the “waning god” : exhausted by the reading of highly charged “versets”, the reader, his voice nearly gone out, is often in a condition where he can experience the very true nature of the failing god, who is, in Grosjean’s view, in a perpetual state of expiring. Thus “verset” is not only a term designating a certain type of verse. It also constitutes a possible form of historical thought, as we would like to suggest in conclusion.
Parties annexes
Références
- Claudel, Paul, Cinq grandes Odes, Paris, Gallimard (Poésie), 1957.
- Grosjean, Jean, Araméennes, Paris, Éditions du Cerf, 1988.
- — — —, La gloire, Paris, Gallimard (Poésie), 1969.
- — — —, Nathanaël, Paris, Gallimard, 1996.
- — — —, « Préface », dans Paul Claudel, Cinq grandes Odes, Paris, Gallimard, 1966 [1957], p. 5-13.
- Mallarmé, Stéphane, Igitur. Divagations. Un coup de dés, Paris, Gallimard (Poésie), 1976.
- Nepveu, Pierre, Lectures des lieux, Montréal, Boréal (Papiers collés), 2004.
- Rémy, Pierre-Jean, « L’exil le plus absolu… », dans Victor Segalen, Stèles, Paris, Gallimard (Poésie), 1973, p. 5-15.
- Roubaud, Jacques, La vieillesse d’Alexandre. Essai sur quelques états récents du vers français, Paris, Maspéro, 1978.
- Saint-John Perse, Éloges suivi de La gloire des rois, Anabase, Exil, Paris, Gallimard, 1960.