Résumés
Résumé
L’écriture postmoderne, dans laquelle s’inscrit C’est moi le gros et toi le petit de Juan Mayorga, est une écriture construite notamment sur les renvois et les répétitions. De fait, ce texte fonde sa structure et sa charge comique sur la répétition : comique de répétition, mais aussi humour du jeu sur la répétition du modèle de Laurel et Hardy et sur les répétitions permanentes auxquelles se livrent les deux protagonistes. Nous nous proposons d’interroger ces répétitions en cascade et d’analyser les rouages du comique de répétition en mettant en regard un cinéma usant de ce procédé et un théâtre qui reprend ce motif pour mieux se le réapproprier.
Abstract
Postmodern writing, which informs C’est moi le gros et toi le petit, by Juan Mayorga, is largely built on repetitions. In fact, this text bases its structure and its comical dimension on repetition: running gags, but also humor in the repetition – and variations – of the model of Laurel and Hardy, and of the constant rehearsals in which the protagonists engage. We shall attempt to analyze the different forms of repetition and how they create comedy by taking into consideration cinematic uses of this process as well as theatrical works that adopt it and adapt it to new ends.
Corps de l’article
Société et littérature sont, selon Gilles Lipovetsky[1], autant de miroirs que l’individu postmoderne se tend à lui-même pour s’y contempler à loisir… et tenter de saisir ou de recomposer une unité par-delà l’éclatement de son identité. L’un des pendants littéraires de ce narcissisme est une écriture qui se construit à travers tout un jeu de renvois, d’échos et de répétitions. Si ce procédé n’est pas nouveau ni propre à la postmodernité, son caractère récurrent et son utilisation consciente en font un trait pertinent d’une littérature postmoderne dans laquelle s’inscrit de plein droit Juan Mayorga, auteur du Traducteur de Blumemberg, de Cartes d’amour à Staline ou encore de C’est moi le gros et toi le petit[2]. Ce dernier texte, notamment, présente nombre de caractéristiques qui le rattachent aux écritures dramatiques postmodernes : jouant sur l’intertextualité et la métatextualité, l’ironie et la parodie, il remet en cause les métarécits, ces grands récits idéologiques de la modernité, au profit des microrécits du quotidien[3]. Mais surtout, il fonde aussi bien sa structure que sa charge comique sur la répétition.
Ce sont les différentes figures de la répétition qu’explore ce texte, placé sous le signe d’un humour souvent ironique, que nous souhaitons analyser ici. En effet, par-delà le comique de répétition de nombre de scènes, l’humour de la pièce se nourrit des répétitions incessantes (et ô combien répétitives !) auxquelles se livrent les deux protagonistes, en mal de contrat, pour être fin prêts le jour où un producteur les rappellera. Enfin, il réside dans le jeu sur la répétition d’un modèle cinématographique bien ancré dans l’imaginaire collectif, celui de Laurel et Hardy, le Gros et le Petit. Il nous semble donc intéressant d’interroger ce jeu de répétitions en cascade et d’analyser les rouages du comique de répétition en mettant en regard un cinéma usant généreusement – et parfois mécaniquement – de ce procédé et un théâtre qui reprend ce motif pour mieux se le réapproprier.
Se répéter pour amuser : gags burlesques et comique de répétition
Avec un titre qui renvoie directement le public espagnol aux personnages de Laurel et Hardy[4], la pièce de Juan Mayorga met à jour, d’entrée de jeu, l’intertextualité avec le cinéma burlesque américain. Un cinéma nourri de nombreux procédés comiques récurrents, repris par le texte dramatique : « les splasticks, les running gags, le procédé de l’attente après un gag, etc.[5] ». Parmi ces procédés, il est une figure qui nous intéresse tout particulièrement ici : la répétition. De fait, avant d’analyser plus précisément les running gags évoqués plus haut, force est de constater que l’humour de certaines séquences repose sur la répétition de répliques ou d’actions, reprises à l’identique ou presque. On peut citer, à titre d’exemple, cette séquence où, attribuant le désintérêt du public et des producteurs à une certaine uniformisation de leurs deux silhouettes, le Gros décide de s’imposer un régime grossissant et le Petit un régime amaigrissant. La drôlerie de cette scène, déjà présente dans le déphasage entre causes et effets et dans le décalage par rapport aux attentes du récepteur[6], est également alimentée par tout un jeu autour du bruit de la corde à sauter avec laquelle Le Petit est censé faire de l’exercice. Jeu phonique sur le « Toc - Toc - Toc… » de la corde, sur l’exhibition de l’illusion dramatique (le bruit de la corde est produit par le Gros), mais aussi jeu sur la répétition de cette succession de sonorités. D’abord émise par le Gros : « Tú concéntrate en la frecuencia de los saltos. (Con la boca, hace el ruido de una comba que golpea el suelo :) Toc - Toc - Toc[7] », elle est reprise par le Petit sur le mode de la perplexité puis de la soudaine compréhension. La répétition trouve ici sa charge comique dans la variation de ton autour d’une simple suite d’onomatopées mais aussi dans la signification et l’importance disproportionnée qu’elle acquiert ainsi.
En effet, si le ton péremptoire du Gros la met en exergue, l’incompréhension du Petit face à cette suite de sons peut tout d’abord donner l’impression que le personnage a conscience du décalage entre le sens dont le Gros charge ces onomatopées et la signification somme toute mécanique qu’elles ont. À la lumière de la réplique suivante : « Creo que lo he entendido : Toc - Toc - Toc[8] », le récepteur comprend que ce décalage est le fait des deux personnages. C’est la complicité ainsi instaurée par le dramaturge qui vient provoquer le sourire, voire le rire, du « spectalecteur ». Une complicité marquée par la répétition du même son et de la même suite de sons qui rythme toute la séquence. Après le passage évoqué ici, le « Toc - Toc - Toc » va être repris deux fois : la première par le Petit, qui, emporté par le rythme des « Toc - Toc… », semble ne plus pouvoir s’arrêter et est stoppé net par le Gros, ressort traditionnel des duos comiques. La seconde, en accompagnement d’une vraie corde à sauter avec laquelle s’entraîne le Petit. Et ici, le comique se trouve accentué par un double jeu autour des « Toc - Toc ». D’une part, si ceux-ci ponctuent l’effort du Petit, ils sont le fait du Gros qui les accompagne de grosses bouchées de glace, établissant une équivalence drolatique entre l’effort physique de l’un et la gourmandise déguisée en contrainte de l’autre : « Gordo(Con la boca llena.) Deja de hablar, estamos en un entrenamiento. Toc - Toc[9]… » D’autre part, par un glissement alimenté précisément par les jeux de répétition et par le rythme ainsi produit, le Petit passe du « Toc - Toc » initial à la répétition d’une expression porteuse de sens, mais qui semble le laisser tout aussi perplexe :
Gordo – Toc - Toc - Toc…
Flaco – « Sarna con gusto no pica ». (No lo entiende.) « Sarna con gusto no pica ». (No lo entiende.) « Sarna con gusto no pica[10]… »
Juan Mayorga instaure ainsi un nouveau décalage qui prolonge celui que nous avons analysé, prêtant aux onomatopées une signification aussi grande qu’à l’expression lexicalisée reprise par le Petit. Quant à la répétition d’un même jeu d’acteur – marquée, humoristiquement, par la répétition de la même didascalie – face à deux situations différentes, elle joue sur l’effet toujours comique du personnage burlesque reproduisant une action ou répétant un propos sans rien y comprendre.
Si les jeux de répétition évoqués ici concernent une même séquence, Monique Martinez cite également, parmi les ressorts comiques exploités par Juan Mayorga, les running gags[11] qui jouent, eux, sur des répétitions à travers tout le texte, participant de l’humour mais aussi de l’énergie qui traverse la pièce : « Dans le mot “running”, il y a l’idée de quelque chose qui court comme le furet, une notion de mouvement […] Le “running gag”, c’est quelque chose qui avance, qui traverse le récit de part en part[12] ». Effectivement, on retrouve, dans C’est moi le gros et toi le petit, la répétition, à travers toute la pièce, de plusieurs sketches ou motifs récurrents. On peut citer notamment le motif – là encore en prise directe avec le cinéma burlesque[13] – de la porte, cette porte sur laquelle se centre régulièrement l’attention des personnages et qui est le plus souvent cause de situations saugrenues ou rocambolesques prêtant à rire ou à sourire. Et ce d’autant plus que cette fameuse porte, limite symbolique dont le franchissement final marque l’émancipation du Petit et la disparition du duo en tant que tel, est étroitement liée au personnage invisible du groom, objet de la jalousie du Gros. Une jalousie qui renvoie au ressort comique de la relation triangulaire, avec son lot de suspicion, de scènes de jalousie et de portes qui claquent – à ceci près qu’ici, le schéma est perverti : la porte ne claque quasiment pas, l’amant supposé ne l’est pas, ce jeu sur les codes étant générateur d’humour et de complicité entre le dramaturge et le récepteur.
En tout état de cause, dès le début de la pièce, la porte ouvre sur une potentielle infidélité et donne lieu à une scène de jalousie qui puise son humour à la fois dans l’objet du délit (une empreinte de chaussure n’appartenant pas au Gros, devant la porte) ; dans le débat qui s’ensuit sur le type de chaussure, débat en décalage avec la jalousie au coeur de l’échange ; et dans la recherche d’une semelle qui correspondrait, parmi toutes celles que le Gros et le Petit rangent sous le lit. Cette recherche renvoie à tout un jeu scénique basé sur la disparité entre les deux personnages puisque, nous dit la didascalie, « le Gros est aussi ordonné que le Petit est désordonné », mais joue aussi de l’incongruité de la situation et de la répétition du même geste puisque les deux protagonistes comparent la tache « avec les semelles de toutes les chaussures qui se trouvent sous le lit[14] ». Immédiatement après cela, quelqu’un frappe à la porte, créant un effet de surprise pour le spectateur et pour les personnages qui, autre topique du burlesque, en tombent sur le cul… Ce qui introduit tout un sketch, attendu, nourri de jeux de scène tels que la collision des deux personnages lors de leur mouvement vers la porte ; le jeu du Gros s’adressant directement au public pour, dans un geste complice, faire signe qu’il lui faut bien de la patience pour supporter la maladresse du Petit ; la porte claquée au nez de l’interlocuteur invisible, cependant que le Petit se contorsionne pour tenter de voir qui est là… Mais, si elle coïncide d’abord avec la plus pure tradition du burlesque, au fil du texte, la répétition de ce motif va s’imposer comme l’un des moteurs d’un comique qui se fait chaque fois plus grinçant.
La porte acquiert en effet un statut ambigu, source de comique mais aussi tentation irrépressible pour le Petit dont elle suggère l’enfermement :
(Se da cuenta de que el Gordo se ha dormido. El Flaco mira la puerta. Sigilosamente, se mueve hacia ella. A un respingo del Gordo reacciona el Flaco volviendo a la cama de un salto. Falsa alarma : el Gordo ronca. El Flacova a volver a intentarlo[15].)
Ici, si la charge comique reste présente avec le jeu scénique du Petit – sa marche de Sioux pour atteindre la porte, les ronflements du Gros… – elle commence à virer à l’aigre, et le malaise que peut susciter le rapport dominé-dominant qui semble se cacher derrière le souci de discrétion du Petit va se confirmer avec les différentes occurrences de la porte. Elle s’impose progressivement comme une obsession des deux personnages, une obsession rendue drôle par la récurrence du motif et des stratégies de diversion mises en place par le Gros pour éloigner le Petit de cet espace dangereux pour leur couple (de l’autorité arbitraire à la « tête de chiot abandonné par son maître[16] », en passant par le rappel du contrat qui les unit et par toutes sortes de ruses destinées à détourner l’attention du Petit telles que la bonne vieille bataille de tartes à la crème). Mais c’est une obsession qui confine aussi à la maladie, qui adopte des formes de plus en plus violentes, puisque les deux personnages en viennent aux mains puis à un combat à l’arme blanche. Si, dans son traitement, ce conflit autour de la porte est burlesque, il n’en reste pas moins qu’il laisse au « spectalecteur » une impression de malaise générée par la violence qui va de pair avec l’humour, et ce, même si finalement le Petit parvient à partir. Il le fait d’ailleurs sur un dernier pied de nez empreint de drôlerie : cette porte, qu’il a eu tant de mal à franchir, il la repasse une dernière fois, jouant de l’effet de surprise créé sur le Gros et sur le récepteur et désamorçant la jalousie du Gros, ce qui vient dynamiter une bonne partie de ce qui précède :
Gordo – ¿Recepción ? Póngame con el nuevo botones. […] ¿Con QUIÉN estás ocup… ?
(Se interrumpe al ver que el Flaco vuelve a entrar.)
Flaco – Y una cosa má. Ese gesto que haces. (Lo hace.) Ese gesto no es tuyo. Es de Chaplin. (Se va.)[17]
Ainsi, cette porte, qui a été l’un des fils rouges de la pièce et l’un des moteurs du comique[18] notamment par son caractère récurrent, vient clore la pièce dans un dernier trait d’humour et une dernière référence au burlesque. Référence liée au jeu même du personnage qui réapparaît, moqueur, alors qu’on le croyait parti, mais aussi à l’allusion directe que fait le Petit à Chaplin, rappelant si besoin était au « spectalecteur » l’intertextualité sur laquelle se tisse la pièce, le modèle qu’elle répète.
Vingt fois sur le métier… : le grippage de la mécanique du rire
Nous avons vu comment Juan Mayorga joue sur les ressorts traditionnels du burlesque et notamment sur sa capacité à se prévaloir du comique de répétition. S’il use de procédés parfois rebattus, nous avons néanmoins signalé certaines des distorsions qu’il leur impose, redoublant par là l’effet de comique et poussant le « spectalecteur » à s’interroger sur ces schémas devenus classiques. S’il ouvre par là-même le champ des possibles de gags parfois éculés, il explore aussi un éventail bien plus large de jeux autour de la notion de répétition.
Cette notion est d’ailleurs à prendre dans sa double acception de réitération et de travail scénique. En effet, parmi les répliques qui se répètent inlassablement, il y a « Texte ou action ? ». En forme de jeu, rendue drôle d’abord par son caractère mécanique (les personnages à ces mots adoptent des postures de films de Laurel et Hardy), ensuite par la tension qu’elle instaure entre les personnages (le Gros se prêtant au jeu avec entrain et le Petit à contrecoeur), cette réplique sert d’amorce à la répétition de sketches tirés de la filmographie de Laurel et Hardy. Elle aussi alimente ainsi le comique de la pièce par son caractère répétitif et par le matériau burlesque dont elle composée. Elle l’alimente également par la théorisation solennelle et le caractère inutile de ces répétitions incessantes, « au cas où », que le Gros impose au Petit. Une inutilité qui teinte le sourire d’une certaine ironie :
Gordo – ¿Palabras o movimientos ?
(El Flaco se encoge de hombros.)
Gordo – Tú te lo tomas a guasa, pero estar preparados es parte del trabajo de un actor. Estar preparados es lo más importante. El resto apenas tiene importancia[19].
Le comique de ces répétitions réside aussi dans leur caractère mécanique : il s’agit en effet de répéter, inlassablement, à l’identique, des gestes et des répliques. Les uns et les autres sont d’ailleurs mécanisés au point de pouvoir être joués séparément, comme en témoigne la réplique « Texte ou action ? ». Comme en témoigne aussi l’action scénique, qui nous montre effectivement des répétitions dissociant texte et action :
(Inmóviles, con los acentos de Laurel y Hardy, repasan el diálogo […].)
Flaco – ¿Y tú ? ¿Cómo subirás tú ?
Gordo – Ya me las arreglaré. Tu sólo preocúpate de no caerte. (Silencio.) Pero ¿qué demonios haces ? (Silencio.) Vamos a intentarlo otra vez. (Silencio.) ¿Ya estás arriba ? ¿Qué ves ? […]
Gordo – Ni una coma, ¿te das cuenta ? Ni un matiz nos hemos comido. ¿Vamos con los movimientos ?
(El Flaco acepta. Mudos, el Gordo y el Flaco repasan los movimientos correspondientes al diálogo que acaban de pronunciar[20].)
S’instaure donc une forme supplémentaire d’humour née du décalage entre le statisme des personnages (marqué notamment par des silences lorsqu’il devrait y avoir un mouvement) et le dynamisme de l’échange (certaines répliques faisant office de didascalies implicites). Née aussi du jeu muet des acteurs qui vient, à contretemps, compléter le texte dit précédemment. On peut d’ailleurs noter que le mot choisi, en espagnol, par Juan Mayorga pour désigner le jeu des acteurs, « movimientos », mouvements, traduit cette mécanisation puisque l’on n’est plus dans le jeu ni même dans l’action mais dans la simple répétitions de mouvements… et de mots (« palabras »).
Néanmoins, ce jeu de répétition des répétitions est lui aussi progressivement gangrené par le désir du Petit de sortir de cette circularité aliénante. Certes, cette subversion prête à sourire, essentiellement par le contraste qu’elle instaure entre les deux personnages : « (Lo dice con el acento de Hardy ; el Flaco no responde con el de Laurel) », ou encore « (El Flaco los interpreta con tanta desgana como entusiasmo sobra al Gordo[21]) ». Mais elle ne laisse cependant pas d’interroger la figure même de la répétition, sa dimension mécanique et son caractère cyclique, confinant à l’enfermement stérile (puisque les répétitions des deux personnages ne débouchent sur aucune concrétisation, sur aucun contrat). Derrière le rire, on voit ainsi sourdre la possibilité d’une dimension tragique, disant la circularité de l’existence de ces personnages, leur emprisonnement dans des schémas préétablis et la difficulté d’en sortir : « (Como un autómata, el Gordo vuelve a su posición original. Por costumbre, el Flaco vuelve a la suya[22]) ». Une difficulté que semble trahir la répétition d’un autre jeu de scène : le Gros se repasse, incessamment, compulsivement, de vieux films de Laurel et Hardy, en doublant la voix de Laurel. Ce doublage – qui est encore une forme de dédoublement, de jeu de miroir – interroge sur le mode du burlesque l’identité du personnage, son autonomie par rapport à ce double qui a peut-être été lui… ou pas. De fait, le doute quant à l’identité réelle des personnages est introduit dès la didascalie aperturale qui nous dit que « cette pièce peut être interprétée par un grand costaud et un petit maigre ou par deux hommes de même corpulence. Il pourrait même arriver que celui que l’on appelle “Le Petit” soit plus gros que celui que l’on appelle “Le Gros”[23] ».
Cette didascalie induit donc, dès les premiers mots du texte, la problématique du même et de l’autre, de la répétition et de sa subversion, puisqu’elle offre au metteur en scène la liberté de reproduire un modèle clairement identifié ou au contraire de produire un effet supplémentaire de surprise et de comique en créant un déphasage entre un référent explicite et son traitement. Pourtant, au fil du texte, c’est la figure de la répétition, la reprise du modèle qui semble s’imposer. Nous avons évoqué les procédés de répétition de répliques, de reprises de gags dans la veine burlesque, nous avons vu comment C’est moi le gros et toi le petit se structure autour d’un jeu de répétition des répétitions des films de Laurel et Hardy. Nous pourrions également signaler l’effet comique et l’ancrage dans la tradition du duo créés par l’évocation récurrente de titres de films tournés par le Gros et le Petit. Cette évocation donne une véritable impression de litanie d’où ne ressort que le chiffre deux : « Gordo – […] Aparte de que “Dos en apuros” es tres semanas más antigua. Entre “Dos en apuros” y “Dos en Alaska”, hicimos “Dos en el casino”, “Dos en el Oeste” y “Dos en Varsovia”[24] ». Une litanie dont une fois de plus le Petit va chercher à briser le caractère systématique et comique : « Flaco – […]“Dos en la catedral”, “Dos en la Casa Blanca”… Me da pena, ¿y qué ? “Dos en la luna”, “Dos en raya”… ¿Hasta la muerte ? “Dos por cientos”, “Dos al cuadrado”[25] ». Il fait ainsi ressortir, sur le mode de l’ironie cette fois, en inventant des titres absurdes jouant sur le chiffre deux, l’ineptie de cette répétition constante d’un même modèle, faisant éclater celui-ci ou, à tout le moins, y ouvrant une brèche.
Au-delà des phénomènes plus ou moins ponctuels de répétition qui traversent la pièce de Juan Mayorga, celle-ci se présente donc comme la répétition d’un modèle : le burlesque, et plus exactement le cinéma burlesque américain. Celui-ci devient, par les divers procédés que nous avons déjà signalés comme par l’omniprésence de références à cet univers, le référentiel exclusif de la pièce. Ce jeu de répétition intertextuelle inscrit, si l’on en croit Wilfried Floeck, la pièce dans une écriture de la postmodernité :
Dans la postmodernité, le doute sur la capacité de l’art à pouvoir reconstruire de manière artistique une réalité extérieure et, surtout, à pouvoir mettre à jour des vérités ontologiques et existentielles ou à pouvoir faire clairement la différence entre réalité et fiction est beaucoup plus radical. […] Par conséquent, la littérature et le théâtre postmodernes renoncent, parfois, à toute fonction référentielle. De cette expérience peuvent naître des textes qui renvoient uniquement à la réalité de formes esthétiques antérieures ou à leur propre réalité esthétique[26].
Nous avons déjà largement montré les liens étroits qu’entretient la pièce de Juan Mayorga avec le cinéma burlesque américain et avec le comique à la Laurel et Hardy. Nous ne nous étendrons pas davantage sur ce procédé de répétition, si ce n’est pour en signaler le caractère fractal, autre trait distinctif des écritures postmodernes. Pour définir le « fractal », Florence Baillet affirme qu’il s’agit de « l’ensemble […] reconstitué dans le détail, où chaque partie peut constituer un nouveau tout, donnant l’idée d’une série infinie[27] ». Dans C’est moi le gros et toi le petit, le motif de la répétition burlesque fait l’objet d’un tel traitement, les répétitions au creux d’une séquence fonctionnant comme un miroir tendu aux répétitions à l’échelle de la pièce, qui elles-mêmes font écho à la répétition d’un modèle générique.
Le motif de la répétition est donc reproduit à tous les niveaux et il n’est pas jusqu’aux subversions qu’il subit qui ne fassent l’objet d’un traitement similaire. Nous avons évoqué, en effet, les distorsions qui s’introduisent progressivement dans les jeux de répétition des répliques, dans les running gags, dans le jeu sur les répétitions des scènes des films… C’est finalement le modèle burlesque lui-même qui se trouve remis en question, au même titre que tout autre modèle, puisque la répétition tend à devenir enfermement. Ce jeu de miroirs déformants permet ainsi un jeu non seulement intertextuel mais aussi métatextuel, l’écriture réfléchissant sur elle-même dans un procédé, là encore, très prisé des écritures postmodernes qui s’en prévalent pour interroger tout à la fois le processus créatif et la condition de l’homme postmoderne :
Ces texte mettent en scène les défauts de la société et la crise existentielle du sujet contemporain soumis à une vie malheureuse, arbitraire et souvent absurde. Mais ils vont plus loin encore dans leur questionnement, étant nourris de subversions intertextuelles, de mélange entre éléments populaires […] et savants (comme l’usage du contrepoint et du cultisme), d’aspects métatextuels et parodiques[28].
Dans la pièce de Mayorga, où derrière le comique burlesque percent, nous l’avons vu, une dimension tragique mais aussi une certaine ironie – voire une ironie certaine ! –, c’est finalement à un sourire en demi-teinte qu’aboutit cette écriture de la répétition. Le comique du burlesque est dynamité de l’intérieur, la reproduction de la forme aboutissant à son questionnement et à sa remise en question.
Il convient de signaler, pour clore cette réflexion, une dernière subversion. Certes, le modèle cinématographique apparaît, notamment à travers le traitement répétitif qui en est fait, figé et statique ; certes, on peut lire cela comme une traduction dramatique de l’enfermement de l’homme dans des schémas préexistants et du rejet postmoderne des modèles préétablis et des grandes valeurs… Et pourtant ! Pourtant, il y a, dans le texte, quelques indices d’une ouverture possible, d’une éventuelle échappatoire. Cette porte entrebâillée, c’est celle que pousse le Petit à la fin, faisant exploser le carcan. C’est aussi l’ouverture laissée par l’écriture didascalique de la pièce, la liberté et le dynamisme qu’elle oppose à un texte qui dit l’enfermement et le statisme. En effet, si dans ce texte les didascalies sont globalement très précises, certaines, comme la didascalie aperturale, laissent une grande latitude au metteur en scène. D’autres, les plus nombreuses, mettent en mouvement le corps de l’acteur, un corps dont elles nous disent qu’il boxe, qu’il mime les actions d’un film, qu’il saute à la corde ou engloutit des sucreries, lui donnant des directions mais lui accordant, autour d’un thème donné, la liberté de broder, d’improviser. Enfin, certaines indications peuvent paraître peu fonctionnelles – « ([…] Falsa alarma : el Gordo ronca. […] De pronto, el Gordo despierta asustado, salta de la cama como si fuera un lugar peligroso y mira al Flaco con desconfianza. Está a un lado de la cama, como en una trinchera.)[29] » –, accordant en réalité une plus grande licence aux différents artistes, metteur en scène et acteurs. C’est d’ailleurs le cas dès le début de la pièce où, suite à la proposition du Gros : « Texte ou action », les deux personnages « prennent leur position d’origine »… Mais quelle est-elle ? Bien que cette didascalie soit répétée à plusieurs reprises, jamais la « position d’origine » n’est explicitée. Le texte didascalique semble donc suggérer que le théâtre, spectacle vivant par excellence, est peut-être l’un des derniers espaces de vraie liberté, un lieu privilégié pour questionner l’écriture et le monde (présent notamment dans le rapport dominé-dominant qui lie les deux personnages ou dans la problématique intérieur-extérieur que dessine la porte…), pour lutter aussi contre l’immobilisme et l’enfermement dans des formes préexistantes… Néanmoins, la fin de la pièce donne à penser que cet espoir est fragile, que l’ouverture n’est qu’un entrebâillement et qu’il convient d’en prendre soin. En effet, si le Petit s’émancipe et parvient enfin à quitter l’univers clos dans lequel il vivait avec le Gros, il fait, nous l’avons vu, une réapparition pour lancer une dernière pique au Gros… Une dernière ? Le fait même qu’il éprouve le besoin de revenir, que son propos soit encore placé sous le signe de la référence au cinéma burlesque et à Chaplin, laissent ce final ouvert. Peut-être son départ final est-il définitif. Peut-être aussi, de provocation en provocation et de retour en arrière en retour en arrière, le Petit ne se détachera-t-il pas si facilement de ce qui fut son monde…
Ainsi, ce que nous présente C’est moi le gros et toi le petit, c’est une pièce dont l’humour repose sur la répétition, mais une répétition au carré ou même au cube, jouant sur tous les niveaux de la pièce. Cette réflexion – en miroir ! – permet de mettre à jour un rire qui n’est pas aussi mécanique qu’il pourrait y paraître à première vue, loin s’en faut. Un rire parfois tragi-comique qui se teinte d’une réflexion sur l’acte de création et d’un questionnement sur la condition de l’individu postmoderne. Un rire parodique et ironique, placé sous le signe de la problématique du double et du moi, de la répétition et de l’individualisation. Un rire, enfin, profondément empreint de la quête identitaire du Petit, quête qui n’est pas sans échos chez le « spectalecteur ».
Parties annexes
Note biographique
Agnès Surbezy
Maître de conférences à l’Université de Toulouse II, Agnès Surbezy a soutenu en 2003 une thèse sur le théâtre postmoderne espagnol. Auteure d’articles sur le théâtre contemporain hispanique parus notamment dans Visor (Espagne), Hisponia (Belgique), Revista peruana de literatura, Estreno et Gestos, elle est co-auteure d’un manuel sur Le théâtre contemporain espagnol et a traduit plusieurs pièces hispaniques dans la collection Nouvelles Scènes (Presses universitaires du Mirail).
Notes
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[1]
Gilles Lipovetsky, L’ère du vide. Essais sur l’individualisme contemporain, 1993.
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[2]
Juan Mayorga, El gordo y el flaco / C’est moi le gros et toi le petit, dans Juan Mayorga et Marcelo Lobera, El gordo y el flaco / C’est moi le gros et toi le petit et El grito de los espejos / Le cri des miroirs, 2005, p. 24-89. Nous citerons ce texte en espagnol en reportant la traduction en français en note de bas de page, de manière à rester au plus près du texte d’origine et de l’intentionnalité de l’auteur.
La pièce de Juan Mayorga met en scène le Gros et le Petit, couple qui ne laisse pas de rappeler au « spectalecteur » le duo mythique de Laurel et Hardy. Enfermés dans une chambre d’hôtel, ces deux personnages, acteurs sur le retour, essaient de continuer… de continuer à être ensemble, à répéter leurs sketches, à espérer un improbable producteur. Mais peu à peu, l’apparente complicité se fissure et des failles se font jour, posant la question du double et de l’altérité jusqu’à l’affranchissement du Petit face au Gros.
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[3]
Concernant la postmodernité et les métarécits, on peut se reporter à l’ouvrage de Jean-François Lyotard, La condition postmoderne. Rapport sur le savoir, 1994. Il développe, en effet, dans ce volume, la notion de métarécits ou grands récits, pour désigner les grands textes fondateurs, les pensées prises pour vraies qui ont, jusqu’à la catastrophe d’Auschwitz et l’entrée dans la postmodernité, régenté notre vision du monde (grandes religions, mouvements idéologiques tels que le marxisme). Avec l’avènement de l’ère postmoderne, ces grands récits qui faisaient l’Histoire ont laissé place aux microrécits, aux histoires, placées désormais sous le signe de l’individualisme. Cette évolution constitue, comme de juste, une révolution intellectuelle et culturelle qui n’a pas manqué de se répercuter sur les écritures postmodernes et notamment sur les textes dramatiques, qui se sont eux aussi recentrés sur le quotidien, l’anecdotique, la petite histoire de personnages souvent narcissiques ou, à tout le moins, en quête d’identité. Les répercussions de ces changements paradigmatiques sur le théâtre actuel espagnol sont un des aspects que nous avons développés dans notre thèse doctorale, « Être ou ne pas être postmoderne… Théâtre espagnol actuel et postmodernité », soutenue en 2003 à l’Université de Toulouse-le Mirail (à paraître).
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[4]
En espagnol, El Gordo et El Flaco désignent en effet Laurel et Hardy.
-
[5]
Monique Martinez Thomas, « Au-delà des miroirs : la transgression des images », dans Juan Mayorga et Marcelo Lobera, El gordo y el flaco et El grito de los espejos, op. cit., p. 10.
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[6]
De fait, nos sociétés postmodernes sont nourries, comme le montrent notamment Gianni Vattimo (La société transparente, 1990) ou Gilles Lipovetsky (L’ère du vide, op. cit.), par le culte de l’image, une image qui se doit, s’agissant des individus, d’être lisse… et mince. Aussi, voir le Gros faire un régime grossissant ne laisse pas de faire sourire. Sans doute davantage que de voir le maigre (traduction littérale de El Flaco) faire un régime amincissant. Cet effet trouve alors son ressort comique moins dans l’incongruité de la situation (hélas fréquente !) que dans le contraste qui s’établit entre les deux personnages.
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[7]
« Toi, concentre-toi sur la fréquence de tes sauts. (Avec la bouche, il imite le bruit d’une corde à sauter qui frappe le sol :) Toc - Toc - Toc… » (Juan Mayorga, El gordo y el flaco / C’est moi le gros et toi le petit, op. cit., p. 50-51).
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[8]
« Je crois que j’ai compris : Toc - Toc - Toc… » (ibid., p. 52-53).
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[9]
« Le Gros –(La bouche pleine.) Arrête de parler, on est en plein entraînement. Toc - Toc… » (id.).
-
[10]
« Le Gros – Toc - Toc - Toc… / Le Petit – « On n’a rien sans rien ». (Il ne comprend pas.) « On n’a rien sans rien ». (Il ne comprend pas.) « On n’a rien sans… » (id.).
-
[11]
Monique Martinez Thomas, « Au-delà des miroirs : la transgression des images, loc. cit. », p. 10.
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[12]
Philippe Roussel, « Approche interdisciplinaire d’un running gag : la porte du bureau dans Le cameraman de Buster Keaton », 1999, p. 452.
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[13]
Motif comique exploité aussi bien par le théâtre (on peut penser, par exemple, au vaudeville) que par le cinéma, la porte qui claque, se referme sur le nez du personnage, le repousse ou, vitrée, ne cesse d’être cassée… ne laisse pas de nous faire penser au cinéma burlesque américain et à des films tels que Le caméraman de Buster Keaton, dans lequel elle est également au centre de toute une série de running gags.
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[14]
Juan Mayorga, El gordo y el flaco / C’est moi le gros et toi le petit, op. cit., p. 27.
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[15]
« (Il se rend compte que Le Gros s’est endormi. Le Petit regarde la porte. Précautionneusement, il se glisse vers elle. Un sursaut du Gros fait réagir Le Petit qui regagne le lit d’un bond. Fausse alarme : Le Gros ronfle. Le Petit va réessayer.) » (ibid., p. 36-37).
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[16]
Ibid., p. 71.
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[17]
« Le Gros – La réception ? Passez-moi le nouveau groom. […] Avec QUI tu es occup… ? / (Il s’interrompt en voyant que Le Petit rentre de nouveau.) / Le Petit – Encore une chose. Ce geste que tu fais. (Il le fait.) Ce geste n’est pas à toi. Il est à Chaplin. (Il s’en va.) » (ibid., p. 88-89).
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[18]
Nous ne pouvons le faire ici, mais une réflexion similaire pourrait être menée sur les autres objets présents dans la scénographie, en particulier les cassettes de films de Laurel et Hardy ou encore le téléphone, dont la sonnerie est contrefaite par les personnages et qui laisse miroiter un contrat pour un rôle de naufragé sur une île déserte, contrat impossible puisque requérant un seul acteur, mais ô combien symbolique !
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[19]
« Le Gros – Texte ou action ? / (Le Petit hausse les épaules.) / Le Gros – Tu le prends à la rigolade, mais être bien préparé fait partie du travail de l’acteur. Être bien préparé est le plus important. Le reste a peu d’importance ». (Juan Mayorga, El gordo y el flaco / C’est moi le gros et toi le petit, op. cit., p. 40-41).
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[20]
« (Immobiles, avec l’accent de Laurel et Hardy, ils répètent les dialogues […].) / Le Petit – Et toi ? Comment tu vas escalader, toi ? / Le Gros – Je me débrouillerai. Toi, occupe-toi seulement de ne pas tomber. (Silence.) Mais, qu’est-ce que tu fabriques ? (Silence.) On va réessayer. (Silence.) Ça y est, tu es en haut ? Qu’est-ce que tu vois ? […] / Le Gros – Pas une virgule, tu te rends compte ? On n’a même pas sauté une virgule. On passe à l’action ? / (Le Petit accepte. Muets, Le Gros et Le Petit révisent les mouvements correspondant au dialogue qu’ils viennent de dire) » (ibid., p. 40-43).
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[21]
« (Il le dit avec l’accent de Hardy ; Le Petit ne répond pas avec celui de Laurel.) » ou encore « (Le Petit interprète la scène avec un manque d’envie égal à l’excès d’enthousiasme du Gros […]) » (ibid., p. 62-63).
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[22]
« (Comme un automate, Le Gros reprend sa position d’origine. Par habitude, Le Petit reprend la sienne. […] » (ibid., p. 44-45)
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[23]
Ibid., p. 25.
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[24]
« Le Gros – […] Sans compter que “Deux dans le pétrin” est plus vieux de trois semaines. Entre “Deux dans la pétrin” et “Deux en Alaska”, on a fait “Deux au casino”, “Deux dans le Far West” et “Deux à Varsovie” » (ibid., p. 62-63). Outre le caractère anaphorique et répétitif de « Deux », force est de constater ici que la multiplication des titres de films tournés en un laps de temps restreint renforce l’impression de mécanisation des personnages évoquée précédemment. Ils ne sont plus que des machines à tourner des films taillés sur le même patron…
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[25]
« Le Petit – […]“Deux dans la cathédrale”, “Deux à la Maison Blanche”… Ça me fait de la peine, et alors ? “Deux sur la lune”, “Deux en ligne”… Jusqu’à notre mort ? “Deux pour cent”, “Deux au carré”… » (ibid., p. 70-71).
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[26]
Wilfried Floeck, « Teatro y posmodernidad en España », 1999, p. 159 (nous traduisons).
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[27]
Florence Baillet, « Les paradoxes des fragments synthétiques mülleriens », 2002, p. 65.
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[28]
Vance R. Holloway, El posmodernismo y otras tendencias de la novela española (1967-1995), 1999, p. 124 (nous traduisons).
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[29]
« (Fausse alarme : Le Gros ronfle. Le Petit va réessayer. Soudain, Le Gros se réveille, effrayé, saute du lit comme s’il s’agissait d’un lieu dangereux et regarde Le Petit avec défiance. Il se tient à côté du lit, comme s’il était dans une tranchée) » (Juan Mayorga, El gordo y el flaco / C’est moi le gros et toi le petit, op. cit., p. 36-37).
Références
- Baillet, Florence, « Les paradoxes des fragments synthétiques mülleriens », Études théâtrales (n° 24/25), Louvain, Centre d’études théâtrales de l’Université catholique de Louvain / Institut d’études théâtrales Paris III, 2002, p. 59-66.
- Floeck, Wilfried, « Teatro y posmodernidad en España », dans Martha T. Halsey et Phyllis Zatlin (éd.), Entre actos : diálogos sobre teatro español entre siglos, University Park (Penn.), Estreno, 1999, p. 157-164.
- Holloway, Vance R., El posmodernismo y otras tendencias de la novela española (1967-1995), Madrid, Fundamentos, 1999.
- Lipovetsky, Gilles, L’ère du vide. Essais sur l’individualisme contemporain, Paris, Gallimard (Folio essais), 1993.
- Lyotard, Jean-François, La condition postmoderne. Rapport sur le savoir, Paris, Éditions de Minuit, 1994.
- Mayorga Juan, et Marcelo Lobera, El gordo y el flaco / C’est moi le gros et toi le petit et El grito de los espejos / Le cri des miroirs, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 2005, p. 24-89.
- Roussel, Philippe, « Approche interdisciplinaire d’un running gag : la porte du bureau dans Le cameraman de Buster Keaton », Paris, DEA de Médiologie, 1999.
- Vattimo, Gianni, La société transparente, Paris, Desclée de Brouwer, 1990.