
Volume 42, numéro 1-2, 2018 Collections arctiques Arctic Collections Sous la direction de Gwénaële Guigon et Aurélie Maire
Sommaire (14 articles)
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Mot du Directeur
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Note de la rédaction
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Introduction aux collections arctiques et à la muséologie : Présentations, diffusions et interprétations / Introduction to Arctic Collections and Museology: Presentations, Disseminations, and Interpretations
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Shared Inuit Culture: European Museums and Arctic Communities
Cunera Buijs
p. 37–59
RésuméEN :
Since the 1980s, museum professionals have increasingly committed to sharing collections with the descendants of people and communities from whom the collected artifacts originated. As late as the 1970s, Indigenous people were not considered stakeholders in the collection and exhibition of their own cultural artifacts. Recently, however, exemplary cases of collection sharing have occurred in North American and European museums. Museums have become “contact zones” as issues of decolonization have come to the fore. This article discusses the sharing of material culture and “double” position of anthropological museums, rooted in their own (colonial) history but in possession of another’s culture. Ownership issues, access, and ethics are important for local communities but not always easy for museums to negotiate. This article describes thirteen examples of collaborative partnerships between museums, for the most part large, urban, European, postcolonial institutions, and Arctic Indigenous communities. I argue that open communication, collection research, and an increasing level of co-curation are prerequisites for changes in museum practice, and these changes will benefit both the institutions and the communities involved.
FR :
Depuis les vingt dernières années, les conservateurs des musées se sont de plus en plus engagés à partager les collections avec les descendants des peuples et des communautés dont elles sont originaires. L’histoire des collections et la documentation des relations avec les communautés autochtones concernées montrent qu’à la fin des années 1970, les portes de la plupart des musées étaient fermées aux Peuples autochtones. Depuis, cependant, les choses se sont bien améliorées aux États-Unis et au Canada, les musées devenant des « zones de contact » où la décolonisation constitue une priorité. Dans cet article, je discute du partage de la culture matérielle et de la « double » position particulière dans laquelle se trouvent les musées. Les questions de propriété et d’éthique sont très importantes pour les communautés locales et ne sont pas toujours évidentes pour les musées. Une comparaison entre un cas difficile des années 1970 (l’exigence, de la part du gouvernement groenlandais, que les Pays-Bas lui restituent des restes humains présumés inuit) et les développements récents d’une coopération accrue entre les musées et les communautés arctiques peut projeter un nouvel éclairage sur ce sujet controversé.
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Call Me Angakkuq: Captain George Comer and the Inuit of Qatiktalik
Bernadette Driscoll Engelstad
p. 61–86
RésuméEN :
Through many years of dedicated fieldwork in the Canadian Arctic, Captain George Comer laid a solid foundation for the future of museum anthropology. With the support of Franz Boas, Captain Comer—a New England whaling master with little formal schooling—assembled an extensive collection of Inuit ethnographic and archaeological artifacts, photographs, sound recordings, and natural history specimens for the American Museum of Natural History in New York City, as well as major museums in Berlin, Ottawa, and Philadelphia. This article examines a remarkable segment of that collection, the production of Inuit facial casts—portraits of over two hundred men, women, and children—created by Comer at Qatiktalik (Cape Fullerton), a whaling site on the west coast of Hudson Bay. In tandem with photographs taken by Comer, Geraldine Moodie, and others at the time, these facial casts comprise a vital chapter of Inuit social history, preserving the memory of individuals and families who lived, worked, and traded at Qatiktalik. Accompanied by detailed biographical documentation prepared by Captain Comer, this extraordinary collection acknowledges the significance of personhood, a key concept in modern anthropological theory, and provides meaningful insight into the early social, cultural, and political history of Nunavut in the Canadian Arctic.
FR :
Après de nombreuses années sur le terrain dans l’Arctique canadien, le capitaine George Comer a jeté des bases solides pour l’avenir de l’anthropologie muséale. Avec le soutien de Franz Boas, le capitaine Comer – un maître baleinier de la Nouvelle-Angleterre peu scolarisé – a rassemblé une vaste collection d’artefacts ethnographiques et archéologiques inuit, de photographies, d’enregistrements sonores et de spécimens d’histoire naturelle pour le compte du musée américain d’histoire naturelle de New York, ainsi que pour les grands musées de Berlin, Ottawa et Philadelphie. Cet article examine une section remarquable de cette collection, la production de moulages faciaux inuit – portraits de plus de 200 hommes, femmes et enfants – créés par Comer à Qatiktalik (cap Fullerton), un site de chasse à la baleine sur la côte ouest de la baie d’Hudson. En lien avec les photographies prises par Gerald Comer, Geraldine Moodie et d’autres à l’époque, ces moulages de visage constituent un chapitre vital de l’histoire sociale des Inuits, préservant la mémoire des individus et des familles qui ont vécu, travaillé et échangé à Qatiktalik. Accompagné d’une documentation biographique détaillée préparée par le capitaine Comer, cette collection extraordinaire reconnaît l’importance de l’identité individuelle, concept clé de la théorie anthropologique moderne, et fournit un aperçu significatif de l’histoire sociale, culturelle et politique du Nunavut dans l’Arctique canadien.
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Taitsumanialuk, les collections de l’Arctique canadien et du Groenland dans les musées français au XIXe siècle
Gwénaële Guigon
p. 87–115
RésuméFR :
Dès le XIXe siècle, des artefacts arctiques figurent dans les inventaires des premiers musées publics français. Un certain nombre provenait de cabinets de curiosités privés, nationalisés lors de la Révolution française. Si la France n’a jamais manifesté d’intérêt particulier et encore moins de velléité territoriale sur les zones arctiques, on trouve néanmoins des objets Inuit conservés dans nombre d’institutions muséales sur le territoire. Ces collections sont arrivées sur le sol français grâce à l’intérêt de particuliers, collectionneurs et voyageurs, ainsi qu’aux échanges avec des institutions étrangères. En petit nombre au sein des musées encyclopédiques, elles ne furent que très rarement étudiées, bien qu’exposées régulièrement au public. Achetées à des intermédiaires et souvent vendues sous le terme de pièces « eskimos », malgré quelques exceptions notoires, une grande majorité fut enregistrée dans les inventaires sans que le contexte d’origine n’apparaisse. Il faut véritablement attendre le dernier tiers du XIXe siècle pour découvrir, en France, des artefacts reproduits dans des revues scientifiques à travers le prisme de l’anthropologie physique et surtout de l’archéologie. La collection la plus vaste et la plus connue se trouve aujourd’hui conservée au musée du quai Branly-Jacques Chirac, à Paris. Pourtant, une dizaine de villes françaises possède également des collections issues des régions polaires. La majorité de ces objets est arrivée en France avant la Seconde Guerre mondiale. Il faut cependant attendre les années 2000 pour appréhender l’ampleur de ces collections sur tout le territoire français, malgrés des recherches isolées et des initiatives particulières qui ont mis en lumière localement ces objets. Cet article vise à analyser et documenter les collections arctiques du XIXe siècle en France, dans une perspective historique.
EN :
As early as the nineteenth century, Arctic artifacts were included in the inventories of the first French public museums. A number of them came from private curiosity cabinets, nationalized during the French Revolution. Although France has never shown any particular interest and even less territorial interest in the Arctic regions, there are nonetheless Inuit objects preserved in many French museum institutions. These collections have arrived on French soil thanks to the interest of individuals, collectors and travellers as well as exchanges with foreign institutions. In small numbers within encyclopedic museums, they were only very rarely studied, although they were regularly displayed to the public. Purchased from intermediaries and often sold under as “Eskimo” pieces, despite some notable exceptions, a large majority were recorded in the inventories without the original context appearing. It was not until the last third of the nineteenth century that artefacts reproduced in scientific journals were discovered in France, through the prism of physical anthropology and especially archaeology. The largest and most famous collection is now kept at the Quai Branly-Jacques Chirac Museum in Paris, but about ten French cities also have collections from the polar regions. The majority of these objects arrived in France before the Second World War. However, it was not until the 2000s that the scope of these collections was understood throughout France, despite isolated research and specific initiatives that brought these objects to light locally. This article aims to analyse and document the nineteenth century Arctic collections in France from a historical perspective.
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The Holmberg Collection of Skin Clothing from Kodiak Island at the National Museum of Denmark
Anne Lisbeth Schmidt
p. 117–136
RésuméEN :
In 1851, during his stay in what was then Russian America, Finnish scientist Henrik Johan Holmberg (1818–1864) collected a unique assortment of some four hundred objects primarily from the Indigenous people of southern Alaska and the Northwest Coast. The collection included skin clothing, dress ornaments, hunting equipment, household tools, and ceremonial objects from the Koniags (of Kodiak Island off the coast of South Alaska) and the Tlingit (along the Pacific Northwest Coast). On his journey home in 1852, Holmberg visited Copenhagen and the Museum of Northern Antiquities (later the National Museum of Denmark). There, he met Christian Jürgensen Thomsen (1788–1865), museum director, Danish antiquarian, and creator of the so-called “three-period system,” which divided early human history into the Stone Age, Bronze Age, and Iron Age. Last, but not least, Thomsen founded the first ethnographic museum in the world. Thomsen, who never missed an opportunity to increase the museum’s collections, succeeded in buying Holmberg’s collection from him, perhaps because of Holmberg’s poor finances. The Holmberg Collection consists of unique specimens from a period before the Indigenous population was forever influenced by the cultural changes that were introduced with the early Russian trade. This article focuses the Holmberg Collection of skin clothing, which differed considerably from that of the more northerly Inuit people. The collection is part of the Danish National Museum’s interdisciplinary research initiative Northern Worlds, under the subproject “Skin Clothing from the North,” which includes the museum’s large collection of skin clothing from circumpolar Indigenous people.
FR :
En 1851, pendant son séjour dans ce qui était alors l’Amérique russe, Henrik Johan Holmberg (1818-1864), un scientifique finlandais, recueillit un assortiment unique d’environ 400 objets provenant principalement des Peuples autochtones du sud de l’Alaska et de la côte nord-ouest. La collection comprenait des vêtements en peau, des parures de vêtements, du matériel de chasse, des outils ménagers et des objets cérémoniels des Koniags (de l’île Kodiak au large du sud de l’Alaska) et des Tlingit (le long de la côte nord-ouest du Pacifique). Lors de son voyage de retour chez lui en 1852, Holmberg se rendit à Copenhague et au musée des antiquités du nord (devenu plus tard le Musée national du Danemark). Il y rencontra Christian Jürgensen Thomsen (1788-1865), directeur de musée, antiquaire danois et créateur du prétendu « système à trois périodes », qui divisait la première histoire de l’humanité en deux âges : l’âge de pierre, l’âge de bronze et l’âge de fer. Enfin, et surtout, Thomsen fonda le premier musée ethnographique au monde. Thomsen, qui n’a jamais manqué d’augmenter les collections du musée, réussit à racheter la collection de Holmberg, peut-être en raison de la situation financière précaire de Holmberg. La collection Holmberg est composée de spécimens uniques datant d’une période antérieure à l’influence prévisible de la population autochtone sur les changements culturels introduits lors du commerce précoce de la Russie. Cet article se concentre sur la collection de vêtements en peau Holmberg, qui diffère considérablement de celle des Inuit plus septentrionaux. La collection fait partie de l’initiative de recherche interdisciplinaire Northern World du Musée national danois, dans le cadre du sous-projet Vêtements de peau du Nord, qui comprend une vaste collection de vêtements de peau des Peuples autochtones circumpolaires.
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Objets ethnographiques associés aux Inuit du Labrador exhibés en Europe en 1880
France Rivet
p. 137–159
RésuméFR :
À l’été 1880, huit Inuit du nord du Labrador acceptent de partir pour l’Europe où, contre rémunération, ils exhiberont leurs personnes et leur culture devant le public de grandes villes. Leur recruteur, le Norvégien Johan Adrian Jacobsen, profite de son séjour à Hebron et dans le fjord de Nachvak pour recueillir dans les sépultures une collection d’artefacts qu’il expose avec les Inuit. Malheureusement, aucun des Inuit ne reverra sa terre natale, le groupe ayant été anéanti par la variole moins de quatre mois après son arrivée en Europe. En 2014, la publication du livre Sur les traces d’Abraham Ulrikab dévoile la présence, dans les collections de musées français et allemands, non seulement des restes humains des Inuit, mais aussi d’un ensemble d’artefacts assemblé par Jacobsen, ainsi que de divers objets ayant appartenus aux Inuit. Ce texte vise à actualiser la nature des objets, l’historique de leur collecte et leur acquisition par les musées européens.
EN :
In the summer of 1880, eight Inuit from northern Labrador agreed to travel to Europe where, in exchange for payment, they were to exhibit themselves and their culture to the public of large cities. Their recruiter, the Norwegian Johan Adrian Jacobsen, took advantage of his stay in Hebron and Nachvak Fjord to collect a series of grave artifacts, which he exhibited with the Inuit. Unfortunately, none of the Inuit returned to their native land. Smallpox wiped out all of them less than four months after their arrival on European soil. In 2014 publication of the book In the Footsteps of Abraham Ulrikab revealed that French and German museum collections contain not only the human remains of the Inuit but also a set of artifacts assembled by Jacobsen and various objects that belonged to the Inuit. This article is intended to be an update on the nature of the objects and how the European museums collected and acquired them.
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The Iliviaq Returns to Gjoa Haven: Interrogating Objects from Roald Amundsen’s Collection in the Nattilik Heritage Centre
Tone Wang
p. 161–178
RésuméEN :
Museum collaboration and object return has been discussed and examined widely in practice and literature in recent decades (e.g. Fienup-Riordan 1998; Peers and Brown 2003; Basu 2017). This paper examines an instance of object return, a wooden bowl. The bowl was part of the Roald Amundsen/Gjoa Haven Collection held at the Museum of Cultural History in Oslo, Norway, and returned to the Nattilik Heritage Centre in Gjoa Haven in 2013. Upon its return to Gjoa Haven, the bowl became the focus of interrogations and discussions to determine how it might be related to local heritage and traditional knowledge. This paper explores how this particular instance of memory work might contribute to our understanding of the processes at play in repatriation activities, or, to quote Paul Basu, the bowl’s “entanglements of ongoing social, spatial, temporal and material trajectories and relationships, dislocations and relocations” (2017, 2) as seen from the perspective of Gjoa Haven residents.
FR :
La collaboration des musées et le retour d’objets ont été largement discutés et examinés dans la pratique et la littérature au cours des dernières décennies (Fienrup Rordan 1998 ; Peers and Brown 2003 ; Basu 2017). Cet article examine l’exemple d’un retour d’objet : un bol en bois. Le bol faisait partie de la collection Roald Amundsen/Gjoa Haven, conservée au musée d’histoire culturelle à Oslo, en Norvège, qui est retournée au Centre Nattilik Heritage de Gjoa Haven, en 2013. À son retour à Gjoa Haven, le bol a fait l’objet d’interrogations et de discussions visant à déterminer son lien avec le patrimoine et les savoirs traditionnels. L’objectif de cet article est d’explorer comment ce cas particulier de travail mémoriel pourrait contribuer à notre compréhension des processus en jeu dans les activités de rapatriement ou pour citer Basu à la suite de cet examen particulier, des « enchevêtrements d’enchevêtrements sociaux, spatiaux, temporels de la société Bow et trajectoires et relations matérielles, dislocations et délocalisations » (2017, 2) du point de vue de Gjoa Haven.
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Deux musées pour un héritage : Les collections unangax̂ de l’île d’Unga
Marie-Amélie Salabelle, Claire Alix et Allison Y. McLain
p. 179–207
RésuméFR :
Cet article s’intéresse aux destins parallèles de deux collections unangax̂ (aléoutes) constituées dans la seconde moitié du XIXe siècle par le Français Alphonse Pinart et l’Américain William Dall. Fondées sur une rivalité entre ces deux personnages, ces collections, issues de leurs explorations respectives de cavernes funéraires de l’île d’Unga, forment un ensemble d’objets aussi unique qu’énigmatique, divisé entre le Château-Musée de Boulogne-sur-Mer (France) et le National Museum of Natural History de la Smithsonian Institution (États-Unis). Les auteures retracent ici le parcours singulier de ces objets qui, malgré leur caractère exceptionnel, restent à ce jour encore très peu étudiés.
EN :
This article looks at the parallel fates of two Unangax̂ (Aleut) collections from the second half of the nineteenth century made by French Alphonse Pinart and American William Dall. Their explorations of Unga Island burial caves, partly driven by their rivalry, resulted in collections of unique and enigmatic objects divided between the Château-Musée de Boulogne-sur-Mer (France) and the Smithsonian Institution National Museum of Natural History (United States). In this article, the authors retrace the particular course of these objects, which, despite their exceptional character, remain understudied.
Hors thème / Off theme
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“If Only It Makes Them Pretty”: Tattooing in “Prompted” Inuit Drawings
Jamie Jelinski
p. 211–241
RésuméEN :
Tattooing was a widespread cultural practice amongst Inuit women for millennia before the first Europeans arrived in the Arctic. However, by the nineteenth century, colonial, imperial, and missionary mechanisms led to the decline of many pre-contact Inuit belief systems and practices, including tattooing. Although tattooing had begun to disappear from Inuit bodies by the late nineteenth century, it did not vanish altogether. Beginning in the early twentieth century, a number of Inuit, aided by newly introduced Western materials, transferred their knowledge of tattooing from skin to paper to create pictorial records of the pre-contact custom. This article begins by establishing an early precedent for post-contact Inuit drawing through the examination of work depicting tattooing collected by Reverend Edmund James Peck and Diamond Jenness. It then moves on to consider a group of twelve drawings collected by Danish-Inuk explorer and anthropologist Knud Rasmussen during the Fifth Thule Expedition. These drawings occupy a precarious place alongside other types of Inuit visual culture as they were originally collected as ethnographic artifacts, thus denying their aesthetic importance and interior Inuit cultural value. When reconsidered, these early drawings demonstrate the Inuit ability to appropriate Western materials as a form of both cultural endurance and record. Consequently, I argue that such drawings allowed tattooing to persist, albeit pictorially, despite the overall decline of the practice in its bodily form.
FR :
Le tatouage a été, durant des millénaires, une pratique culturelle très répandue chez les femmes inuit avant l’arrivée des premiers Européens dans l’Arctique. Cependant, au XIXe siècle, des mécanismes coloniaux, impériaux et missionnaires ont provoqué le déclin de nombreux systèmes de croyances et de pratiques inuit antérieures au contact, y compris le tatouage. Bien que ce dernier ait commencé à s’effacer des corps des Inuit à la fin du XIXe siècle, il n’a pas totalement disparu. À partir du début du XXe siècle, un certain nombre d’Inuit, aidés en cela par des matériaux occidentaux nouvellement introduits, ont transféré leur connaissance du tatouage de la peau au papier afin de créer des témoignages picturaux des coutumes ayant précédé le contact. Cet article commence par établir un précédent antérieur aux dessins post-contact chez les Inuit en examinant des travaux qui décrivent des tatouages recueillis par le révérend Edmund James Peck et par Diamond Jenness. Il considère ensuite un ensemble de douze dessins collectés par l’explorateur et anthropologue dano-inuk Knud Rasmussen durant la cinquième expédition de Thulé. Ces dessins occupent une place incertaine à côté d’autres types de culture visuelle inuit, car ils ont été à l’origine recueillis en tant qu’artefacts ethnographiques, ce qui leur retire, par conséquent, leur importance esthétique à l’intérieur des valeurs culturelles inuit. Lorsqu’on les reconsidère, ces dessins anciens témoignent de l’aptitude des Inuit à s’approprier des matériaux occidentaux en tant que forme, à la fois, de longévité culturelle et d’archives. Nous avançons ici que de tels dessins ont permis au tatouage de perdurer, quoique sous forme picturale, malgré le déclin général de cette pratique sous sa forme corporelle.
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“Some Account of an Extraordinary Traveller”: Using Virtual Tours to Access Remote Heritage Sites of Inuit Cultural Knowledge
Peter C. Dawson, Cecilia Porter, Denis Gadbois, Darren Keith, Colleen Hughes et Luke Suluk
p. 243–268
RésuméEN :
The use of panoramic images to transport viewers to remote geographic locations can be traced back to the panorama theatres of nineteenth-century Victorian London. More recently, Google’s World Wonders Project has utilized 360-degree panospheres to capture some of the world’s most famous heritage sites. Using arrows that demarcate a defined path of movement, users can virtually tour these sites by “jumping” from one panosphere to the next. Arvia’juaq National Historic site is located near the community of Arviat. Although the heritage value of the site is highly significant, Arvia’juaq sees few national and international visitors because of its remote location. For a variety of reasons, some local Inuit also find it difficult to regularly visit the site even though it is an important source of cultural identity. In this paper, we explore how panospheres can be used to create interactive virtual tours of heritage sites like Arvia’juaq. Although there are some caveats, we argue that virtual reality (VR) tours are potentially powerful tools for connecting people to heritage sites that might otherwise be inaccessible. This has important implications for raising awareness of polar heritage and its significance to Indigenous people, as well as national and international audiences.
FR :
L’utilisation d’images panoramiques pour transporter les téléspectateurs dans des emplacements géographiques éloignés remonte aux théâtres panoramiques de Londres victorienne du XIXe siècle. Plus récemment, le projet World Wonders de Google a utilisé des panosphéros à 360 degrés pour capturer certains des sites patrimoniaux les plus célèbres du monde. En utilisant des flèches qui délimitent un chemin de déplacement défini, les utilisateurs peuvent virtuellement visiter ces sites en « sautant » d’une panosphère à l’autre. Le lieu historique national Arvia’juaq est situé près de la communauté d’Arviat. Bien que la valeur patrimoniale du site soit très significative, Arvia’juaq voit peu de visiteurs nationaux et internationaux en raison de son emplacement éloigné. Pour diverses raisons, certains Inuits locaux éprouvent également de la difficulté à visiter régulièrement le site même s’il existe en tant que source importante d’identité culturelle. Dans cet article, nous explorons la façon dont les panosphères peuvent être utilisées pour créer des visites virtuelles interactives de sites patrimoniaux comme Arvia’juaq. Bien qu’il y ait quelques réserves, nous soutenons que VR Tours sont potentiellement des outils puissants pour relier des personnes à des sites patrimoniaux qui pourraient autrement être inaccessibles. Cela a des répercussions importantes sur la sensibilisation au patrimoine polaire et a son importance pour les Peuples autochtones, ainsi que pour le public national et international.
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Exploring Potential Archaeological Expressions of Nonbinary Gender in Pre-Contact Inuit Contexts
Meghan Walley
p. 269–289
RésuméEN :
In recent years, gender has factored heavily into the study of Inuit archaeological remains. Frequently, archaeologists have used diagnostic men’s and women’s tools to “see” gender in the archaeological record. However, recent anthropological literature attests to the existence of nonbinary gender categories in Inuit tradition. While the concept of nonbinary gender is not new in anthropological literature, it has not commonly been translated into meaningful archaeological research. Although many archaeologists studying Inuit gender have acknowledged the possibility of Inuit gender fluidity, virtually no archaeological research has directly addressed Inuit nonbinary gender. In this article, I discuss the anthropological concept of nonbinary gender and its diversity within Inuit culture, and then propose a variety of ways in which archaeologists conducting research on pre-contact Inuit gender might begin to study sites and materials within an interpretive framework that is more inclusive of these gender categories. These approaches include examination of artifacts, studies of the spatial distribution of sites, and re-examination of mortuary data. Through this work, I emphasize that gender occurs as a complex system rather than as two or three distinct sets of static social roles and that archaeologists need to adjust our approaches to past genders in order to see them through a culturally specific and meaningful lens.
FR :
Au cours des dernières années, le genre a été fortement pris en compte dans l’étude des vestiges archéologiques Inuit. Fréquemment, les archéologues ont utilisé des outils de diagnostic masculins et féminins pour « voir » le genre dans les archives archéologiques Cependant, la littérature anthropologique récente témoigne de l’existence de catégories de genre non binaires dans la tradition Inuit. Bien que le concept de genre non-binaire ne soit pas nouveau dans la littérature anthropologique, il ne s’est généralement pas traduit en une recherche archéologique significative. Si de nombreux archéologues qui étudient le genre inuit ont bien reconnu la possibilité d’une fluidité inuit entre les sexes, pratiquement aucune recherche archéologique n’a abordé directement le genre non binaire inuit. Dans cet article, je discute du concept anthropologique du genre non-binaire et de sa diversité au sein de la culture inuit, puis je propose diverses façons pour les archéologues de mener des recherches sur le genre inuit avant le contact incluant ces catégories de genre. Ces approches comprennent l’examen des artefacts, les études de la distribution spatiale des sites et le réexamen des données mortuaires. À travers ce travail, je souligne que le genre se présente comme un système complexe plutôt que comme deux ou trois ensembles distincts de rôles sociaux statiques et que les archéologues doivent ajuster leurs approches aux genres passés afin de les considérer dans une optique culturellement spécifique et significative.