Résumés
Résumé
Si Marie Chassaing (1873), Amour et gloire (1897) et Le Maître de l’heure (1897) sont désormais oubliés, ces romans ne sont pas dépourvus d’intérêt. Tous trois montrent que l’insurrection de 1871 a donné lieu chez ses commentateurs métropolitains non pas à un récit national univoque, mais à des mémoires plurielles. Leurs auteurs s’inspirent des codes du roman historique à la Walter Scott. Ils mettent en scène à côté de personnages fictifs, des acteurs de l’insurrection : le bachaga Mohamed El Mokrani chez Baude de Maurceley et Le Roux, et, chez Badin, Jacques Chassaing, le « tueur de lions » popularisé par le Journal des chasseurs. En recourant au genre romanesque, les trois auteurs façonnent des versions divergentes des événements de 1871. Baude de Maurceley et Le Roux rendent hommage à Mokrani vaincu et imputent la responsabilité de l’insurrection au gouvernement républicain. Adolphe Badin, lui, réécrit l’histoire de Jacques Chassaing en dressant un réquisitoire du Second Empire et en faisant du déclenchement de l’insurrection l’ultime faute politique de ce régime. Les trois romans montrent que l’insurrection de 1871 s’est prolongée en métropole avec une bataille historiographique et politique. Badin, Baude de Maurceley et Le Roux se rejoignent sur un point : ils mettent en scène des victoires françaises qu’ils attribuent à l’union des compatriotes à l’heure du danger. Tout en valorisant l’union nationale, ils envisagent des avenirs différents pour la présence française en Algérie. Baude de Maurceley reste évasif sur ce point par contraste avec Badin et Le Roux qui ont écrit leurs récits dans la perspective des colons. L’auteur de Marie Chassaing, en particulier, montre la répression de l’insurrection comme le début d’une nouvelle ère, celle d’une véritable colonisation : les terres algériennes représenteront un dédommagement au pays vaincu par l’Allemagne et dépossédé de plusieurs départements métropolitains.
Abstract
While Marie Chassaing (1873), Amour et gloire (1897) and Le Maître de l’heure (1897) are now forgotten, these novels are not devoid of interest. The three show that the 1871 revolt incited its observers in mainland France to produce, not an unequivocal national account, but rather multivoiced memories. Their authors draw inspiration from the codes of the historical novel in the vein of Walter Scott. They portray alongside fictional characters, the revolt’s protagonists: the bachaga Mohamed El Mokrani in Baude de Maurceley and Le Roux, and in Badin, Jacques Chassaing, the ‘lion killer’ popularized by the Journal des Chasseurs. In appealing to the fictional genre, the three authors fashion different versions of the 1871 events. Baude de Maurceley and Le Roux pay homage to the vanquished Mokrani and assign responsibility for the revolt to the Republican government. As for Adolphe Badin, he rewrites the story of Jacques Chassaing as an indictment of the Second Empire and makes the outbreak of the revolt the final political error of this regime. The three novels demonstrate that the 1871 revolt continued in mainland France as a historiographical and political battle. Badin, Baude de Maurceley and Le Roux share one common point: in their accounts, the French victories are attributed to the unity of compatriots in the hour of danger. While exalting national unity, they envisage different futures for the French presence in Algeria. Baude de Maurceley remains coy on this point whereas Badin and Le Roux write their works from the perspective of the colonists. The author of Marie Chassaing points to the repression of the revolt as the start of a new era: an era of genuine colonisation. Algerian lands will stand as compensation to the country conquered by Germany and stripped of several French departments.