Résumés
Résumé
L’oeuvre littéraire de Boubacar Boris Diop comporte une importante dimension métapoétique qui interroge constamment l’ensemble du processus d’écriture. Dès le premier roman, Le temps de Tamango, une mise en abyme de l’écriture est prise à la fois dans les plis de sa propre élaboration et dans le dialogue avec un autre texte – Tamango de Mérimée. Après cette oeuvre inaugurale, dans la facture de laquelle Mongo Beti a vu une admirable « expérimentation esthétique », les romans suivants n’ont cessé de revenir à la question, classique et inépuisable, du sens, et non pas seulement des moyens, de l’écriture littéraire. D’un roman à l’autre, le lecteur reconnaît quelques préoccupations récurrentes, dont le rapport entre la fiction et la réalité (plus particulièrement l’histoire politique) et l’effet de la littérature sur ses acteurs. À travers ces aspects, Boubacar Boris Diop semble explorer la crise du littéraire sur fond de crise politique à l’ère des indépendances. Cependant, cette interrogation n’est pas celle d’un sociologue, mais celle d’un créateur de fiction. Le titre de cette contribution peut ainsi se lire de deux manières qui se complètent. C’est, d’une part, la trace du mouvement subtil qui va de la question littéraire, en tant que périmètre d’un problème relatif à la production écrite, à l’oeuvre en tant que résultat et reflet de cette production. D’autre part, c’est aussi l’étude de la façon dont cette question littéraire, déplacée au sein même de l’oeuvre par le truchement de la mise en abyme, s’y révèle à la fois problématique et féconde, permettant d’approcher, de façon plus large, la place de la littérature dans les sociétés africaines postcoloniales.
Abstract
Boubacar Boris Diop’s literary work comprises an important metapoetical dimension that constantly questions the entire writing process. From the first novel, Le Temps de Tamango, a mise en abyme of the writing is caught in the fold of both its elaboration and in the dialogue with another text, Mérimée’s Tamango. After that inaugural work, whose construction Mongo Beti deemed an admirable ‘aesthetic experimentation’, the following novels never ceased returning to the topic, classic and inexhaustible, of the meaning, and not only the means, of literary writing. From one novel to the next, the reader recognizes some recurring concerns, such as the relationship between fiction and reality (especially political history) and the effect of literature on its actors. Through these considerations, Boubacar Boris Diop seems to explore the literary crisis against the backdrop of the political crisis of the era of independence. However, this is not the investigation of a sociologist, but that of a creator of fiction. Hence, the title of this contribution can be read in two complementary ways. On the one hand, it is the trace of the subtle move from the literary question (as it marks out an issue of the written production), to the work as a result and reflection of this production. On the other hand, it is also the study of how this literary question, shifted within the work by the means of the mise en abyme, reveals itself problematic and fecund, thus allowing a broader approach to the role of literature in postcolonial African societies.