Résumés
Résumé
Au cours des années 1722-1724, quelques savants de l’Académie royale des Inscriptions et Belles-Lettres – l’abbé Anselme, l’abbé Sallier, Louis Jean Lévesque de Pouilly et Nicolas Fréret notamment – débattirent vigoureusement du degré de foi qu’il fallait accorder aux oeuvres historiques anciennes lorsque les rares témoignages contemporains des faits qu’elles relataient et sur lesquels elles auraient pu s’appuyer paraissaient douteux, comme c’était le cas pour les quatre premiers siècles de Rome. En nous penchant sur les textes de cette querelle, nous réfléchissons au rôle tenu à l’époque par le témoignage dans la connaissance historique, aux conséquences de sa raréfaction, de sa fragmentation, voire de son absence : comment l’histoire, qui est testis temporum selon le magnifique éloge de Cicéron (De Oratore 2, 9), peut-elle subsister sans testis ? Nous éclairons par cet examen, dans la transition lente d’une pratique littéraire de l’histoire à sa pratique scientifique, le rôle des monuments, des traités, des lois, des relevés astronomiques et des autres archives qui ne transcrivent ni témoignage ni mémoire personnelle.
Abstract
During the years 1722-1724, several savants of the Académie royale des Inscriptions et Belles-Lettres – notably Abbé Anselme, Abbé Sallier, Louis Jean Lévesque de Pouilly and Nicolas Fréret – vigorously debated just how much credence to accord the ancient historical works when the rare contemporaneous factual testimonies and their underpinning “facts” seemed questionable, as was the case in the first four centuries of Rome. Our study of the texts examines the role of testimony during that period in relation to historical knowledge, the consequences of its rarity, its fragmentation, even its absence: how could history, which is testis temporum, according to Cicero’s magnificent eulogy (De Oratore 2, 9), subsist without testis? Through this examination we elucidate, in the slow transition from a literary to a scientific practice of history, the role of monuments, treatises, astronomy reports and other archives that convey neither testimony nor personal accounts.