Résumés
Résumé
Les romans-mémoires, genre particulièrement en vogue en France dans le premier xviiie siècle, ont la particularité de faire parler un narrateur témoin de sa propre histoire. La valeur du témoignage proposé au lecteur repose alors sur l’articulation entre l’implication du mémorialiste et la prise de distance temporelle et réflexive rendue possible par les caractéristiques narratives du genre. Dans l’Histoire d’une Grecque moderne (1740) cependant, le mémorialiste, qui raconte une de ses « erreurs » – une passion hors norme –, insiste volontiers sur la précarité et les biais qui altèrent son témoignage. L’Histoire d’une Grecque moderne participe ainsi d’un changement d’horizon heuristique du témoignage : à mesure qu’il perd son rôle dans l’élaboration de la vérité, le témoignage se constitue en autre objet de connaissance, susceptible de ne plus délivrer un savoir que sur le témoin lui-même. Nous nous proposons dans cet article d’étudier les conséquences éthico-narratives de ce nouveau régime de l’erreur.
Abstract
Romans-mémoires, a genre particularly in vogue in the first half of the 18th century in France, have the distinction of giving a voice to a narrator who is witness to his own history. The value of the testimony offered to the reader hinges on the interplay between the memorialist’s involvement and the temporal and reflexive distance made possible by the narrative characteristics of the genre. However, in The Greek Girl’s Story (1740) the memorialist, who recounts one of his “errors” – an extraordinary passion – readily acknowledges the precariousness and biases that alter his testimony. The Greek Girl’s Story thus participates in a heuristic change in the value of a testimony. No longer playing a role in unfurling the truth, the testimony becomes another object of knowledge, one that yields knowledge only on the witness himself. This article examines the ethical-narrative consequences of this new regime of error.