Présentation. Présences de Gilles Marcotte[Notice]

  • Micheline Cambron,
  • Pierre Popovic et
  • le comité de rédaction

Gilles Marcotte (1925-2015). La parenthèse de l’histoire littéraire s’est durement refermée à l’automne 2015, sur une oeuvre ample qui s’étend de l’après-guerre à la fin des années 2000, oeuvre hybride, à bien des égards atypique, à la fois journalistique et universitaire, critique et littéraire, dont l’impact sur la littérature au Québec est considérable. Qu’une gerbe d’études, d’essais et de témoignages s’intitule Présences de Gilles Marcotte n’est que pure justice. L’auteur de Présence de la critique, du Roman à l’imparfait et de La prose de Rimbaud qui présentait son travail comme un accompagnement, qu’il se soit agi de suivre des jeunes chercheurs dans leur progression ou de faire équipage avec l’écriture d’un poème pour l’entendre au plus creux de son murmure, demeure présent à notre travail. Ce numéro réunit des interventions qui mettent en valeur de multiples facettes du travail de Gilles Marcotte. Des liens anciens et nombreux unissent le nom de Gilles Marcotte à Études françaises : il a tenu à la revue la chronique « romans » de 1967 à 1969 puis la chronique « poésie » de 1970 à 1974. Il a également dirigé plusieurs dossiers, « François-Xavier Garneau et son histoire » (vol. 30, no 3, 1994), « Ville, texte, pensée : le xixe siècle, de Montréal à Paris » (vol. 27, no 3, 1991) et codirigé, avec Laurent Mailhot, le dossier « Jacques Poulin » (vol. 21, no 3, 1985). De la vingtaine d’articles qu’il a publiés à la revue, plusieurs, comme « Réjean Ducharme, lecteur de Lautréamont », ont durablement marqué la recherche. Le dernier à y avoir paru, « Professeur de poésie ? » (vol. 41, no 3, 2005) figure dans le dossier « Poésie, enseignement, société » sous la direction de Madeleine Frédéric. En ouverture de ce dossier, un article d’Isabelle Daunais montre en quoi Gilles Marcotte, dont l’oeuvre, absente des anthologies d’essais littéraires et la plupart du temps classée en critique et non en littérature, fut pourtant un authentique quoique « discret » essayiste. Indissociable d’« une aventure de pensée », le travail de lecture et d’interprétation des textes de Marcotte se caractérise, selon elle, par une position singulière, qui le démarque par rapport à ses contemporains : à rebours de tout surplomb, il refuse de faire des textes qu’il lit des « objets » pour les poser plutôt « en interlocuteurs » et se situer lui-même « aux côtés du monde plutôt que face à lui ». Or les poètes (et pas seulement ceux de l’Hexagone qu’il a connus et dont il a souvent été le premier lecteur) auront compté parmi ses interlocuteurs privilégiés. À partir d’une confiance dans les « pouvoirs de l’étrangeté poétique » que Gilles Marcotte formule très tôt et à laquelle il tient jusqu’à ses derniers écrits, François Dumont remonte le fil de ses critiques, depuis les articles de L’Action nationale dans les années 1950 qui ébranlent les certitudes de cette revue, jusqu’aux textes plus récents parus dans Le lecteur de poèmes, en passant par Une littérature qui se fait et La prose de Rimbaud. Cette « étrangeté », par laquelle le poème résiste aux discours, irréductible et précieuse comme les contradictions si importantes à ses yeux, Gilles Marcotte la trouve aussi dans la prose et chez quelques-uns des romanciers qu’il commente dans Le roman à l’imparfait. Marie-Andrée Beaudet aborde quant à elle le rapport que Gilles Marcotte entretient avec la littérature du Québec au xixe siècle ; historien de la littérature, Marcotte a contribué à faire exister dans la lecture contemporaine certains auteurs du xixe siècle, …

Parties annexes