Résumés
Résumé
Cet article a pour but de renouveler notre appréciation des rapports entre poète et mécène au moyen de trois études de cas de textes écrits à la louange des dames entre 1440 et 1534 : Le Champion des dames de Martin Le Franc, dédié à un homme (Philippe le Bon), La Nef des dames vertueuses de Symphorien Champier et Le Palais des nobles Dames de Jehan Du Pré, tous les deux destinés à des femmes (Anne de France et Marguerite de Navarre respectivement). Cette contribution s’intéresse en particulier au rôle que joue l’acte de publication (ou de re-publication) dans l’élaboration de ces rapports sur le plan idéologique aussi bien que matériel. On pourrait s’attendre à des rapports des plus simples dans un corpus où, semblerait-il, on n’a qu’à louer la ou les dames — adopter la rhétorique « pro-féminine » et se proclamer des plus sincères — afin de s’assurer le mécénat. Mais il arrive que les rapports ne se tissent pas de cette manière. En me servant du modèle sociologique des « circuits de pouvoir » proposé par Stewart R. Clegg dans Frameworks of Power (Londres, Sage, 1989), j’essayerai de formuler dans des termes plus précis la circulation du pouvoir dans les rapports poète-mécène dans les apologies du sexe féminin de la fin du Moyen Âge. L’article interrogera la flexibilité et l’espace de négociation issus de cet axe de communication à titre de stratégies potentielles, et, du côté négatif, les risques de résistance — autant de facteurs qui nous permettront d’identifier avec plus de nuance les enjeux de l’acte de publication et le rôle qu’y jouent ses acteurs principaux.
Abstract
This article gives us a new perspective on poet-patron relations through three case studies of texts written in praise of women between 1440 and 1534: Martin Le Franc’s Le Champion des dames, dedicated to a man (Philip the Good), and La Nef des dames vertueuses and Le Palais des nobles Dames by Symphorien Champier and Jehan Du Pré, both directed at women (Anne of France and Margaret of Navarre). This contribution examines the act of publishing (or indeed re-publishing), exploring how the poet-patron relationship proceeds both materially and ideologically. One might expect a straightforward relationship in a corpus where proclamations of pro-feminine rhetoric seemingly suffice to win patronage. But clearly things did not happen so simply. Using the sociological model of “circuits of power” presented by Stewart R. Clegg in Frameworks of Power (London, Sage, 1989), I shall attempt to formulate more precisely the circulation of power in poet-patron relations in late-Medieval defences of women. This article examines the strategic possibilities of flexibility and negotiation opened up by this axis of communication, and, on the negative side, the risk of resistance—all factors which more subtly enunciate the stakes at play in the act of publishing and the roles of its principal agents.