Résumés
Résumé
Ennemie du temps, acharnée à refuser l’existence, l’oeuvre de Cioran est forcément vouée à entretenir un rapport intense et complexe avec l’éternité. Dans ses premiers écrits, Cioran paraît hanté par une éternité salvatrice, qui remédierait par des moments d’extase à la maladie du temps, exprimée dans un lyrisme du dégoût et de l’enlisement. En passant à la langue française et à son classicisme, il donne désormais à son refus du temps une sorte de frappe éternelle : son art devient pour de bon une pratique de la formule, qui dit l’éternité non comme salut mais comme maladie, apparentée à l’insomnie, à l’ennui et au mal de la langue elle-même, cherchant par une clarté digne du Grand Siècle à assumer et à surmonter le déracinement. S’il reste une éternité heureuse, elle se situe au-delà du langage, dans la musique de Bach. Par l’ensemble de ses réflexions sur l’histoire, le temps et l’éternité, le classicisme de Cioran paraît annoncer paradoxalement la postmodernité.
Abstract
Hostile to time, devoted to the refusal of existence, Cioran’s work was destined to maintain an intense and complex relation with the notion of eternity. In his early works, Cioran’s obsession with eternity is linked with the hope of a salvation : time as a sickness, expressed in a lyric style of disgust and depression, could be cured by moments of ecstasy. By shifting to the French language in its classic form, Cioran can now give to his refusal of time an eternal stamp : his art becomes more than ever an art of the formula, which treats eternity not as a possible salvation but as a disease, close to boredom, insomnia and the sickness of language itself, whose classic clarity tries to assume and overcome strangeness. By its reflexions on history, time and eternity, Cioran’s work seems paradoxically to prefigure postmodernity.
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