Résumés
Résumé
Les anglophones du Québec ont toujours constitué une minorité démographique. Or, ce n’est que dans les années 1970 que ce groupe commence à se percevoir comme une minorité linguistique. Alors que la « communauté » anglophone continue aujourd’hui de faire partie des « référents imaginés » du Québec, qu’en est-il exactement des acteurs sociaux qui la composent et qui contribuent eux aussi à la construction du social et des identités québécoises? L’école de langue anglaise, constituant l’un des principaux vecteurs permettant la préservation (ou la création) d’un sentiment d’appartenance au groupe anglophone, remplit-elle ce rôle de socialisation à une appartenance collective? Par une approche constructiviste et interactionniste de la formation des identités, cet article traite du rôle de l’école de langue anglaise dans le processus de construction identitaire des jeunes adultes. Il porte spécifiquement sur la formation de l’identité chez les jeunes adultes qui ont effectué une « traversée des frontières scolaires » – chez les jeunes qui sont passés de l’école secondaire anglaise vers l’université francophone. Par une analyse de 10 entretiens qualitatifs, nous abordons l’expérience sociale et identitaire que retiennent les jeunes issus de l’école anglaise après avoir effectué une mobilité linguistique scolaire, c’est-à-dire après leur passage de l’école anglaise vers l’université francophone (et donc vers de nouveaux rapports d’altérité). Le principal résultat de recherche est le suivant : l’expérience de l’école de langue anglaise dans un Québec majoritairement francophone constituera toujours, chez les jeunes que nous avons interrogés, un repère de leur construction identitaire – un repère duquel ils se rapprocheront ou se distancieront au cours de leur trajectoire biographique.
Abstract
Quebec anglophones have always been a demographic minority, but it was only during the 1970s that they began to perceive themselves as a linguistic minority. While the English “community” continues to be one of the basic components of the “Quebec image”, who exactly are the social actors who make it up and who contribute to the construction of Quebec society and identity? Do Quebec English schools, one of the principal vehicles that allow the perpetuation (or the creation) of a sense of belonging, fulfil a role as socializers in the construction of a collective consciousness? Using a constructivist and interactional approach to the formation of identity, this article looks at the role of English schools in young adults’ identity construction. More specifically, it concentrates on the formation of an identity of young adults who have “crossed academic boundaries”, that is, who have gone from English secondary education to university in French. We analyze, through ten in-depth, the social and identity experiences of young people who have gone through the English school system and have opted for linguistic academic mobility, that is, from English secondary schooling to a French university (and thus toward a new experience of differences). The preliminary conclusions indicate that the experience of English schooling within the context of a French speaking majority in Quebec acts as a frame of reference for the young people we interviewed, which is invoked more or less often according to their life choices.
Parties annexes
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