Résumés
Résumé
Dans un premier temps, cet article brosse brièvement une biographie intellectuelle de Sembène Ousmane pour faire ressortir les rapports entre sa production et sa trajectoire de sujet sénégalais, Ousmane Sembène de son vrai nom, devenu le romancier et cinéaste Sembène Ousmane. Du même coup, à partir d’une lecture de l’évolution des titres de ses romans du français au wolof, du Docker noir (1956) à Xala (1973), il tente d’expliquer son passage de l’écrit à l’écran. Dans un deuxième temps, ce texte montre la cohérence interne de l’oeuvre cinématographique de La Noire de... (1966) à Moolaadé (2004), en passant par Mandabi (1968), Ceddo (1976) ou Camp de Thiaroye (1988). Ces films qui, tous, mettent en scène une crise suite à une rencontre avec l’Autre (ou d’autres), plus spécifiquement l’irruption d’un ou des éléments étrangers dans un corps social jamais un mais multiple, divers dans un procès de confrontation/transformation. Cette double contre-ethnographie, portrait de Soi et portrait de l’Autre, ni Soi ni l’Autre n’étant un, mais multiple, divers/divisé est une poéthique (poétique et éthique) liée à un engagement personnel de l’écrivain-cinéaste pour une redéfinition de l’image de l’Afrique sur les écrans. En ce sens, son travail se fait notamment, du moins implicitement, contre un certain cinéma ethnographique dont Jean Rouch a été la figure de proue avec des documentaires comme Les Maîtres fous (1954) ou Mammy Water (1966).
Abstract
This article begins with a brief sketch of the intellectual biography of Sembène Ousmane (his real name, Ousmane Sembène being his pen name) in order to highlight the connections between his productions and his life as a Senegalese. At the same time, looking at the progression of the titles of his novels from French to Wolof, from Docker noir (1956) to Xala (1973), it attemps to explain his passage from novel writing to filmmaking. Secondly, we look at the internal consistency of his films from La Noire de... (1966) to Moolaadé (2004), with Mandabi (1968), Ceddo (1976) or Camp de Thiaroye (1988) in between. These films all centre around a crisis caused by an encounter with an Other (or Others), more specifically the sudden introduction of multiple foreign elements into a social setting, thereby provoking confrontation/transformation. This double counter-ethnography, portrayal of the Self, portrayal of the Other, neither being One but Many, multiplied/divided is poethics (poetics and ethics) linked to a personal commitment of the writer-filmmaker to redefine the image of Africa on the screen. In this sense, his work runs counter, notably if implicitly, to a certain type of ethnographic film of which Jean Rouch was the figurehead with his documentaries Les Maîtres fous (1954) or Mammy Water (1966).
Parties annexes
Bibliographie
- 1956, Le Docker noir [roman]. Paris, Debresse.
- 1957, O Pays, mon beau peuple! [roman]. Paris, Le Livre contemporain/ Amiot Dumont.
- 1960, Les Bouts de bois de Dieu : Banty Mam Yall [roman]. Paris, Le Livre contemporain/ Amiot Dumont.
- 1960. Indépendances africaines.
- 1961. Sembène Ousmane quitte la France où il vivait depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, et retourne en Afrique.
- 1962. Études cinématographiques au Studio Gorki à Moscou.
- Pour rejoindre son peuple ; passage de l’écrit à l’écran, du roman à la nouvelle, recours au wolof ou au français africain comme langue des titres.
- 1962, Voltaïque [nouvelles]. Paris, Présence africaine (dernières éditions, après le film, La Noire de… : Voltaïque/ La Noire de …).
- 1963. Sembène Ousmane réalise ses premiers films, deux courts métrages: L’Empire Songhaï et Borom Sarret (premier film africain présenté à un festival international, Prix de la première oeuvre au Festival de Tours).
- 1964. Il sort son premier moyen métrage : Niaye.
- 1964, L’Harmattan. Livre I : Référendum [roman]. Paris, Présence africaine, 299 p. (Partie d’un plus large projet jamais terminé, un seul volume publié)
- 1965, Véhi-Ciosane ou Blanche Genèse suivi du Mandat [nouvelles]. Paris, Présence africaine. (dernières éditions, après le film, Mandabi: Le Mandat, précédé de Véhi-Ciosane).
- 1966. Premier long métrage réalisé par Sembène Ousmane, mais diffusé comme moyen métrage, La Noire de… [Prix Jean-Vigo, Tamit d’or, Carthage], et son premier grand succès cinématographique. Le film a été présenté dans divers festivals de films dont le prestigieux Festival de Cannes. Depuis, il est de plus en plus impliqué dans la production cinématographique: Mandabi (1968) [Prix spécial du jury Venise] ; Taaw (1970) ; Emitaï (1971) ; Xala (1974) ; Ceddo (1976) ; Camp de Thiaroye (1988 — co-réalisateur Thierno Faty Sow) ; Guelwaar (1992) ; Faat-Kine (2000) ; Moolaadé (2004).
- 1968. Mandabi, un premier film en wolof (qui existe aussi en version originale titrée, Le Mandat).
- Pour mieux rejoindre son peuple: passage du français au wolof ou d’autres langues africaines, dans les titres notamment des films, mais aussi des livres avec deux exceptions notoires Le Mandat (terme inexistant en wolof), et Le Dernier de l’Empire (fort probablement un vieux projet). Par ailleurs, en mettant entre parenthèses Niaye (1964), version filmique de Véhi-Ciosane (1965), il faut souligner un certain renversement dans le rapport Écrit/ Écran ; désormais des films sont produits avant la publication de leurs livres éponymes Taaw (1970) ; Guelwaar (1993).
- 1973. Xala [roman]. Paris, Présence africaine.
- 1981. Le Dernier de l’Empire (roman sénégalais). Paris, L’Harmattan, 2 vol.
- 1987. Niiwam, suivi de Taaw [nouvelles]. Paris, L’Harmattan.
- 1996. Guelwaar [roman]. Paris, Présence africaine.
- Plusieurs livres et films tant en anglais qu’en français sont entièrement consacrés à l’oeuvre de Sembène Ousmane. Parmi eux on peut souligner :
- Vieyra, Paulin Soumanou, 1972, Ousmane Sembène cinéaste : première période, 1962-1971, Paris, Présence africaine [autre titre : Sembène Ousmane cinéaste].
- Pfaff, Françoise, 1984, The Cinema of Ousmane Sembène. Wesport, Greewood Press.
- Gadjigo, Samba et al., 1993, Ousmane Sembène. Dialogues with Critics and Writers. Amherst, University of Massachusetts Press.
- Nzabatsinda, Anthère, 1996, Normes linguistiques et écriture africaine chez Ousmane Sembène. Toronto, éditions du Gref.
- Diagne, Ismaïla, 2004, Les Sociétés africaines au miroir de Sembène Ousmane. Paris, L’Harmattan.
- Gadjigo, Samba, 2007, Ousmane Sembène, une conscience africaine. Genèse d’un destin hors du commun. Paris, Homnisphères.
- Bush, Annett et Max Annas (dir.), 2008, Ousmane Sembène Interviews. Jackson, University Press of Mississipi.
- Référence Sembène de Yacouba Traoré (2002)
- The Making of Moolaadé de Samba Gadjigo (2004)
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Bio-biliographie & Filmographie annotées de Sembène Ousmane (1923-2007)
[Notez les changements de fréquences et de formes de production avant et après les indépendances africaines (1960); avant et après les premiers longs métrages (1966)]