Éditorial

Musées et aires protégées, à la croisée de multiples enjeux pour l’éducation relative à l’environnement[Notice]

  • Aurélie Zwang et
  • Yves Girault

Selon la définition adoptée à Vienne par le Conseil International des musées (ICOM) en 2007, le musée est « une institution permanente sans but lucratif, au service de la société et de son développement, ouverte au public, qui acquiert, conserve, étudie, expose et transmet le patrimoine matériel et immatériel de l’humanité et de son environnement à des fins d’études, d’éducation et de délectation ». Par essence, l’institution muséale est donc un lieu d’éducation relative à l’environnement (ERE), qu’il s’agisse d’un édifice spécifiquement architecturé, d’un espace clos ou ouvert vers l’extérieur, comme un parc zoologique ou un jardin botanique, ou bien encore d’un « musée territoire » tel que George Henri-Rivière (1989), directeur de l’ICOM de 1948 à 1965, désignait les écomusées. Dans leur grande diversité, les aires patrimonialisées, protégées ou non, favorisant le développement économique ou non, concourent également à ce que l’on nomme, au sens large, la muséologie de l’environnement. Cependant, si depuis les années 2000, ces différentes aires (réserves de biosphère, parcs nationaux, parcs naturels régionales, géoparcs, etc.) développent des activités d’ERE centrées sur l’interprétation et la découverte de la nature, peu de travaux de recherche francophone existent à l’intersection de ces deux champs (Girault, 2019a). Ce numéro thématique portant sur l’ERE au sein des aires protégées et des musées contribue donc à combler ce manque. Les 14 articles des rubriques « Recherches et réflexions » et « Regards » abordent en effet plusieurs grandes questions de la muséologie de l’environnement, dont certaines ont récemment émergé : Dans ce texte d’introduction, nous souhaitons donc présenter chacune des contributions par une mise en perspective des liens qui unissent muséologie et éducation à la nature, aux cultures, aux patrimoines ou aux territoires, toutes constitutives de l’ERE. Dans cette section, nous présentons les liens anciens entre l’ERE et la muséologie de l’environnement ainsi que la formalisation conjointe des deux champs au niveau international, dans les années 1970, par une prise de conscience des problèmes socio-environnementaux. Bien avant que l‘ERE ne soit formalisée comme champ d’action éducative, des expériences de musées locaux en Occident et en Orient avaient pour objectif d’éduquer la population sur les composantes naturelles et culturelles de leur milieu de vie. En France, ce sont les musées cantonaux, dont le premier aurait été créé en 1877 à Lisieux par l’avocat Edmond Groult, qui ont, d’une certaine manière, constitué les prémices de l’ERE dans les musées. En s’inspirant d’institutions similaires existantes en Suisse, en Angleterre, en Belgique, et aux États-Unis, leur objet était de contribuer à « l’instruction des visiteurs » (Groult, 1877) sur le patrimoine de leur territoire. Leur déploiement dans diverses villes de France (dont Pornic, Clermont-Ferrand et Saint-Tropez) ont permis à des élèves et à leurs instituteurs, de découvrir le patrimoine exposé selon quatre thématiques : artistique, scientifique, historique, et agricole et industrielle. Puis, en 1891, fut inauguré le premier musée de plein air : le Parc du Skansen à Stockholm. Son objectif était de lutter contre l’érosion et la disparition des savoirs et techniques traditionnels dues à l’exode rural. Cette expérience influença grandement Georges Henri Rivière qui créa le premier musée de plein air français en 1969 à Marquèze dans le futur parc naturel régional des Landes de Gascogne (créé en 1970). Il trouva dans ce musée, qui avait pour mission de conserver, d’étudier et de transmettre le patrimoine de la Grande Lande en reconstituant le cadre de vie de ses habitants au 19e siècle, « la matière de sa future définition de l’écomusée » (Varine, 2017, p. 21). En Orient, bien que plus tardives et très différentes, des expériences muséales fondées sur une approche …

Parties annexes