Résumés
Résumé
Cet article porte sur la conception et l’enseignement de cours en ligne dans le contexte de l’école secondaire de langue française en Ontario relativement à la reconnaissance de la diversité culturelle et linguistique des élèves. Des entretiens auprès de membres responsables de la conception des cours et du personnel enseignant ont été menés. L’analyse s’intéresse aux paradigmes et aux approches qui guident la conception de cours en ligne, à la flexibilité et à la variété de leurs composantes, à la communication qui y est prévue et à la sensibilité culturelle qui en ressort. Les résultats révèlent des approches et des pratiques qui exploitent peu ou mal certaines composantes disponibles et limitent l’apport même des élèves dans la construction des connaissances et la reconnaissance de la variété linguistique.
Mots-clés :
- conception pédagogique,
- apprentissage en ligne,
- culture,
- langue,
- équité
Corps de l’article
Introduction
L’avènement d’Internet et des outils numériques donne une nouvelle dimension à l’introduction des technologies à l’école, laquelle remonte cependant à bien longtemps. On est ainsi passé de l’utilisation de l’imprimé et des moyens audiovisuels à celle plus récente des dispositifs infonuagiques et intelligents (Gunawardena et al., 2019; Mehta et Dubey, 2021; Saykili, 2018). Dans ce cadre, l’enseignement-apprentissage en ligne, perçu comme une innovation pédagogique à l’ère du numérique (Seok, 2008), a connu une évolution fulgurante partout dans le monde. Cette évolution a atteint son sommet à tous les niveaux d’études avec la survenue de la Covid 19 en mars 2020, occasionnant notamment la fermeture temporaire des écoles. Afin de poursuivre la scolarisation, les systèmes d’éducation ont été contraints de se tourner vers l’apprentissage en ligne, certes avec ses multiples avantages, mais aussi son lot de défis et d’iniquités (UNESCO, 2020).
Au Canada, l’inscription d’un nombre d’élèves à l’enseignement à distance et/ou en ligne augmente régulièrement. En Ontario spécifiquement, l’apprentissage en ligne consiste en des cours de la 9e à la 12e année donnant droit à des crédits et offerts entièrement par Internet, et pour lesquels les élèves ne sont pas tenus d’être à l’école, à l’exception de moments durant lesquels les élèves pourraient devoir passer un examen (ministère de l’Éducation de l’Ontario [MEO], 2022). Des élèves du secondaire suivent leur scolarité en ligne notamment en raison d’enjeux liés à la santé. Il est permis de penser que cette offre de cours ira en s’accentuant dans les prochaines années étant donné l’intérêt du gouvernement Ford à rendre obligatoire la prestation de cours à distance pour les élèves de l’école secondaire malgré des résistances du corps enseignant. En effet, rappelons qu’en 2018, avant la pandémie, le personnel enseignant s’y opposait publiquement évoquant les limites que cela peut représenter, en particulier pour la minorité francophone qui compte sur ses écoles comme lieux de socialisation et de coprésence où peuvent s’épanouir les élèves et interagir en français au quotidien.
Parallèlement à l’essor de l’apprentissage en ligne au Canada, et spécifiquement en Ontario pour les besoins de l’analyse qui suit, se dessine une diversification croissante de la population scolaire. L’augmentation du nombre d’enfants issus de familles immigrantes d’ici 2036 est estimée entre 39 % et 49 % de la population totale d’enfants au Canada, démontrant ainsi l’hétérogénéité qui caractérise désormais les salles de classe d’aujourd’hui et de demain (Lory, 2022). On peut donc postuler que l’apprentissage en ligne touche et touchera une population de plus en plus diversifiée. Toutefois, on en sait encore très peu sur ce qui constitue un enseignement en ligne à une telle population scolaire malgré sa normalisation dans les cursus éducatifs (Lawrence, 2020). Au Canada, les données disponibles sur le sujet portent seulement sur la moitié des programmes d’apprentissage en ligne connus (Barbour et LaBonte, 2022). En outre, celles ayant trait aux aspects culturels de l’enseignement-apprentissage en ligne sont plutôt rares (Gunawardena et al., 2003).
Dans cet article, il s’agit de comprendre les expériences de conception et d’utilisation de cours en ligne à l’école secondaire de langue française en Ontario relativement à la question de la diversité culturelle et linguistique des élèves. Pour ce faire, nous avons étudié les représentations de conceptrices et concepteurs pédagogiques de cours en ligne ainsi que celles du personnel enseignant qui utilisent ces cours dans leurs classes virtuelles. Précisons que les enseignants et enseignantes sont aussi considérés comme des participants et participantes à la conception dans cette étude puisque certains adaptent les cours ou ne les utilisent que partiellement en sélectionnant les éléments qui les intéressent pour compléter les cours dont ils ont la charge.
Dans un premier temps, nous présenterons les enjeux culturels et linguistiques dans l’apprentissage en ligne. Dans un deuxième temps, nous préciserons la méthode de recueil, d’analyse et d’interprétation des données. Dans un troisième temps, nous discuterons des principaux résultats de cette recherche.
1. Enjeux de l’inclusion culturelle et linguistique dans l’apprentissage en ligne
Initialement destiné aux adultes, l’apprentissage en ligne s’est considérablement accru à tous les niveaux au cours des dernières décennies (Barbour et Reeves, 2009; de la Varre, 2014; Saqlain, 2016). Sa forte croissance est tributaire des nombreux avantages tels que l’élargissement de l’accès à l’éducation, la flexibilité temporelle, la possibilité de faire tomber les barrières géographiques, l’offre de cours avancés (Barbour et Reeves, 2009; Barbour, 2014; Cavanaugh et al., 2004; De la Varre, 2014; Saqlain, 2016). Les aspects économiques liés à l’efficacité administrative semblent aussi prévaloir (Selwyn, 2016). Sa montée en importance est également liée à l’expansion rapide des technologies numériques et d’Internet sur lesquelles il repose (Saqlain, 2016).
Ainsi, même si d’une manière générale, certains pans de la population restent marginalisés ou n’ont pas accès au cyberespace (Macfadeyn et al., 2004), ces technologies permettent de toucher un public plus vaste d’apprenantes et apprenants issus de contextes culturels et linguistiques très divers (Moore et al., 2005; Sieffert, 2006). Elles accroissent aussi la portée des institutions d’enseignement, car si celles-ci répondaient auparavant aux besoins d’éducation locaux, elles peuvent dorénavant se tourner vers une population d’élèves élargie à la faveur de marchés scolaires en bien des endroits et d’une conception de marchandisation de l’éducation (Renaut, 2007). La plupart des programmes en ligne affichent cependant un taux de décrochage élevé et des performances assez faibles (Barbour et Reeves, 2009; Borup et al., 2016; Cavanaugh et al., 2004; de la Varre, 2014; Freidhoff, 2019; Morasse, 2019).
De surcroit, ces contreperformances semblent concerner davantage les élèves issus des groupes minoritaires (Gunawardena et al., 2003; Hass et al., 2023; Yeboah et Smith, 2016). Ceci apparait d’autant plus étonnant que ce sont notamment ces populations d’élèves que l’éducation en ligne promettait de mieux rejoindre. Une hypothèse pour expliquer une telle limite suggère que les cours en ligne et les technologies qui les appuient ne sont pas neutres, mais dominés à la fois par la langue anglaise et des façons d’apprendre propres à celles qui existent en Amérique du Nord, et donc contraires à des modes d’apprentissage plus coopératifs et moins axés sur l’individu (Conway et al., 2011; Henderson, 1996, 2007; Moore et al., 2005; Sieffert, 2006).
La conception de cours en ligne ne prendrait pas en compte les enjeux de diversité culturelle et linguistique (Henderson, 1996, 2007; Watson, 2013) et donc ne favoriserait pas une équité entre élèves (Henderson, 1996, 2007). En effet, la langue, les icônes employées et leur disposition à l’écran peuvent toutes affecter la façon dont l’apprenante ou apprenant interprète et utilise le matériel pédagogique (Henderson, 2007; Sieffert, 2006; Watson, 2013). Or des symboles allant de soi dans la culture occidentale, aussi vaste et difficile soit-elle à définir, ne sont pas toujours compris ni adoptés par une population étudiante encore peu familière avec ceux-ci. Il existe en outre des différences régionales significatives dans les attitudes des apprenants et apprenantes et leur degré de confort avec un enseignement fondé sur la technologie (Smith et Ayers, 2006; Yeboah et Smith, 2016). Ceci est d’autant plus crucial au moment où le nombre de cours en ligne est en augmentation, tout comme celui d’apprenants et d’apprenantes géographiquement dispersés, culturellement et linguistiquement très diversifiés.
De plus, si l’école, dans sa forme habituelle, est encore confrontée à la persistance d’inégalités, y compris du fait de la langue (Bergeron, 2020; Bergeron et al., 2022; Dalley, 2014; Gérin-Lajoie, 2020; Jacquet et al., 2023), il est permis de s’interroger à ce sujet dans sa forme en ligne (Henderson, 1996, 2007; Lawrence, 2020; McLoughlin et Oliver, 2000; Piccardo et al., 2022; Young, 2008). Or les recherches relatives à l’apprentissage en ligne, portant sur une population scolaire hétérogène, sont rares alors que les affirmations concernant son pouvoir transformatif sont nombreuses (Lawrence, 2020). La paucité des recherches sur le sujet pourrait aussi partiellement s’expliquer par l’absence de consensus entourant le concept même de culture (Ball et Ladson-Billings, 2020).
1.1 Saisir la diversité culturelle en éducation?
Différentes théories ont été élaborées pour saisir l’approche culturelle en éducation. Parmi celles-ci figurent en bonne place la pédagogie critique et réflexive (Freire, 1970, 2001), le socioconstructivisme (Vygotsky, 1978), la pédagogie adaptée culturellement (Ladson-Billings, 1995), la pédagogie sensible à la culture (Gay, 2000) et la pédagogie culturellement viable (Paris, 2012). Blake et Masschelein (2003) suggèrent au personnel enseignant d’opter pour une théorie critique qui s’intéresse aux questions de contrôle, de pouvoir et d’épistémologie qui peuvent avoir un impact sur une population étudiante, y compris issue de minorités (Henderson, 1996). Cette théorie offre au personnel enseignant un moyen éthique de réfléchir à leurs pratiques (Bradshaw, 2017). Emblématique de ce courant, Freire (1970, 2001) propose l’approche conscientisante et dialogique consistant à réfléchir et à agir sur le monde afin de le transformer. Freire (2018) réitère la pertinence d’un espace pédagogique où le personnel enseignant et les élèves apprennent les uns des autres et où l’acte d’enseigner ne se réduit pas à un processus de transfert de connaissances. Cela implique de la part du personnel enseignant d’être prêt à repenser leurs approches. Cette posture s’impose aussi à l’élève puisque l’accès à la connaissance exige de se retrouver dans une posture de dissonance cognitive.
La vision d’une pédagogie privilégiant les interactions sociales se retrouve également dans la théorie socioconstructiviste où, selon Vygotsky (1978), la construction des savoirs s’effectue au cours des interactions avec d’autres personnes dans la zone proximale de développement. Le principe selon lequel l’apprentissage doit être pertinent pour les élèves en est le fondement
Lawrence, 2020
Dans cette veine, Ladson-Billings (1995, 2021) fonde sa pédagogie adaptée à la culture à la capacité à lier l’apprentissage à une profonde compréhension (et appréciation) de la culture. L’objectif est d’initier une pratique pédagogique efficace susceptible de favoriser la réussite des élèves issus des milieux défavorisés, de les aider à affirmer leur identité culturelle en développant des perspectives critiques qui remettent en question les inégalités entretenues par les écoles et les autres institutions. À sa suite, Gay (2000, 2018) propose la pédagogie sensible à la culture prônant la mise en oeuvre nécessaire d’un enseignement adapté afin de favoriser la réussite des élèves issus des minorités culturelles et linguistiques. Paris (2012) suggère une pédagogie qui préserve et revitalise la culture. Selon elle, les théories précédentes ne vont pas assez loin pour maintenir les modes d’héritage et valoriser le partage culturel et linguistique au-delà des différences.
1.2 La culture et ses ramifications
Issu de l’anthropologie, le concept de culture demeure un objet de discussion (Moore et al., 2005). D’un point de vue anthropologique, Hofstede (2011) le définit comme la programmation collective de l’esprit qui distingue les membres d’un groupe ou d’une catégorie de personnes des autres. Or l’identification qu’opère un acteur social, précise Bayart (1996), est toujours « contextuelle, multiple et relative » (p. 98); il met également en garde contre cette tentation de vouloir rechercher un substrat culturel, à l’image de ce qu’est le « noyau igné » pour les géologues, au lieu de s’intéresser à « l’indétermination, l’inachèvement, la multiplicité, la polyvalence » (p. 113). Pour Bayart (1996), il vaut mieux « analyser des opérations concrètes d’énonciation d’une représentation culturelle dans un contexte précis » (p. 123).
Dans le cadre de l’enseignement et de l’apprentissage en ligne, la vision statique de la culture est aussi remise en question pour attirer l’attention sur sa nature dynamique, interactive et évolutive (Charlier et al., 2007; Henderson, 2007; Ladson-Billings, 2014, 2021; Thomas et al., 2002; Young, 2008, 2009). Ladson-Billings (2014) parle d’une pédagogie adaptée à la culture 2.0 pour refléter la fluidité de la culture, en changement. Henderson (2007) considère la culture comme étant la manifestation des modes de pensée et de comportement qui résultent de l’adaptation continue d’un groupe à son environnement. On s’accorde généralement à reconnaitre l’importance de la culture, sans pour autant arriver à un consensus sur ce qu’elle est et encore moins sur la manière dont elle devrait être pensée et étudiée (Thomas et Columbus, 2009-2010). Face à ce constat, Ball et Ladson-Billings (2020) suggèrent d’utiliser plutôt l’expression pratiques culturelles.
1.3 De la diversité culturelle et linguistique en contexte canadien
Comprendre et situer la notion de diversité culturelle, notamment sur le plan linguistique, renvoie, selon Diller (2015, cité dans Resta et al., 2018), à décrire des situations d’interactions entre plusieurs langues ou plusieurs groupes linguistiques. Dans le paysage canadien, cela revient à retracer trois générations de politiques linguistiques (Cardinal, 2023). La première génération débute avec la création de la fédération canadienne en 1867 et l’adoption de l’article 133 de la Constitution, qui permet l’usage du français et de l’anglais au Parlement, mais sans que des mesures soient mises en oeuvre pour atteindre cette égalité, sauf timidement à partir de 1959. La deuxième génération de politiques linguistiques débute avec la Commission royale sur le bilinguisme et le biculturalisme en 1963. Son mandat est d’examiner les relations entre les « deux peuples fondateurs » (francophones et anglophones) en vue de proposer des recommandations pour améliorer le sort des Canadiens français tout en prenant en compte les contributions d’autres groupes ethnoculturels au pays. C’est à l’issue de cette Commission qu’en 1969, le gouvernement canadien a promulgué la Loi sur les langues officielles, qui fait du français et de l’anglais les deux langues officielles du pays. De plus, en 1971, il publie sa politique sur le multiculturalisme, qui donne le droit aux groupes ethniques partout au pays de maintenir leur héritage culturel. Cette politique est subordonnée à celle sur les langues officielles afin que le pays se développe en tant que pays multiculturel dans un cadre bilingue. Enfin, la troisième génération de politiques linguistiques commence en 1982 au moment du rapatriement de la Constitution canadienne de Westminster et de l’adoption de la Charte canadienne des droits et libertés, qui reconnaît que le français et l’anglais sont des caractéristiques fondamentales de la société canadienne (Cardinal, 2023).
Avec la mobilité et le changement associés à la mondialisation qui caractérisent les dernières décennies, la diversification de la société s’accroit, tout comme les demandes de reconnaissance (Piccardo, 2016). En contexte canadien, Traisnel, Violette et Gallant (2013), dans leur étude sur les minorités francophones et l’immigration, recensent différentes postures par rapport à la diversité ethnoculturelle. Selon ces auteurs, la volonté d’ouverture et de synthèse entre l’authenticité particulariste et la diversité culturelle reste tributaire, d’une part, des réalités sociopolitiques caractérisant chacune des communautés francophones canadiennes et, d’autre part, de l’ampleur du processus d’immigration à l’oeuvre dans chaque région. Ils notent ainsi une pluralité de francophonies canadiennes qui, en dépit du contexte politique fédéral, tendent à se séparer et à produire des réflexions identitaires distinctes. Garant et Bélanger (2010) s’intéressent aux « signes de la francophonie » (p. 14), à leur apparition, à leur appropriation et à leur réception, afin d’éclairer les processus de production et de reproduction de la francophonie. Ceci permet de saisir, dans une perspective relationnelle, les accords et les désaccords, tributaires de positions et d’intérêts particuliers, qui construisent la francophonie. L’hétérogénéité découlant de l’arrivée de personnes immigrantes francophones met en opposition deux positions, soit le bilinguisme et le multiculturalisme, créant ainsi des dynamiques d’inclusion et d’exclusion (Fourot, 2016). La composition démographique du contexte minoritaire bouscule les définitions de ce qu’est la francophonie ou de qui est francophone (Noël et al., 2014). Le Commissariat aux services en français de l’Ontario définit ainsi comme francophones :
Les personnes pour lesquelles la langue maternelle est le français, de même que les personnes pour lesquelles la langue maternelle n’est ni le français ni l’anglais, mais qui ont une bonne connaissance du français comme langue officielle et qui utilisent le français à la maison
Boileau, 2016, p. 26
Le défi de taille pour ces communautés francophones reste, selon Traisnel et al. (2013), de faire preuve d’ouverture à l’égard des minorités issues de l’immigration tout en revendiquant une reconnaissance politique au sein de l’État canadien. Ceci laisse présager un nouveau virage générationnel dans les politiques linguistiques. La Loi sur les langues officielles a d’ailleurs été modernisée en 2023 en plus de reconnaître la diversité de la francophonie dans son préambule. En outre, en éducation, la diversité de la population étudiante autant qu’au sein du personnel enseignant conduit à observer de plus près ce qui s’y passe au point de vue de l’aménagement linguistique et des politiques d’établissement, mais aussi dans des cours en ligne.
1.4 Culture, langue et apprentissage en ligne
Compte tenu des liens intrinsèques entre culture, langue et apprentissage, plusieurs recherches récentes prennent en compte la diversité culturelle et linguistique dans la conception pédagogique et la mise en oeuvre de l’apprentissage en ligne (Henderson, 1996, 2007; Edmundson, 2007; Frechette et al., 2014; Gunawardena et al., 2019; McLoughlin, 2000; McLoughlin et Olivier, 2000; Seufert, 2002; Thomas et al., 2002, Young, 2008, 2009). Si la recherche à ce sujet est encore rudimentaire en contexte minoritaire de langue française au Canada, ailleurs des résultats sont publiés. À titre d’exemple, la recherche de Pillay et James (2013) suggère que lors de l’apprentissage à partir d’expériences interculturelles, il est plus probable de comprendre les relations et les dynamiques culturelles en étant en classe plutôt qu’à distance ou en ligne. Ceci se confirme dans l’étude de Kuo et Belland (2016) dont les résultats indiquent que les étudiantes et étudiants en ligne semblent avoir un niveau de satisfaction modéré de leurs expériences d’apprentissage.
En revanche, les résultats de los Ríos (2018) dans le cadre de ses travaux sur l’apprentissage en ligne basé sur l’approche critique révèlent que les élèves ont puisé dans un éventail de pratiques linguistiques et littéraires pour donner sens à leurs apprentissages et reconnaitre des contenus et des pratiques d’exclusion. L’étude de Shepherd (2018) sur les perceptions du personnel enseignant concernant leurs propres niveaux de sensibilité culturelle et la manière dont elle peut être influencée par des croyances et des valeurs personnelles montre leurs besoins de formation. Le manque de formation est également confirmé dans l’étude narrative d’Amery, Blignaut et Winchester (2022). Les résultats montrent que, globalement, malgré l’inclusion des principes de l’éducation interculturelle dans certains modules de cours et leur mise en oeuvre dans les classes par les formatrices ou formateurs du personnel enseignant, ils ne se sont pas traduits dans la pratique autant qu’ils pourraient l’être.
Pour sa part, l’étude de cas multiples d’Utuk (2018) atteste de diverses stratégies que les conceptrices et concepteurs pédagogiques, incluant celles et ceux issus du corps enseignant, utilisent pour appuyer leurs populations étudiantes culturellement diversifiées. L’échafaudage, le travail en groupe, la sensibilisation culturelle et la flexibilité sont les stratégies pédagogiques les plus efficaces utilisées en direction d’un groupe étudiant diversifié. Selon les résultats de l’étude de Lawrence (2020), la plupart des membres du personnel enseignant décrivent leurs pratiques pédagogiques en termes de dialogue constant avec leurs élèves. Ils ont aussi indiqué que des éléments contextuels, tels que la structure de leur programme, avaient une incidence sur leur capacité à mettre en oeuvre une pédagogie en ligne sensible à la culture. L’étude de Kumi-Yeboah et al. (2018) montre, pour sa part, que les défis liés aux expériences d’apprentissage d’élèves issus d’une minorité sont associés au manque d’inclusion culturelle dans le contenu du cours.
Examinons maintenant le cas d’un institut de production de cours en ligne dans le contexte linguistique minoritaire de langue française en Ontario pour mieux comprendre l’offre de cours en ligne et la façon dont ils sont conçus et utilisés par des membres du personnel enseignant oeuvrant dans un système, lui-même fruit d’une reconnaissance linguistique et culturelle.
2. Méthode
L’étude de cas a été retenue pour cette recherche puisqu’elle permet d’explorer un phénomène unique ou non encore observé pour rendre compte de sa complexité (Journée, 2012). L’institut de production de cours, dont le nom est ici anonymisé pour les fins de cette recherche, a servi de cas instrumental pour explorer et comprendre ce phénomène d’intérêt de la conception pédagogique et l’utilisation de cours en ligne au secondaire dans un contexte de diversité culturelle et linguistique (Prévost et Roy, 2012; Rosenberg et Yates, 2007). L’institut a une expérience de plus de dix ans dans la production de cours en ligne, avec une moyenne de dix cours par année. Il a réussi à mettre à la disposition du personnel enseignant et des élèves environ 120 cours à travers les systèmes de gestion de l’apprentissage (SGA) de différents conseils scolaires de langue française en Ontario. L’expérience utilisateur et l’innovation créées dans ces cours se présentent sous forme de cours modulaires autoportants. Ces cours découlent d’une collaboration entre une équipe pédagogique chargée du contenu, une équipe multimédia chargée de l’agrémenter et la cellule recherche et innovation. Cette cellule est responsable de détecter les meilleures pratiques en termes d’apprentissage en ligne, et ce, sur les plans pédagogique, technique et multimédia. Les cours en ligne produits sont destinés aux élèves et au personnel enseignant des douze conseils scolaires de langue française via la plateforme Environnement d’apprentissage virtuel du ministère de l’Éducation de l’Ontario.
Les questions suivantes ont guidé l’investigation : comment les concepteurs et conceptrices pédagogiques décrivent-ils leurs expériences de conception des cours en ligne au niveau secondaire relativement à la prise en compte ou non de la diversité culturelle et linguistique dans le contexte franco-ontarien? Comment le personnel enseignant décrit-il les expériences d’enseignement de ces cours relativement à la prise en compte ou non de la diversité culturelle et linguistique dans le contexte franco-ontarien?
2.1 Échantillonnage et recrutement des participantes et participants
L’échantillonnage des personnes participantes s’est fait selon la stratégie boule de neige, une technique d’échantillonnage non probabiliste et ciblée (Creswell et Poth, 2018; Firdion, 2012). L’échantillon est formé de quatre membres de l’équipe de production de cours en ligne de l’institut, soit deux conceptrices pédagogiques et deux chargés de projets (Émilie, Céline, Gaston et Maria), et de cinq membres du personnel enseignant au secondaire. Ces derniers, provenant de diverses régions, ont été sélectionnés en fonction de leur appartenance à un groupe francophone ou francophile et de leur expérience de l’enseignement/apprentissage en ligne (Justin, Marcel, Matty, Alfred et Sonia)[1]. Les prénoms en usage ici sont des pseudonymes afin de protéger l’identité des participantes et participants. Le nombre relativement limité de personnes interviewées se justifie par le fait que l’étude ne vise pas des résultats statistiquement significatifs, mais plutôt une compréhension fine de la conception et de l’utilisation des cours destinés à l’enseignement-apprentissage en ligne au secondaire dans le contexte de langue française en Ontario.
2.2 Collecte et analyse des données
Les entrevues ont porté sur les théories, les approches pédagogiques et de conception, l’expérience utilisateur et la prise en compte de la diversité linguistique et culturelle. Les données retenues pour cet article proviennent d’entrevues individuelles semi-dirigées menées auprès des membres de l’équipe de production de cours en ligne et du personnel enseignant. Les entrevues effectuées soit en ligne via Zoom soit au téléphone, ont duré chacune environ 60 minutes (une heure) Lors de l’analyse, nous avons identifié un ensemble de concepts dits sensibilisants qui servent de cadre pour analyser les données en vue d’une meilleure compréhension du phénomène étudié (Bulmer, 1979; Prévost et Roy, 2012). Il s’agit ici de concepts clés liés aux approches pédagogiques, aux caractéristiques des cours en ligne ainsi qu’aux principes de conception culturellement inclusifs.
Leur choix repose sur le fait qu’ils proposent des directions dans lesquelles chercher sans restreindre la marge de manoeuvre, permettant ainsi d’étudier le matériel empirique et de préciser les spécificités du phénomène à l’étude (Gaudet et Robert, 2018). Nous les avons utilisés en tant que thèmes pouvant abriter des sous-thèmes issus de l’analyse des verbatims et autorisant l’émergence d’éventuels thèmes au fil de l’analyse. Ont été retenus ceux qui suivent : 1) paradigmes/théories de l’apprentissage; 2) approches/modèles de conception pédagogique; 3) flexibilité/variété; 4) communication/interaction; 5) sensibilité culturelle. Selon Henderson (1996), la conception de l’enseignement-apprentissage en ligne requiert un paradigme éclectique ainsi que d’avoir recours à une combinaison d’éléments de paradigmes variés, en l’occurrence du béhaviorisme, du constructivisme, du socioconstructivisme et de l’approche critique.
L’intérêt du paradigme repose sur le fait que dans les interfaces en ligne, il y a, selon Paquelin (2011), un passage de la notion de distance qui sépare à celle de proximité qui relie. Quant aux approches et modèles de conception pédagogique, il s’agit là de représentations visualisées d’un processus de conception pédagogique, montrant les principaux éléments ou phases du processus et leurs relations (Chen, 2011). La flexibilité/variété renvoie à la mise à disposition de modules d’apprentissage interactif qui reflètent les multiples réalités culturelles de la société, incorporent diverses manières d’apprendre et d’enseigner et favorisent l’équité des résultats d’apprentissage (Henderson, 1996; Seufert, 2002). Les aspects communicationnels et interactifs se définissent par la prise en compte de la variété des différences culturelles à travers une flexibilité organisationnelle du cours et l’offre d’un ensemble d’outils technologiques de différents canaux de communication, d’outils méthodiques et de ressources. La sensibilité culturelle réfère à l’incorporation du contexte multiculturel comme dimension transversale affectant d’autres dimensions pédagogiques (Henderson, 1996). Voyons ce qui ressort de ces cinq sous-thèmes dans l’analyse des entretiens avec le personnel responsable de la conception et le personnel enseignant.
3. Résultats : tenir compte d’aspects culturels dans les activités d’enseignement-apprentissage en ligne
Dans cette section, nous nous intéressons d’abord aux paradigmes et aux approches qui guident la conception de cours en ligne destinés aux élèves du secondaire en Ontario français ainsi qu’aux démarches et aux modèles privilégiés. Nous verrons que si une vision participative est envisagée dans la construction des apprentissages, la démarche retenue se rapproche d’un environnement dans lequel l’élève est considéré comme autonome, avançant à son propre rythme et limitant le rapprochement. S’ensuit l’examen de la vision relative à la flexibilité et à la variété. Alors qu’elles sont consubstantielles de théories de l’apprentissage intégrant des aspects culturels, la flexibilité et la variété sont comprises, dans notre étude de cas, essentiellement en tant que possibilités d’opter, de choisir, entre différents contenus, matériels ou outils. Concernant la communication, les résultats montrent que si les outils et les plateformes prévoient des composantes efficaces pour l’accroitre entre les élèves, ceux-ci les utilisent peu. Enfin, l’examen de la sensibilité culturelle révèle que dans le curriculum et la formation du personnel enseignant, une diversité de façade et d’énonciation semble davantage utilisée qu’une réelle prise en compte de situations culturelles propices à l’apprentissage.
3.1 Des approches pédagogiques basées sur l’apprentissage autonome et la neutralité
Une variété de visions pédagogiques et épistémologiques sont à l’oeuvre dans la mise en place de l’enseignement en ligne. Si le personnel responsable de la conception tend à favoriser une approche participative dans le processus d’élaboration des cours (Émilie), d’autant plus que ces derniers doivent être validés par le MEO (Céline, Gaston), il est vite apparu que leur vision pédagogique est fondée sur l’apprentissage autonome et exploratoire. L’approche qui sous-tend la conception des cours est décrite à travers différentes expressions : approche de pensée critique, apprentissage exploratoire, approche de l’élève-chercheur, approche par découverte, etc. Néanmoins, il s’avère que ces expressions, quoiqu’apparemment diverses, convergent en réalité vers la même idée, à savoir la responsabilisation de l’élève, laquelle se traduit par l’apprentissage autonome (Céline, Gaston). Selon les membres du personnel relevant de la conception, l’objectif dans les cours est de développer la capacité des élèves à analyser l’information et à valider leurs sources. Ils expliquent le potentiel de l’approche de l’élève-chercheur à le rendre entièrement autonome dans son apprentissage, comme le note ici Gaston :
Nous, avec l’approche depuis 2013, l’approche de l’élève-chercheur, l’élève est beaucoup plus autonome dans l’avancement de son cours en ligne, donc il n’est pas nécessairement dépendant de l’enseignant.
Les membres de l’équipe de production interrogés mettent également l’accent sur l’apprentissage exploratoire dont le but est d’amener l’élève à prendre des initiatives par rapport à son apprentissage, même s’il existe également de petits moments d’enseignement explicite, précisent deux d’entre eux.
Cette vision de l’apprentissage autonome se confirme dans les propos des personnes enseignantes. Toutefois, cette convergence de vues cache mal des points de divergence chez certaines d’entre elles qui ne manquent pas de mentionner aussi l’importance d’approches traditionnelles, déplorant parfois même le fait qu’elles soient incitées à devoir les abandonner (Sonia). La plupart s’accordent sur la nécessité de recourir à une variété d’approches indépendamment de la plateforme utilisée pour donner leurs cours; elles insistent sur la pertinence de combiner les approches traditionnelles et nouvelles pour favoriser l’apprentissage. Certaines disent aussi privilégier l’approche exploratoire tout en préférant parfois le cours magistral pour donner le contexte du thème à aborder et permettre aux élèves de prendre des notes. D’autres évoquent un mélange de cours un peu plus traditionnels axés sur la lecture de notes de cours, mais aussi en lien avec des nouveautés, en regardant des vidéos ou en visitant des sites Web selon le thème. Pour le personnel enseignant, les approches transmissives sont donc autant valorisées que les approches constructivistes. Il suggère ainsi un équilibre entre ces deux approches au lieu d’en préférer une. De surcroit, aucune des personnes enseignantes interrogées n’utilise textuellement et exclusivement les cours disponibles sur le SGA. Elles les exploitent partiellement et les adaptent en fonction des besoins des élèves (Justin, Alfred). Par exemple, certaines les utilisent comme appui en combinaison avec les manuels scolaires disponibles. D’autres s’en servent pour y puiser des fiches et des activités, des apports théoriques et des notes de cours en lien avec un module spécifique et leurs leçons.
3.2 Une vision de la flexibilité et de la variété déconnectée de la culture
Si la flexibilité et la variété sont consubstantielles aux théories de l’apprentissage intégrant des aspects culturels, ces caractéristiques sont comprises en tant que possibilités, tant pour le personnel enseignant que pour les élèves, d’opter ou de choisir entre différents contenus, matériels ou outils.
Les conceptrices et chargés de projet parlent d’emblée de mettre l’accent sur l’accessibilité et la différenciation pédagogique en soulignant son importance dans des guides destinés aux enseignants et enseignantes. La création d’objets médias visibles et utilisables sur différentes plateformes et la possibilité de publier et réunir des ressources en vue de s’assurer de leur accessibilité sont soulignées. La mise à la disposition de l’élève de diverses options, surtout par rapport à la présentation des productions, aux outils numériques utilisés pour réaliser des tâches de même qu’aux thèmes ou sujets à traiter, est aussi mentionnée. Il en est ainsi pour la préparation de l’évaluation sommative avec la possibilité d’effectuer une série de tâches formatives. Les chargés à la conception fournissent également au personnel enseignant des listes d’activités supplémentaires ou complémentaires en appui aux élèves qui en ont éventuellement besoin.
À titre illustratif, le choix de technologies en fonction d’activités et de matières, comme c’est le cas en mathématique, est rendu possible afin que l’enseignante ou enseignant puisse donner davantage de flexibilité aux élèves dans la réalisation de leurs tâches. Gaston mentionne l’importance de micro activités à travers lesquelles l’élève chemine et qui peuvent lui faire vivre des succès. Maria parle quant à elle de rendre les contenus des modules agréables. La possibilité de choisir l’ordre de réalisation des tâches leur est également offerte (Émilie). Toutefois, précise le personnel chargé de la conception, cette option ne fonctionne pas pour tous les élèves, notamment celles et ceux peu familiers de prime abord avec ce contexte scolaire. Du point de vue technique, la flexibilité s’opère avec l’utilisation d’une approche multiplateforme en produisant des cours accessibles à partir d’une diversité d’interfaces et d’outils technologiques. Les modules autoportants contenus dans la majorité des cours permettent à l’élève d’en choisir un avec lequel il souhaite commencer, sauf certains cours d’introduction qui requièrent un parcours linéaire.
Cette approche de la flexibilité telle que présentée ci-dessus offre aussi aux enseignantes et enseignants la possibilité de choisir le module, l’activité, la tâche ou les outils qui retiennent leur attention. Elle leur permet également de les télécharger pour les utiliser dans leurs cours en ligne ou même en situation d’enseignement hybride en salle de classe. La flexibilité pour le personnel enseignant se traduit en effet par la possibilité d’adapter le cours en fonction des besoins de l’élève. On peut par exemple diminuer le volume de travail pour certains, l’augmenter pour d’autres ou même retrancher des notions puisqu’en réalité on évalue les attentes sur le plan curriculaire en Ontario. Ces attentes peuvent être comblées sans pour autant couvrir tous les contenus, comme le notent Justin et Alfred. Malgré l’approche autonome privilégiée dans les cours en ligne, la flexibilité n’atteint pas un niveau où l’élève peut avoir prise sur son propre parcours d’apprentissage, ou être invité à interagir avec les autres ou encore porter un regard critique. À ce sujet, Matty précise :
On n’est pas dans ce cadre où c’est l’élève qui choisit ce qu’il doit faire. On donne des tâches sinon il y a …, si l’élève devait choisir, donc malheureusement, il y a certains élèves qui [ne] progresser[aient] pas du tout.
Globalement, il ressort des propos du personnel s’occupant de la conception et du personnel enseignant l’idée de flexibilité quant aux possibilités de choix et de variation dans les activités et les outils d’apprentissage proposés. Cependant, celle ayant trait aux univers culturels et linguistiques des élèves pris dans leur diversité n’est pas vraiment considérée.
3.3 Une communication et des interactions en ligne limitées
Les personnes responsables de la conception s’accordent sur la disponibilité de canaux de communication intégrés dans la plateforme, mais expriment en même temps leurs préoccupations quant à leur utilisation et leur efficacité. Selon elles, les forums de discussion, par exemple, ne sont pas utilisés à bon escient : ils sont peu utilisés et les élèves sont peu habilités à y exprimer leurs points de vue (Émilie). Elles affirment pourtant mettre à la disposition des élèves des documents communs comme des Google Docs ou des documents Word collaboratifs tout en encourageant l’utilisation d’outils de collaboration comme Padlet pour favoriser la communication/interaction entre eux. Toutefois, cette communication/interaction varierait selon les compétences des élèves à utiliser ces outils. Le discours du personnel responsable de la conception révèle que l’approche collaborative n’est que peu mise de l’avant dans les cours en ligne du secondaire. C’est plutôt l’approche autonome discutée plus haut qui est privilégiée, dans laquelle l’élève ne dépend ni de son enseignante ou enseignant ni d’un autre élève et avance à son propre rythme. Par ailleurs, la difficulté à faire travailler les élèves ensemble ou en groupe est la conséquence de la nature asynchrone des cours, comme l’explique Émilie :
La réalité des cours, c’est que moi j’ai mon cours la première période le matin. Ensuite, l’autre élève, il a son cours à la dernière heure de la journée, donc c’est certain que ces deux élèves-là ne peuvent pas travailler dans un groupe, disons, en même temps.
Le personnel enseignant travaille avec divers canaux de communication tels que le clavardage, Google Meet, le forum de discussion et le téléphone. Selon certaines personnes interviewées, la communication se déploie à travers une plateforme comme Classroom, y compris pour les messages aux parents. Malgré ces avenues, la difficulté de mettre en oeuvre l’apprentissage collaboratif ressort aussi du discours de certaines d’entre elles. Elles indiquent pourtant s’appuyer sur les outils du Web 2.0, tels que les blogues et les wikis, ainsi que sur l’utilisation des forums de discussion et du travail d’équipe dans des sessions parallèles pour amener les élèves à réfléchir et à produire ensemble. Cependant, il apparait que la facilité ou non de faire travailler les élèves en ligne de façon collaborative dépend de plusieurs facteurs. Les problèmes de connexion, parmi les principaux, perdurent et ont un impact sur les élèves de milieux ruraux (Sonia, Marcel). Les membres du personnel enseignant qui donnent des cours asynchrones à travers le SGA désignent aussi les différences d’horaires des élèves comme obstacle à l’organisation de discussions en groupe confirmant ainsi les constats des concepteurs. En revanche, dans les cours synchrones, la difficulté d’amener les élèves à collaborer réside plus dans le fait qu’ils peuvent être quelque peu réticents à interagir avec d’autres élèves, surtout quand ils ne les connaissent pas. Même ouvrir la caméra semble constituer, dans certains cas, une difficulté. La motivation pour la tâche est aussi parfois en cause (Justin, Marcel).
3.4 Une référence à la culture dans le curriculum?
Les membres de l’équipe de conception pédagogique affirment s’efforcer de prendre en compte la diversité culturelle et linguistique des élèves tout en relevant les multiples défis auxquels l’équipe est confrontée pour y arriver. Dans un contexte de diversité culturelle et linguistique grandissante, une sensibilité culturelle qui tient compte des référents et trajectoires singulières des apprenantes et apprenants en ligne (McLoughlin et Olivier, 2000) apparait centrale. À la question de savoir de quelle façon la conception pédagogique prend en compte les multiples réalités socioculturelles, les membres rappellent que leur mission consiste à mettre l’accent sur l’aspect franco-ontarien tout en soulignant les efforts fournis ces dernières années pour faire allusion à une francophonie plus inclusive, tenant compte notamment de l’inscription régionale (Émilie). Certaines personnes interviewées estiment que l’intégration des aspects culturels s’effectue en fonction des matières et que les cours de sciences sociales et de civisme sont plus propices que ceux de mathématiques pour aborder les questions culturelles (Émilie). La nécessité de rester conscient de l’existence et de l’accroissement des différences culturelles apparait également dans les propos du personnel responsable de la conception.
Toutefois, les propos d’une des conceptrices soulignent les contraintes liées au décalage entre sa pratique professionnelle et son propre vécu en tant que personne originaire d’une petite ville de l’Ontario où le rapport à une population diversifiée est plus ténu. Quoiqu’il en soit, les responsables de la conception déclarent se conformer à la demande du ministère pour reconnaitre les groupes diversifiés qui composent le tissu social, comme c’est le cas avec les groupes autochtones, même si cela se fait parfois en silo les uns des autres. Cette reconnaissance est jugée essentielle pour que les élèves inscrits aux cours en français en ligne puissent se reconnaitre (Maria). Les démarches d’inclusion culturelle sont aussi décrites en termes de diversification des images et autres illustrations dans des situations d’apprentissage pour amener tous les élèves à se sentir inclus. Une démarche qui s’avère dans certains cas profitables, mais aussi parfois superficielle.
À l’instar du personnel s’occupant de la conception, les enseignants et enseignantes interrogés sont d’avis qu’à l’heure actuelle, la prise en compte de la diversité culturelle et linguistique n’apparait pas dans les cours en ligne de façon concrète, sauf à travers les quelques initiatives concernant des communautés données, telles les communautés autochtones. Alfred et Justin reviennent souvent sur le fait que le curriculum commande de diversifier les contenus ou d’adapter l’enseignement en fonction des différences culturelles pour un meilleur apprentissage des élèves, sans pour autant les renseigner sur la façon de le faire concrètement. Les membres du personnel enseignant regrettent de ne pas bénéficier d’accompagnement dans la prise en compte des réalités culturelles de leurs groupes. Selon eux, le programme-cadre auquel ils se conforment ne tient pas compte de l’existence d’une diversité culturelle dans la population des élèves. C’est aussi le cas dans le matériel pédagogique, selon Matty. Ce serait une approche universelle qui est envisagée, selon Justin, qui considère que c’est à lui d’adapter le cours :
C’est l’enseignant qui adapte le cours. Le cours est là pour tout le monde. On ne fait pas le cours pour les francophones, les francophones de souche. On n’a pas fait de cours pour les francophones immigrants. On a fait le cours pour tout le monde.
Alors que la question de la langue s’avère un véhicule pour apprendre ensemble en contexte interculturel, des occasions sont ratées. Sonia l’explique dans l’extrait qui suit :
C’est un cours de français, donc évidemment l’aspect linguistique est en jeu quand on parle de grammaire, quand on parle de structure des phrases, des choses comme ça, mais l’aspect où est-ce que j’ai peut-être plus de difficulté, ou est-ce que mon français n’est pas le même que le tien, ça, on n’a pas nécessairement abordé ça sauf quand on a lu la pièce de théâtre où y’avait différents registres de langues. On a abordé les registres de langue, mais pas dans un aspect culturel malheureusement.
Aussi, le personnel enseignant prend conscience des biais potentiels liés à l’aspect virtuel et s’interroge sur la probabilité que le fait de ne pas voir l’élève puisse signifier qu’il ne met pas assez l’accent sur des aspects de son identité, de sa culture, de son profil linguistique. Les enseignants et enseignantes s’entendent pourtant sur la nécessité de connaitre les différences culturelles et d’en tenir compte dans l’enseignement à travers diverses démarches mises en oeuvre. Parmi celles-ci figurent notamment l’utilisation du registre culturel de l’élève, l’étude d’oeuvres littéraires venant de différents horizons connus des élèves ou de leurs parents, le partage d’informations à travers le choix de thèmes en lien avec des aspects culturels et l’exploration de contenus à travers une autre perspective.
4. Discussion
Les données présentées ci-dessus proviennent d’une enquête qui porte sur la conception de cours en ligne et leur prestation par des enseignants et enseignantes du secondaire oeuvrant en français en Ontario et sur les composantes culturelles que ceux-ci intègrent. Selon une analyse à partir de thèmes clés (paradigmes/théories d’apprentissage, approches/modèles de conception pédagogique, flexibilité/variété, communication/interaction, sensibilité culturelle), il s’est agi ici de mieux comprendre, à partir d’un échantillon certes limité mais illustratif, quelle prise en compte culturelle est présente dans ces cours en ligne. Comme le précise Young (2008), une compréhension de la culture est nécessaire dans la conception pédagogique puisqu’elle fournit une voie d’apprentissage. Le personnel responsable de la conception pédagogique interrogé se montre soucieux de cet aspect.
Toutefois, la conception même des cours en ligne et les approches suggérées se révèlent limitées au chapitre de la collaboration/interaction pourtant nécessaire à l’échange entre pairs et à l’intercompréhension culturelle dans l’apprentissage. L’interaction apprenant-apprenant est l’un des trois types d’interactions – les deux autres étant l’interaction apprenant-contenu et l’interaction apprenant-instructeur ou instructrice – que Moore (1989) décrit comme étant d’importance dans la planification des éducateurs ou éducatrices oeuvrant à distance, quel que soit le média. Vlachopoulos et Makri (2019) la définissent comme la communication entre deux ou plusieurs élèves afin de collaborer, de réfléchir et d’échanger des connaissances. Ceci renvoie à l’apprentissage collaboratif en tant que modèle dans lequel les élèves sont appelés à travailler en groupe pour construire des connaissances (Anderson, 2017; Thien, 2021; Zain, 2018). Pourtant, c’est plutôt une approche qui vise à rendre autonome l’élève qui est privilégiée. Dans cette approche, l’élève évolue à son rythme dans un SGA autoportant ou dans divers outils convoqués pour le cours.
Certains enseignants et enseignantes affirment que pour rendre leur pratique effective, ils puisent dans les modules de cours conçus d’avance. Néanmoins, ils n’y adhèrent pas entièrement et restent attachés à leur liberté d’enseignement, à une diversité d’approches, même certaines plus traditionnelles. Cette posture enseignante se révèle être plus en adéquation avec celle des chercheurs mentionnés plus haut qui prônent la mise en oeuvre d’approches plurielles ou éclectiques combinant une variété de pédagogies pour créer les conditions d’un apprentissage équitable (Henderson, 1996, 2007; McLoughlin et Olivier, 2000; Seufert, 2002).
Henderson (1996, 2007) associe la flexibilité à la mise à disposition de modules d’apprentissage interactif qui reflètent les multiples réalités culturelles de la société et incorporent diverses manières d’apprendre et d’enseigner au profit de tous les élèves. Cependant, les participants et participantes de cette recherche associent davantage la flexibilité et la variété à la possibilité de choix parmi une diversité d’outils technologiques, d’activités, de ressources, etc., offerte à l’élève pour faciliter son apprentissage. Ceci renvoie à une vision consumériste de l’éducation où chacun est censé y trouver ce dont il a besoin ainsi qu’à une définition assez statique de la culture.
Les membres du personnel relevant de la conception affirment essayer de développer les cours en ayant en tête la différenciation pédagogique, et donc de varier les types d’activités en fonction des styles d’apprentissages, même si cette pseudo théorie est par ailleurs contestée (MacDonald et al., 2017). Est ainsi évoquée l’approche de la différenciation pédagogique censée rejoindre une population d’élèves diversifiée. Kahn (2010) expose les trois interprétations de la différence et les limites de cette approche : la conception naturalisante des différences qui s’appuie sur l’idée qu’il existe entre les élèves des différences de nature; la conception quantitative où la différence n’est pas en lien avec la nature de l’élève, mais provient de la comparaison de la performance de l’élève avec celle des autres et, enfin, la conception en termes de diffraction où la différence est entendue comme un désajustement relationnel (ou une distance) de l’élève avec la culture scolaire.
C’est cette dernière qui, selon la chercheuse, devrait être envisagée, car elle permet de développer une perspective différenciée qui tient compte du rapport aux savoirs des élèves afin de ne pas renforcer les écarts qui existent déjà entre eux. Or ce n’est pas de cela dont il semble être question puisque les participants et participantes interrogés s’en remettent à varier les contenus et à offrir des options dans la façon dont sont pensés les cours en ligne. Il en ressort l’image d’un marché scolaire où chacun puisse ce dont il a besoin et une vision des aspects culturels, quand ceux-ci sont considérés, somme toute assez figée. Les points de vue du personnel enseignant et des responsables de la conception convergent ainsi peu vers une définition de la culture considérée évolutive. Dans le contexte de cours en ligne en français en contexte linguistique minoritaire, un rapport aux savoirs plus contextualisé, différencié, permettrait peut-être qu’en Ontario, ce ne soient pas que les deux tiers des enfants admissibles à l’éducation en français qui y soient inscrits (Statistique Canada, 2022). Une approche tenant compte du rapport aux savoirs des élèves pris dans toute leur diversité pourrait bonifier les cours en ligne au-delà d’un simple éventail de choix et d’options.
Certes, les responsables de la conception pédagogique disent prendre conscience de la diversité culturelle et linguistique des élèves. Toutefois, cela ne se reflète pas dans les pédagogies privilégiées et dans la conception même des cours en ligne, comme l’ont souligné des membres du personnel enseignant. Ces derniers affirment également éprouver des difficultés à tenir compte de cette diversité en vue de favoriser l’apprentissage et la réussite des élèves. Pourtant, le curriculum recommande de diversifier les contenus ou d’adapter l’enseignement en fonction des différences culturelles. Toutefois, la question est de savoir comment le faire sans s’en remettre à une reconnaissance de façade, naturalisante ou essentialisante. Une façon d’y remédier serait d’accroitre la communication essentielle à une approche qui tient compte d’éléments culturels. Dans les faits, des outils et plateformes prévoient des composantes efficaces pour l’accroitre, notamment entre les élèves, mais ils restent peu exploités ou utilisés.
Les difficultés à prendre en compte la diversité culturelle et linguistique nécessitent de mener des recherches autour des épistémologies et pédagogies dans des contextes diversifiés et en ligne. En effet, comme le dit Henderson (1996), l’épistémologie et la philosophie pédagogique sont des éléments fondamentaux de la pratique. Penser ou repenser le cadre de conception même des cours s’avère donc nécessaire. En témoigne le constat qu’ont fait Ball et Ladson-Billings (2020) au sujet du décrochage continu de candidats et candidates aux programmes de formation à l’enseignement dû entre autres au sentiment qu’elles et ils n’ont pas les connaissances, les compétences, ni la formation nécessaire pour enseigner efficacement aux élèves d’horizons divers. Zisselsberger et González (2019) notent aussi que les compétences culturelles et linguistiques des élèves apportent des connaissances uniques à la classe, mais sont souvent peu exploitées par manque de préparation du personnel enseignant. Au regard des résultats de cette recherche, à l’instar de ceux de Mahmud (2023) et de O’Keeffe, Paige et Osborne (2019), le besoin d’accompagnement des responsables de la conception et du personnel enseignant oeuvrant en contexte de langue française en Ontario, et de surcroit en ligne, s’avère nécessaire.
Conclusion
Cet article porte sur la conception et l’enseignement de cours en ligne dans le contexte de langue française en Ontario relativement à la reconnaissance de la diversité culturelle et linguistique des élèves. L’analyse d’entretiens menés auprès de personnes responsables de la conception et d’enseignants et enseignantes au secondaire révèle les défis qui en entravent la prise en compte. Pourtant, dans ce réseau, l’offre de cours en ligne de même que la diversification de la population étudiante sont en croissance. Ceci en fait un sujet d’intérêt, d’autant plus si l’on souhaite réduire les écarts de réussite entre les élèves en fonction de leurs caractéristiques sociales et favoriser une équité entre élèves. Étant donné que la recherche en éducation en Ontario ne s’était pas encore penchée sur cette question, la présente étude contribue à combler cette lacune. Malgré ses limites liées au nombre restreint de répondantes et répondants, les données qualitatives recueillies s’avèrent instructives sur plusieurs plans. La façon même dont les cours en ligne sont construits montre des limites au point de vue de la collaboration, puisque l’accent est mis sur l’autonomie de l’élève apprenant à son rythme. Malgré des outils disponibles et propices à la communication, notamment entre élèves, il appert que ceux-ci les exploitent peu ou mal, ce qui limite l’apport même des élèves dans la construction des connaissances. Cet apport permettrait pourtant d’intégrer et de reconnaitre la variété linguistique et culturelle lors de situations d’enseignement-apprentissage en ligne. Si les participants et participantes se montrent concernés par cet aspect, ils et elles le formulent en termes de choix offerts entre différents contenus, matériels et outils. Cette approche tend à figer ce qui est entendu par culture et à véhiculer l’idée de l’éducation comme d’un marché où chacun ou chacune peut y trouver ce dont il ou elle a besoin.
L’inadéquation des approches pédagogiques et de conception ainsi que les défis qui en découlent prouvent la nécessité d’axer les réflexions et les investigations sur des stratégies davantage susceptibles de mettre en oeuvre des approches plurielles et critiques dans l’apprentissage en ligne en contexte de diversité. Il serait également judicieux de réfléchir aux aspects culturels, non statiques, dans les programmes de formation à l’enseignement.
Parties annexes
Note
-
[1]
Notons ici que les données et les résultats retenus dans cet article font partie d’une recherche plus large dans laquelle des élèves ont aussi été interviewés.
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