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La crise financière et économique qui a secoué le système international en 2008 a fait l’objet de nombreux écrits qui se sont intéressés à ses sources et à ses effets. Cette crise qui a débuté aux États-Unis a modifié la structure politique et économique mondiale, et c’est à l’étude de cette nouvelle donne que nous invitent Richard Iley et Mervyn Lewis dans leur ouvrage. En effet, les auteurs s’intéressent dans ce livre au nouvel ordre mondial qui a suivi cette crise avec, d’une part, la perte de vitesse des États-Unis ainsi que de l’Europe et, d’autre part, la résistance face à cette crise démontrée par les pays émergents, plus spécifiquement ceux du brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) dont la Chine est la figure de proue.
À travers les neuf chapitres qui composent l’ouvrage, trois principales idées sont à retenir. Il y a d’abord la multicausalité de la crise de 2008 que les auteurs abordent en analysant les facteurs microéconomiques et macroéconomiques qui ont conduit à la crise. Les premiers font référence aux politiques des banques commerciales et des assurances (en particulier aux États-Unis) et à l’absence d’une régulation financière (p. 21), alors que les seconds correspondent aux déséquilibres mondiaux (p. 43) et à la politique monétaire des banques des pays développés (p. 71).
Ensuite, les auteurs exposent l’idée centrale de l’ouvrage qui porte sur l’établissement d’un nouvel ordre mondial, c’est-à-dire la redéfinition du système économique et financier (et politique) international. Cette idée d’un nouvel ordre mondial n’est pas nouvelle et elle apparaît chaque fois que le monde connaît un événement qui modifie les relations internationales. La crise financière et économique de 2008, que les auteurs surnomment la grande récession (p. 107), n’échappe pas à cette règle, car, au moment où les puissances occidentales (États-Unis, Japon et Europe) ont subi de plein fouet cette crise sans précédent depuis la grande dépression des années 1930, les pays émergents, en particulier en Asie, ont tant bien que mal réussi à survivre à la crise et à prouver qu’ils constituaient le moteur de la croissance économique mondiale. Les pays du brics qui incarnent ce nouvel ordre mondial ont pu s’appuyer sur de bonnes politiques fiscales et monétaires, sur une diversification de leurs productions et de leurs exportations, sur d’importantes réserves de change, sur une forte demande intérieure, entre autres.
Enfin, Iley et Lewis s’intéressent à la place de la Chine et des États-Unis dans ce nouvel ordre mondial. La crise de 2008 a fini par montrer que la Chine est bel et bien devenue la deuxième économie mondiale. S’appuyant sur des atouts non négligeables comme une population nombreuse, une grande superficie, une industrie active et une forte croissance, la Chine semble être le pays le mieux placé (voire le seul) pour contester la puissance américaine. À cette fin, Pékin doit veiller à la consolidation de la souveraineté et de l’intégrité du territoire chinois, mais il doit aussi composer avec la présence américaine en Asie. Toutefois, au-delà de ces enjeux géostratégiques, la Chine doit également faire face à des réformes structurelles internes, notamment en ce qui concerne la réforme des entreprises, la politique de l’enfant unique qui a instauré un déséquilibre des genres, les inégalités entre les zones rurales et urbaines, les problèmes environnementaux entre autres. Il en va de la survie du modèle capitaliste d’État chinois basé sur un secteur d’entreprise publique fort (p.171) qui, quoique contestable, a permis à la Chine de devenir un acteur économique incontournable. Concernant les États-Unis, toute la question est de savoir si, avec un déficit et une dette extérieure nette qui persistent depuis quelques années, ils pourront continuer à être la plus grande économie, mais aussi le plus grand débiteur de la planète. Pour les auteurs, la réponse réside dans l’importance des revenus nets d’investissement et dans la capacité du dollar américain à demeurer la monnaie de référence internationale, notamment au niveau financier et commercial. Il est clair que la Chine aura sans doute besoin d’un yuan (ou renminbi) qui peut contester l’hégémonie du dollar si elle souhaite devenir la première puissance économique mondiale. Quoi qu’il en soit, le destin de la Chine semble lié à celui des États-Unis quand on sait que les deux pays partagent des intérêts communs non négligeables, comme en témoigne l’importance du marché américain pour l’industrie chinoise ainsi que l’importance de la Chine pour les investissements directs américains (p. 257).
Sur le plan méthodologique, on peut saluer la richesse des données quantitatives qui illustrent la volonté des auteurs appartenant au monde de l’économie et de la finance de donner une bonne base à leur argumentation et d’ainsi faciliter la compréhension pour les économistes, mais aussi pour les non-économistes. Soulignons également la bonne présentation et la pertinence du dernier chapitre en conclusion, qui reprend de façon satisfaisante les principaux thèmes de l’ouvrage. Même si le rappel sur les causes de la crise est appréciable, on peut regretter que la présentation de l’idée maîtresse de l’ouvrage, c’est-à-dire la situation mondiale après la crise, n’intervienne qu’au cinquième chapitre, ce qui peut paraître long pour le lecteur.
En définitive, Global Finance After the Crisis : The United States, China and the New World Order constitue une source d’information pour ceux qui s’intéressent aux causes et aux conséquences de la crise économique de 2008 ainsi qu’aux relations sino-américaines, deux sujets qui n’ont pas fini d’être au coeur des débats.