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La Maison de Robert Schuman près de Metz, en Lorraine, a été acquise par le Conseil général de la Moselle qui l’a transformée en musée, comme on l’a fait pour les maisons de Jean Monnet, de Konrad Adenauer et d’Alcide De Gasperi. Ce réseau des Maisons-musées des Pères de l’Europe permet d’entreprendre certaines activités de nature à faire comprendre l’histoire de l’Europe, notamment des colloques ou journées d’étude axées sur cette histoire.
Des journées ont été organisées les 9 et 11 mai 2010, à l’occasion du 60e anniversaire de la déclaration fondatrice de Robert Schuman, à l’origine de la réconciliation franco-allemande et qui allait donner l’impulsion nécessaire à la construction européenne. L’ouvrage débute par la transcription d’un débat entre Jacques Delors et Paul Collowald qui préside l’Association Robert Schuman. Les quatre parties qui suivent concernent les premières initiatives communautaires, en fait dès 1940 la période des Six, puis la période suivante appelée la période des crises et, enfin, la dernière période avec l’élargissement qui a suivi la fin de la guerre froide.
Cette histoire est analysée cette fois à travers les hommes qui ont joué depuis la guerre un rôle important. Les actes publiés dans cet ouvrage examinent la contribution d’une quinzaine de ces hommes : Maurice Schuman naturellement, dont on découvre l’intérêt qu’il portait à l’Eurafrique, Willy Brandt qui a, d’une certaine façon, préparé la réunification allemande, Pierre Werner et son fameux plan de 1970, Valéry Giscard d’Estaing et Helmut Schmidt auxquels on doit le système monétaire européen, Helmut Kohl dont on ne sait pas encore s’il faut le ranger ou non parmi les « bâtisseurs de l’Europe », Stanislas Geremek qui a plaidé pour l’ouverture aux pays de l’Est… et quelques autres comme Amintore Fanfari, Duncan Sandys ou Felipe Gonzales… Ce n’est pas un livre d’histoire, mais il permet de mieux comprendre l’histoire de l’Europe à travers l’engagement des hommes politiques qui ont milité pour qu’elle se réalise.
Il ne s’agit cependant pas d’une succession de portraits ou de biographies. Ce n’est pas la vie des uns et des autres qui est racontée, mais leur implication dans la transformation progressive des relations entre les pays européens. Ainsi sont mis en lumière le rôle moteur de la France depuis l’origine, comme le rôle très important du plus petit des pays fondateurs, le Luxembourg. Les problèmes posés par la Grande-Bretagne, qui n’ont jamais cessé et qui restent très actuels, sont évoqués à maintes reprises, comme la solidité nécessaire du couple franco-allemand, seul capable de faire progresser l’idée de l’Europe et de la traduire dans les institutions. Les relations avec l’Afrique et l’outre-mer, avec le Commonwealth, avec l’otan sont également évoquées. Et, surtout, on prend conscience de l’extraordinaire diversité des embûches, comme des projets et des compromis qui ont jalonné la construction de l’Europe depuis soixante ans.
Ces quinze contributions sont le fait d’universitaires français, allemands, italiens, belges, luxembourgeois, polonais, hongrois. Trois d’entre elles sont en allemand et une en anglais, mais toutes sont résumées dans les deux autres langues. Toutes fourmillent de références à des discours, à des textes officiels, à des documents d’archives, à des notes diplomatiques… Cet ouvrage qui permet d’éclairer les processus qui ont abouti à l’Union européenne d’aujourd’hui permet d’en bien comprendre les difficultés. Cela n’est pas sans intérêt au moment où de nouvelles difficultés apparaissent – n’envisage-t-on pas parfois une sortie de la Grèce de la zone euro, voire une sortie de l’Allemagne ! Depuis deux ans elles rendent nécessaire une amélioration de la gouvernance de cette Union européenne dont l’histoire ne sera sans doute jamais terminée.