On observe ces dernières années un filet mince mais régulier de publications en sciences politiques et en relations internationales sur les petits États. Comment le livre de Diana Panke se distingue-t-il dans cette production, par exemple du livre Small States in Europe de Robert Steinmetz et Anders Wivel ? Là où Steinmetz et Wivel proposent une série de cas thématiques et nationaux, basés sur des analyses qualitatives, l’approche de Panke est une analyse quantitative des stratégies de différents petits États dans le cadre de négociations à l’intérieur de l’Union européenne, impliquant à la fois d’autres États et les institutions européennes. Panke vise essentiellement à compléter une littérature sur les négociations interétatiques propres à l’Union européenne : cette tradition de recherche s’est en effet largement concentrée sur les grands États, négligeant les petits. Le livre est destiné à un public de spécialistes en sciences politiques intéressés par les processus de négociations et de décisions intérieures à l’ue, avec une nette inclinaison vers l’analyse quantitative. Il demande des connaissances précises en la matière, mais fournit un ensemble de données permettant de mieux comprendre la place des petits États dans l’ue. L’introduction de Panke pose les principaux axes de son travail. Elle part de la notion d’organisations internationales pour chercher dans une de ces organisations, l’Union européenne, les traces de l’activité de ses plus petits États membres. Elle revient sur les contraintes structurelles que les négociations intérieures à l’ue font peser sur ces petits États. Ces contraintes sont essentiellement liées à la taille économique de ces États, qui détermine leurs capacités diplomatiques. Le but de Panke est d’observer la façon dont les petits États participent aux négociations, et éventuellement arrivent à influencer ces négociations malgré leurs désavantages structurels. L’auteure définit par la suite la notion de petit État. Fidèle à une approche quantitative, elle décrit les petits États comme les 19 États membres de l’ue ayant « moins de la moyenne des votes au Conseil des ministres de l’ue dans un vote à la majorité qualifiée (12,78 %) ». Cette définition est discutable, mais elle correspond bien au parti pris méthodologique de Panke. Celle-ci revient ensuite sur les grandes lignes de la prise de décision intérieure à l’ue, et cartographie les faiblesses intrinsèques des petits États dans ce cadre. Ces États, pour se démarquer, doivent concentrer leurs ressources sur des questions précises essentielles pour des intérêts nationaux clairement définis. De même, ils ont à leur disposition des outils d’influence qu’ils peuvent utiliser. L’auteure s’emploie ensuite à mesurer l’activisme de ces petits États. Elle trouve que certains d’entre eux, le Danemark ou le Luxembourg par exemple, sont plus actifs que d’autres, s’impliquant davantage dans les échanges européens, et arrivant plus facilement que d’autres (la Grèce par exemple) à produire des stratégies de négociation. Steinmetz et Wivel reviennent eux aussi sur cet exemple du Luxembourg. Panke se base ici sur une catégorisation des stratégies de négociation et sur une définition du « succès » lors de négociations, ses résultats quantitatifs étant exposés en annexe. Globalement, la conclusion du livre est assez classique : les petits États ne sont pas impuissants dans l’Union européenne, dont le système de négociations internes leur donne des moyens d’action, mais ces moyens dépendent largement du contexte, du sujet, de l’époque, et de la capacité de ces États à participer activement et intelligemment aux né-gociations. Le degré de coordination interne de chaque État est essentiel dans la mise en place de stratégies et dans le processus de négociation. Des États mal organisés, intérieurement divisés, des diplomates manquant d’instructions, des communications problématiques sont …
Small States in the European Union. Coping with Structural Disadvantages, Diana Panke, 2010, Burlington, vt, Ashgate, 243 p.[Notice]
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Louis Clerc
Département d’histoire politique, Université de Turku, Finlande