Comptes rendus : Études stratégiques et sécurité

Stephen J. Cimbala et Peter K. Forster, 2010, Multinational Military Intervention. nato Policy, Strategy and Burden Sharing, Burlington, vt, Ashgate, 233 p.[Notice]

  • Justin Massie

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  • Justin Massie
    École supérieure d’affaires publiques et internationales, Université d’Ottawa, Ontario

Au moment où l’otan est engagée dans une nouvelle offensive militaire « hors zone », cette fois en Libye, offensive caractérisée par un engagement militaire à géométrie variable selon les États participants, l’analyse de Stephen Cimbala et Peter Forster sur le partage du fardeau arrive à point. En effet, depuis la fin de la guerre froide, l’on assiste à une multiplication inédite d’opérations militaires multilatérales menées par les États occidentaux, un phénomène qui semble n’avoir rien d’éphémère. La problématique de l’ouvrage est d’autant plus pertinente qu’elle s’inscrit dans une littérature florissante qui tente de cerner autant les raisons derrière les contributions variables des alliés aux nombreuses opérations militaires coalisées que la nature de ces variations et leurs implications pour les interventions multilatérales à venir. C’est bien davantage à ce second niveau que l’apport de Multinational Military Intervention se distingue. L’ouvrage adopte une perspective multidimensionnelle du partage du fardeau en comparant la distribution relative des risques, des coûts et des responsabilités entre alliés, et ce, de l’intervention militaire au Liban au début des années 1980 aux négociations entourant la réduction des armes nucléaires dans l’après-guerre froide, en passant par les guerres du golfe Persique, des Balkans et d’Afghanistan. Au-delà donc de simples analyses comparées des budgets militaires et financiers ou des troupes déployées, l’ouvrage examine de nouveaux aspects que représente le partage équitable des risques et des responsabilités à prendre part à des interventions militaires de plus en plus longues, coercitives et périlleuses. On y aborde ainsi les coûts et les bénéfices liés à de nouvelles dimensions que sont l’influence, la réputation et les pertes humaines. Si l’objectif des auteurs est d’explorer l’impact du changement systémique (d’un ordre dipolaire à multipolaire) sur le partage du fardeau entre États occidentaux, à travers les perceptions contrastées des menaces et des opportunités, le résultat réside davantage en une description détaillée de chacune des études de cas, de même qu’en une synthèse des nouvelles caractéristiques du partage du fardeau à l’ère dite de la multipolarité. L’ouvrage s’adresse donc au large public de praticiens, analystes et étudiants intéressés moins par les enjeux de polarité eux-mêmes ou les causes des contributions étatiques disparates à la sécurité collective que par l’évolution des opérations militaires contemporaines, ainsi que des relations transatlantiques et des questions d’équité qui leur sont associées. On y souligne également les raisons pouvant expliquer le manque de volonté à prendre part à une action collective, c’est-à-dire la perception de menaces, les capacités à agir ainsi que les différents intérêts des États. Il est nécessaire de rappeler, toutefois, que ces motivations ne sont pas examinées systématiquement pour chacun des États (les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, l’Italie et l’Allemagne) et chacune des études de cas. Les auteurs insistent néanmoins à plusieurs reprises pour dire que la perception d’une menace à la « crédibilité » ou au « prestige » d’un État ou de l’Alliance atlantique constitue l’une des motivations d’action principales à contribuer substantiellement aux opérations coalisées. Le premier cas d’étude – le seul ayant lieu au cours de la guerre froide malgré la volonté de comparaison systémique des auteurs – porte sur la force multinationale déployée au Liban en 1982. Celle-ci serait le fruit d’une volonté de contrer l’influence soviétique grandissante au Moyen-Orient, d’une perte de prestige international des États-Unis, d’une politique d’équilibrage indirect de la France et d’un désir britannique (et français) de maintenir un statut de grande puissance. Les « intérêts nationaux » de chacun de ces États expliqueraient donc le partage variable du fardeau. Ce serait toutefois des raisons financières, de politique intérieure et l’absence d’un mandat des Nations Unies qui expliqueraient …