En 2005, le rejet par les Français et les Hollandais du Traité établissant une constitution pour l’Europe (tece) fit prendre un nouveau tournant à la tentative de remise à plat des institutions européennes. Le traité de Lisbonne, signé en décembre 2007, confirma la volonté des chefs d’État européens de remettre sur la table le chantier institutionnel entamé par la Convention européenne. L’ouvrage sous la direction de Marianne Dony et Lucia Serena Rossi s’attache à étudier les contours et les modalités de cette réforme institutionnelle. Les contributions au livre proviennent d’un projet de recherche associant trois universités européennes et visant à étudier, autour de la notion de « constitutionnalisation » du système européen, les effets de la réforme européenne en termes de démocratisation, de transparence et de cohérence du système. Mis en oeuvre en 2005-2006, le projet se concentre essentiellement sur le tece, intégrant à la marge le traité de Lisbonne et ses apports. La première partie du livre traite de démocratisation et de transparence. Giacomo Di Federico revient sur la distinction entre actes législatifs et actes non législatifs dans les deux traités étudiés, autour des notions de démocratie et de transparence : simplification des hiérarchies entre actes, démocratisation du système législatif, etc. Maria Francesca Portincasa indique les changements affectant l’utilisation de la procédure législative spéciale, montrant la généralisation des procédures de codécision. Marianne Dony se penche ensuite sur la question des procédures financières, expliquant les éléments fondamentaux de système repris du tece par le traité de Lisbonne (contrôle accru du Parlement en ce qui concerne les dépenses, monopole du Conseil en ce qui a trait aux ressources, mécanismes de consultation interinstitutionnels, etc.). Anne Weyembergh et Veronica Santamaria reviennent ensuite sur le contrôle démocratique dans l’espace pénal européen. Encore imparfait, ce contrôle démocratique n’en bénéficie pas moins des nouveaux traités. Les deux auteures insistent avec raison sur la nécessité de développer, parallèlement à un contrôle démocratique représentatif, un contrôle direct, participatif, encore balbutiant au sein de l’ue : l’Europe reste loin des citoyens, un aspect souligné dans d’autres contributions. Lorenzo Picciano et Luisa Ficchi concluent la partie en traitant deux aspects de la démocratisation européenne : la dimension régionale de l’ue comme facteur de démocratisation et la transposition des principes classiques de l’État de droit en droit communautaire. La conclusion de Ficchi met en particulier l’accent sur l’importance des principes fondamentaux de l’État de droit (dont la charte des droits fondamentaux) dans le dispositif européen, alors que Picciano pose la question du rôle des régions dans l’architecture européenne, comme éventuel « trait d’union » entre citoyens et administration européenne. La deuxième partie traite de la cohérence et de l’efficacité de la politique étrangère européenne. Federico Casolari, Lucia Serena Rossi, Antonietta Di Blase et Elisa Baroncini reviennent sur différents aspects de la relation entre droit international et droit communautaire : transposition des normes du droit international, pouvoir de la Commission de conclure des traités, règles concernant la propriété intellectuelle, etc. Mario Telò, Alix Rancurel, Marie Bourriche, Gaëlle Dusépulchre, Giovanni Grevi, Luca Paladini et Louis Balmont mettent ensuite en avant un ensemble de cas d’études permettant de juger des évolutions de l’action extérieure européenne en matière d’efficacité et de cohérence. Les contributions d’Alix Rancurel sur l’action extérieure européenne en Amérique latine et de Marie Bourriche sur la politique européenne d’aide au développement sont particulièrement intéressantes. Elles rapportent de façon concrète deux cas d’actions extérieures, montrant les évolutions et les problèmes, le manque d’harmonisation et de cohérence comme les progrès récents. Comme on le voit, le point de départ du livre est essentiellement juridique. Les conclusions de nombreux contributeurs …
Dony, Marianne et Lucia Serena Rossi (dir.), Démocratie, cohérence et transparence. Vers une constitutionnalisation de l’Union européenne ?, coll. Études européennes, Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 2008, 369 p.[Notice]
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Louis Clerc :
Département d’histoire politique, Université de Turku, Finlande