Comptes rendus : Régionalisme et régions - Amérique

David, Charles-Philippe et Julien Tourreille (dir.), Le conservatisme américain. Un mouvement qui a transformé les États-Unis, coll. Enjeux contemporains, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2007, 171 p.[Notice]

  • Simon Petermann

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  • Simon Petermann
    Département de science politique
    Université de Liège, Belgique

Voilà un ouvrage collectif qui arrive à point nommé, alors que la vie politique s’anime aux États-Unis en vue des élections présidentielles. Beaucoup d’excellents livres existent en anglais sur le conservatisme américain (notamment ceux de George Nash, de John Micklethwait et d’Adrian Wooldridge) mais il y en a très peu en français. Le présent ouvrage comble donc un vide. Il analyse en profondeur un courant politique, à savoir le conservatisme américain, qui a profondément transformé les États-Unis et qui a un impact sur les relations de ce pays avec ses voisins, ses alliés et le monde dans son ensemble. Cet ancrage à droite est relativement récent. Dans leur introduction, Charles-Philippe David et Julien Tourreille, qui ont dirigé l’ouvrage, montrent bien que pendant la première moitié du xxe siècle les idées de gauche, qualifiées de « libérales » aux États-Unis sont largement dominantes. Le virage à droite va se faire paradoxalement à l’époque même où le libéralisme connaît son apogée. La défaite de Barry Goldwater aux élections présidentielles de 1964 s’inscrit dans une période de gestation des idées conservatrices. C’est lui qui insuffle le conservatisme au sein du Parti républicain. Mais la définition même du conservatisme pose problème. En effet, ce courant rassemble des sensibilités diverses, qui vont des conservateurs traditionnels opposés à des changements sociaux trop rapides aux néoconservateurs militants d’une politique étrangère proactive, en passant par les paléoconservateurs, tenants d’un ordre social articulé autour de valeurs traditionnelles, au premier rang desquelles se situe la famille. C’est pourquoi les auteurs de l’ouvrage se sont attachés à dégager les grands principes, les composantes et les tendances du conservatisme. Élu triomphalement en 1980, c’est Ronald Reagan qui, en fait, imposa le conservatisme dans la vie politique américaine. Il fut le véritable instigateur d’une « révolution » d’essence conservatrice. Celle-ci s’inscrit autour de trois axes principaux. Le premier axe est la réduction de la taille du gouvernement fédéral, en particulier dans ses fonctions de régulation. Beaucoup de mesures adoptées sous les administrations précédentes, telles la discrimination positive ou normes environnementales, ont été revues à la baisse parce que considérées comme trop contraignantes pour les entreprises. Le second axe est la diminution des impôts mise en oeuvre avec l’Economic Recovery Act (1981). Et le troisième est l’augmentation massive des budgets du département de la Défense et le projet de bouclier antimissiles Star Wars. Cette course aux armements finira, on le sait, par épuiser l’urss et précipiter sa décomposition. Cette longue marche conservatrice qui a permis au parti Républicain de connaître de nombreux succès est marquée également par de nombreux déboires. S’ils gagnent la majorité au Congrès en 1994 (une première depuis les années 1950), ils perdent cette majorité en 1998 et, entretemps, sont incapables en 1996 de reconquérir la Maison Blanche. Avec l’élection de George W. Bush en 2000 et sa réélection en 2004, le courant conservateur semble l’emporter mais, en réalité, il n’est pas à l’abri de fortes turbulences. Le président s’appuie à la fois sur les conservateurs traditionnels (y compris la droite religieuse) et sur les néoconservateurs dont l’influence sera surtout forte dans le domaine de la politique étrangère après les attentats du 11 septembre 2001. Mais si le président parvient à maintenir une certaine cohésion lors de son premier mandat, celle-ci s’effrite au cours du second mandat. La gestion désastreuse des conséquences de l’ouragan Katrina, les scandales de corruption, la gestion incertaine de la guerre en Irak et les images d’Abou Ghraib ont provoqué un mécontentement grandissant chez les conservateurs et le retrait des néoconservateurs de l’avant-scène. La victoire des démocrates aux élections de novembre 2006, voire …