Comptes rendus : Théorie, méthode et idées

Grande, Edgar et Louis W. Pauly (dir.), Complex Sovereignty. Reconstituting Political Authority in the Twenty-First Century, Toronto, on, University of Toronto Press, 2005, 348 p.[Notice]

  • Georges Labrecque

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  • Georges Labrecque
    Collège militaire royal du Canada
    Kingston, on

Edgar Grande et Louis W. Pauly, qui sont respectivement professeur de sciences politiques à l’Université de Munich et directeur du Centre for International Studies de l’Université de Toronto, ont regroupé dans Complex Sovereignty onze contributions de chercheurs provenant principalement d’universités canadiennes et allemandes et à qui ils ont demandé de réfléchir sur la question de l’autorité politique dans le contexte de la mondialisation. Les études de cas, consacrées à divers sujets transnationaux tels la sécurité, l’environnement, l’agriculture, les finances internationales, l’alena, l’Union européenne, les partenariats public/privé, sont précédées d’un chapitre introductif dans lequel les directeurs montrent comment la fin de la guerre froide, l’intégration de l’économie, les nouvelles technologies de l’information, les menaces de pandémies et les menaces du terrorisme ont créé un nouvel environnement politique où la notion traditionnelle de souveraineté territoriale étatique, si elle n’est pas devenue obsolète, requiert qu’il faille reconstruire une autorité politique à plusieurs niveaux, y compris aux niveaux régional et mondial. Aussi, les directeurs définissent-ils un nouveau concept de souveraineté basé sur les propositions suivantes : elle est à la fois externe et interne, ces deux dimensions pouvant se développer séparément, tout en demeurant interdépendantes ; cette souveraineté peut être divisée et transformée, ce qui autorise de nouveaux aménagements constitutionnels. Dans son développement historique cette notion de souveraineté a façonné cinq types d’États : absolutiste, constitutionnel, État-nation, démocratique, enfin, État-providence. De plus, les auteurs de ce chapitre envisagent la création d’un sixième type, qu’ils appellent le transnational cooperation State ou networked state, à l’instar de Ulrich Beck qui, dans sa contribution (chap. 2), propose une théorie, celle de la world risk society, pour tenter d’expliquer comment une perception différente des menaces à la sécurité, de part et d’autre de l’Atlantique, ne devrait pas empêcher la coopération basée sur ce qu’il appelle le réalisme cosmopolitain, approche adoptée également par Mathias Albert (chap. 3) qui, à la suite des travaux de Nicklas Nuhmann, nous invite à reconstituer une nouvelle carte conceptuelle du monde établie non plus ou non plus seulement sur l’international mais sur le global, dans un contexte où le nouveau système politique de la société mondiale transcende l’addition des sociétés nationales. Dans le chapitre suivant, au titre très accrocheur, Governance. A Garbage Can Perspective, Guy Peters soutient que le concept de gouvernance, loin d’être immuable, doit être adapté aux besoins et aux circonstances. Ainsi l’auteur estime, à la suite des travaux de Cohen, March et Olsen, que le modèle du comportement organisationnel peut aider à comprendre comment la gouvernance peut être supplée dans un monde moins clairement administré par l’autorité et la hiérarchie et à expliquer les difficultés auxquelles de nombreux gouvernements ont à faire face dans leurs prises de décisions, dans le contexte de la multiplicité des acteurs. William Coleman, dans le chapitre 5, montre que le domaine agricole est marqué tout autant par le conflit que par la coopération. En effet, si cette coopération a pu être facilitée par certains facteurs (développement du transport des denrées, méthodes de conservation et de transformation des aliments, etc.), force est de constater que l’espace politique global en matière agricole est caractérisé par une asymétrie des pouvoirs dans ce secteur, et que des pays comme le Brésil, la Chine et l’Inde se plaignent d’un manque de coopération des États-Unis et de l’Union européenne. C’est à des conclusions tout aussi mitigées qu’arrive Louis Pauly (chap. 6), dans sa contribution consacrée aux finances internationales, qui examine notamment la Banque mondiale, le Fonds monétaire international et le contenu de la conférence de Monterey. Les deux contributions suivantes, fort intéressantes à comparer et d’abord …