Comptes rendus : Droit international

Scott, Shirley V., International Law in World Politics. An Introduction, Boulder, co, Lynne Rienner Publishers, 2004, 327 p.[Notice]

  • Georges Labrecque

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  • Georges Labrecque
    Département de sciences politiques et d’économie
    Collège militaire royal du Canada

Peu de disciplines sont aussi mal connues, y compris par les universitaires, que le droit, en particulier le droit international. Ainsi, on affirme souvent que celui-ci est impuissant à contribuer au règlement pacifique des différends, notamment les différends territoriaux qui sont les plus nombreux. Pourtant, c’est dans la majorité des cas que les décisions des tribunaux internationaux sont respectées par les Parties, lorsque ces instances ont été saisies par compromis. Par ailleurs, les résultats sont moins éloquents quand l’affaire est introduite par requête unilatérale. C’est un fascinant voyage que le lecteur est invité à parcourir en lisant International Law in World Politics, car il ne s’agit pas seulement de plonger au coeur de deux disciplines en examinant certes leurs objets respectifs d’études, mais aussi de longer, si on peut dire, la frontière qui les unit plutôt qu’elle les sépare. Le droit international et la politique internationale sont en effet deux sciences de plus en plus rapprochées dans le contexte de la mondialisation, mais elles n’en sont pas moins distinctes – réalité que certaines écoles de pensée ont tendance à occulter, notamment quant à l’autonomie du droit international. Cette interrelation presque inextricable, cette question de savoir lequel, de l’oeuf ou de la poule, vient en premier, l’auteure la présente avec une clarté admirable dès le chapitre introductif, en montrant, par exemple, que les traités multilatéraux (cette source la plus importante du droit international, chap. 7 et 8) sont le résultat d’âpres négociations au cours desquelles les États les plus puissants semblent de toute évidence partir avec une longueur d’avance. Pourtant, la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, mentionnée par Scott à plusieurs reprises tout au long de l’ouvrage, n’est-elle pas d’abord le fruit de la volonté des États en développement auxquels on a reconnu des juridictions exclusives sur d’immenses zones de pêche (200 milles marins), réputées jusque-là de haute mer et donc ouvertes à tous, mais en pratique aux États technologiquement et économiquement avantagés. En d’autres termes, le principe de l’égale souveraineté des États, qui sont les sujets principaux du droit international (chap. 2), consacre l’égalité de droit, tandis que subsiste l’inégalité de fait, comme du reste en droit interne. La notion de consentement, fondamentale en droit international, met en évidence la proximité de la discipline avec la politique, à un point tel que l’ouvrage aurait pu tout aussi bien s’intituler World Politics in International Law ou mieux encore International Law and World Politics. Scott examine aussi ces interrelations dans les activités des organisations internationales et des acteurs non étatiques (chap. 3 et 4), soit l’Assemblée générale des Nations Unies, son Conseil de sécurité, les ong comme Amnesty International ou Greenpeace, les sociétés multinationales, enfin la Cour internationale de justice (cij), qui aurait mérité à elle seule un chapitre entier, puisque le principe du consentement, sans lequel elle ne saurait fonctionner, est ici particulièrement intéressant à examiner. L’auteure accorde par ailleurs à ce tribunal quelques pages fort intéressantes au chapitre 5, dans lequel elle adopte une approche résolument théorique en prenant ses distances, si on peut dire, par rapport à la politique, en montrant l’autonomie considérable du droit : « International law may be entwined with world politics, but it is not enmeshed » (p. 87). Scott définit alors la discipline comme étant l’étude des règles, principes et concepts, qui peuvent être divisés en trois catégories (ou niveaux) entre lesquels il existe une interrelation. Ainsi, il faut distinguer, au premier niveau, l’école philosophique à laquelle appartient le droit (positif ou naturel); au second niveau, se trouve le moteur permettant de faire fonctionner …