Volume 55, numéro 2, automne 2022 Les impacts de la COVID-19 sur les populations judiciarisées et vulnérables et sur les institutions de prise en charge Sous la direction de Bastien Quirion et Virginie Gautron
Sommaire (14 articles)
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Introduction : les impacts de la COVID-19 sur les populations judiciarisées et vulnérables et sur les institutions de prise en charge
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COVID-19, usages de drogues et réduction des risques : analyse croisée des expériences et de l’impact de la pandémie en France et au Québec
Marie Jauffret-Roustide et Karine Bertrand
p. 17–42
RésuméFR :
Les personnes utilisatrices de substances qui fréquentent les services d’addictologie et de réduction des risques font partie des publics en situation de précarité dont les vulnérabilités sont aggravées en temps de pandémie. Notre article étudie l’expérience de la pandémie par ces personnes et l’impact de celle-ci sur les pratiques professionnelles et l’action publique, comme productrice d’inégalités mais aussi d’innovations et de solidarités. La collecte de données a été réalisée en France et au Québec, incluant des entretiens semi-directifs auprès de personnes usagères de substances (France, n = 25 ; Québec, n = 15) et de professionnels en addictologie et réduction des risques (France, n = 25 ; Québec, n = 18). Une approche théorique pragmatiste a été mise en oeuvre et analyse les niveaux macro et micro ensemble et de manière réflexive. Dès le premier confinement, les dispositifs professionnels ont tenté au mieux d’organiser une continuité de services afin de répondre aux besoins des usagers dans un contexte d’urgence sanitaire : par le déploiement de l’accès à l’hébergement, le développement de la téléconsultation afin d’assurer la continuité des soins. Des innovations ont été réalisées par des collaborations entre acteurs sur l’hébergement ou sur l’inclusion accélérée de la réduction des risques (alcool et approvisionnement sécuritaire) dans les centres d’hébergement. Des difficultés ont été également observées en lien avec des contraintes organisationnelles. Les usagers se sont bien approprié les mesures de prévention. Ils ont subi des logiques de contrôle social dans les champs sanitaire et répressif. Au-delà des vulnérabilités apportées par la COVID-19, des adaptations peuvent également constituer des opportunités de création de solidarités entre usagers et professionnels, des espaces favorables aux innovations professionnelles, et des nouveaux modes de collaboration et d’organisation entre acteurs.
EN :
People who use psychoactive substances and who attend drug treatment and harm reduction services represent groups whose vulnerabilities are exacerbated during a pandemic. We study the pandemic experience of people with problematic substance use and its impact on professional practices and policies, with an eye towards vulnerability and innovations. This comparative study was conducted in France and Quebec via semi-structured interviews with substance users (France, n=25 ; Quebec, n=15) and care and harm reduction providers (France, n=25 ; Quebec, n=18). We employ a pragmatist theoretical approach that reflexively analyzes the macro and micro levels together. During the first lockdown, professionals tried their best to organize a continuity of service to meet the needs of people in a context of a health emergency via the deployment of access to accommodation and the development of teleconsultation to ensure continuity of care. Innovative collaborations between actors occurred related to accommodation or the inclusion of harm reduction (alcohol and safe supply) in shelters. Difficulties were observed stemming from organizational constraints. Individuals adopted the preventive measures and had to endure social control both in the health and repressive fields. Beyond the vulnerabilities produced by COVID-19, adaptations also constitute opportunities for : solidarity between users and professionals, professional innovations, as well as new modes of collaboration and inter-actor organization.
ES :
Las personas que consumen sustancias y acuden a los servicios de adicción y reducción de riesgos se encuentran entre los grupos de población en situación de precariedad cuya vulnerabilidad se ha agravado durante la pandemia. Nuestro artículo estudia cómo estas personas han vivido la pandemia y el impacto de ésta en las prácticas profesionales y la acción pública, como productora de desigualdades, pero también de innovaciones y de solidaridad. La recogida de datos se llevó a cabo en Francia y en Quebec, incluyendo entrevistas semidirectivas con usuarios de sustancias (Francia, n=25 ; Quebec, n=15) y con profesionales del ámbito de la adicción y la reducción de riesgos (Francia, n=25 ; Quebec, n=18). Se utilizó un enfoque teórico pragmático, analizando conjuntamente los niveles macro y micro de forma reflexiva. Desde el primer confinamiento, los dispositivos profesionales trataron de organizar una continuidad de los servicios para responder a las necesidades de los usuarios en un contexto de emergencia sanitaria : se impulsó el acceso al alojamiento y se desarrolló la teleconsulta para garantizar la continuidad de los cuidados. Las innovaciones se han producido a través de la colaboración de los actores del sector del alojamiento o mediante la inclusión acelerada de la reducción de riesgos (alcohol y suministro seguro) en los centros de alojamiento. También se observaron dificultades en relación con las limitaciones organizativas. Los usuarios han integrado las medidas de prevención. Han sido sometidos a lógicas de control social en el ámbito sanitario y represivo. Más allá de las vulnerabilidades producidas por el COVID-19, las adaptaciones también pueden constituir oportunidades para la solidaridad entre usuarios y profesionales, espacios favorables a las innovaciones profesionales y nuevos modos de colaboración y organización entre los actores.
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Confinés en prison : l’expérience carcérale au temps de la COVID-19
Lara Mahi, Léo Farcy-Callon et Vincent Rubio
p. 43–65
RésuméFR :
Durant la pandémie de COVID-19, des mesures exceptionnelles restreignant les libertés ont été appliquées avec pour mot d’ordre : « Restez chez vous ! » Si la prison est devenue métaphore du confinement, peu de choses sont connues sur la façon dont la période a été vécue par les personnes détenues. À partir d’une enquête sociologique réalisée dans cinq prisons françaises durant la pandémie (2020-2021), associant observations et entretiens, cet article interroge les effets des politiques de confinement sur l’expérience carcérale. Nous montrons que l’altération ou la suspension des principales « activités » dans lesquelles les détenus sont tenus de s’impliquer durant l’incarcération (l’école et la formation professionnelle, le travail, les soins), et dont l’engagement est récompensé en temps ordinaire par des réductions et des aménagements de peine, a exacerbé l’un des paradoxes majeurs d’une institution enjoignant son public à l’« activité » tout en le contraignant à l’immobilité. Nous soutenons qu’au-delà d’un quotidien bouleversé, c’est le sens même de la peine de prison, construite autour du thème de la « réinsertion », qui a été troublé dans une institution à l’arrêt et une société confinée.
EN :
During the COVID-19 pandemic, exceptional measures that restricted freedoms were applied using the motto : “Stay home ! ” If the prison became a metaphor for confinement, little is known about how this period was experienced by actual detainees. Based on an ethnographic field study conducted in five French prisons during the pandemic in 2020 and 2021, and combining observations and interviews, the present article questions the impacts of confinement policies on the penitentiary experience. We show that the alteration or suspension of the major activities that inmates are required to partake in during their time in prison (school and training, work, healthcare)–and whose commitment is rewarded in ordinary times by sentence reductions and accommodations–has exacerbated one of the main paradoxes of an institution that pushes its population towards “activity,” while forcing them into immobility. We suggest that it is the very meaning of the prison sentence, built around the theme of “reintegration,” which has been disturbed in the context of a standstill institution and a confined society.
ES :
Durante la pandemia de Covid-19, se aplicaron medidas excepcionales de restricción de libertad, bajo el lema de « ¡Quedaos en casa ! ». Si la cárcel se volvió una metáfora del confinamiento, poco se sabe sobre cómo las personas detenidas vivieron dicho periodo. Partiendo de una investigación sociológica llevada a cabo en cinco cárceles francesas durante la pandemia (2020-2021), asociando observaciones y entrevistas, este artículo se interesa por los efectos de las políticas de confinamiento sobre la experiencia carcelaria Los autores muestran que la alteración o la suspensión de las principales « actividades » en las que los detenidos pueden implicarse durante su encarcelamiento (escuela y formación profesional, trabajo, cuidados de salud), y cuya implicación se recompensa en tiempo ordinario con reducciones de pena y beneficios penitenciarios, ha venido a exacerbar una de las mayores paradojas de una institución que exhorta su público a la « actividad » mientras lo obliga al mismo tiempo a la inmovilidad. El artículo sostiene que, más allá de la vida cotidiana en prisión, es el propio significado de la pena de prisión, construido alrededor del tema de la « reinserción », el que ha sido puesto en cuestión en una institución paralizada y una sociedad confinada.
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La COVID-19 : « une seconde prison » : l’expérience de personnes âgées judiciarisées
Valérie Aubut, Mathieu Goyette et Chantal Plourde
p. 67–92
RésuméFR :
La proportion de personnes âgées judiciarisées (PAJ) de 50 ans et plus est en constante augmentation dans les établissements carcéraux. Environ 80 % d’entre elles éprouvent des difficultés sur le plan de leur santé physique et de leur bien-être psychologique et social. L’ensemble de ces difficultés complexifie leur processus de réintégration sociocommunautaire. Or, le contexte de pandémie amène des défis supplémentaires. Cette étude qualitative descriptive aborde l’expérience vécue en regard de la COVID-19 de PAJ en incarcération et son influence perçue sur leur réintégration sociocommunautaire. Des entrevues en profondeur semi-dirigées ont été menées auprès de 22 participants âgés de 50 à 73 ans. L’analyse thématique a permis de mieux comprendre les dimensions du processus de réintégration sociocommunautaire ayant été modulées par la COVID-19 à travers deux périodes charnières du processus, soit lors de l’incarcération et lors du retour en communauté. L’influence de la crise sanitaire sur le processus de retour en société a été plus importante à ses débuts qu’un an plus tard. Les résultats mettent en lumière le manque de cohérence entre les mesures sociosanitaires et les objectifs de réintégration sociocommunautaire.
EN :
Offenders aged 50 and older represent a growing population among the incarcerated. Around 80 % of them struggle with difficulties related to their physical and mental health, as well as their social well-being. These difficulties heavily impacts their social and community reintegration process. The pandemic has given rise to additional and greater challenges. This interpretive descriptive qualitative study aims to comprehend older offenders’ experiences related to their incarceration at the time of COVID-19, as well as its perceived influence on their social and community reintegration. In-depth semi-structured interviews were conducted with 22 participants ranging from 50 to 73 years of age. A thematic analysis was conducted to further understand the aspects modulated by COVID-19 during each key period of the social and community reintegration process, namely, while they were incarcerated and while they were released into the community. The pandemic influenced the social and community reintegration process, and had a larger impact on offenders at the beginning of the pandemic, as compared to a year later. Results highlight the lack of consistency between health measures and social and community reintegration objectives.
ES :
La proporción de personas mayores detenidas de 50 años o más de edad está aumentando constantemente en las prisiones. Aproximadamente el 80 % de estas personas tienen dificultades en cuanto a su salud física y su bienestar psicológico y social. Todas estas dificultades hacen más complejo su proceso de reinserción sociocomunitaria. El contexto de la pandemia conlleva retos adicionales. Este estudio cualitativo descriptivo examina la experiencia de los detenidos mayores encarcelados ante el COVID-19 y su influencia percibida en su reintegración socio-comunitaria. Se realizaron entrevistas en profundidad y semiestructuradas a 22 participantes de entre 50 y 73 años. El análisis temático permitió comprender mejor las dimensiones del proceso de reinserción sociocomunitaria que fueron moduladas por el COVID-19 a lo largo de dos periodos cruciales del proceso, esto es, durante el encarcelamiento y durante el retorno a la comunidad. La influencia de la crisis sanitaria en el proceso de reincorporación a la sociedad fue mayor al principio que un año después. Los resultados ponen de manifiesto la falta de coherencia entre las medidas sociosanitarias y los objetivos de reinserción sociocomunitaria.
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Gestion punitive de l’itinérance durant la pandémie : défis et stratégies des intervenant·e·s de première ligne à Montréal
Marianne Quirouette, Karl Beaulieu et Nicolas Spallanzani-Sarrasin
p. 93–120
RésuméFR :
Les personnes en situation d’itinérance (PSI) qui tentent de (sur)vivre dans les espaces publics vivent une judiciarisation accrue ainsi qu’un contrôle punitif qui se manifestent aussi dans les espaces de soins. Les intervenant·e·s de première ligne, dans les refuges ou dans la rue, ont des contacts fréquents avec la police. Les pratiques de profilage social et de contrôle punitif exercées sont largement documentées, mais des lacunes subsistent quant aux impacts de la pandémie de COVID-19 pour les intervenant·e·s et leurs usager·ère·s. Notre article rend compte d’une étude de cas menée à Montréal, fondée sur 43 entrevues semi-structurées portant sur les constats d’infraction liés aux mesures sanitaires, les campements et les agent·e·s de sécurité dans les refuges. En nous inspirant de la criminologie des crises ainsi que des études sur la gestion de l’itinérance, nous analysons les défis et les stratégies que les travailleur·euse·s de première ligne utilisent pour résister aux approches punitives. Notre étude aide à clarifier les conséquences de la gouvernance des espaces publics et de services durant la pandémie pour les intervenant·e·s et leurs usager·ère·s. Elle participe à une meilleure compréhension de la violence juridique, du contrôle punitif et de l’exclusion des populations marginalisées, tout en portant une attention particulière à la résilience du milieu communautaire et des intervenant·e·s de première ligne.
EN :
People experiencing homelessness (PEH) are pressed to survive both in public spaces, where they face intense judicialization and criminalization, as well as in spaces of care, where they also experience punitive governance. Frontline service providers, in shelters, or conducting street outreach, regularly engage with security forces and the police. The social profiling and punitive control of PEH has been widely documented, yet little is known about the impacts of the COVID-19 pandemic on key issues important to practitioners and their clients. Our paper reports on 43 semi-structured interviews conducted with Montreal practitioners, focusing on local themes such as COVID tickets, encampments, and increased security forces in shelters. Engaging with work on the punitive governance of homelessness and a criminology of crisis, we analyze how frontline workers face challenges while also pushing to adapt, innovate and resist punitive approaches. Our work can help clarify when and how pandemic-related laws, regulations, police practices, and agency rules impact practitioners and the people they work with. We contribute to a better understanding of the control, punishment and exclusion of PEH and of legal violence, while also focusing on community and frontline resilience.
ES :
Las personas si hogar intentado sobrevivir en los espacios públicos se enfrentan a una intensa judicialización y a un control punitivo que se manifiesta también en los espacios donde reciben asistencia. Los proveedores de servicios de primera línea, en los albergues o en la calle, tienen contacto frecuente con la policía. Las prácticas de elaboración de perfiles sociales y el control punitivo han sido ampliamente documentadas, pero las lagunas persisten en lo que se refiere al impacto que ha tenido la pandemia de COVID-19 sobre los trabajadores de primera línea y sus usuarios. Nuestro artículo presenta un estudio de caso llevado a cabo en Montréal, fundado sobre 43 entrevistas semiestructuradas sobre las multas por incumplimiento de medidas sanitarias, los campamentos y las fuerzas de seguridad en los albergues. Inspirándose en la criminología de las crisis y los estudios sobre la gestión de las personas sin techo, analizamos los desafíos y las estrategias que los trabajadores de primera línea utilizan para resistir ante los enfoques punitivos. Nuestro estudio ayuda a clarificar las consecuencias de la gobernanza de los espacios públicos y de los servicios durante la pandemia para dichos trabajadores y sus usuarios. Además, contribuye a una mejor comprensión de la violencia jurídica, del control punitive y de la exclusión de las personas marginalizadas, prestando especial atención a la resiliencia del sector comunitario y de los profesionales de primera línea.
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La pandémie de COVID-19, le prisonnier et le juge : étude des recours exercés par les personnes incarcérées en France pendant la crise sanitaire
Nicolas Klausser, Gaëtan Cliquennois, Christine Burkhardt, Stefano Cannepele, Daniel Fink et Annie Kensey
p. 121–146
RésuméFR :
Cet article porte sur une analyse des recours exercés par les personnes détenues en établissement pénitentiaire en France visant à contester leurs conditions de détention pendant la crise sanitaire. Grâce à un accès à la base de données Ariane archives du Conseil d’État, 117 décisions rendues par les tribunaux administratifs, les cours administratives d’appel et le Conseil d’État ont pu être recueillies. L’analyse de ces décisions met en évidence la faible concrétisation du droit à la santé des personnes détenues pendant la crise sanitaire, ainsi que les lacunes du contrôle juridictionnel exercé, le juge administratif ne prononçant quasiment jamais de mesures pour contrôler effectivement les conditions de détention, et s’en tenant aux allégations de l’administration. Ces constats viennent conforter les deux hypothèses retenues : la gestion de la COVID-19 en prison est paradigmatique des contradictions inhérentes au droit à la santé en milieu carcéral d’une part, et son contrôle révèle une hiérarchisation entre individus selon leur statut d’autre part.
EN :
This article concerns the complaints brought forth in France during the COVID-19 pandemic by certain prisoners seeking to challenge the conditions of their imprisonment. With direct access to the administrative decision databases, a full analysis of the complaints lodged by prisoners before the administrative courts reveals two key aspects : poor protection of the right to health of prisoners, and the weakness of the judicial control exercised by administrative judges. This socio-legal inquiry supports two hypotheses : that COVID-19 pandemic governance reveals the contradictions inherent to the right to health in prisons, and that the control of contagion underpins a hierarchy between individuals with regard to their legal statuses.
ES :
Este artículo presenta un análisis de los recursos interpuestos por las personas detenidas en los establecimientos penitenciarios de Francia encaminados a impugnar sus condiciones de detención durante la crisis sanitaria. Gracias al acceso a la base de datos Ariane, archivos del Consejo de Estado, se recogieron 117 decisiones dictadas por tribunales administrativos, tribunales administrativos de apelación y por el Consejo de Estado. El análisis de estas decisiones pone de manifiesto la escasa concretización del derecho a la salud de los detenidos durante la crisis sanitaria así como las lagunas del control jurisdiccional ejercido, ya que el juez administrativo casi nunca adopta medidas para controlar efectivamente las condiciones de detención y se limita a atenerse a las alegaciones de la administración. Estos resultados apoyan las dos hipótesis : la gestión de la Covid-19 en la cárcel es paradigmática de las contradicciones inherentes al derecho a la salud en las prisiones, y su control revela una jerarquía entre los individuos según su estatus.
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Accès à la justice dans les tribunaux criminels en temps de crise de COVID-19 : le recours aux tribunaux virtuels
Brendyn Johnson et Chloé Leclerc
p. 147–170
RésuméFR :
Au Canada, la pandémie de COVID-19 a forcé la fermeture sans précédent des tribunaux. La solution du gouvernement ontarien a été de mener les procédures judiciaires virtuellement. Longtemps présentée comme un moyen d’élargir l’accès à la justice, certains craignent que l’utilisation des technologies audiovisuelles ne réduise en fait l’accès à la justice à certains égards. Cette recherche s’intéresse à la migration vers un environnement virtuel pendant la pandémie et à ses impacts sur l’accès à la justice, conçu ici comme la capacité des justiciables à accéder aux tribunaux et à leurs avocats. La recherche repose sur des méthodes ethnographiques dans les tribunaux criminels de l’Ontario qui combinent observations et entrevues auprès de juges et d’avocats. Les résultats révèlent que bien que le passage en mode virtuel ait pu contribuer à un meilleur accès aux tribunaux pour une majorité de justiciables, il a aussi pu compliquer l’accès pour les justiciables vivant en région éloignée, ceux qui ne sont pas représentés par un avocat ou ceux qui sont incarcérés. L’article aborde ces enjeux avant de discuter de l’avenir de ces technologies dans les tribunaux dans une ère post-pandémie.
EN :
In Canada, the COVID-19 pandemic necessitated an unprecedented closure of criminal courts. The Ontario government’s solution to these physical closures was to conduct proceedings virtually. Long touted as a way to expand access to justice, some have raised concerns that the use of audiovisual technologies will in certain respects actually decrease access to justice. This research thus sought to understand how the pandemic-era migration to a virtual environment impacted access to justice, conceived narrowly as the ability to access courts and lawyers. This research employed ethnographic methods in Ontario’s criminal courts. It found that while the transition to a virtual environment could contribute to greater access to the courts for a majority of defendants, it also complicated access for those living in rural areas, those who were self-represented or those who were incarcerated pending trial. This article explores these issues before discussing the post-pandemic future of these technologies in criminal courts.
ES :
En Canadá, la pandemia de COVID-19 obligó a un cierre sin precedentes de los tribunales. La solución del gobierno de Ontario fue la realización de los procesos judiciales de forma virtual. Aunque durante mucho tiempo se ha presentado como una forma de ampliar el acceso a la justicia, algunos temen que finalmente el uso de las tecnologías audiovisuales disminuya de hecho el acceso a la justicia en algunos aspectos. Esta investigación se interesa por la migración hacia un ambiente virtual durante la pandemia y a sus impactos sobre el acceso a la justicia, concebido aquí como la capacidad de los justiciables de acceder a los tribunales y a sus abogados. Esta investigación se realiza sobre la base de métodos etnográficos en los tribunales penales de Ontario que combinan observaciones y entrevistas con jueces y abogados. Los resultados muestran que, aunque la transición a un entorno virtual ha podido contribuir a un mayor acceso a los tribunales para la mayoría de los justiciables, también ha podido complicar el acceso para aquellos justiciables que viven en zonas rurales, para aquellos que no están representados por un abogado y para aquellos que están encarcelados. Este artículo explora estas cuestiones antes de discutir sobre el futuro de estas tecnologías en los tribunales en el mundo post-pandémico.
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Enjeux de gestion dans les organisations policières en période de pandémie
Andrée-Ann Deschênes, Annie Gendron, Rémi Boivin et Charles-Antoine Rioux
p. 171–186
RésuméFR :
La pandémie a posé des défis importants aux institutions de sécurité publique. Les organisations policières ont dû rapidement faire preuve d’adaptation et de mobilisation, considérant le rôle que les policiers ont été appelés à endosser dans cette lutte contre la pandémie. Dans une perspective descriptive et compréhensive, la présente recherche a exploré les enjeux de gestion au sein des organisations policières dans les premiers mois de la pandémie. Une méthodologie qualitative a été privilégiée afin de répondre à cet objectif. Des entrevues semi-dirigées ont été réalisées auprès de 8 policières et de 26 policiers oeuvrant dans différentes régions de la province de Québec. Parmi eux, 15 occupaient la fonction de patrouilleur, 9 étaient reliés à des unités d’enquête et 10 ont déclaré occuper une fonction de supervision. La méthode de réduction du matériel a été guidée par les techniques propres à l’analyse de contenu thématique. Les principaux résultats mettent en lumière des enjeux de gestion sur le plan communicationnel (p. ex., évolution rapide des directives à transmettre pour l’application des règles de santé publique), des ressources humaines (p. ex., imposer des équipes fixes pour diminuer les contacts entre employés) et de la logistique (p. ex., réaffectation des fonctions), de la clarté des directives découlant des mesures de la Santé publique (p. ex., mise en application des cas d’exception) et de la formation des gestionnaires (p. ex., manque de connaissances sur les enjeux de santé publique). Les implications de cette étude ajoutent aux connaissances sur la compréhension des enjeux de gestion dans les organisations policières en temps de pandémie et notent une série de leçons à retenir sur le plan pratique.
EN :
The COVID-19 health crisis resulted in significant challenges for public security institutions. Police organizations had to quickly adapt and mobilize given their responsibilities in the fight against the pandemic. This paper explored management issues within police organizations during a health crisis, employing qualitative methodology towards this objective. Semi-structured interviews were conducted with eight policewomen and 26 police officers working in different regions of the province of Quebec. Of these, 15 worked as a patroller, nine were linked to investigative units and ten were identified as occupying a supervisory role. The material reduction method was guided by techniques specific to thematic content analysis. The main results highlight management issues at the communication level (e.g. : the rapid evolution of directives to be transmitted for the application of public health rules), as well in relation to personnel management (e.g. imposing fixed teams to reduce contacts between employees), logistics (e.g. reassignment of functions), the clarity of directives resulting from public health measures (e.g. enforcement of exceptional cases) and the training of managers (e.g. lack of knowledge regarding public health issues). The results of this study add to the body of knowledge regarding the understanding of management issues in police organizations during a health crisis such as this. A series of lessons to be learned on a practical level are also noted.
ES :
La pandemia ha planteado importantes desafíos a las instituciones de seguridad pública. Las organizaciones policiales han tenido que adaptarse y movilizarse rápidamente, teniendo en cuenta los roles que los policías han tenido que asumir en la lucha contra la pandemia. Adoptando una perspectiva descriptiva y comprensiva, este estudio ha explorado los problemas de gestión dentro de las organizaciones policiales durante los primeros meses de una pandemia. Se ha favorecido una metodología cualitativa para cumplir este objetivo. Se realizaron entrevistas semiestructuradas a ocho mujeres policías y 26 agentes de policía trabajando en diferentes regiones de la provincia de Quebec. De ellos, 15 trabajaban como patrulleros, mientras que nueve estaban vinculados a unidades de investigación y diez afirmaron desempeñar funciones de supervisión. El método de reducción de material se guió por técnicas propias del análisis de contenido temático. Los principales resultados ponen de manifiesto problemas de gestión a nivel de la comunicación (por ejemplo, la rápida evolución de las directivas a transmitir para la aplicación de las normas de salud pública), de gestión de los recursos humanos (por ejemplo, la imposición de equipos fijos para reducir los contactos entre los empleados) y de logística (por ejemplo, la reasignación de funciones), de la claridad de las directivas derivadas de las medidas de salud pública (por ejemplo, la aplicación de casos excepcionales) y de la formación de los directivos (por ejemplo, la falta de conocimientos sobre cuestiones de salud pública). Los resultados de este estudio se suman al conocimiento sobre la comprensión de los problemas de gestión en las organizaciones policiales durante una crisis sanitaria de este tipo y permiten constatar una serie de lecciones que deben aprenderse a nivel práctico.
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Collaborer en contexte de COVID-19 : point de vue d’intervenants oeuvrant auprès de personnes judiciarisées sur les obstacles qu’ils ont rencontrés
Sylvie Hamel, Bastien Quirion et Natacha Brunelle
p. 187–212
RésuméFR :
Cet article se penche sur les réponses de 81 intervenants québécois oeuvrant auprès de personnes judiciarisées âgées de 16 à 35 ans à propos des défis que pose la crise sanitaire en matière de collaboration intra et interorganisationnelle. Ces intervenants, affiliés à diverses agences des milieux institutionnels et communautaires, ont rempli, entre novembre 2020 et juin 2021, un questionnaire portant notamment sur les effets de la crise pandémique sur leur capacité à travailler en collaboration. Les résultats de cette enquête montrent comment les conséquences de cette crise sont venues affecter la dimension organisationnelle de la collaboration intra et interorganisationnelle et encore davantage, sa dimension interactionnelle. En d’autres mots, ces résultats révèlent combien les relations humaines constituent un élément fondamental à la collaboration, tant celles que les intervenants développent entre eux que celles qu’ils développent avec leur clientèle. Au final, cet article porte à réfléchir sur les conditions essentielles à la collaboration ainsi que sur les attentes que l’on fait peser sur elle en faveur d’une meilleure intégration des services et d’un accompagnement mieux adapté à la complexité des trajectoires des personnes judiciarisées.
EN :
This article examines the responses of 81 Quebec practitioners working with criminalized individuals aged 16 to 35 who were surveyed about the challenges posed by the pandemic crisis in terms of intra- and inter-organizational collaboration. These practitioners, affiliated to various public and community agencies, completed, between November 2020 and June 2021, a questionnaire regarding the impact of COVID-19 on their ability to work in collaboration with other practitioners. The findings of this study show that the crisis has had particularly powerful effects on the organizational dimension of collaboration, and even more so on the interactional dimension of collaboration. More specifically, the findings indicate how human relationships constitute an essential aspect of collaborative practices, regarding both collaboration among practitioners and collaboration with clients. In conclusion, this article provides an opportunity to reflect on the conditions essential for collaborative work between practitioners, as well as on the expectations one should have with regard to the integration of services and the support of criminalized individuals.
ES :
Este artículo examina las respuestas de 81 trabajadores quebequenses que trabajan con personas judicializadas de entre 16 y 35 años sobre los retos que plantea la crisis sanitaria en términos de colaboración intra e interinstitucional. Entre noviembre de 2020 y junio de 2021, estos trabajadores, afiliados a diversos organismos institucionales y comunitarios, completaron un cuestionario sobre los efectos de la pandemia en su capacidad para trabajar juntos. Los resultados de esta investigación muestran cómo las consecuencias de esta crisis han afectado a la dimensión organizativa de la colaboración intra e interorganizativa y, sobre todo, a su dimensión interactiva. En otras palabras, estos resultados muestran cómo las relaciones humanas son un elemento fundamental de la colaboración, tanto las que los profesionales desarrollan entre sí como las que desarrollan con sus usuarios. Finalmente, este artículo reflexiona sobre las condiciones esenciales para la colaboración, así como sobre las expectativas que se depositan en ella en favor de una mejor integración de los servicios y de un apoyo mejor adaptado a la complejidad de las trayectorias de las personas judicializadas.
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Analyse sociotechnique des applications de traçage de la COVID-19 : protection de la vie privée et matérialisation de la méfiance envers l’État
Simon Hogue
p. 213–238
RésuméFR :
Le 6 octobre 2020, à l’instar d’une quarantaine d’États, Québec donna son feu vert à une application de traçage des contacts basée sur une technologie d’Apple et Google pour combattre la COVID-19. Les applications de traçage soulèvent toutefois plusieurs enjeux liés aux droits démocratiques et à la justice sociale, aux premiers chefs la protection de la vie privée et l’équité face à une technologie à laquelle tous n’ont pas accès. Or, comment cet objet est-il devenu un objet de convergence dans l’utilisation de la surveillance numérique ? L’argument développé ici suggère que l’adoption en masse masque des dynamiques de pouvoir entre les développeurs, la société civile, les autorités de santé publique et les gouvernements sur le design des technologies utilisées dans la gestion de la pandémie. Apple, Google et leurs partisans ont réussi à normaliser une technologie qui matérialise une méfiance envers l’État. Cette analyse éclaire les dynamiques de pouvoir derrière la promotion des outils techniques dans la lutte contre la COVID-19 et les angles morts générés par la primauté de la protection de la vie privée.
EN :
On October 6, 2020, Quebec, along with some 40 other states, gave the green light to a contact tracing application based on technology developed by Apple and Google to combat COVID-19. Contact tracing applications, however, raise a number of issues related to democratic rights and social justice, most notably privacy and equality in the face of a technology to which not everyone has access. How did this object become an object of convergence in the use of digital surveillance ? The argument developed in this article suggests that mass adoption masks power dynamics between developers, civil society, public health authorities and governments in regard to the design of technologies used for pandemic management. Apple, Google and their supporters have succeeded in normalizing a technology that materializes a distrust of the state. This analysis illuminates the power dynamics behind the promotion of technical tools in the fight against COVID-19, as well as the blind spots generated by the primacy of privacy.
ES :
El 6 de octubre de 2020, el Quebec, como hicieron otros 40 estados, dio luz verde a una aplicación de rastreo de contactos basada en la tecnología de Apple y Google para combatir el COVID-19. Sin embargo, las aplicaciones de rastreo de contactos plantean una serie de cuestiones relacionadas con los derechos democráticos y la justicia social, sobre todo en lo que se refiere a la protección de la vida privada y la equidad ante una tecnología a la que no todo el mundo tiene acceso. ¿Cómo este elemento ha podido convertirse en un objeto de convergencia en el uso de la vigilancia digital ? El argumento desarrollado aquí sugiere que su adopción masiva esconde las dinámicas de poder entre los desarrolladores, la sociedad civil, las autoridades de salud pública y los gobiernos sobre el diseño de las tecnologías utilizadas en la gestión de la pandemia. Apple, Google y sus partidarios han conseguido normalizar una tecnología que materializa la desconfianza hacia el Estado. Este análisis saca a relucir las dinámicas de poder que hay detrás de la promoción de las herramientas técnicas en la lucha contra el COVID-19 y los puntos ciegos que genera la primacía de la protección de la vida privada.
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Inonder l’espace médiatique, contester le manque de transparence de l’État : l’importance de la criminologie de l’actualité en temps de pandémie
Justin Piché et Kevin Walby
p. 239–267
RésuméFR :
Il y a eu des différences importantes concernant la divulgation proactive des cas de coronavirus, parmi les prisonniers et le personnel pénitentiaire, entre les juridictions canadiennes au cours des deux premières années de la pandémie COVID-19. S’appuyant sur la littérature sur la police des connaissances criminologiques et l’opacité des prisons, cet article aborde comment de multiples approches de la criminologie de l’actualité (« newsmaking criminology »), sous la forme d’articles de blogues, de rédaction d’éditoriaux, de publication de rapports et de commentaires d’experts, peuvent aider à remettre en question le manque de transparence de l’État afin de générer une divulgation proactive d’informations supplémentaires sur l’impact et la gestion du coronavirus derrière les murs de la prison. Nous explorons comment l’approche « inonder l’espace » des débats publics sur la gestion de la pandémie avec les informations limitées et incomplètes mises à disposition par les autorités fonctionne comme une stratégie de mobilisation des connaissances et de recherche pour faciliter la diffusion d’informations précédemment non publiées qui sont essentielles pour éclairer les politiques, les pratiques et les résultats de l’enfermement. Ce faisant, nous soulignons la valeur de la criminologie de l’actualité non seulement comme moyen de communiquer et de mobiliser les connaissances criminologiques, mais aussi de les générer au service de la recherche émancipatrice et militante.
EN :
Over the course of the COVID-19 pandemic, Canadian jurisdictions have varied in terms of their reporting of COVID-19 cases amongst prisoners and prison staff. By engaging with the literature focused on the policing of criminological knowledge and prison opacity, this paper examines how multiple approaches to newsmaking criminology in the form of blog posts, op-ed writing, the publishing of reports, and expert commentary can challenge state secrecy in ways that help generate proactive disclosure of additional information regarding the impact and management of the coronavirus behind prison walls. We explore how “flooding the zone” of public debates on pandemic management with the limited and incomplete data made available by authorities works as a knowledge mobilization and research strategy to help reveal previously unpublished information critical to better understanding prison policy, practice and outcomes. In so doing, we highlight the value of newsmaking criminology not only as a means of communicating and mobilizing criminological knowledge, but also of generating it in the service of emancipatory research and advocacy.
ES :
Durante los dos primeros años de la pandemia de COVID-19, hubo diferencias significativas en la divulgación proactiva de los casos de coronavirus, entre los reclusos y el personal penitenciario, entre las jurisdicciones canadienses. Basándose en los estudios sobre la vigilancia del conocimiento criminológico y la opacidad de las prisiones, este artículo analiza cómo los múltiples enfoques de la criminología mediática (« newsmaking criminology »), en forma de entradas de blog, redacción de editoriales, publicación de informes y comentarios de expertos, pueden ayudar a cuestionar la falta de transparencia del Estado para generar una divulgación proactiva de información adicional sobre el impacto y la gestión del coronavirus tras los muros de las prisiones. Exploramos cómo el enfoque de « inundar el espacio » de los debates públicos sobre la gestión de la pandemia con la información limitada e incompleta puesta a disposición por las autoridades funciona como una estrategia de movilización del conocimiento y de investigación para facilitar la difusión de información inédita que es fundamental para informar la política, la práctica y los resultados del confinamiento. De este modo, destacamos el valor de la criminología mediática no sólo como medio de comunicación y movilización del conocimiento criminológico, sino también para generarlo al servicio de la investigación emancipadora y activista.
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« Je ne suis pas anti-vaccin, mais cette affaire de COVID-19 pue la merde » : la fabrique du discours des opposants aux mesures sanitaires dans la twittosphère canadienne
Samuel Tanner et Aurélie Campana
p. 269–294
RésuméFR :
Cet article porte sur le rôle des plateformes de médias sociaux (Twitter en particulier) dans la fabrique et la diffusion du discours opposé aux mesures sanitaires dans la province du Québec, durant les premiers jours de la pandémie de COVID-19, en 2020. Fondé sur une approche matérialiste et issue de la théorie de l’acteur-réseau, il analyse les récits opposés aux mesures sanitaires qui ont circulé dans la twittosphère québécoise durant les deux premières semaines d’application des mesures restrictives imposées par les autorités fédérale et provinciale. En particulier, nous montrons que la fabrique et la diffusion d’un discours opposé à ces mesures aboutissent à un syncrétisme idéologique aux contours flous qui contribue à banaliser les idées traditionnellement associées au conspirationnisme et qui visent les élites scientifiques et politiques canadiennes. L’étude, tant du discours que du dispositif qui le promeut, montre par ailleurs qu’il permet à des individus situés à la marge de la sphère publique de se transformer en influenceurs populaires, techno-entrepreneurs moraux, qui deviennent les figures de proue d’une mouvance opposée aux mesures sanitaires.
EN :
This article examines the role played by social media platforms (Twitter in particular) in the fabrication and dissemination of a discourse opposing health measures in the province of Quebec during the early days of the COVID-19 pandemic in 2020. Based on a materialist and actor-network theory approach, it analyzes the narratives opposing the measures that circulated in the Quebec Twittersphere during the first two weeks of the implementation of the restrictive measures imposed by the federal and provincial authorities. In particular, we show that the fabrication and dissemination of a discourse opposed to these measures leads to an ideological syncretism with blurred contours that contributes to the trivialization of ideas traditionally associated with conspiracism that target Canadian scientific and political elites. The study, both of the discourse and of the device that promotes it, shows how this device allows individuals on the fringe of the public sphere to transform themselves into popular influencers and moral techno-entrepreneurs who become the figureheads of a movement opposed to the sanitary measures.
ES :
Este artículo examina el papel de las plataformas de medios sociales (Twitter en particular) en la fabricación y difusión del discurso de oposición a las medidas sanitarias en la provincia de Quebec durante los primeros días de la pandemia de COVID-19 en 2020. Basándose en un enfoque materialista y derivado de la teoría del actor-red, se analizan las narrativas opuestas a las medidas que circularon en la twittosfera quebequense durante las dos primeras semanas de aplicación de las medidas restrictivas impuestas por las autoridades federales y provinciales. En particular, mostramos que la fabricación y difusión de un discurso opuesto a estas medidas da lugar a un sincretismo ideológico de contornos borrosos que contribuye a la banalización de las ideas tradicionalmente asociadas al conspiracionismo y que apuntan a las élites científicas y políticas canadienses. El estudio, tanto del discurso como del dispositivo que lo promueve, muestra que se permite que individuos situados en los márgenes de la esfera pública se transformen en influenciadores populares y tecnoempresarios morales que se convierten en los mascarones de proa de un movimiento opuesto a las medidas sanitarias.
Hors thème
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Variables associées à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité en contexte de violence conjugale
Isabelle Côté, Joël Gagnon, Dominique Damant et Simon Lapierre
p. 295–321
RésuméFR :
S’appuyant sur les résultats d’une recherche exploratoire menée sur un échantillon de 189 femmes recevant des services en maisons d’hébergement au Québec, cet article s’intéresse aux variables associées à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité en contexte de violence conjugale. Plus précisément, une analyse de classification révèle la présence de deux sous-groupes de participantes qui diffèrent quant à leur niveau de reprise du pouvoir sur leur sécurité (RPS) : RPS élevé (n = 114) et RPS faible (n = 75). Chacun des groupes se distingue de l’autre sur une série de variables : l’estime de soi, le sentiment d’auto-efficacité et de satisfaction de vie, la perception de soutien social et la détresse psychologique. Ces résultats soulèvent des pistes intéressantes pour la recherche et la pratique de l’intervention sociale auprès des femmes victimes de violence conjugale, qui sont abordées dans l’article.
EN :
Drawing upon the results of exploratory research conducted on a sample of 189 women receiving services from a shelter in Quebec, this paper investigates the variables associated with women’s safety-related empowerment in the context of domestic violence. More specifically, a cluster analysis reveals two participant subgroups who differ in their level of safety-related empowerment (SRE) : high SRE (n = 114) and low SRE (n = 75). The groups contrast from one another across a series of variables : self-esteem, self-efficacy, satisfaction with life, perceived social support, and psychological distress. The paper also discusses interesting avenues for research and intervention practices vis-à-vis abused women arising from these results.
ES :
A partir de los resultados de una investigación exploratoria realizada sobre una muestra de 189 mujeres usuarias de varias casas de acogida en Quebec, este artículo estudia las variables asociadas al empoderamiento de las mujeres sobre su propia seguridad en un contexto de violencia doméstica. Más concretamente, un análisis de clasificación revela la existencia de dos subgrupos de participantes que difieren en su nivel de empoderamiento relacionado con su seguridad (SER, por las siglas en francés) : SRE alto (n = 114) y SRE bajo (n = 75). Cada grupo se distingue del otro en una serie de variables : autoestima, sentimiento de autoeficacia, satisfacción con la vida, percepción del apoyo social y malestar psicológico. Los resultados plantean pistas interesantes para la investigación y las prácticas de intervención social con mujeres víctimas de violencia conyugal, que se discuten en el artículo.
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Chaque âge a ses vertus, comme il a ses défauts : biais liés à l’âge dans la prédiction du risque de récidive criminelle au sein du Level of Service and Case Management Inventory
Julien Frechette et Patrick Lussier
p. 323–352
RésuméFR :
Malgré la panoplie d’études axées sur la valeur prédictive du Level of Service and Case Management Inventory (LS/CMI), peu de chercheurs se sont penchés spécifiquement sur les biais de cet outil. Pour cette raison, l’âge, une information qui n’est pas utilisée dans le calcul actuariel du LS/CMI, mais qui est jugée incontournable par plusieurs chercheurs pour évaluer et prédire le risque de récidive criminelle des personnes contrevenantes, a été l’objet d’analyses approfondies. Autrement dit, la présente étude propose d’examiner les profils de personnes contrevenantes ayant fait l’objet d’une erreur de prédiction quant à la récidive criminelle par le LS/CMI, et ce, à partir de l’âge et de facteurs interagissant avec celui-ci ne figurant pas dans l’outil. Pour ce faire, des analyses d’arbres décisionnels auprès d’un large échantillon de détenus et de probationnaires québécois (n = 9 807) ont été effectuées. Les résultats suggèrent que l’erreur de prédiction n’est pas aléatoire et que les personnes plus âgées, particulièrement celles ayant été condamnées pour un crime sexuel ou pour un crime lié aux drogues, sont plus susceptibles d’en être l’objet. Tout porte à croire que ces observations seraient largement tributaires du processus d’actuarialisation des outils qui favorise l’utilisation de prédicteurs de la récidive pertinents seulement pour un sous-groupe relativement homogène et important de jeunes adultes.
EN :
Given the growing interest in the predictive validity of the Level of Service and Case Management Inventory (LS/CMI), researchers have overlooked potential biases within this tool. For this reason, age, a piece of information that is not included in the actuarial calculation of the LS/CMI, but which is considered essential by several researchers to assess and predict criminal recidivism risk, has been the subject of in-depth analyses. More precisely, the study proposes examining the profiles of offenders who have been subjected to a false prediction by the LS/CMI regarding criminal recidivism, based on age and factors interacting with it that do not appear in the tool. Consequently, decision tree analyses were conducted on a large sample of Quebec inmates and probationers (n = 9,807). The results suggest that false predictions are not random and that older offenders, especially those convicted of a sex crime or a drug-related crime, are more likely to experience it. There are several reasons to believe that these observations largely result from the actuarialization process of risk assessment tools, which favours the use of criminal recidivism predictors relevant only to a relatively homogeneous but large group of young adult offenders.
ES :
A pesar del gran número de estudios sobre el valor predictivo del Level of Service and Case Management Inventory (LS/CMI), pocos investigadores han examinado específicamente los sesgos de esta herramienta. Por ello, la edad, un dato que no se utiliza en el cálculo actuarial del LS/CMI, pero que es considerado por muchos investigadores como esencial para evaluar y predecir el riesgo de reincidencia delictiva en los delincuentes, ha sido objeto de un amplio análisis. Precisamente, el presente estudio se propone examinar los perfiles de los delincuentes que fueron mal predichos en cuanto a reincidencia delictiva por el LS/CMI, en función de la edad y de factores que interactúan con la edad y que no están incluidos en la herramienta. Para ello, se han realizado análisis de árboles de decisión en una amplia muestra de reclusos y personas en libertad condicional de Quebec (n = 9.807). Los resultados sugieren que el error de predicción no es aleatorio y que los individuos de mayor edad, en particular los que tienen una condena por delitos sexuales o de drogas, son más propensos a sufrirlo. Esto hace pensar que estas observaciones son en gran medida una función del proceso de actuarialización de las herramientas, que promueve el uso de predictores de reincidencia que son relevantes sólo para un subgrupo relativamente homogéneo y importante de adultos jóvenes.