Résumés
Résumé
Sous ses airs de comédie de voisinage, Bonjour (1959), remake de Gosses de Tokyo (1932), film également réalisé par Ozu, se présente comme une réflexion médiatique opérée à la surface des images. Le médium télévisuel s’y comprend comme un régime possible du cinéma, dont Ozu s’efforce de dissocier sa pratique cinématographique. Organisé par une tension entre ordre et disparité, le film s’attache à rendre tangible, cinématographiquement, la différence entre un ordre prédéterminé, pouvant être imposé soit par des images conçues sur le mode de la communication, soit par une autorité surplombante, et un cinéma auprès de son propre désordre. Sa question fondamentale est de savoir quelle est la mise en ordre possible pour le cinéma. Elle implique une distance prise avec le pouvoir explicatif du récit, particulièrement manifeste dans la résolution du film. La pratique cinématographique d’Ozu se caractérise ainsi par son caractère paradoxal, sa proximité avec les limites propres au cinéma, seuil où s’énoncent à la fois sa puissance et son impuissance, pour reprendre les termes éclairants de Giorgio Agamben.
Abstract
Under the guise of a neighbourhood comedy, Good Morning (1959), a remake of I Was Born, But . . . (1932), both by Ozu, becomes a reflection on media carried out on the surface of the images. Here television is seen as a possible form of cinema, from which Ozu seeks to disassociate his work as a film director. Organized by a tension between order and disparity, the film endeavours to make tangible, cinematically, the difference between a predetermined order, which can be imposed either by images conceived on the mode of communication or by an overarching authority, and a cinema close to its own disorder. The author’s fundamental question is to know what ordering is possible for cinema. This involves distancing oneself from the explicatory power of the narrative, which is particularly manifest in the resolution of the film. Ozu’s cinema is thus characterized by its paradoxical nature and its proximity to the boundaries of the medium, the threshold where both its power and impotence are expressed, to adopt the enlightening terms used by Giorgio Agamben.
Parties annexes
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