Cet ouvrage regroupe une vingtaine de chapitres rédigés par des chercheurs provenant de différentes disciplines : études féministes, biologie, droit, arts visuels, études anglaises, science politique, sociologie, communication, littérature, études des jeunes, études culturelles et philosophie politique. Divisé en cinq sections, le livre aborde une diversité d’enjeux touchant au bien-être animal. Spécifiquement, il vise à analyser d’une manière critique l’exploitation des « animaux non humains » dans différents contextes sociaux et culturels. Parmi les sujets traités, on peut mentionner : les effets néfastes de la production laitière sur les vaches et les veaux, l’industrialisation massive de la production de volaille, les atteintes au bien-être animal, de même que le caractère douloureux de la captivité, notamment dans les zoos. On y traite aussi des droits des animaux, de la croissance du végétalisme intégral ou encore de la gestion des chiens errants en Inde. Le sociologue John Sorenson de l’Université Brock, le directeur de l’ouvrage, annonce clairement d’entrée de jeu les intentions du collectif en signalant que les auteurs des chapitres sont des chercheurs engagés. Ces derniers ont recours à la recherche non pas pour faire avancer la science, mais plutôt pour contrer l’exploitation des animaux. En analysant la manière dont l’industrialisation massive de l’agriculture et de l’élevage animal contribue à la détérioration de l’environnement – pensons aux énormes fermes laitières et aux mégaporcheries –, l’ouvrage peint un portrait très sombre notamment de la production de viande et de l’exploitation animale. Le rôle des universités, spécifiquement la recherche universitaire, est également mis en cause dans le système d’exploitation des animaux. Les textes visant à nous faire prendre conscience de l’ampleur des mauvais traitements que l’humain fait subir aux animaux – qui souffrent physiquement et émotivement – utilisent donc un ton très militant et radical d’un point de vue politique. Cette démarche engagée vise aussi à combiner les approches en termes d’économie politique et d’écoféminisme afin de fournir un portrait pluriel permettant à différents points de vue d’être mis en avant. Ayant recours à la notion de spécisme – c’est-à-dire la considération morale supérieure que les humains accordent à leur propre espèce, justifiant de ce fait l’exploitation d’autres animaux –, les auteurs adhèrent ainsi au principe selon lequel on doit reconnaître les animaux comme des êtres légaux. En ciblant le complexe industriel animal (animal industrial complex) comme étant responsable d’une forme d’exploitation qui n’a pas sa raison d’être dans nos sociétés contemporaines, ils visent à démontrer que les animaux sont des êtres légaux devant être traités comme tels. Un autre objectif poursuivi par l’ouvrage est de développer une perspective d’analyse et un point de vue normatif contribuant à la construction d’un nouveau champ d’études nommé Critical Animal Studies (CAS). Les chapitres présentent une image pessimiste de la condition animale contemporaine. L’exploitation des animaux par les humains soulève des enjeux éthiques et écologiques dont les sociétés contemporaines doivent tenir compte. Ainsi, les effets délétères de la production animale sur l’environnement sont substantiels. D’ailleurs, la lecture de l’ensemble des chapitres du livre nous convainc rapidement que la production et la consommation de viande s’avèrent non durables, dans le sens environnemental du terme. Comme en témoignent les bibliographies accompagnant les chapitres, l’étude des relations animaux-humains constitue un domaine de recherche en développement. Malheureusement, Critical Animal Studies. Thinking the Unthinkable ne fournit pas de conclusion générale pour nous laisser entrevoir des nouvelles pistes de recherche ou de recherche-action. De plus, en raison de leur forte perspective critique, on ne voit pas toujours très bien l’originalité des multiples recherches mises en commun dans l’ouvrage. Au cours des dernières années, plusieurs recherches en sciences humaines et sociales …
Parties annexes
Référence
- CRONON, William (1991) Nature’s metropolis: Chicago and the Great West. New York, W. W. Norton & Company.