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Comptes rendus bibliographiques

BERNARDIE-TAHIR, Nathalie (dir.) (2008) L’autre Zanzibar. Géographie d’une contre-insularité. Paris, Karthala, 379 p. (ISBN 978-2-84586-946-2)[Notice]

  • Christian Bouchard

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  • Christian Bouchard
    Université Laurentienne

Avec L’autre Zanzibar. Géographie d’une contre-insularité, Nathalie Bernardie-Tahir et ses collaborateurs nous proposent, d’une part, de « mettre à jour et comprendre les nouvelles logiques territoriales, économiques et identitaires à l’oeuvre aujourd’hui dans cet archipel en pleine recomposition » (p. 12) et, d’autre part, « à partir de l’exemple de Zanzibar, considéré ici comme une île-laboratoire, de mener une réflexion plus générale sur l’insularité et de revisiter ce concept » (p. 13). Pour ce faire, l’ouvrage de 18 chapitres s’organise en cinq parties que sont « Construire le mythe… », « … puis le déconstruire », « Territoires en mouvement », « Zanzibar et la mer : des rivages aux horizons maritimes » et « Zanzibar, l’Autre et l’Ailleurs — Identités insulaires en questions ». Le tout est judicieusement accompagné d’un feuillet couleur de 12 pages qui comprend les principales cartes ainsi que 75 photographies. Répondant au premier objectif du livre, l’étude géographique de l’archipel est fort bien menée, intégrant tout à la fois les questions spatiales et les logiques territoriales contemporaines en référence aux contextes environnemental, historique, politique, économique et socioculturel. On y découvre d’abord un petit archipel que les aléas du temps ont doté d’une forte individualité, résultante des influences successives de quatre mondialisations : la mondialisation swahilie (XVIe au XIXe siècle), la mondialisation coloniale (1873 à 1964), la mondialisation refusée (1964 à 1984) et la mondialisation actuelle. Cela a donné une société originale, cosmopolite et complexe, aujourd’hui confrontée à de graves problèmes de développement, grandement influencée par un contexte économique renouvelé (libéralisation économique, développement du tourisme et des échanges internationaux) et profondément secouée par la question identitaire (face à l’Afrique continentale d’abord, mais aussi face à l’Occident). De fait, la réalité géographique de Zanzibar apparaît très éloignée des représentations habituelles de l’insularité telles que déclinées par l’auteure sous la forme des quatre « i » : imaginaire, immobilité, isolement et identité. On se trouve donc en présence d’un territoire bien réel, avec ses qualités, ses enjeux et ses difficultés, d’un espace en mutation et marqué par une forte mobilité humaine (quotidienne, migrations internes et internationales), d’un archipel ouvert sur le reste du monde (migrations et diaspora, tourisme, communications) et, enfin, d’une société qui s’identifie, plutôt qu’à l’insularité, d’abord à sa langue (le kiswahili) et à sa religion (l’islam), ensuite de plus en plus à sa différence face à l’Afrique continentale. Cela nous mène au deuxième objectif du livre, soit celui de revisiter le concept de l’insularité. Il s’agit cette fois de rappeler qu’il n’y a pas de déterminisme insulaire qui ferait de l’insularité « l’élément moteur d’un fonctionnement insulaire a priori et a posteriori singulier » (p. 19), c’est-à-dire capable de déterminer un type d’économie et de société. En s’appuyant sur une démonstration convaincante dans le cas de Zanzibar, Bernardie-Tahir propose un concept néologique qui est celui de « contre-insularité ». Pour l’auteure, « en rupture avec l’idée selon laquelle c’est la forme de l’objet “île” qui détermine le contenu de ce dernier, la contre-insularité offre une piste de réflexion visant à remettre en question les déclinaisons et implications longtemps considérées comme irréfutables de l’insularité » (p. 19). Dans les faits, il ne s’agit pas vraiment d’une position nouvelle, pas plus que d’un nouveau champ d’étude, car il s’agit toujours de s’intéresser à l’insularité, en revisitant les travaux antérieurs, en proposant de nouvelles explications et en formulant de nouveaux questionnements. Si le néologisme de contre-insularité ne nous accroche guère, le plaidoyer pour une approche renouvelée de l’insularité et l’étude géographique de Zanzibar sont, quant à eux, tout à fait réussis. Reste encore à trancher …