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Comme discipline, la psychologie environnementale est apparue dans les années 1960. Se préoccupant des interactions entre individu et environnements, elle s’est construite à partir des échanges entre la psychologie et les autres disciplines. La psychologie environnementale fait ainsi écho à la nécessité de plus en plus grande de prendre en considération l’individu dans les actions visant l’aménagement ou la protection de son cadre de vie.
Jean Morval est professeur titulaire au département de psychologie de l’Université de Montréal et sa carrière s’est essentiellement déroulée dans le domaine de la psychologie environnementale. Par cet ouvrage, Morval désire produire une introduction au domaine de recherche, dans une collection destinée aux étudiants de premier cycle universitaire.
L’ouvrage survole d’abord les grands concepts de psychologie environnementale et les modèles employés dans la discipline. Un premier chapitre définit les concepts d’espace personnel, d’intimité, de territorialité et de compétence environnementale. Ces cadres conceptuels sont développés sous l’angle de l’individu, et font peu appel aux notions de société ou de collectivité. Le second chapitre est consacré aux modèles théoriques permettant d’aborder les questions de psychologie environnementale. À travers ces modèles, Morval décrit l’influence sur les individus des « stresseurs environnementaux » du bruit, de la chaleur, de la pollution et de la foule. Cependant, ces questions sont traitées de façon très inégale. Par exemple, la densité de population (crowding) occupe plus de la moitié du chapitre, tandis que la pollution fait l’objet de quelques paragraphes. La dernière partie de la publication est consacrée aux applications de la psychologie environnementale. Ce chapitre fait état d’une seule perspective d’étude, celle de l’appropriation de l’espace, abordée dans les dimensions de la motivation au travail, de la satisfaction résidentielle et des personnes âgées. Ces questions sont explorées par la description détaillée de projets de recherche récents auxquels l’auteur a participé. Ces recherches soulèvent des enjeux pertinents pour les avancées de la discipline, notamment quant à la validité des études in situ et la nécessité de développer des outils de travail mieux adaptés aux réalités environnementales. Ces études font également appel à de nouveaux concepts et cadres théoriques en lien avec l’identité et la phénoménologie, mais la structure du chapitre en rend la synthèse difficile.
L’un des objectifs énoncés par Jean Morval en introduction de son ouvrage était de produire un premier équivalent en langue française des ouvrages de référence américains sur le sujet. Malheureusement, cet ouvrage comporte plusieurs limites à cet égard. Même si Morval note que la psychologie environnementale a connu une évolution notable depuis les années 1980, le texte demeure essentiellement fondé sur les références en vogue à de cette époque, hormis les recherches présentées au dernier chapitre. De même, le texte demeure centré sur les approches de psychologie de l’individu ; il n’ouvre pas sur des cadres théoriques interdisciplinaires ou des concepts tels paysage, sens du lieu, médiance, etc. À partir de ces derniers, l’anthropologie, la sociologie et la géographie culturelle développent pourtant des recherches pertinentes en ce qui a trait à l’étude des interactions entre l’être humain et son milieu. Enfin, aucune définition de l’environnement n’est abordée dans l’ouvrage, le terme étant employé sans distinction pour désigner tout ce qui entoure l’individu et pour aborder le paradigme environnementaliste. Bref, cette publication inégale comporte des éléments intéressants, mais ne permet pas de réaliser un réel tour d’horizon du domaine de la psychologie environnementale, et encore moins de constituer une référence en la matière. D’autres publications répondent peut-être mieux à cet objectif, comme le collectif récent dirigé par Karine Weiss et Dorothée Marchand (Psychologie sociale de l’environnement, Presses universitaires de Rennes, 2006).