Résumés
Résumé
L’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA) s’est depuis peu engagée sur la voie de l’uniformisation des règles de droit international privé de ses États membres. Une telle entreprise est sans précédent pour cette organisation. Pour la première fois en trois décennies d’existence, le domaine de l’uniformisation ne sera en effet pas celui de l’arbitrage ou du droit substantiel des affaires, mais celui du traitement des relations d’affaires ayant des éléments de rattachement avec plusieurs ordres juridiques. Ce projet d’acte uniforme est bienvenu à plus d’un titre. Il comblerait d’abord un déficit patent de règles de droit international privé dans un espace qui intègre pourtant 17 États, et qui est donc propice aux relations d’affaires internationales. En oeuvrant désormais à l’articulation des lois et des juridictions nationales de ses États membres, le droit OHADA prendrait de surcroît le contre-pied de son approche traditionnelle qui consistait jusqu’alors à les neutraliser. Plus qu’un nouvel acte uniforme, ce projet constitue donc un important changement d’orientation pour l’OHADA.
Abstract
OHADA has recently embarked on the path of uniformization of its member States’ rules of private international law. This undertaking is unprecedented for this organization. For the first time in its three decades of existence, this uniformization will not concern arbitration or substantive business law, but will deal with private international law issues. This project is welcome for several reasons. First of all, it would make up for an obvious deficiency of private international law rules in an area comprising seventeen States that is conducive to international business relations. By working towards the articulation of its Member States’ laws and jurisdictions, OHADA is moreover taking the opposite standpoint of the one that thus far prevailed, consisting in the neutralization of domestic laws and jurisdictions. More than a new Uniform Act, this project constitutes therefore a significant shift for OHADA.
Resumen
Recientemente, la OHADA se ha comprometido a uniformizar las reglas de derecho internacional privado de sus Estados miembros. Esto es algo sin precedentes para esta organización. Por primera vez en tres décadas de existencia, el ámbito de la armonización no será el arbitraje o el derecho sustantivo del comercio, sino más bien el trato en las relaciones de negocios que tengan puntos de conexión con diversos órdenes jurídicos. Este texto es bienvenido por distintas razones. En primer lugar, vendría a colmar una carencia manifiesta de reglas de derecho internacional privado en un espacio integrado por diecisiete Estados, propicio para relaciones comerciales internacionales. Al trabajar en favor de la articulación de leyes y jurisdicciones nacionales de sus Estados miembros, la OHADA tomaría además el sendero contrario de su perspectiva tradicional, la cual consistía en contrarrestarlas. Más que una nueva Acta uniforme, este proyecto constituye un importante cambio de rumbo para la OHADA.
Corps de l’article
À l’heure de la régionalisation de la réglementation des échanges commerciaux en Afrique[1] par l’instauration de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA) cherche à adopter un acte uniforme relatif aux règles de droit international privé.
Soucieuse d’encourager l’investissement, l’OHADA a produit depuis sa création un droit uniforme des affaires directement applicable dans les ordres juridiques de ses États membres[2].
Alors que l’OHADA s’est toujours pensée comme facteur de sécurité et d’attractivité des investissements, le droit international privé n’avait jusqu’alors manifestement pas été perçu comme un élément participant de cet attrait[3].
Cette importante lacune, qui — comme nous le verrons plus loin — résulte de la position traditionnelle de l’OHADA à l’égard de sa production normative, est sur le point d’être résorbée. À la fin de l’année 2020, un consortium composé du cabinet GBS Disputes, du professeur Louis d’Avout et de l’avocat Alain Fénéon a en effet été chargé par le Secrétariat permanent de l’OHADA d’élaborer un ambitieux projet d’acte uniforme ayant pour domaine les règles de conflits de lois, les règles de conflits de juridictions ainsi que les règles de reconnaissance et d’exécution des actes judiciaires et extrajudiciaires[4].
Ce projet d’uniformisation s’inscrit dans un espace d’intégration juridique unique en son genre. Alors que les États de l’Union européenne se sont dotés de règles communes de droit international privé pour « développer un espace de liberté, de sécurité et de justice »[5], les États membres de l’OHADA ont choisi la voie singulière de l’uniformisation du droit des affaires et de l’arbitrage avec l’adoption d’actes uniformes[6] directement applicables et l’instauration d’une originale cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA), compétente pour administrer des procédures d’arbitrage et dire le droit en dernier recours dans les litiges ayant trait, au moins pour partie, à l’application de ce droit uniforme[7]. L’espace OHADA se trouve ainsi être un espace juridique hybride, mêlant droits nationaux et droit uniforme, juridictions nationales et juridiction commune aux États membres. Ce caractère hybride place l’OHADA dans une situation tout à fait inédite par rapport au droit international privé, et ce, notamment à l’égard de l’internationalité des situations qui commande classiquement la mise en oeuvre de ses règles. En effet, de manière quelque peu paradoxale, le droit OHADA est destiné à s’appliquer à des situations à la fois internes à l’échelle de l’espace OHADA et internationales à l’échelle des États membres.
Dans ce système hybride, les mécanismes de droit international privé ont donc encore vocation à être mobilisés pour des questions d’une importance considérable, qu’il s’agisse de déterminer le droit applicable et la juridiction compétente lorsque ces éléments ne sont pas couverts par le droit uniforme ou qu’il s’agisse de faire reconnaître et exécuter les décisions des juges nationaux de l’espace OHADA.
En s’intéressant à l’articulation des dispositions, des juridictions et des décisions nationales, l’OHADA s’éloigne de l’esprit qui présidait jusque-là à son développement. Ce projet d’acte uniforme, s’il devait aboutir, opérerait ainsi un singulier changement d’orientation pour l’OHADA. Il mérite donc d’être examiné en détail. Classiquement, nous nous intéresserons à ses enjeux après en avoir dressé l’état des lieux. À l’heure actuelle, si elles ne sont pas totalement inexistantes, les dispositions de droit international privé forment dans l’espace OHADA un corpus hybride et extrêmement parcellaire, qui n’est donc pas en mesure de répondre aux attentes des opérateurs et des justiciables de la région (partie 1). Pour ce qui est des enjeux que nous avons déjà quelque peu effleurés, ce projet viendrait d’abord naturellement combler d’importants déficits que la philosophie générale de l’OHADA ne permettait jusqu’alors d’appréhender. Ce projet, s’il s’inscrit dans la continuité d’une production normative qui vise à l’attractivité, pourrait ainsi conduire à un changement d’orientation opportun et sans précédent pour l’OHADA (partie 2).
1 État des lieux : le droit international privé de l’espace OHADA, un corpus hybride et parcellaire
Afin de procéder à l’état des lieux des règles de droit international privé applicables dans l’espace OHADA, nous reviendrons d’abord sur les rares dispositions en la matière, parsemées au sein du droit uniforme (1.1) ; puis nous rechercherons les autres règles de droit international privé, hors le droit uniforme, applicables dans l’espace OHADA (1.2).
1.1 Les rares dispositions de droit international privé incidemment produites par le droit uniforme OHADA
Le droit uniforme, n’ayant pas vocation à remplacer l’intégralité des droits internes ni à se substituer aux ordres judiciaires de ses États membres, contient de nécessaires mécanismes de renvoi aux droits nationaux non uniformisés ainsi que de ponctuelles règles de compétences juridictionnelles.
Ces mécanismes, qui forment de lege lata les règles de droit international privé issues du droit uniforme, comportent de très importantes lacunes en ce qu’ils n’ont pas été pensés de façon systémique, comme ceux du droit international privé de l’Union européenne. Ils peuvent en ce sens être qualifiés de règles incidentes du droit uniforme[8]. Ce constat est valable aussi bien pour les règles de conflits de lois que pour les règles de conflits de compétences que pour les règles de reconnaissance et d’exécution des actes judiciaires et extrajudiciaires que nous aborderons successivement.
Concernant tout d’abord les règles de conflits de lois, il peut sembler contre-intuitif de vouloir les rechercher au sein d’un ordre juridique qui s’évertue à instaurer des règles de droit uniforme, applicables dans tous les États membres. Le droit uniforme, pourrait-on penser, permettrait précisément de faire l’économie du droit international privé[9].
Les conflits de lois n’ont pourtant pas disparu dans la mesure où le droit uniforme, bien qu’il soit en expansion, n’est pas destiné à se substituer à l’ensemble du droit applicable au monde des affaires. Le droit uniforme demeure en effet nécessairement lacunaire, que ces lacunes soient organisées par les États membres ou qu’elles se révèlent à mesure de la pratique[10].
Les espaces dans lesquels le droit uniforme se tient en retrait ne sont pas des zones « hors le droit », mais requièrent de nécessaires mécanismes de désignation du droit applicable. Ainsi, aux fins de l’applicabilité du droit uniforme et de son agencement avec les dispositions nationales, le droit uniforme a produit de discrets points de contact entre droit uniforme et droits nationaux non uniformisés[11].
Parmi ces règles, nous décelons d’abord, pour les contrats de vente, un hommage mesuré au principe d’autonomie de la volonté des parties contractantes[12]. S’il semble aller de soi que les parties contractantes jouissent dans l’espace OHADA d’une liberté de choix de la loi applicable à leurs relations contractuelles, il serait cependant bienvenu que l’exercice de cette liberté soit affirmé et encadré par le droit uniforme, notamment lorsque le droit désigné est le droit OHADA sans autre précision.
Par-delà cette discrète référence à la volonté des parties, nous pouvons relever en droit OHADA quelques autres mécanismes de comblement du droit uniforme. Parmi ces derniers, mentionnons celui qui est relatif à la détermination du droit applicable au fonctionnement des sociétés, le critère de désignation étant dans cette circonstance celui du lieu du siège social de la société[13]. Le critère de localisation territoriale est également retenu pour les sûretés[14] et les marchandises périssables nécessitant d’être vendues[15]. Nous pouvons encore évoquer, dans le cas de la question très particulière de l’ordre des licenciements pour motif économique, un mécanisme de renvoi à l’application du droit du travail applicable[16], ce droit étant alors nécessairement national puisque, pour l’heure, le droit du travail n’a pas fait l’objet d’un acte uniforme spécifique.
Disséminées au fil des actes uniformes, les règles de désignation du droit applicable que constituent ces mécanismes de renvoi demeurent pour le moins fragmentaires et imprécises. De lege lata, ces règles suivent une logique de comblement ponctuel, et ne sauraient constituer une théorie ou un système autonome de résolution des conflits de lois. La plupart peuvent d’ailleurs être qualifiées de règles de façade tant dans ces circonstances les justiciables demeurent tributaires de l’application des règles de conflits de lois du juge saisi[17].
En ce qui concerne, à présent, les règles de conflits de juridictions, relevons que cette problématique demeure éminemment pertinente, et ce, en dépit de la perception que le justiciable se ferait du concept d’espace OHADA et du caractère panafricain[18] revendiqué par l’OHADA.
Les juridictions nationales des États membres conservent effectivement leurs compétences territoriales dans leurs ordres judiciaires respectifs[19]. Les actes uniformes vont par conséquent contenir des règles de compétences spéciales sans lesquelles leurs applications seraient rendues des plus hasardeuses. Comment en effet appliquer une disposition qui s’en remettrait pour produire ses effets à une juridiction indéterminée ?
À cet égard, nous pouvons d’abord identifier, en droit uniforme, quelques rares références au principe d’autonomie de la volonté. Il existe par exemple une timide et maladroite disposition ayant trait à la clause d’electio fori pour les contrats de bail à usage professionnel[20]. Il est par ailleurs précisé, dans le contexte des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, que les parties peuvent choisir le juge compétent par désignation du domicile du débiteur[21].
Ces hommages timides et limités à l’autonomie de la volonté dans la désignation de la juridiction compétente mériteraient assurément d’être renforcés, notamment pour encadrer et préciser les modalités et conséquences juridiques d’une telle désignation.
Plus problématique est évidemment la situation où les parties ne désignent pas de juridiction compétente pour trancher leurs éventuels litiges. Dans ce cas de figure, le droit uniforme dispose de quelques mécanismes ponctuels de détermination de compétences. Est ainsi généralement compétent le juge de l’ordre juridique dans lequel se situe le centre de gravité de l’activité commerciale pour laquelle son intervention est nécessaire. En application de cette règle, pour toute sollicitation de l’institution judiciaire relative au fonctionnement d’une société[22] et de ses formalités afférentes[23], est compétente la juridiction du lieu du siège ou de l’immatriculation de cette société. La notion de siège est un critère de rattachement stable, opposable à tout intéressé. Cela permet de comprendre que l’on trouve son équivalent non seulement dans le cas des injonctions de paiement qui doivent s’effectuer auprès de la juridiction du domicile où demeure effectivement le débiteur[24], mais également en matière de procédures collectives d’apurement du passif, qui doivent se dérouler devant la juridiction du siège social de la personne morale ou du principal établissement de la personne physique débitrice[25].
Mentionnons enfin une rare option juridictionnelle offerte au demandeur dans les litiges relatifs au transport de marchandises transfrontières, qui peut saisir soit le juge du lieu de résidence habituelle du défendeur, soit le juge du lieu de prise en charge des marchandises[26].
Les règles de détermination de compétences montrent toutefois leurs limites en ce qu’elles ne répondent qu’à une nécessité de mise en oeuvre de mécanismes particuliers, dont on ne saurait inférer une philosophie générale de détermination. Les dispositions de droit uniforme, aussi utiles soient-elles, ne sont pas en mesure de constituer un système général de répartition de compétences entre différentes juridictions, ne serait-ce que par l’absence de disposition imposant aux autres juridictions de l’espace OHADA de reconnaître et de donner sa pleine force obligatoire à toute désignation de juridiction.
La question de la circulation des actes judiciaires et extrajudiciaires semble, elle aussi, avoir été largement ignorée par le législateur OHADA. Ces propos peuvent surprendre lorsqu’on sait que le droit OHADA confère force exécutoire aux décisions de la CCJA dans tout l’espace OHADA[27] ainsi que l’exequatur communautaire pour toute sentence arbitrale rendue sous l’égide de la CCJA[28]. Propres aux sentences arbitrales, ces régimes tranchent néanmoins avec le caractère fragmentaire des dispositions consacrées aux modalités de reconnaissance et d’exécution des décisions judiciaires rendues au sein de l’espace OHADA. Tout au plus mentionnerons-nous ici un principe de reconnaissance automatique des décisions d’ouverture des procédures collectives internationales dans l’espace OHADA[29], ainsi qu’un principe de reconnaissance des décisions prises en matière de transport de marchandises, à cette réserve près, pour ces décisions, de l’accomplissement des formalités requises par l’État du lieu d’exécution de la décision[30].
À l’issue de ce survol du droit OHADA, force est de constater que les règles uniformes de droit international privé restent réduites à leur portion congrue. Cette indigence est d’autant plus à déplorer qu’elle n’est guère compensée par les autres dispositions de droit international privé applicables en matière contractuelle dans l’espace OHADA.
1.2 L’indigence du droit international privé en matière contractuelle des États membres de l’OHADA
De lege lata, les dispositions applicables en matière contractuelle restent bien rares dans l’espace OHADA, qu’elles soient issues des conventions internationales[31], d’une part, ou des droits domestiques, d’autre part.
Il importe de souligner à ce stade le legs colonial jurisprudentiel français commun à la plupart des ordres juridiques de l’OHADA. En effet, à défaut de textes ou de décisions ultérieures contraires, les solutions apportées par la Cour de cassation française du temps de l’appartenance des territoires africains à l’ordonnancement juridique français demeurent, à notre sens, applicables dans les ordres juridiques concernés[32]. Nous pensons, par exemple, à la reconnaissance du principe d’autonomie de la volonté issue de l’arrêt American Trading[33], à la reconnaissance de règles matérielles propres au commerce international découlant de l’arrêt Messageries maritimes[34] ou encore à la projection internationale des règles de compétences nationales provenant de l’arrêt Pelassa[35].
Si ces quelques principes ne sauraient à l’évidence tenir lieu de système de droit international privé pour les États de l’OHADA, nous croyons tout de même utile de rappeler l’existence de ce fond commun, dans lequel pourrait du reste s’enraciner tout futur texte uniforme de droit international privé.
En l’état, nous ne pouvons toutefois que constater une carence de dispositions applicables dans l’espace OHADA relatif au droit international privé. Ce constat est tout aussi patent en matière de confits de lois, de conflits de juridictions que pour les questions de reconnaissance et d’exécution des actes judiciaires et extrajudiciaires.
En ce qui concerne les règles de conflits de lois, à défaut de droit commun en droit OHADA ou hors le droit OHADA, il échoit classiquement au juge du for saisi de procéder, en application de ses propres règles, à la détermination du droit applicable. Or, si tant est qu’elles existent, ces règles de détermination sont pour le moins sommaires et disparates. Contrairement à ce qui a pu être récemment affirmé[36], les législations domestiques des États membres de l’OHADA ne contiennent généralement pas de règles de conflits de lois en matière contractuelle, mais portent pour l’essentiel sur le droit de la famille et des personnes[37].
À notre connaissance, il n’existe que deux dispositifs, parmi les ordres juridiques des États membres de l’OHADA, qui ont précisément pour objet la détermination de la loi applicable en matière contractuelle. Le premier est issu d’un décret de 1895 applicable en République démocratique du Congo[38] et le second provient du Code civil du Gabon de 1972[39]. Ces dispositions sont d’ailleurs plutôt désuètes puisque l’une et l’autre retiennent que, à défaut de choix des parties, le lieu de signature du contrat constitue le critère de détermination de la loi applicable au contrat.
Hormis ces cas de figure, au demeurant guère satisfaisants, le justiciable de l’espace OHADA est contraint de s’en remettre aux pratiques de chacun des juges du for, qui, dans le contexte africain, sont encore difficilement accessibles[40]. Nous voulons toutefois signaler ici une rare décision de la Cour d’appel de Ouagadougou qui pourrait servir d’exemple aux autres juridictions de la région et qui a fait prévaloir le lieu de résidence de la partie devant fournir la prestation caractéristique comme critère de détermination de la loi applicable au contrat[41].
En ce qui concerne, à présent, les règles de conflits de juridictions, nous constatons, sans surprise, que les rares dispositions internationales et nationales applicables dans l’espace OHADA n’offrent guère de quoi construire un système général de détermination de compétences. La Convention générale de coopération en matière de justice de 1961[42] a toutefois instauré une règle de répartition de compétences judiciaires en matière contractuelle, avec son article 38 :
[S]ont considérées comme compétentes pour connaître d’un litige […] en matière de contrats : la juridiction que les parties ont valablement reconnue, expressément ou séparément pour chaque contrat, à défaut, les juridictions de l’État où le contrat a été conclu et en outre, en matière commerciale, celle de l’État où le contrat doit être exécuté[43].
Cette clause a fait florès et a essaimé dans six conventions bilatérales de coopération judiciaire, dont au moins une partie contractante est un État membre de l’OHADA[44], ainsi que dans la Convention de coopération et d’entraide en matière de justice entre les États membres du Conseil de l’Entente de 1997[45].
À y regarder de plus près, nous estimons que cette règle se révèle en réalité peu pratique. Soit les parties ont en effet opté pour une clause d’electio fori et elles s’y conforment volontairement (dans ce cas de figure, il n’y a alors aucun conflit de juridictions), soit, à l’inverse, en cas de divergence, dans la plus stricte application de cette règle, pourront être concomitamment compétentes la juridiction du lieu de conclusion du contrat et celle de son lieu d’exécution. Cette solution en trompe-l’oeil n’apporte donc aucune réelle sécurité juridique.
Les droits nationaux ne sont pas plus satisfaisants sur les questions de compétences juridictionnelles internationales. À notre connaissance, les ordres juridiques de l’espace OHADA se contentent de procéder à une projection internationale des règles nationales de compétences[46], et n’accordent pas de considération particulière à l’internationalité de certaines situations contractuelles. Certains regretteront, à ce titre, l’absence dans les droits nationaux de l’espace OHADA, de mécanismes de purge des procédures parallèles tels que des mécanismes de litispendance ou de connexité.
Quant à la question de la circulation des actes judiciaires et extrajudiciaires[47], la situation n’est vraiment pas plus rutilante. Les conventions internationales et bilatérales applicables sont pour la plupart anciennes, voire obsolètes. Les modalités de circulation des décisions étrangères y sont sévères et bien peu utilisables. La Convention judiciaire de l’OCAM, la Convention relative à la coopération en matière judiciaire entre les États membres de l’Accord de non-agression et d’assistance en matière de défense de 1987 et la Convention du Conseil de l’Entente retiennent par exemple, comme critère de contrôle, l’examen de la loi applicable de l’ordre juridique d’origine[48]. Plus récemment, l’Accord de coopération judiciaire entre les États membres de la CEMAC de 2004[49] a ajouté comme étonnante condition de reconnaissance que la décision de l’État d’origine ne soit « pas contraire à la jurisprudence de l’État sur le territoire duquel elle doit recevoir exécution[50] ».
En l’absence de droit commun, cette question reste donc traitée par le droit de l’ordre juridique dans lequel le justiciable souhaite voir reconnaître la décision étrangère, quand bien même cette décision serait rendue par un juge de l’espace OHADA. Or, les conditions de reconnaissance et d’exécution restent, parmi les États de l’OHADA, pour le moins disparates. Par exemple, en droit ivoirien[51] et en droit malien[52], il existe encore six critères de contrôle de la décision étrangère, tandis qu’il n’y en a que cinq au Sénégal[53] et au Gabon[54]. Ces dispositions nationales peuvent de surcroît se montrer étonnamment restrictives et confier un véritable pouvoir discrétionnaire au juge de l’exécution.
À cet égard, le pouvoir conféré au juge par le Code civil gabonais de vérifier « si le litige a reçu une solution exacte en ce qui concerne les faits de la cause de l’interprétation des règles de droit qui leur étaient applicables[55] », lui permettant de surcroît de « n’accorder l’exequatur qu’à certains chefs de la décision[56] » et de « réduire le montant de la condamnation[57] », se trouve particulièrement malvenu, car contraire aux principes de confiance et de coopération qui devraient prospérer dans tout espace d’intégration[58].
Parmi les conventions applicables dans l’espace OHADA, nous notons toutefois l’existence de dispositions plus libérales favorisant la circulation des décisions étrangères et la lutte contre les mesures dilatoires et autres décisions contradictoires. La Convention bilatérale de coopération entre la France et le Sénégal de 1974 prévoit en ce sens une rare disposition relative aux situations de litispendance et de connexité[59]. La Convention bilatérale de coopération entre le Mali et la Guinée de 1964 confère, pour sa part, force exécutoire aux décisions de justice dans l’ordre juridique des deux États contractants[60]. Ces dispositions, quoique limitées et anciennes, correspondent à l’esprit et à la logique qui devraient présider à l’instauration d’un espace judiciaire OHADA et devraient en cela inspirer les rédacteurs d’un futur acte uniforme portant sur ces questions.
2 Perspectives : les enjeux de l’uniformisation du droit international privé de l’espace OHADA
Les enjeux d’un droit international privé uniforme pour l’espace OHADA sont, d’évidence, tout à fait considérables. Notre tour d’horizon du droit international privé de l’espace OHADA nous a permis d’observer les importantes lacunes qu’accuse encore cet espace en ce domaine. Or, nous estimons que l’uniformisation du droit international privé de l’OHADA non seulement serait susceptible de rendre enfin possible la réalisation des objectifs affichés de l’OHADA (2.1), mais donnerait également lieu à un rééquilibrage d’une organisation dont la raison d’être est demeurée jusqu’alors essentiellement extravertie (2.2).
2.1 La réalisation des objectifs affichés de l’OHADA
L’OHADA s’est toujours pensée comme un facteur de prévisibilité et d’attractivité des investissements, notamment en raison des insécurités juridiques et judiciaires des États membres, mises en évidence au courant des années 90. Ses objectifs en témoignent. Ils reposent sur ceux de l’adoption :
« d’un Droit des Affaires harmonisé, simple, moderne et adapté, afin de faciliter l’activité des entreprises, […] appliqué avec diligence, dans les conditions propres à garantir la sécurité juridique des activités économiques, afin de favoriser l’essor de celles-ci et d’encourager l’investissement[61] », et de « règles communes simples, modernes et adaptées à la situation de leurs économies, par la mise en oeuvre de procédures judiciaires appropriées[62] ».
Jusqu’à la publication du Rapport de présentation du Projet de texte uniforme portant sur le droit général des obligations dans l’espace OHADA[63] en 2015, les règles de droit international privé n’avaient guère été considérées comme pouvant concourir à l’atteinte de ces objectifs. Ce rapport énonçait en effet pour la première fois que
[L’]une des premières attentes des investisseurs nationaux comme étrangers est bien une grande prévisibilité de la loi applicable au fond des litiges ; dans un espace judiciaire intégré comme l’OHADA, il est hautement sécurisant que les règles de conflits en vigueur dans les États membres désignent la même loi nationale quel que soit le pays dans lequel l’action est introduite[64].
Comme nous avons pu le constater, de lege lata, du chemin reste à parcourir pour atteindre ces objectifs de prévisibilité. Si les règles de détermination de la loi applicable ne sont pas totalement inexistantes en droit uniforme et dans les droits nationaux de ses 17 États membres, celles-ci sont pour le moins embryonnaires et procèdent pour l’essentiel de la méthode suivie par le juge saisi.
Cette situation demeure en soi particulièrement problématique. Ainsi, pour reprendre les règles de conflits de lois que nous avons mises en évidence, pour une même relation contractuelle, le juge gabonais saisi fera application de la loi du lieu de signature du contrat, tandis que le juge burkinabé appliquera la loi du lieu de résidence de la partie devant fournir la prestation caractéristique[65]. Les implications de cette absence de prévisibilité seront d’autant plus regrettables que la méthode de détermination choisie par le juge conditionnera également l’applicabilité du droit OHADA[66] dès lors qu’un ordre juridique tiers à l’espace OHADA sera concerné par la situation contractuelle litigieuse (dans notre exemple, si par hypothèse le lieu de résidence ou de signature se situait en dehors de l’espace OHADA).
Les investisseurs étrangers, comme les investisseurs locaux, à défaut d’une clause précise de désignation du droit applicable, ne sont ainsi guère en mesure de déterminer le droit qui viendra in fine régir leurs relations contractuelles. À désigner le droit OHADA comme droit applicable, la question de la détermination du droit reste de surcroît une problématique irrésolue pour les éléments non couverts par le droit uniforme[67].
Comme nous avons pu le constater pour les règles de conflits de lois, le survol des quelques dispositifs relatifs aux conflits de compétences fait surgir d’importantes béances. En effet, quand bien même les opérateurs économiques pourraient s’entendre pour insérer une clause d’electio fori attribuant compétence à une juridiction particulière, en l’état, aucune disposition de droit uniforme n’est susceptible d’empêcher l’une des parties requérantes de saisir une autre juridiction qui pourrait alors, selon ses propres règles nationales, se reconnaître compétente pour trancher le litige[68]. Un tel dispositif est à regretter en ce qu’il ne peut avoir que des effets désastreux sur le plan de la coopération entre les juridictions de l’espace OHADA[69].
Enfin, parmi les angles morts du droit OHADA, l’absence de règle relative à la reconnaissance des décisions judiciaires est sans conteste la plus patente, à tout le moins pour les décisions ayant tranché des litiges relevant du droit uniforme. Si les carences du droit international privé peuvent s’entendre pour régler les questions de détermination du droit applicable ou de la juridiction compétente de par l’approche sectorielle adoptée par le droit OHADA, cette configuration est beaucoup moins compréhensible en ce qui concerne la circulation des décisions rendues au sein même de l’espace OHADA.
Cette situation de défiance à l’endroit des décisions rendues par les juges nationaux tranche en effet pour le moins avec la confiance accordée aux sentences arbitrales en général[70], et à celles qui sont rendues sous l’égide de la CCJA en particulier[71]. Rappelons ici que, par définition, seul un faible pourcentage des différends de l’espace OHADA sont résolus par la CCJA[72] et que, par conséquent, l’immense majorité des décisions restent soumises au contrôle de chacun des ordres juridiques dans lesquels leur reconnaissance et exécution sont recherchées. Aussi pouvons-nous nous ranger derrière les propos sévères mais fort éclairants du professeur Pierre Meyer qui constate que
« [L’]absence de législation et de jurisprudence publiée et connue rend incertain et quasiment divinatoire le sort susceptible d’être réservé aux décisions judiciaires étrangères dans ces pays. » Et l’auteur d’en conclure qu’ « [u]ne telle insécurité juridique n’est évidemment pas de nature à favoriser la circulation des jugements […] D’une manière générale, l’absence de législation dans certains pays, la diversité des législations et parfois l’ambiguïté des conditions de la reconnaissance et de l’exequatur constituent incontestablement un frein à la circulation fluide des décisions judiciaires dans les États d’Afrique membres de l’OHADA[73].
De toute évidence, l’édification d’un droit uniforme des affaires n’aura aucunement rendu désuètes les problématiques de droit international privé, que ce soit pour les relations d’affaires ayant des éléments de rattachement avec des ordres juridiques extérieurs à l’espace OHADA ou pour les relations d’affaires internes à cet espace. Au contraire, l’entrée en vigueur de la ZLECAf conduira à une multiplication de ces situations.
Nul doute que l’essor du commerce intra-africain démultipliera les relations contractuelles internationales pour lesquelles pourront se poser de délicats problèmes de droit international privé. Ainsi, alors que l’instauration d’une réglementation du commerce international à l’échelle de l’Afrique devrait conduire à favoriser la circulation des personnes, des biens et des capitaux dans tout le continent[74], il est à craindre que, aux barrières douanières que la ZLECAf ambitionne de réduire, se substituent de nouvelles barrières juridiques.
Ces questions de droit international privé pourraient, de surcroît, se révéler particulièrement redoutables dans le contexte d’un continent africain aux traditions et aux systèmes juridiques multiples, auxquels se superposent et dans lesquels s’enchevêtrent ordres supranationaux et ordres spécialisés[75]. La ZLECAf a manifestement conscience des difficultés que pose cet entrecroisement puisque l’un de ses objectifs affichés est de « résoudre les défis de l’appartenance à une multitude d’organisations qui se chevauchent[76] ».
L’OHADA, parmi ces organisations, tient une place tout à fait singulière. Nulle autre organisation n’est en effet en mesure de produire un droit uniforme, attractif et d’application immédiate. En se dotant pour la première fois de règles d’articulation pour les ordres juridiques concernés par une relation d’affaires internationale, de toute évidence, nous assisterions à un véritable redimensionnement de l’OHADA.
2.2 Un véritable redimensionnement de l’OHADA
L’indigence des règles uniformes de droit international privé, pourtant si centrales dans un ordre juridique composite se présentant comme un instrument de prévisibilité, semble pour le moins paradoxal. Cette contradiction n’est toutefois que d’apparence et peut se comprendre à l’aune du positionnement traditionnel de l’OHADA à l’égard de sa production normative.
Rappelons d’abord, pour pleinement le saisir, que la raison d’être de l’OHADA est et demeure essentiellement extravertie. La création même de cette organisation doit d’abord à l’impulsion fédératrice de la France. C’est bel et bien sous le parrainage de ce pays, à l’occasion du Ve Sommet de la Francophonie tenu à Port-Louis qu’a été signé en 1993 le Traité OHADA et que ce Traité fut révisé en 2008 lors du XIIe Sommet de la Francophonie qui se tenait alors à Québec[77].
Cette impulsion originelle porte en son sein l’orientation générale de l’OHADA, intrinsèquement tournée vers l’extérieur. Il est communément admis dans les institutions de l’OHADA que le développement économique de l’espace OHADA requiert l’attraction d’investissements directs étrangers et qu’à cet effet le cadre juridique et judiciaire des États membres doit s’adapter aux attentes et aux exigences de ces investisseurs. L’ordonnancement juridique de l’espace OHADA demeure ainsi à ce jour essentiellement appréhendé comme un instrument d’attractivité et de mobilisation de capitaux, tout autre phénomène juridique devenant, hors ce prisme, non pertinent[78].
Les présupposés de pareils choix de politiques juridiques[79] et les conséquences qu’ils impliquent restent encore très largement indiscutés, du moins dans le cercle des juristes de l’OHADA[80]. Nous ne pouvons à cet égard qu’inviter praticiens et universitaires à se saisir pleinement de cette question au soubassement de l’OHADA, notamment à l’heure des rééquilibrages affichés des rapports entre la France et le continent africain[81].
Sans aller plus en avant sur cette délicate question, tout au moins doit-on convenir que l’OHADA a toujours été l’objet d’intenses influences normatives[82]. Si, à l’origine, ces dernières étaient pour l’essentiel françaises, elles proviennent désormais également des prescriptions des institutions financières internationales, notamment de la Banque mondiale[83], sous couvert de l’amélioration du climat des affaires.
L’économie générale de l’OHADA reflète assurément cette extraversion. De par son positionnement, il est aisé de comprendre que l’instauration d’un droit international privé uniforme n’ait pas été à l’ordre du jour pendant près de trois décennies, et pouvait même apparaître contre-productive. À quoi bon, en effet, élaborer des règles de détermination du droit national applicable, de la juridiction étatique compétente et de circulation de décisions judiciaires, alors que précisément l’ambition de l’OHADA est de prémunir les investisseurs étrangers des vicissitudes de ces ordres juridiques, de leurs insécurités juridiques et judiciaires ? La sécrétion d’un droit uniforme et d’un système arbitral n’est-elle pas précisément le résultat direct de cette volonté de neutralisation des droits et juridictions d’origine nationale[84] ?
Nul doute que l’élaboration d’un droit international privé uniforme pour l’OHADA s’inscrit encore dans une logique d’extraversion et d’attractivité des capitaux privés étrangers. Les modalités d’élaboration et d’adoption[85] de la législation OHADA continuent de le suggérer. D’aucuns regretteront peut-être que l’élaboration du droit OHADA demeure pour l’essentiel opaque[86] et déléguée à d’autres institutions internationales ou à des cabinets d’avocats internationaux comme pour le présent projet d’acte uniforme[87], à charge alors pour eux d’organiser la consultation des parties prenantes africaines.
Pour autant, de par son objet, ce projet d’acte uniforme porte en son sein des éléments bienvenus d’introversion et d’approfondissement de l’intégration de l’espace OHADA. Si l’harmonisation par l’uniformisation se poursuit, le domaine de cette entreprise englobe désormais non plus des règles matérielles d’un droit des affaires internationalisé, mais également des règles de désignation, de compétence et de reconnaissance de dispositions, de juridictions et de décisions nationales. Un tel acte uniforme serait ainsi susceptible d’équilibrer l’économie générale de l’OHADA et, par-là, de concourir à son changement de politique juridique.
Conclusion
Après avoir longtemps délaissé les problématiques de droit international privé, l’OHADA est aujourd’hui en mesure d’édifier en ce domaine une oeuvre déterminante à l’heure de la ZLECAf.
À l’échelle du continent, le projet d’uniformisation pourrait en effet contribuer positivement au dynamisme de la ZLECAf et rayonner pour autant qu’il puisse trouver un langage commun avec les pays africains de common law[88] et prendre en considération les spécificités de la pratique du droit sur l’ensemble du continent. L’on comprend alors l’appel du secrétaire permanent de l’OHADA, Sidibi Darankoum, en décembre 2019, pour que l’Union africaine intègre l’OHADA aux travaux sur la constitution de la ZLECAf et que l’OHADA bénéficie d’un poste de commissaire[89].
À l’échelle de l’espace OHADA, l’entrée en vigueur de règles uniformes de droit international privé entraînerait, croyons-nous, une mue sans précédent pour cette organisation. Au-delà des objectifs désormais classiques de sécurisation et d’attractivité des capitaux étrangers auxquels répondrait assurément toute uniformisation des règles de droit international privé, un acte uniforme en ce domaine conférerait une toute nouvelle dimension à l’OHADA.
L’uniformisation visée permettrait une meilleure articulation des ordres juridiques et judiciaires des États membres de l’OHADA et, osons le dire, n’attribuerait pas moins que sa pleine mesure à la dimension africaine de cette organisation. Tel est en effet l’enjeu lorsqu’on promeut le commerce infra-africain par des règles claires et communes de droit international privé et que l’on fait enfin le pari de la confiance à l’endroit des juges[90], des législateurs nationaux et des opérateurs économiques africains.
Une révolution silencieuse est ainsi peut-être en cours. S’il est possible que nos attentes soient déçues, ce pari mérite d’être tenté et il nous faut souhaiter que ce projet d’uniformisation arrive à son terme.
Parties annexes
Notes
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[1]
Accord portant création de la zone de libre-échange continentale africaine, États membres de l’Union africaine, 21 mars 2018 ; Maryala Maliszewska et Michele Ruta, The African Continental Free Trade Area Economic and Distributional Effects, Washington, World Bank Group, 2020, p. 5 ; Wamkele Mene, « The African Continental Free Trade Area (AfCFTA) : Boosting Intra-Africa Trade », (2020) 51-4 Geo J Intl L 751, 751-752 ; Katrin Kuhlmann et Akinyi Lisa Agutu, « The African Continental Free Trade Area : Toward a New Legal Model for Trade and Development », (2020) 51-4 Geo J Intl L 753, 753-808.
-
[2]
Conformément à l’article 10 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA), adopté le 17 octobre 1993, J.O. OHADA, no 4, 1er novembre 1997, modifié par le Traité portant révision du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, adopté le 17 octobre 2008, J.O. OHADA, no 20, 1er novembre 2009 (ci-après « Traité OHADA »). Sur ce sujet, voir Parfait Diédhiou, « L’article 10 du Traité de l’OHADA : quelle portée abrogatoire et supranationale ? », (2007) 2 Unif L Rev 265.
-
[3]
Et cela, malgré l’intérêt qu’a pourtant suscité le droit international privé durant la période des déclarations d’indépendance. Voir notamment : Philippe Franceskakis, « Problèmes de droit international privé de l’Afrique noire indépendante », (1964) 112 Académie de droit international de La Haye 269, 270-361 ; Jean Foyer, « Problèmes de droit international privé dans les relations entre la France et les nouveaux États africains d’expression française : les problèmes de nationalité et de conditions des Étrangers », dans Travaux du Comité français de droit international privé, 21-23e année, 1963, p. 139 et suiv. Nonobstant ce climat de désintérêt manifeste pour le droit international privé, il faut noter que le juge Mbaye, père fondateur de l’OHADA, avait appelé en 1971 à une harmonisation en Afrique de la matière. Voir Kéba Mbaye, « Harmonisation du droit privé et du droit international privé en matière commerciale dans les États de l’Afrique occidentale, équatorial et orientale », (1971) 26-2 Rivista trimestrale di studi e documentazione dell’Istituto italiano per l’Africa e l’Oriente 139.
-
[4]
Institut international de droit d’expression et d’inspiration françaises, « L’IDEF vous informe de l’invitation du CIAN... », 11 mai 2021, [En ligne], [idef.legiteam.net/L-IDEF-vous-informe-de-l.html] (15 février 2023) ; Gilles Cuniberti, « OHADA Commissions a PIL Act », European Association of Private International Law, 29 septembre 2020, [En ligne], [eapil.org/2020/09/29/ohada-commissions-a-pil-act/] (15 février 2023).
-
[5]
Ce considérant est commun au Règlement (CE) n°593/2008 du Parlement Européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I), J.O. L 177/6 du 04.07.2008, premier considérant, au Règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (refonte), J.O. L 351/1 du 20.12.2012, troisième considérant, et au Règlement 2015/848 du Parlement Européen et du Conseil du 20 mai 2015 relatif aux procédures d’insolvabilité (refonte), J.O. L 141/19 du 05.06.2015, deuxième considérant. L’Union européenne n’est pas l’unique organisation d’intégration régionale produisant des règles de droit international privé vers laquelle l’OHADA pourra porter le regard pour élaborer son acte uniforme. En avril 2014, l’Organisation pour l’harmonisation du droit des affaires dans la Caraïbe (OHADAC), dont l’intitulé signale en lui-même la force inspiratrice de l’OHADA, a élaboré la Loi type OHADAC de droit international privé, qui pourrait servir de référence aux rédacteurs de cet acte uniforme. Voir OHADAC, Avant-projet de loi modèle OHADAC relative au droit international privé, [En ligne], [www.ohadac.com/textes/5/avant-projet-de-loi-modele-ohadac-relative-au-droit-international-prive.html] (16 janvier 2023).
-
[6]
À ce jour, l’OHADA a adopté et révisé dix actes uniformes :
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Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, adopté le 10 avril 1998, J.O. OHADA, 2e année, no 6, 1er juin 1998 (ci-après « AURVE ») ;
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Acte uniforme relatif aux contrats de transport de marchandises par route, adopté le 22 mars 2003, J.O. OHADA, no 13, 31 juillet 2003 (ci-après « AUCTMR ») ;
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Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général, adopté le 15 décembre 2010, J.O. OHADA, no 21, 15 février 2011 (ci-après « AUDCG ») ;
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Acte uniforme relatif au droit des sociétés coopératives, adopté le 15 décembre 2010, J.O. OHADA, no 23, 15 février 2011 (ci-après « AUDSC ») ;
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Acte uniforme révisé portant organisation des sûretés, adopté le 15 décembre 2010, J.O. OHADA, no 22, 15 février 2011 (ci-après « AUS ») ;
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Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, adopté le 30 janvier 2014, J.O. OHADA, no spécial, 4 février 2014 (ci-après « AUSCGIE ») ;
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Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, adopté le 10 septembre 2015, J.O. OHADA, no spécial, 25 septembre 2015 (ci-après « AUPCAP ») ;
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Acte uniforme relatif au droit comptable et à l’information financière, adopté le 26 janvier 2017, J.O. OHADA, no spécial, 15 février 2017 (ci-après « AUDCIF ») ;
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Acte uniforme relatif à la médiation, 23 novembre 2017, J.O. OHADA, no spécial, 15 décembre 2017 (ci-après « AUM ») ;
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Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage, 23 novembre 2017, J.O. OHADA, no spécial, 15 décembre 2017 (ci-après « AUDA »).
Pour accéder à ces textes, www.ohada.com/textes-ohada/actes-uniformes.html (22 janvier 2023).
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[7]
Conformément au Traité OHADA, préc., note 2, art. 13 et 14.
-
[8]
Ces règles sont qualifiées de règles indirectes de droit international privé par le professeur Gérard Ngoumtsa Anou, « Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA) », dans Jurisclasseur International, Droit international, fasc. 170, LexisNexis, 2018, no 94, à jour au 23 janvier 2018 (LAd/QL).
-
[9]
En ce sens, le professeur Joseph Issa-Sayegh, L’intégration juridique des pays africains par l’OHADA, 2007, [En ligne], [www.ohada.com/uploads/actualite/177/conference-ohadac-issa-sayegh.pdf] (16 janvier 2023), a pu défendre l’idée suivante :
L’unité des règles de droit élimine les conflits de lois et les conséquences fâcheuses de leur solution (lenteur des procédures pour résoudre la question préalable de la loi compétente pour trancher un litige ; choix d’une législation non prévue par les parties ou défavorable à leurs intérêts communs) ; en effet, dans la mesure où la loi des affaires est identique d’un pays à l’autre de la zone intégrée, il est indifférent que ce soit telle ou telle loi qui soit finalement retenue par le juge.
-
[10]
Sur le caractère nécessairement inachevé du droit substantiel de l’OHADA, Gérard Ngoumtsa Anou, Droit OHADA et conflits de lois, L.G.D.J., 2013, p. 27-80.
-
[11]
Id., à cet égard, le professeur Ngoumsta Anou fait état du droit international privé comme instrument de réalisation de la complétude du droit OHADA et comme instrument de délimitation de l’applicabilité spatiale du droit matériel OHADA, ces deux éléments constituant les deux parties de sa thèse.
-
[12]
« Sauf stipulations conventionnelles contraires, le contrat de vente commerciale est soumis aux dispositions du présent Livre dès lors que les contractants ont le siège de leur activité dans un des États Parties ou lorsque les règles du droit international privé mènent à l’application de la loi d’un État Partie » : AUDCG, préc., note 6, art. 234, al. 2 (l’italique est de nous). Pour un commentaire approfondi de cet article, Paul-Gérard Pougoué et Gérard Ngoumsta Anou, « L’applicabilité spatiale du nouveau droit OHADA de la vente commerciale et le droit international privé : une réforme inachevée », dans Mélanges en l’honneur du professeur Jean-Michel Jacquet : le droit des rapports internationaux économiques et privés, Paris, LexisNexis, 2013, p. 541-560.
-
[13]
AUDCG, préc., note 6, art. 1 al. 3. De manière similaire, le droit uniforme désigne comme droit de complément, le droit de l’État partie dans lequel est située la succursale. Voir AUDSC, préc., note 6, art. 118.
-
[14]
Voir AUS, préc., note 6, art. 195, 201 al. 1, 205, 207 ou 221 al. 2.
-
[15]
AUCTMR, préc., note 6, art. 12 al. 6.
-
[16]
AUPCAP, préc., note 6, art. 110.
-
[17]
G. Ngoumtsa Anou, préc., note 8.
-
[18]
Voir Traité OHADA, préc., note 2, art. 53.
-
[19]
Akrawati Shamsidine Adjita, « Les problèmes de cohabitation entre la Cour commune de justice et d’arbitrage et les cours nationales de cassation », OHADATA D-11-73 ; Boubacar Diarrah, « Réflexions sur les problèmes de cohabitation entre la CCJA et les juridictions nationales de cassation », OHADATA D-11-72. Voir également, à cet égard, l’Avis n° 1/2003/EP du 04 juin 2003, CCJA, Ohadata J-04-69.
-
[20]
« Sauf convention contraire des parties, les contestations découlant de l’application des dispositions du Titre I du présent Livre sont portées à la requête de la partie la plus diligente, sauf dispositions contraires du présent Livre, devant la juridiction compétente, statuant à bref délai, dans le ressort de laquelle sont situés les locaux donnés à bail » : AUDCG, préc., note 6, art. 132 (l’italique est de nous). L’autonomie de la volonté pour la désignation du juge compétent a également été reconnue par la pratique de la CCJA. Voir, par exemple, l’affaire SDV-Côte d’Ivoire c. Société Rial Trading (2004), CCJA no 21, OHADATA J-04-382, p. 5-6 (l’italique est de nous) : « s’il est de principe en matière que le Tribunal compétent est celui du lieu de résidence du débiteur, cette règle toutefois ne trouve plus à s’appliquer dès lors que les parties y ont contractuellement dérogé ».
-
[21]
AURVE, préc., note 6, art. 3 al. 2.
-
[22]
Voir AUSCGIE, préc., note 6, art. 36, 75, 127, 159, 164, 170, 216, 326, 619, 827-1 ou encore 853-21.
-
[23]
Voir AUDCG, préc., note 6, art. 46, 48, 51, 54, 55, 58, 62 ou encore 159.
-
[24]
AURVE, préc., note 6, art. 3 al. 1.
-
[25]
AUPCAP, préc., note 6, art. 3-1. Pour une analyse approfondie de la dimension de droit international privé de cet acte uniforme, voir Laurence-Caroline Henry et Jean-Luc Vallens, « Le droit international privé de l’acte uniforme OHADA », (2015) 253 Revue Droit & Patrimoine 49.
-
[26]
AUCTMR, préc., note 6, art. 27-1 :
[S]i les parties n’ont pas attribué compétence à une juridiction arbitrale ou étatique déterminée, le demandeur peut saisir les juridictions du pays sur le territoire duquel :
a) le défendeur a sa résidence habituelle, son siège principal ou la succursale ou l’agence par l’intermédiaire de laquelle le contrat de transport a été conclu ;
b) la prise en charge de la marchandise a eu lieu ou les juridictions du pays sur le territoire.
-
[27]
Conformément au Traité OHADA, préc., note 2, art. 20.
-
[28]
Voir id., art. 25.
-
[29]
Voir AUPCAP, préc., note 6, art. 247 : cet acte uniforme dispose également d’une action en reconnaissance des décisions d’ouverture prise en dehors de l’espace OHADA en son article 256‐14.
-
[30]
Voir AUCTMR, préc., note 6, art. 27 par. 3º.
-
[31]
Pour ce qui est des conventions internationales signalons que, si le Bénin, le Cameroun, le Congo-Brazzaville, le Gabon et la Guinée-Conakry ont adhéré à la Convention des Nations unies sur les contrats de vente internationale de marchandises, 11 avril 1980, 1489 R.T.N.U. 3 (entrée en vigueur le 1er janvier 1988), [En ligne], [treaties.un.org/doc/Publication/MTDSG/Volume%20I/Chapter%20X/X-10.fr.pdf] (2 avril 2023) (ci-après « CVIM »), cet instrument ne fournit pas de règles de conflits de lois. À noter également, que le Burkina Faso, seul membre de l’espace OHADA à être également membre de la Conférence de La Haye de droit international privé, n’a signé aucun instrument relatif à la matière contractuelle. Sur les répercussions de l’applicabilité de la CVIM dans l’espace OHADA, voir Alain Fénéon, « L’influence de la CVIM sur le nouveau droit africain de la vente commerciale », (2005) 115-853 Penant 464 et suiv. Voir également : Jean Alain Penda Matipe, « OHADA et CVIM : instruments alternatifs ou complémentaires ? », AJ Contrat, 2020, 372 et suiv. ; Olivier Bustin, « Un droit OHADA de la vente commerciale, pour quoi faire ? », AJ Contrat, 2020.8-9.359 et suiv. ; Conférence de La Haye de droit international privé, « Le Burkina Faso a accepté le Statut de la Conférence de La Haye de droit international privé », 14 octobre 2013, [En ligne], [www.hcch.net/fr/news-archive/details/?varevent=330 ] (17 janvier 2023).
-
[32]
Sur le legs civiliste français dans le droit matériel de l’espace OHADA, voir : Kéba Mbaye, « Le destin du Code civil en Afrique », dans Le Code civil 1804-2004 – Livre du Bicentenaire, Dalloz, 2004, p. 515-538 ; Louis-Daniel Muka Tshibende, « Les Gaulois, nos ancêtres ? Sur la circulation et l’influence du modèle juridique français en Afrique noire francophone », [2015] Ohadata D-07-02 ; Boubacar Diambou, « De l’application du droit étranger au Mali et par-delà dans les pays francophones de l’espace OHADA », [2015] RDAA ; Boubacar Diambou, « Une validation du recours aux droits français et belge en zone OHADA », [2015] RDAA.
-
[33]
Gabriel Chervet, Civ. 1re, 5 déc. 1910, Rev crit dr int privé 1911.395.
-
[34]
H. Batiffol, note sous Civ. 1re, 21 juin 1950, Rev crit dr int privé, 1950.609.
-
[35]
Civ. 1re, 19 octobre 1959, Rev crit dr int privé, 1960.215.
-
[36]
Justin Monsenepwo, « Quo vadis, OHADA Private International Law ? », (2021) 26 Unif L Rev 345, 351 et s., note 28.
-
[37]
Ces dispositions qui ont trait, par exemple, au droit applicable aux dispositions testamentaires ne sauraient être généralisées aux situations contractuelles propres au droit des affaires. Voir à titre d’exemple : pour le Burkina Faso, la Loi Zatu no An VII 0013/FP/PRES du 16 novembre 1989, portant institution et application du Code des personnes et de la famille, art. 1047 et 1048 ; pour la République du Congo, la Loi n° 073/1984 du 17 octobre 1984 portant Code de la famille, art. 826 ; pour le Sénégal, la Loi n° 72-61 de juin 1972 portant Code de la famille modifiée par les lois no 74-37 du 18 juillet 1974 et no 89-01 du 17 janvier 1989, art. 848 ; ou encore pour le Togo, l’Ordonnance n° 80-16 du 31 janvier 1980 portant Code des personnes et de la famille, J.O. no spécial du 31.01.1980, art. 717-724. Sur cette dimension du droit international privé en Afrique, voir : Abdoul Aziz Diouf, « Libres propos sur le statut personnel dans le droit international privé des États d’Afrique noire », (2019) 3 Rev crit dr int privé 723, 723-747 ; Siméon Patrice Kouam, « La réception du droit français dans la construction d’une théorie générale de droit international privé camerounais : réflexion à partir de l’avant-projet de code des personnes et de la famille », (2013) Recht in Afrika, Rüdiger Köppe Verlag Köln 21, 21-58.
-
[38]
Voir le Décret du 4 mai 1895 – Code civil. – Des personnes, [1985] B.O. p. 138, art. 11.
-
[39]
Voir la Loi n° 15/72 du 29 juillet 1972 portant adoption de la Première Partie du Code Civil, J.O. de la République Gabonaise, art. 55 (ci-après « Code civil gabonais »).
-
[40]
Malgré les efforts notables, notamment de l’OHADA et des praticiens qui s’évertuent à commenter régulièrement les décisions notables de la CCJA et des cours de cassation nationales, ces décisions demeurent encore pour une large part inaccessibles, du fait en particulier de l’impéritie publique qui règne encore sur ce point.
-
[41]
Eurasie-Afrique c. Compagnie internationale d’affrètement et de transit (CIAT) (2001), Ordonnance du 30 novembre 2001 de référé no 89/2001, Cour d’appel de Ouagadougou, OHADATA J-06-64.
-
[42]
Convention générale de coopération en matière de justice de 1961, 12 septembre 1961 (ci-après « Convention judiciaire de l’OCAM »).
-
[43]
Office contre la drogue et le crime, Recueil d’accord bilatéraux, régionaux et internationaux en matière d’entraide judiciaire et d’extradition, Doc. N.U., 2008, t. 1, p. 248, à la page 257.
-
[44]
Convention générale de coopération en matière de justice entre la République du Niger et la République du Mali, 22 avril 1960, dans Recueil d’accord bilatéraux, régionaux et internationaux en matière d’entraide judiciaire et d’extradition, Doc. N.U., 2008, t. 1, p. 3, aux pages 12-13, art. 36 ; Convention relative à la coopération judiciaire à l’exéquatur des jugements et à l’extradition entre le Sénégal et la Tunisie, J.O. de la République tunisienne 3-7 décembre 1965, p. 1587, art. 39 ; Convention générale de coopération en matière de justice entre le Gouvernement de la République du Mali et le Gouvernement de la République de Guinée, 20 mai 1964, dans Recueil des instruments bilatéraux, régionaux, et internationaux sur l’extradition et l’entraide judiciaire (États membres de la CEDEAO) – Instruments bilatéraux, Doc. N.U., 2013, t. I, p. 178, art. 31 ; Convention générale de coopération en matière de justice entre la République du Mali et la République de Côte d’Ivoire, 11 novembre 1964, dans Recueil des instruments bilatéraux, régionaux, et internationaux sur l’extradition et l’entraide judiciaire (États membres de la CEDEAO) – Instruments bilatéraux, Doc. N.U., 2013, t. I, p. 198-199, art. 38 ; Convention générale de coopération en matière de justice entre la République du Sénégal et la République du Mali, 8 avril 1965, dans Recueil des instruments bilatéraux, régionaux, et internationaux sur l’extradition et l’entraide judiciaire (États membres de la CEDEAO) – Instruments bilatéraux, Doc. N.U., 2013, t. I, p. 217-218, art. 36 ; Convention de coopération en matière judiciaire entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal, 29 mars 1974, dans Recueil des instruments bilatéraux, régionaux, et internationaux sur l’extradition et l’entraide judiciaire (États membres de la CEDEAO) – Instruments bilatéraux, Doc. N.U., 2013, t. I, p. 272-273, art. 56.
-
[45]
Convention de coopération et d’entraide en matière de justice entre les États membres du Conseil de l’Entente, 20 février 1997, dans Recueil d’accord bilatéraux, régionaux et internationaux en matière d’entraide judiciaire et d’extradition, Doc. N.U., 2008, t. 1, p. 285, à la page 304, art. 80 (ci-après « Convention du Conseil de l’Entente »).
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[46]
Voir, par exemple, la Loi n° 2002-07 du 24 août 2004 portant Code des personnes et de la famille du Bénin, art. 962.
-
[47]
Nos propos concernent ici les décisions judiciaires, mais les actes extrajudiciaires ne bénéficient pas d’un régime de faveur. Un auteur, soulignant l’intérêt qu’auraient les États membres de l’OHADA à devenir signataires de la Convention de La Haye du 5 octobre 1961 supprimant l’exigence de la légalisation des actes publics étrangers, relève qu’actuellement, au sein de l’espace OHADA, pour une procédure de légalisation d’un simple acte, comme les actes d’huissier ou désormais les actes d’avocat, pas moins de cinq authentifications sont nécessaires devant les organismes de l’État d’accueil et ceux de l’État d’origine : Justin Monsenepwo Mwakwaye, « Apports des instruments de la conférence de La Haye au droit des affaires dans l’espace OHADA », (2016) 5 Schriftenreihe Junges Afrikazentrum 3, 6-7.
-
[48]
Les dispositions relatives à l’exequatur étant en substance identiques, nous ne reproduisons ici que la première d’entre elles, à savoir l’article 30 de la Convention judiciaire de l’OCAM, préc., note 42. Voir pour les autres conventions : Convention relative à la coopération en matière judiciaire entre les États membres de l’Accord de non-agression et d’assistance en matière de défense (ANAD), 21 avril 1987, dans Recueil d’accord bilatéraux, régionaux et internationaux en matière d’entraide judiciaire et d’extradition, Doc. N.U., 2008, t. 1, p. 266, à la page 274, art. 31 ; Convention du Conseil de l’Entente, préc., note 45, art. 72 :
« En matière civile et commerciale, les décisions contentieuses et gracieuses rendues par les juridictions de l’une des Hautes Parties contractantes ont, de plein droit, l’autorité de la chose jugée sur le territoire des autres États si elles réunissent les conditions suivantes : [1.] la décision émane d’une juridiction compétente selon les règles définies à l’article 38 ; [2.] la décision a fait application de la loi applicable au litige en vertu des règles de solution des conflits de loi admises dans l’État où l’exécution de la décision est demandée ; [3.] la décision est, d’après la loi de l’État où elle a été rendue, passée en force de chose jugée et susceptible d’exécution ; [4.] les parties ont été régulièrement citées, représentées ou déclarées défaillantes ; [5.] la décision ne contient rien de contraire à l’ordre public de l’État où elle est invoquée et n’est pas contraire à une décision judiciaire prononcée dans cet État et possédant à son égard l’autorité de la chose jugée. »
-
[49]
Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale, Accord de coopération judiciaire entre les États membres de la CEMAC, 28 janvier 2004.
-
[50]
Id., art. 14.
-
[51]
Loi n° 72-833 du 21 décembre 1972 portant Code de procédure civile, commerciale et administrative, art. 347.
-
[52]
Décret n° 99-254/P-RM du 15 septembre 1999 portant Code de procédure civile, commerciale et sociale, modifié par le décret no 09-220/P-RM du 11 mai 2009, J.O. 2009-23, art. 517.
-
[53]
Décret n° 64-572 du 30 juillet 1964 portant Code de Procédure civile, J.O. no 3705 du 28.09.1964, art. 787.
-
[54]
Loi n° 15/72 du 29 juillet 1972 portant adoption de la Première Partie du Code Civil, préc., note 39.
-
[55]
Id., art. 74 al. 3.
-
[56]
Id., art. 74 al. 5.
-
[57]
Id.
-
[58]
Notons d’ailleurs, dans ce contexte gabonais, que la Convention d’aide mutuelle judiciaire, d’exequatur des jugements et d’extradition entre la République française et la République du Gabon, signée le 23 juillet 1963, J.O.R.F., n°51, mars 1965, p.1723-1727, n’autorise pas un tel pouvoir de révision et que la Cour de cassation française a censuré, sur le fondement de cette convention, les juges de première instance ayant procédé à une révision au fond d’une décision étrangère. Voir Civ.1re, 14 janv. 2009, Bull. civ., n° 194.
-
[59]
Convention de coopération en matière judiciaire entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal, préc., note 44, p. 269, art. 47.
-
[60]
Convention générale de coopération en matière de justice entre le Gouvernement de la République du Mali et le Gouvernement de la République de Guinée, préc., note 44, art. 25.
-
[61]
Traité OHADA, préc., note 2, préambule.
-
[62]
Id., art. 1.
-
[63]
Les articles 566 à 616 de ce projet avaient pour ambition d’unifier les règles de conflits de lois des États membres de l’OHADA. Si ces dispositions ne sont jamais entrées en vigueur, elles demeurent une oeuvre doctrinale dont peuvent toutefois s’inspirer les juridictions nationales pour asseoir leurs décisions. Voir sur ce sujet : Joseph Issa-Sayegh, Paul Gérard Pougoué et Filiga Michel Sawadogo, Projet de texte uniforme portant sur le droit général des obligations dans l’espace OHADA, 15 avril 2015, p. 120-133, [En ligne], [www.fondation-droitcontinental.org/fr/wp-content/uploads/2014/07/Avant-projet-droit-des-obligations-OHADA-texte-final-150603.pdf] (15 février 2023) ; J. Monsenepwo, préc., note 36, p. 352-355. Sur l’influence des conférences de La Haye sur des dispositions de droit international privé de cet avant-projet, voir Justin Monsenepwo, « Contribution of the Hague Principles on Choice of Law in International Commercial Contracts to the Codification of Party Autonomy under OHADA Law », (2019) 15 J Priv Intl L 162, 162-185.
-
[64]
J. Issa-Sayegh, P.G. Pougoué et F.M. Sawadogo, préc., note 65, p. 6.
-
[65]
Voir note n°43.
-
[66]
Sur ce point, G. Ngoumtsa Anou, préc., note 11, p. 375, n° 518.
-
[67]
Pierre Meyer, « Le droit OHADA et le droit international privé : les règles d’applicabilité du droit uniforme », (2018) 23 Rev dr unif 99, 121.
-
[68]
J. Monsenepwo Mwakwaye, préc., note 47, p. 13, n° 5.
-
[69]
Boniface Banamba, « Les conflits de juridictions dans l’espace OHADA », [2016] RLDC no 143.
-
[70]
Conformément au Règlement d’arbitrage de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, 23 novembre 2017, J.O. no spécial du 15.12.2017, art. 30. Voir Gérard Ngoumtsa Anou, « Exequatur en droit positif comparé : regard sur l’espace intégré OHADA à la lumière de l’expérience européenne », (2012) 5 RDAI 588, 595.
-
[71]
Conformément à l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage, 23 novembre 2017, J.O. no spécial du 15.12.17, art. 31.
-
[72]
Serge Christian Ekani, « Intégration, exequatur et sécurité juridique dans l’espace OHADA. Bilan et perspectives d’une avancée contrastrée », (2017) 31-3 RIDE 55, 81.
-
[73]
Voir Pierre Meyer, « La sécurité juridique et judiciaire dans l’espace OHADA », (2006) 855 Penant 151 et suiv., n° 26. Voir aussi S.C. Ekani, préc., note 72 , p. 61.
-
[74]
Boris Martor, « La ZLECAf construit le nouveau marché commun continental africain », (2019) 9 L’essentiel, droits africains des affaires 1.
-
[75]
Kouassi Kouadio, « Conflits de normes et applications du droit communautaire dans l’espace OHADA », (2011) 70 Actualités juridiques 42 ; Filiga Michel Sawadogo, « Les conflits entre normes communautaires : aspects positifs et prospectifs », [2009] OHADATA D-12-29 ; Boubacar Diarrah, « Conflits de compétences entre juridictions communautaires OHADA – UEMOA », 3 Revue de droit uniforme africain 77 ; Maïnassara Maïdagi, « La cohabitation des hautes juridictions communautaires en Afrique francophone (Cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA) de l’OHADA, Cour de justice de la CEMAC et Cour de justice de l’UEMOA) », (2009) 1 Revue congolaise de droit et des affaires 23 ; Pierre-Étienne Kenfack, « La gestion de la pluralité des systèmes juridiques par les États d’Afrique noire : les enseignements de l’expérience camerounaise », (2009) 7 Cahiers de la recherche sur les droits fondamentaux 153 ; Salvatore Mancuso, « African Law in Action », (2014) 58 J Afr L 1 ; Salvatore Mancuso, « The New African Law : Beyond the Difference between Common Law and Civil Law », (2008) 14 Annual Survey of International & Comparative Law 39 ; Jean Gatsi, « La jurisprudence, source du droit OHADA », (2012) 64-2 RIDC 477 ; Sylvie Bissaloué, « Les usages comme source de droit en Afrique subsaharienne », RLDC, 2016, n° 143 ; Étienne Le Roy, « Pourquoi, en Afrique, “le droit” refuse-t-il toujours le pluralisme que le communautarisme induit ? », Anthropologie et Sociétés, vol. 40, n° 2, 2016, p. 25-42.
-
[76]
Accord portant création de la zone de libre-échange continentale africaine, préc., note 1, art. 3 (h). Cet enchevêtrement entre l’OHADA et la ZLECAf n’est d’ailleurs nullement à redouter tant les domaines matériels de l’une et de l’autre sont différents et se complètent. Alors que la première fournit aux commerçants privés un droit substantiel des affaires, la seconde assure aux États une réglementation commune des échanges internationaux.
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[77]
Sur les origines de l’OHADA, voir Kéba Mbaye, « L’histoire et les objectifs de l’OHADA », Les Petites Affiches, n° 205, 2004, p. 4 et suiv. ; Martin Kirsch, « Historique de l’organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA) », (1998) 827 Penant 129 ; François Katendi et Jean-Baptiste Placca, Savoir accepter la pauvreté : interview de Kéba MBAYE, L’autre Afrique, 2001, [En ligne], [www.afrology.com/af/eco/pdf/kebam.pdf] (20 janvier 2023).
-
[78]
À telle enseigne que Marcel Fontaine sous l’égide de l’UNIDROIT, a cherché à concevoir un « droit des contrats inspiré de règles déjà reconnues et appréciées sur le plan international [qui soit] de nature à rassurer et à attirer les investisseurs », capable « de fournir aux pays de l’OHADA un cadre juridique commun leur permettant de participer à armes égales aux échanges dans le contexte d’une économie mondialisée ». À cet égard, les seules spécificités africaines relevées par l’éminent professeur ont été l’analphabétisme et le manque de culture juridique des opérateurs africains. Marcel Fontaine, « Note explicative à l’avant-projet d’acte uniforme OHADA sur le droit des contrats », (2008) 13–1-2 Rev dr unif 561-591, 565 et 567-568.
-
[79]
L’élaboration de ces choix pose en elle-même de graves problèmes de légitimité, passés généralement sous silence par les juristes de l’OHADA. Contra : Pierre Meyer, « L’harmonisation du droit OHADA des contrats, rapport général du Colloque de Ouagadougou – 15-17 novembre 2007 », (2008) 13–1-2 Rev dr unif 379.
-
[80]
Contra : Vicaire Bepyassi Ouafo, « Le droit issu de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires et les sociétés africaines : regard critique sur une illustration du déni de l’essence culturelle du droit », (2020) 61 C. de D. 777.
-
[81]
À ce titre, le rapport remis en octobre 2021 au président français Emmanuel Macron sur les nouvelles relations Afrique-France n’évoque à aucune reprise les enjeux, pourtant cruciaux à cet égard, que représente le droit OHADA : Achille Mbembe, Les nouvelles relations Afrique-France : relever ensemble les défis de demain, octobre 2021, [En ligne], [medias.vie-publique.fr/data_storage_s3/rapport/pdf/281834.pdf] (12 mars 2023).
-
[82]
Sur cette question essentielle, voir : Rachael Ajomboh Ntongho, « Political Economy of the Harmonisation of Business Law in Africa », (2012) 5-2 J Politics & L 58 ; S. Mancuso, préc., note 75, p. 17 ; Conseil d’État, L’influence international du droit français. Étude adoptée par l’Assemblée générale du Conseil d’État le 19 juin 2001, La Documentation française, 2001, [En ligne], [www.conseil-etat.fr/publications-colloques/etudes/influence-internationale-du-droit-francais] (12 mars 2023) ; Claude Revel, Développer une influence normative internationale stratégique pour la France, rapport remis le 28 décembre 2012 à Nicole Bricq, ministre du Commerce extérieur, 31 janvier 2013, [En ligne], [www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/information-strategique-sisse/14133.pdf] (12 mars 2023).
-
[83]
Carmen Feviliye, « Le rapport Doing Business 2012 de la Banque mondiale sur la facilité à faire des affaires dans le monde et dans l’espace OHADA (Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires) », (2012) 9 Revue congolaise de droit et des affaires 63 ; International Finance Corporation, Programme sur le climat d’investissement – OHADA (2007-2017), Évaluation de l’impact des réformes OHADA. Actes uniformes sur le droit commercial général, des sociétés, des sûretés, et de l’apurement du passif, 2018, [En ligne], [www.ifc.org/wps/wcm/connect/d6e28695-e6eb-4a8b-a5ff-08ea329ab65f/OHADA-French-11th-Dec.pdf?MOD=AJPERES] (21 janvier 2023).
-
[84]
Il est à cet égard topique que, dans le préambule du Traité OHADA, préc., note 2, les États membres s’affichent « désireux de promouvoir l’arbitrage comme instrument de règlement des différends contractuels ».
-
[85]
À la lecture du Traité OHADA, préc., note 2, art. 5-12, le Secrétariat permanent jouit de l’initiative législative, tandis que la CCJA a la possibilité d’émettre un avis et que le Conseil des ministres chargés de la justice et des finances des États membres est responsable de la délibération concernant l’adoption des actes uniformes.
-
[86]
Lire, en ce sens, Gérard Ngoumtsa Anou, « De la nécessité d’une meilleure accessibilité du droit pour garantir la sécurité juridique dans l’OHADA », Lamyline. Actualités du droit, 12 septembre 2017, [En ligne], [www.actualitesdudroit.fr/browse/afrique/ohada/8724/de-la-necessite-d-une-meilleure-accessibilite-du-droit-pour-garantir-la-securite-juridique-dans-l-ohada] (21 janvier 2023).
-
[87]
Sur ce point, nous ne pouvons que regretter le manque de transparence et de participation qui caractérise l’élaboration de la norme OHADA, en l’espèce particulière criante, au moment même où la France s’engage dans l’élaboration d’un code de droit international privé. Voir, à ce sujet, Hélène Gaudemet-Tallon, « Quelques réflexions sur le projet de Code français de droit international privé du 31 mars 2022 », (2022) 149-3 JDI 769.
-
[88]
Pour une perspective des États africains du Commonwealth sur ces questions, voir : Richard Frimpong Oppong, Legal Aspects of Economic Integration in Africa, Cambridge, Cambridge University Press, 2011 ; Richard Frimpong Oppong, Private International Law in Commonwealth Africa, Cambridge, Cambridge University Press, 2013 ; Richard Frimpong Oppong, « Private International Law in Africa : The Past, Present, and Future », (2007) 55-4 Am J Comp L 677 ; Richard Frimpong Oppong, « Observing the Legal System of the Community : The Relationship between Community and National Legal Systems under the African Economic Community Treaty », (2006) 15 Tul J Intl & Comp L 41 ; Richard Frimpong Oppong, « The African Union, the African Economic Community and Africa’s Regional Economic Communities : Untangling Complex », (2010) 18-1 Afr J Intl & Comp L 92 ; Richard Frimpong Oppong, « Globalization and Private International Law in Commonwealth Africa », (2014) 36-2 U Ark Little Rock L Rev 153 ; Jan L. Neels et Eesa A. Fredericks, « An Introduction to the African Principles of Commercial Private International Law », (2018) 29-2 Stellenbosch L Rev 347 ; Richard Frimpong Oppong, « AfCFTA and International Commercial Dispute Resolution – A Private International Law (Conflict of Laws) Perspective », 20 octobre 2021, [En ligne], [www.afronomicslaw.org/category/analysis/afcfta-and-international-commercial-dispute-resolution-private-international-law] (22 janvier 2023). Voir également J. Monsenepwo, préc., note 36, p. 344.
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[89]
Village de la justice, La communauté des métiers du droit, « La nécessité de créer une zone OHADA – ZLECAF », [En ligne], [www.village-justice.com/articles/necessite-creer-une-zone-ohada-zlecaf,33193.html] (22 janvier 2023). Cet appel, à notre connaissance, n’a reçu à ce jour aucune réponse positive.
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[90]
Barthélemy Cousin et Aude-Marie Cartron, « La fiabilisation des systèmes judiciaires nationaux : un effet secondaire méconnu de l’OHADA », OHADATA D-07-30.