Il y a un peu plus de 250 ans paraissait en Italie le traité Des délits et des peines du philosophe Cesare Beccaria. Aucun ouvrage n’a probablement contribué autant à jeter les bases de la conception moderne du droit pénal. Inspiré par les grands principes humanistes du Siècle des lumières, Beccaria insiste notamment sur l’importance d’un droit pénal cohérent qui se soucie d’imposer des peines proportionnelles à la gravité des infractions qu’il sanctionne : « si la géométrie pouvait s’adapter aux combinaisons infinies et obscures des actions humaines, il devrait y avoir une échelle correspondante de peines, descendant de la plus forte à la plus faible ». Si le tome III du Traité de droit criminel dont nous faisons ici la recension ne se réclame pas ouvertement de Beccaria, il s’inscrit néanmoins dans son sillage. Son but est précisément de fournir aux justiciables et aux praticiens du droit cette échelle des peines dont parlait le philosophe italien, ou du moins une boussole qui permet de se retrouver dans le labyrinthe complexe des principes législatifs et jurisprudentiels qui régissent le processus de détermination de la peine au Canada, le tout avec une attention spéciale accordée aux décisions des tribunaux québécois. Il en ressort un travail de pénologie exemplaire à tous égards, qui impressionne tant par son exhaustivité que par sa clarté. Avant de présenter en détail la structure du livre, nous tenons à situer ce dernier dans le projet plus large dans lequel il s’insère. Coécrit par les professeurs Hugues Parent (Université de Montréal) et Julie Desrosiers (Université Laval), cet ouvrage de doctrine consacré à la question de la peine constitue en fait le troisième tome d’un traité dont les deux premiers sont dus au seul professeur Parent. Au premier tome qui s’intéresse à l’imputabilité et aux moyens de défense et au deuxième qui porte sur la culpabilité et les éléments constitutifs des infractions s’ajoute donc le troisième tome, qui concerne la détermination de la peine, grâce à la collaboration fructueuse de la professeure Desrosiers. Précisons que l’ouvrage en est déjà à sa troisième édition et qu’il a été cité des centaines de fois par les tribunaux depuis sa première édition en 2012. De cette édition jusqu’à la plus récente parue en 2020, ce ne sont pas moins de 445 pages qui sont venues s’ajouter à l’édifice, ce qui témoigne du souci des auteurs de tenir compte de la moindre évolution du droit. Le résultat s’avère d’autant plus incontournable qu’il n’existe aujourd’hui aucun équivalent sur le marché, que ce soit du point de vue de son ampleur ou de son actualité. La table des matières (p. vii-xvi) permet au lecteur de visualiser d’emblée l’architecture de l’ouvrage qui est divisée en trois grandes parties, lesquelles se subdivisent elles-mêmes en chapitres ainsi qu’en diverses sections et sous-sections. Ces trois grandes parties, que nous examinerons consécutivement, sont les suivantes : tout d’abord, une présentation du processus de détermination de la peine considéré d’après ses fondements et ses fonctions de même que ses nombreux principes d’application ; ensuite, un survol exhaustif des catégories de peines utilisées en droit pénal canadien ; enfin, un examen attentif des fourchettes de peine appliquées en ce qui concerne les principales infractions rencontrées par le système judiciaire. Dès l’introduction, Parent et Desrosiers rappellent que la peine est « l’épilogue du processus judiciaire » (p. 6). C’est à ce moment que le droit élargit son horizon temporel pour considérer non seulement le présent de l’acte criminel, mais aussi son passé et son avenir, c’est-à-dire ses conditions d’émergence et de réapparition potentielle. Le processus de détermination de la peine cherche en …
Hugues Parent et Julie Desrosiers, Traité de droit criminel, t. III « La peine », 3e éd., Montréal, Éditions Thémis, 2020, 1 164 p., ISBN 978-2-89400-447-0.[Notice]
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Ugo Gilbert Tremblay
Université McGill