Résumés
Résumé
L’activisme de certains fonds d’investissement tels que les fonds de couverture ou fonds de placement spéculatif (plus connus sous le nom de « hedge funds ») rompt avec la philosophie et la démarche qui ont longtemps caractérisé l’activisme actionnarial traditionnel. La stratégie des hedge funds consiste à contraindre les administrateurs et les dirigeants d’entreprises à mettre en oeuvre des politiques de rentabilité à court terme en ayant recours aux instruments classiquement utilisés par les actionnaires activistes (batailles de votes, propositions actionnariales, recours judiciaires, etc.). À l’heure actuelle, le comportement des hedge funds activistes est au coeur d’intenses discussions. Beaucoup soulignent les conséquences néfastes que suscite leur action (qualifiée d’activisme « dur ») sur la pérennité des entreprises, sur leurs parties prenantes (salariés, créanciers, etc.) et sur le climat économique. Toutefois, il est exagéré d’affirmer que cet activisme n’a que des aspects négatifs. À ce titre, des spécialistes soulignent les effets disciplinaires positifs de l’activisme des hedge funds aussi bien sur le conseil d’administration que sur la haute direction. Sur le plan juridique, plusieurs solutions sont discutées (et certaines sont déjà mises en place dans certains pays) pour encadrer l’activisme des hedge funds : le renforcement du rôle du conseil d’administration par une compétence accrue de ses membres et un dialogue continu avec les autres actionnaires, d’un côté ; l’encadrement du droit de vote des actionnaires pour le faire davantage correspondre à leur intérêt économique, d’un autre côté. Au travers d’une approche comparative, descriptive et prescriptive, le présent texte contribue à l’intense débat que suscite actuellement l’activisme des hedge funds.
Abstract
The activism of hedge funds fits into a different philosophy and approach from traditional activism. Hedge fund strategy consists of compelling directors and corporate officers through activist mechanisms (proxy fights, shareholder proposals, judicial remedies…) to put in place short-term profitability policies. The behaviour of hedge fund activists is topic of intense discussion. Many people point to the harmful consequences of such actions and their long-term effects on corporations, their stakeholders and the whole economy. However, it would be an overstatement to state that activism has only negative impacts. Experts stress its positive disciplinary effects over boards of directors and senior management. Several solutions are proposed by legislation to frame hedge fund activism : first, a strengthening the board of director’s role through the increased competence of its members and an ongoing dialogue with shareholders ; and second, a framework for shareholder voting rights to better match their economic interest.
Resumen
El activismo de algunos fondos de inversiones (como por ejemplo los fondos de inversión libre) difiere de la filosofía y de los enfoques del activismo tradicional. La estrategia de dichos fondos consiste en apremiar a los administradores y gerentes de empresas para que instauren políticas de rentabilidad a corto plazo, recurriendo a instrumentos que emplean generalmente los accionarios activistas (como la lucha por delegación del voto, las propuestas de accionistas, los recursos legales, etc.) El comportamiento de los fondos de inversión libre activistas se halla en el centro de intensas discusiones. Muchas personas señalan las nefastas consecuencias a largo plazo, que suscitan sus acciones (calificadas como « activismo duro ») en las empresas, y en las partes interesadas (como los empleados, los acreedores…) y en el entorno económico. Sin embargo, se exagera al afirmar que dicho activismo posee solamente aspectos negativos, pues los especialistas han subrayado los efectos disciplinarios positivos del activismo que los fondos de inversión libre ejercen en la junta directiva y en la dirección ejecutiva. En el plano jurídico, se han propuesto diversas soluciones (y algunas ya han sido adoptadas en algunos países) con el fin de controlar el activismo de los fondos de inversión libre : por un lado, el fortalecimiento del papel de la junta directiva a través de un aumento de la competencia de sus miembros, y de un continuo diálogo con el resto de los accionistas, y por el otro, la reglamentación del derecho de voto de los accionistas, con el fin de responder a sus intereses económicos. Mediante un enfoque comparativo, descriptivo y prescriptivo, el presente artículo tiene como objetivo contribuir en el intenso debate que actualmente suscita el activismo de los fondos de inversión libre.
Corps de l’article
Jusqu’alors habituées à la présence d’actionnaires passifs[1], les grandes entreprises font face depuis quelques années à la montée de l’activisme actionnarial des hedge funds (« fonds de couverture », « fonds spéculatif », « fonds d’investissement spéculatif » ou « fonds de placement spéculatif »)[2]. Après s’être largement répandu en Amérique du Nord[3], cet activisme touche progressivement les entreprises du continent européen, comme l’illustrent les récentes interventions qui ont eu lieu dans les sociétés Nestlé et Danone[4]. Si les règles de gouvernance d’entreprise varient souvent selon les pays et sont liées aux cadres institutionnel et juridique propres à chacun[5], il n’en demeure pas moins que l’activisme des hedge funds est devenu un phénomène global[6]. De nos jours, les hedge funds sont des acteurs mondiaux du marché qui profitent pleinement de la libéralisation des flux de capitaux et de leur libre circulation, ainsi que de l’explosion de la titrisation dans des conditions de surliquidité mondiales[7], pour exercer une influence sur les plus grandes entreprises de la planète quelle que soit leur nationalité.
Actionnaires des « temps modernes », les hedge funds sont aujourd’hui des acteurs incontournables de la gouvernance d’entreprise. Malgré leur faible niveau de détention d’actions, ces actionnaires parviennent à influencer la prise de décision dans les entreprises en utilisant les mécanismes sous-tendant l’activisme actionnarial. Si les hedge funds sont au coeur de discussions, c’est parce que leurs interventions bouleversent la gestion des plus grandes entreprises de ce monde[8]. En effet, leur arrivée sonne bien souvent le glas d’une certaine liberté dans l’exercice du pouvoir des administrateurs et des dirigeants en place, ceux-ci devant alors faire face à un dilemme : se soumettre aux revendications des activistes ou céder leur place.
Pendant longtemps, le modèle traditionnel de gouvernance fondé sur la théorie de l’agence[9] a dominé la gestion des entreprises. La relation « agent-principal » repose, selon ce modèle, sur la séparation fonctionnelle entre la propriété des actionnaires (le capital qu’ils investissent) et sur la gestion qui en est faite, séparation qui conduit à la concentration exclusive du pouvoir décisionnel entre les mains des dirigeants[10]. Dans ce modèle, les actionnaires (dont le comportement est dicté par la Wall Street rule[11]) jouent alors un rôle limité[12]. Cependant, ce comportement a évolué à la suite, notamment, des retentissants scandales financiers qui ont eu lieu au début du xxie siècle. À l’image des affaires Enron ou WorldCom ou encore de la crise financière de 2007-2008, ces dérives ont mis en évidence les limites de ce modèle[13]. Ainsi, l’absence de contrôle institutionnel effectif dans le processus décisionnel a favorisé l’opportunisme des dirigeants et des actionnaires de contrôle. Contraintes de réagir, les autorités nationales (tant en Europe qu’en Amérique du Nord) et internationales ont opéré un rééquilibre des forces en présence en encourageant les actionnaires à jouer un rôle actif de contrepouvoir dans la gouvernance[14]. Ce mouvement d’autonomisation des actionnaires (shareholder empowerment) a conduit à la croissance de l’activisme actionnarial que confirment des études récentes[15]. Plusieurs auteurs mettent en lumière que, de 1980 à 2000, les investisseurs institutionnels ont commencé à utiliser leur pouvoir économique et financier pour faire entendre leur voix[16]. Aujourd’hui, « [s]hareholders are increasingly fulfilling their role as owners of the company’s shares by taking a regular interest in the company and its strategy[17] ».
L’activisme actionnarial se définit comme un mécanisme de gouvernance permettant aux actionnaires (notamment minoritaires) de s’exprimer pour défendre leurs intérêts. S’appuyant sur un large éventail d’instruments (allant des propositions actionnariales aux courses aux procurations, en passant par l’élection d’administrateurs ou l’exercice de recours judiciaires)[18], l’activisme est un outil de gouvernance incontournable au service des actionnaires. Une analyse historique de cette pratique démontre qu’à ses origines l’activisme a visé la défense d’enjeux nobles, éthiques et démocratiques, enjeux qu’il est de nos jours possible d’associer aux théories des parties prenantes et de la responsabilité sociale des entreprises (RSE)[19]. Au départ, l’activisme a été de nature « constructive » : il ne cherchait pas à placer les entreprises (et leur gouvernance) dans une logique strictement financière[20] profitant essentiellement aux actionnaires-investisseurs et mettant, au bout du compte, l’économie dans une situation délicate[21]. L’activisme a plutôt eu une vocation sociale. En effet, l’objectif poursuivi par les activistes s’identifie alors à la promotion de valeurs progressistes et à la défense de l’intérêt des parties prenantes[22]. Les frères Lewis et John Gilbert sont les pionniers de l’activisme actionnarial. En 1939, Lewis Gilbert, en conflit avec la direction de l’US Steel Corporation, s’est lancé dans des poursuites auprès de la Securities and Exchange Commission (SEC) afin de faire reconnaître ses droits d’actionnaire minoritaire. C’est à cette occasion que l’autorité boursière américaine a consacré pour la première fois le principe de la démocratie actionnariale et posé indirectement les bases de l’activisme[23]. Parmi les nombreuses causes portées par ce mouvement figurent : la protection des droits de la personne et de la protection de l’environnement ; la féminisation des postes à haute responsabilité ; la promotion de l’égalité homme-femme ; l’amélioration des conditions de travail des salariés ; l’éthique et l’intégrité des affaires[24]. Pensons, par exemple, à la RSE[25] : des études démontrent que cette problématique est défendue par l’activisme contemporain. La promotion de certaines valeurs plus « sociales », que nous venons d’énumérer, est en croissance[26]. Au Canada, les professeures Vanessa Serret et Sylvie Berthelot, se basant sur les résolutions adoptées par les actionnaires de 2000 à 2013, observent que les propositions de résolution à caractère sociétal (environnemental et social) ont augmenté et sont passées de 2 en 2000 à 19 en 2013 (tableau 1)[27]. Leur étude établit parallèlement que ce type de propositions représente 22,97 p. 100 du total des propositions de résolutions soumises aux actionnaires.
À l’instar des professeures Serret et Berthelot, Stéphane Rousseau et Benoît Dubord observent que le Canada fait une place grandissante aux questions à caractère social et environnemental (droits de la personne, diversité, changement climatique, etc.), au point que celles-ci ont supplanté en 2014 celles qui touchent la gouvernance de société[28].
Aux États-Unis, une augmentation de 7 p. 100 des propositions d’actionnaires sur la RSE a été relevée en 2013 comparativement à l’année précédente[29]. Plus récemment, Elroy Dimson, Oğuzhan Karakas˛ et Xi Li ont indiqué que, « [o]ver the last decade, the number of shareholder proposals on environmental and social issues filed with the SEC has increased[30] ». De même, une étude de Jon Weinstein, Blaine Martin et Soren Meischeid sur les propositions actionnariales adoptées pendant la période 2009-2014 démontre ceci : « investors and activists are increasingly using the proxy statement and annual meeting as platforms for environmental and social activism[31] » (tableau 2).
Cet activisme, connu aussi sous le nom d’engagement actionnarial[32], a été qualifié d’activisme « mou ». Il se distingue de l’activisme apparu plus récemment et nommé activisme « dur ».
Contrairement à l’activisme mou, l’activisme dur sert une finalité exclusivement financière. Cet activisme d’un nouveau genre porté par les hedge funds remet en cause la philosophie même du mouvement activiste. Alors que l’activisme a longtemps été présenté comme un outil ex post servant à porter des valeurs différentes et à répondre aux failles de la gouvernance (lutte contre l’opportunisme, rétablissement de l’équilibre des pouvoirs et protection de l’intérêt des parties prenantes), les hedge funds lui ont donné une autre finalité. La question centrale sur laquelle est bâtie leur stratégie ex ante parfaitement organisée[33] n’est plus « quel est le meilleur investissement ? », mais « où se trouvent les meilleures opportunités pour réaliser un profit à court terme ?[34] ».
La multiplication des interventions à succès des hedge funds impressionne en même temps qu’elle inquiète. Génies de la finance pour certains ou acteurs controversés pour d’autres, les hedge funds divisent. Beaucoup s’interrogent sur les conséquences de cette nouvelle forme d’activisme sur la performance à long terme des entreprises et de l’économie[35]. Nombre des critiques de cet activisme insistent sur le fait que les hedge funds perçoivent l’entreprise comme un moyen et non comme une fin en soi. La doctrine (notamment nord-américaine) se penche depuis quelque temps sur les questions suivantes : l’activisme actionnarial des hedge funds devrait-il être encadré ? Si oui, quelles seraient les solutions à préconiser ?
Le phénomène encore trop peu connu de l’activisme actionnarial des hedge funds requiert que les juristes considèrent l’opportunité de l’encadrer. C’est à cet enjeu que le présent article tente de répondre au travers d’une approche juridique ouverte à la comparaison des droits et à l’interdisciplinarité. Eu égard au phénomène de la mondialisation des marchés et du financement des grandes entreprises que les hedge funds illustrent[36], nous ferons appel au droit comparé et à une méthode de type fonctionnel[37]. Ainsi, nous mettrons le droit canadien en parallèle avec ses homologues étatsuniens et européens qui, tous, démontrent un intérêt croissant pour les hedge funds qui demeurent toutefois encore incompris et peu étudiés[38]. En outre, notre démarche est interdisciplinaire[39], sans prétendre cependant adhérer à toutes les disciplines auxquelles nous faisons référence[40]. Loin d’ajouter des disciplines (droit et finance) à un même objet d’analyse (l’activisme des hedge funds), notre étude entend établir des connexions entre concepts, outils d’analyse et méthodes d’interprétation. Les champs du droit et de la finance seront donc confrontés, pas uniquement pour observer leur enchevêtrement, mais pour établir une réflexivité des savoirs[41] amenant à une problématisation différente et à une découverte de nouvelles questions placées sous un angle distinct. Outre la mise en évidence des problèmes liés à l’activisme des hedge funds, notre démarche méthodologique permet de justifier et d’objectiver les critiques faites à ce dernier (pour en démontrer ses limites, ses risques et ses impacts négatifs) et de mener une réflexion nouvelle sur la position du législateur canadien. Le présent article s’articule ainsi autour de deux parties. La première, de nature plus descriptive, entend documenter le phénomène de l’activisme des hedge funds et offrir une mise en perspective des problématiques qu’il soulève. La seconde partie, de nature plus prescriptive, fait état des discussions actuelles pour encadrer efficacement les risques inhérents à l’activisme des hedge funds et présente les premières solutions mises en place à cet égard dès ces dernières années. En conclusion, notre étude met en lumière la complexité de la situation et la difficulté de penser la réponse du droit.
1 Problématique de l’activisme des hedge funds
« The wolf in shareholder’s clothing ?[42] »
Avant d’analyser l’ampleur du phénomène de l’activisme dur (1.2) et les controverses qui y sont associées (1.3), nous voulons d’abord présenter les caractéristiques fondamentales des hedge funds (1.1). L’absence de définition juridique officielle des termes hedge funds justifie l’emploi d’une approche descriptive qui se révèle nécessaire, à notre avis, pour comprendre la spécificité de ces fonds d’investissement. En effet, la problématique de l’activisme actionnarial des hedge funds n’est que le reflet du particularisme de ces acteurs financiers qui sont, depuis leur apparition, controversés.
1.1 Caractéristiques des hedge funds
Acteurs spéculatifs en quête d’une rentabilité élevée, les hedge funds sont des investisseurs institutionnels particuliers. Ce particularisme se traduit par plusieurs caractéristiques.
Une particularité des hedge funds est qu’ils ne possèdent pas de définition juridique officielle[43]. L’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV) a ainsi déclaré qu’« aucune des vingt grandes places mondiales en matière de gestion d’actifs n’a adopté de définition légale précise et formelle du terme hedge fund[44] ». Acteurs du système bancaire parallèle (shadow banking[45]) et ovnis de la finance, les hedge funds exercent des activités si complexes et si occultes qu’il est difficile de mettre la main sur une définition juridique uniforme de ces acteurs. L’absence d’une telle définition est problématique au vu de la puissance financière de cette industrie qui compte parmi ses membres plus de 10 000 hedge funds et dont la croissance annuelle est estimée à 20 p. 100 depuis les années 2000 (tableau 3)[46]. Au total, les hedge funds géreraient près de 3 000 milliards d’actifs.
En dépit de cette lacune[48], les auteurs s’entendent pour définir les hedge funds en s’appuyant sur cinq caractéristiques, révélatrices de leur spécificité[49].
Caractéristique no 1 — Les hedge funds sont des investisseurs peu réglementés. Ils appartiennent à un système bancaire parallèle qui est à peine contrôlé. Les fonds de couverture ont choisi de s’installer dans les territoires à fiscalité réduite et à réglementation souple. À titre d’exemple, Jersey, le Delaware, les Bermudes ou encore le Luxembourg constituent les principales zones de domiciliation de ces fonds. Dans ces pays, les hedge funds ont peu de contraintes. Ils échappent ainsi aux obligations de conformité, de gestion des risques et de transparence auxquelles sont soumis la majorité des investisseurs institutionnels[50]. La réglementation n’est cependant pas totalement absente. Les hedge funds y demeurent tenus dans les États où ils vont investir. Cependant, les régimes qui leur sont applicables restent dérogatoires au droit commun des fonds d’investissement plus traditionnels. À l’image de la situation au Québec, en droit des valeurs mobilières, si les hedge funds relèvent de la catégorie des fonds d’investissement, ils sont soumis à des exigences réglementaires moindres. En 2013, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont néanmoins modernisé l’encadrement des fonds spéculatifs. Plutôt que de régir directement leurs activités à risque, elles ont choisi de restreindre l’accès des investisseurs à leurs services[51].
Caractéristique no 2 — Les hedge funds utilisent massivement les produits dérivés[52] et d’autres techniques d’investissement spéculatives comme la vente à découvert ou encore l’acquisition par emprunt ou effet de levier (leveraged buyout ou LBO)[53]. Recherchant une maximisation de la rentabilité de leur investissement à chacune de leurs opérations, ils mettent en place des stratégies complexes permettant de dégager un maximum de gains dans un laps de temps très court. Le risque élevé étant la contrepartie de leurs opérations, les hedge funds utilisent les produits dérivés pour se couvrir.
Caractéristique no 3 — Les hedge funds n’ont pas de domaine d’investissement privilégié. Ils placent des capitaux dans tous les domaines et les secteurs qui présentent des occasions de croissance[54]. Ils sont donc à l’affût de toutes les opportunités d’investissement, qu’il s’agisse du marché traditionnel des obligations, du marché des matières premières ou de domaines plus originaux comme le marché de l’art[55]. Le principal critère d’investissement des hedge funds est la rentabilité du placement[56].
Caractéristique no 4 — Une des caractéristiques essentielles des hedge funds est relative au niveau de compétence des équipes qui les composent. Malgré l’effectif réduit de leur personnel, les employés qui y travaillent représentent généralement l’élite professionnelle de la finance. Les hedge funds sont gérés et dirigés par d’anciens négociateurs ou opérateurs de marché (traders), analystes financiers ou responsables, ayant travaillé pour les plus grandes banques mondiales, et comptent dans leur équipe les meilleurs négociateurs du secteur ainsi que les diplômés des plus grandes écoles[57]. Cela explique l’existence de politiques de rémunération concurrentes entre les gérants de hedge funds. Les sommes perçues en vertu de leurs politiques sont largement supérieures aux politiques de rémunération des fonds d’investissement traditionnels. En moyenne, les frais de gestion retenus pour les services offerts sont de 2 p. 100 des actifs sous gestion. En plus, des honoraires de 20 p. 100 s’appliquent sur le montant du bénéfice réalisé[58].
Caractéristique no 5 — Les services des hedge funds sont réservés aux investisseurs très fortunés. Ce sont des investisseurs « avertis » et « qualifiés », professionnels ou particuliers dont le patrimoine est susceptible de supporter les pertes élevées pouvant résulter des activités à risque des hedge funds. Bien qu’elle soit très ciblée, la clientèle des hedge funds est étonnamment diversifiée. Historiquement, elle se composait d’investisseurs individuels (particuliers) fortunés. Elle s’est élargie à compter des années 2000 avec l’essor de l’investissement de fonds, d’institutions financières et d’autres investisseurs institutionnels dans les hedge funds. Leur clientèle comprend aussi des associations privées et des fondations universitaires. À titre d’illustration, aux États-Unis, l’Université de Yale à New York a investi en 2006 plus de 25 p. 100 de ses revenus dans les hedge funds ; l’Université de Cleveland et l’Université de la Caroline du Nord ont également investi respectivement 500 millions et 400 millions de dollars américains[59].
L’énumération de ces cinq caractéristiques permet de mieux saisir le particularisme des hedge funds. Accusés d’être responsables de bien des maux (abus de marché, crise des prêts à haut risque (subprimes), crise financière de 2007-2008, crise économique des États de l’Union européenne ou de l’Argentine, etc.), les hedge funds donnent l’impression d’une forte implication qui n’a pourtant jamais pu être clairement démontrée. Ces acteurs habitués aux controverses sont de nouveau associés à une problématique émergente : l’essor d’un activisme actionnarial dur.
1.2 Ampleur de l’activisme dur des hedge funds
L’activisme dur des hedge funds connaît une croissance sans précédent depuis 2010 (1.2.1). Il poursuit un objectif aisément reconnaissable qui le distingue de l’activisme traditionnel (1.2.2). Par ailleurs, l’élaboration de stratégies contemporaines connexes, comme l’attaque en meute (wolf pack), démontre que l’activisme des hedge funds continue son évolution (1.2.3).
1.2.1 Données empiriques
Si l’activisme actionnarial dans son ensemble a connu un essor au cours des dernières années, l’activisme dur des hedge funds explique une part de cet accroissement[60]. D’après l’étude intitulée WSF-FactSet Activism Scorecard, réalisée en 2014 par le Wall Street Journal, 349 interventions activistes ont été recensées cette année-là aux États-Unis contre seulement 27 en 2000[61]. Un récent travail réalisé sur les sociétés européennes confirme cette tendance. Le nombre de sociétés ciblées en Europe est cependant moins important. Pour autant, le phénomène connaît une hausse progressive. Il est passé de 91 interventions activistes en 2013 à 137 en 2016[62].
L’activisme dur est un phénomène de grande ampleur. Pourtant, les activistes ne représentent qu’une infime partie de l’industrie des hedge funds. Sur un total de 10 000 hedge funds, 600 (soit 6 p. 100) ont choisi de concentrer leur activité sur l’activisme actionnarial[63]. Le montant d’actifs qui y est consacré est estimé à environ 80 milliards de dollars américains[64] sur un total de 3 000 milliards. Malgré les faibles niveaux de détention d’actions (en comparaison de ce que détiennent en moyenne les investisseurs institutionnels traditionnels et autres actionnaires)[65] et de sommes investies, l’activisme des hedge funds se révèle extrêmement rentable. Les activistes sont ainsi en mesure de décupler leur faible mise de départ, en la doublant, en la triplant, voire en la quadruplant lorsqu’ils réussissent à mettre en oeuvre leurs stratégies. Sans transformer en profondeur le visage actionnarial des entreprises, les hedge funds imposent donc un nouveau paradigme de gouvernance. Ainsi, l’ampleur de l’activisme des hedge funds se mesure au regard de la portée et du succès de leurs multiples interventions.
Comme le démontrent les interventions survenues dans les entreprises internationales d’envergure (Tim Hortons, Canadian Pacific, Telus, Danone, Ubisoft, Nestlé, Disney, Amazon, Dell, Apple, Yahoo, Pepsi, Facebook, Google, Amex, Microsoft, Vivendi, Club Med, Les Pages Jaunes[66]), « [n]o firm is […] “too big to target”[67] ». Qu’importe sa taille, son pays d’immatriculation, sa structure de capital, toute entreprise cotée est susceptible de faire l’objet d’une intervention activiste[68]. Cela ne signifie pas que les entreprises sont choisies au hasard. Le critère central utilisé par les hedge funds pour cibler une entreprise est celui de la sous-performance : les hedge funds activistes ne visent que les entreprises pour lesquelles ils entrevoient un potentiel de croissance à court terme[69].
1.2.2 Stratégie de maximisation à court-terme
Les hedge funds ont décelé dans l’activisme actionnarial une possibilité de mettre en oeuvre leur stratégie répondant à leurs critères traditionnels d’investissement. D’une part, l’activisme actionnarial s’avère rentable : il offre un niveau de rendement élevé et à court terme. D’autre part, il est propice à l’usage d’instruments spéculatifs.
L’horizon d’investissement des hedge funds est en moyenne plus réduit (9 mois) que celui des autres investisseurs institutionnels dont la détention moyenne est estimée à 20 mois[70]. En dépit de cette courte période de détention, l’activisme dur des hedge funds leur permet d’imposer des politiques de réduction de coûts et d’augmentation de dividendes, ce qui favorise finalement un retour sur investissement à court terme[71]. Pour atteindre cet objectif de maximisation rapide de la valeur actionnariale, les hedge funds contraignent le conseil d’administration et la haute direction à des changements importants dans l’orientation stratégique de l’entreprise ciblée. D’après une étude réalisée par l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP), les moyens privilégiés par les activistes pour atteindre leur objectif sont les suivants[72] :
-
la vente des actifs de l’entreprise ou de l’entreprise elle-même (31,3 p. 100 des cas) ;
-
la mise en oeuvre de changements importants dans la gouvernance d’entreprise (25,2 p. 100) ;
-
la modification de la structure du capital, c’est-à-dire la révision à la hausse des politiques d’affectation du flux de trésorerie, de rachats d’actions ou de versement des dividendes (16,5 p. 100) ;
-
le changement de la stratégie commerciale de l’entreprise (7,8 p. 100).
L’activisme est une stratégie de choix pour les hedge funds, car il se révèle aussi propice à l’usage d’instruments spéculatifs. Comme l’illustrent la pratique du « vote vide » (selon laquelle des investisseurs peuvent se servir de dérivés ou emprunter des titres pour acquérir des droits de vote sans avoir d’intérêt financier dans l’émetteur, voire en ayant un intérêt financier contraire à celui-ci, pour tenter d’influer sur le vote des actionnaires) ou la pratique de la propriété occulte (pratiques dites de « découplage »), les hedge funds activistes peuvent souscrire à des produits dérivés pour couvrir les risques inhérents à leur statut d’actionnaire et multiplier les chances de succès de leur stratégie de retour sur investissement rapide[73]. Les hedge funds utilisent également des effets de levier comme le LBO, dans le contexte notamment d’une offre publique d’achat (OPA). La technique du LBO permet aux hedge funds activistes de financer l’acquisition de leurs titres par une dette qui, par la suite, sera remboursée par l’entreprise elle-même[74]. Ces instruments spéculatifs favorisent la rentabilité de l’activisme actionnarial des hedge funds.
1.2.3 Expansion du phénomène : exemple des wolf packs
Le succès de l’activisme actionnarial des hedge funds a conduit à l’apparition de stratégies connexes renforçant ce mouvement. Les techniques du wolf pack ou du découplage constituent deux stratégies donnant à l’activisme dur une portée plus grande. Les wolf pack[75] renvoient aux ententes tacites conclues entre les hedge funds et d’autres investisseurs désirant intervenir dans une entreprise de manière coordonnée afin d’en prendre le contrôle ensemble[76]. Les wolf pack peuvent aussi résulter d’une situation opportuniste et spontanée, étrangère à une quelconque entente. Par exemple, un hedge fund peut décider d’attaquer une entreprise ciblée après avoir constaté qu’elle subissait déjà une attaque activiste. Le hedge fund va se joindre à la première intervention dans le but de profiter de la situation. Cette stratégie implique alors que les investisseurs partagent une même logique court-termiste. L’intervention de la société canadienne Valeant (réputée être une serial acquéreuse dans le domaine des fusions-acquisitions) avec l’aide du hedge fund Pershing Square dans l’entreprise américaine Allergan est une illustration éloquente de wolf pack[77].
Des études récentes confirment que les investisseurs institutionnels ont joué un rôle important dans la montée en puissance de l’activisme actionnarial des hedge funds. Leur soutien se justifie notamment par le fait qu’un bon nombre d’entre eux investissent dans les hedge funds. Ainsi, dans une étude réalisée en 2015, 76 p. 100 des investisseurs institutionnels affirment avoir une vision favorable de l’activisme actionnarial, notamment celui que pratiquent les hedge funds. En outre, 84 p. 100 d’entre eux considèrent que l’activisme des hedge funds crée une plus-value pour les entreprises ciblées[78].
1.3 Controverses entourant l’activisme dur des hedge funds
L’activisme des hedge funds est controversé en raison de l’usage particulier qui en est fait eu égard à l’esprit initial de cette pratique. L’hostilité de l’intervention des hedge funds (1.3.1) ainsi que les conséquences en découlant pour les entreprises, pour les parties prenantes et pour l’économie (1.3.2) sont discutées ci-dessous.
1.3.1 Hostilité des méthodes d’intervention sous-tendant l’activisme dur
Les interventions hostiles des hedge funds leur ont valu de voir leur nom associé dans la littérature à celui d’animaux prédateurs comme le vautour, le loup ou le requin[79]. Contrairement à l’activisme traditionnel, celui des hedge funds est le résultat d’une stratégie d’investissement élaborée, s’exécutant selon un plan méthodique prédéfini (en cinq étapes) et répété à chaque intervention[80]. Dès leur arrivée dans l’entreprise ciblée, les hedge funds font pression sur les administrateurs et les hauts dirigeants pour imposer un objectif de rentabilité à court terme.
La première étape d’un plan d’intervention de hedge funds consiste à cibler sur les marchés les entreprises qu’ils estiment être en sous-performance au regard de leur potentiel.
À la deuxième étape du plan d’intervention, les hedge funds prennent les mesures nécessaires pour intégrer le capital-actions des entreprises ciblées afin d’en devenir actionnaires. Ce statut (et le droit de vote qui l’accompagne) est un outil essentiel à l’exercice de l’activisme dur. En pratique, les hedge funds recourent à deux méthodes pour acquérir les titres d’une entreprise. La première consiste à acheter des titres sur les marchés par la voie traditionnelle en respectant les obligations de déclaration et d’inscription[81]. La seconde est de conclure des contrats financiers (tels que le prêt de titre) ou de souscrire à des instruments dérivés auxquels sont adossées les actions d’une entreprise ciblée[82]. L’avantage de cette seconde méthode est qu’elle permet aux hedge funds d’obtenir ces titres sur le marché de gré à gré[83], à moindre coût et en toute opacité[84]. En effet, les titres détenus peuvent, selon les modalités du contrat, conduire à un transfert de propriété du titre temporaire (donnant lieu à restitution) ou définitif. Cette méthode s’avère utile pour les activistes désireux de renforcer leur position et d’accroître leur influence en amont d’une assemblée et à l’insu des autres actionnaires et de la société[85].
La troisième étape du plan d’intervention des hedge funds est la prise de contact avec les membres de la haute direction. Dès l’annonce de leur entrée au capital-actions d’une entreprise ciblée, les hedge funds font parvenir aux administrateurs et aux hauts dirigeants un écrit appelé « document de présentation » (white paper). Ce dernier est en fait une lettre détaillée qui expose les limites de la gestion actuelle ainsi que les objectifs à atteindre et les changements qu’ils entendent accomplir dans l’entreprise. La plupart du temps, les hedge funds exigent aussi d’office l’attribution de sièges au conseil d’administration pour faciliter la mise en oeuvre de leur stratégie. En réaction, les dirigeants peuvent décider de se soumettre aux revendications des activistes ou de s’y opposer. D’après une étude réalisée par l’IGOPP en 2010 dans un échantillon comprenant 98 sociétés ciblées par des activistes[86], 19,1 p. 100 ont immédiatement cédé aux demandes des hedge funds, c’est-à-dire juste après leur prise de contact avec la direction ou bien à l’issue des négociations. En cas de refus, les hedge funds entrent alors dans une phase plus hostile.
À la quatrième étape du plan d’intervention, les hedge funds menacent la direction de médiatiser le conflit en rendant publique la lettre. La publicité du conflit présente le risque d’envoyer un signal négatif au marché dont les effets peuvent se répercuter sur le cours de l’action de l’entreprise.
À la cinquième et dernière étape du plan d’intervention des hedge funds, ceux-ci vont maintenir la pression sur les dirigeants. D’après les chiffres de l’IGOPP, dans 27,8 p. 100 des cas, les hedge funds lancent une campagne de décrédibilisation contre la direction pour rallier les autres actionnaires à leur cause au moyen d’une course aux procurations. L’objectif est de critiquer la gestion de la direction pour recueillir les votes des autres actionnaires dans le but de faire adopter ou rejeter une mesure ou encore de faire élire un de leurs représentants au conseil d’administration. Les hedge funds peuvent également préparer des propositions d’actionnaires. Enfin, les actionnaires activistes peuvent aussi intenter des recours judiciaires contre la direction, en leur nom ou pour le compte de la société[87]. À noter que parfois la simple menace d’une course aux procurations ou de poursuites judiciaires suffit à faire céder la direction (dans 11,3 p. 100 des cas, comme le révèle l’IGOPP).
1.3.2 Incertitude sur les effets de l’activisme dur
À l’inverse de l’activisme « constructif », qui se veut plus amical dans sa mise en oeuvre et dont les objectifs se rattachent à des problématiques sociales, l’activisme dur des hedge funds est hostile et poursuit des objectifs principalement financiers[88]. Les discussions opposant la doctrine favorable à l’activisme des hedge funds et celle qui le dénonce ont fait rejaillir un débat de fond ancien : celui du court-termisme.
La doctrine favorable à l’activisme des hedge funds, incarnée par le professeur Lucian Bebchuk, de l’école de Harvard, et par les chercheurs Alon Brav, de l’Université de Duke, et Wei Jiang, de l’Université de Columbia, rejette de front le myopic activism (discours tenu par la doctrine qui critique l’action des hedge funds). Dans un travail de recherche publié en 2015, Lucian Bebchuk a étudié environ 2 000 interventions activistes qui ont eu lieu pendant la période 1994-2007[89]. Il a également examiné les évolutions de la performance et du rendement opérationnel des entreprises en question sur une période de cinq ans après le départ des hedge funds. Les résultats de la recherche ont mené à une double conclusion. D’une part, les interventions des hedge funds sont légitimes. En effet, leur critère d’intervention étant la sous-performance financière de l’entreprise, celui-ci serait objectif et justifierait une telle intervention. D’autre part, l’intervention des hedge funds contribue à la performance d’une entreprise puisque, à l’issue des cinq années suivant le départ des activistes, le maintien d’un niveau positif de performance financière pour l’entreprise est constaté[90]. Au-delà de l’aspect financier, l’activisme dur a un effet disciplinaire sur les administrateurs et les hauts dirigeants. La crainte d’une intervention activiste ou d’un conflit avec les hedge funds les incite à être proactifs et à assurer une meilleure gestion grâce, notamment, à l’instauration de stratégies efficaces et performantes, à une meilleure synergie et à l’utilisation efficiente des ressources et du capital[91]. Des études récentes mettent en lumière les conséquences positives de l’activisme dur des hedge funds[92] : accroissement des bénéfices, existence d’un retour sur la valeur pour les parties prenantes, détention des titres plus longue qu’initialement prévue[93], apport d’une meilleure compréhension des facteurs qui influent sur le cours des actions et d’un regard stratégique extérieur, incitation à adopter des règles exemplaires de gouvernance, lutte contre la « pensée en troupeau », ou encore effet d’entraînement à l’égard des actionnaires brisant l’image d’un actionnariat apathique[94]. Pour certains, l’activisme des hedge funds pourrait même devenir plus positif. Un récent cas d’activisme a suscité l’attention, tant il constitue un changement de cap. Devenu actionnaire de la société américaine Procter & Gamble, le hedge fund Trian, qui entendait obtenir une place au conseil d’administration à l’occasion de l’assemblée générale annuelle à venir, a opté pour une stratégie différente de celles qu’il avait employées jusqu’alors. Plutôt que de pratiquer un activisme dur, ce hedge fund a choisi de convaincre les actionnaires de la société de soutenir sa campagne en publiant sur son site Web sa politique d’investissement au regard des critères sur le plan de l’environnement, de la société et de la gouvernance (ESG)[95].
Aux États-Unis et au Canada, la critique de l’activisme dur est incarnée par les auteurs Martin Lipton, John Coffee et Yvan Allaire[96]. Ces experts critiquent la politique d’investissement des hedge funds qui ne s’inscrirait ni dans une logique partenariale ni dans une démarche de progrès à long terme pour les entreprises. Leurs études établissent une corrélation entre l’activisme dur, le court-termisme et la baisse des dépenses en matière de recherche et de développement d’une entreprise, à l’image de l’affaire Valeant. Dans cette dernière, l’entreprise Valeant, appuyée par un hedge fund, a annoncé la réduction de ses dépenses en fait de recherche et de développement ainsi que la suppression de milliers d’emplois immédiatement après avoir lancé une OPA à l’égard de la société Allergan. Au-delà des conséquences d’ordre microéconomique, les effets négatifs de l’activisme dur ont une dimension économique et sociale, car les hedge funds prônent des stratégies à horizon court dont les parties prenantes sont les premières victimes[97]. À titre d’exemple, il est possible de citer le cas du géant Yahoo. Les interventions respectives des hedge funds Third Point et Starboard en 2011 et en 2016 dans l’entreprise Yahoo ont conduit à de profondes restructurations dont les conséquences ont été supportées in fine par les salariés. Dans chacun des cas, l’annonce d’une cession importante d’actifs de l’entreprise ainsi que la suppression de milliers d’emploi ont suivi l’arrivée des hedge funds.
Les répercussions d’ordre macroéconomique sont les suivantes[98] :
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la dégradation des conditions de travail des salariés (stress, dépression, épuisement professionnel) ;
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la délocalisation des entreprises (licenciement de masse, précarité des salariés et perte de revenus pour l’État) ;
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la dégradation du crédit des entreprises (haut niveau d’endettement et baisse de la marge de crédit et du niveau d’investissement des entreprises) ;
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la baisse des dépenses dans la recherche et le développement (diminution de l’innovation et du progrès scientifique accessible au public au profit de l’innovation privée (ex. : brevet)).
Pour ces raisons, les opposants aux hedge funds soulignent que l’activisme dur présente peu d’avantages, voire aucun pour les parties prenantes. Il ne créerait pas de la valeur, mais opérerait un transfert de richesse de l’entreprise vers les actionnaires[99].
S’appuyant sur des critères d’analyse distincts, à savoir la croissance de la valeur actionnariale, d’un côté, et la croissance durable pour l’ensemble des parties prenantes, de l’ autre, le débat sur les effets de l’activisme peine à être tranché. Néanmoins, pour que les entreprises puissent se prémunir de manière appropriée contre les risques de l’activisme dur, des propositions juridiques ont été faites.
2 Encadrement de l’activisme dur des hedge funds : solutions juridiques ?
L’activisme dur des hedge funds est devenu problématique au fil du temps. Une des questions soumises aux juristes porte sur la façon d’envisager des solutions susceptibles de baliser cet activisme, notamment lorsqu’il produit des conséquences négatives. Certains considèrent que le renforcement du rôle et de la qualité des membres du conseil d’administration serait une solution pertinente (2.1). D’aucuns estiment qu’un interventionnisme plus marqué sur le droit de vote des actionnaires serait nécessaire (2.2). Si certaines propositions ont été concrétisées dans le droit, d’autres en sont encore au stade de la discussion.
2.1 Repenser la composition et le rôle du conseil d’administration
Dans la théorie économique de l’agence[100], le conseil d’administration est un mécanisme qui assure le contrôle de l’équipe dirigeante (qualifiée d’« agent ») pour le compte des actionnaires (qualifiés de « principal »). Le conseil d’administration peut, par exemple, vérifier la mise en oeuvre de la stratégie de l’entreprise ou encore nommer ou révoquer les membres de la direction[101]. Au regard de ses larges pouvoirs, le conseil d’administration occupe une place à part dans le contexte d’une attaque activiste. Toutefois, l’effectivité de son intervention dépend de la réunion de plusieurs qualités tenant à ses membres. La présence d’administrateurs compétents (2.1.1), activistes (2.1.2) et dialoguant avec les actionnaires (2.1.3) est nécessaire[102].
2.1.1 Être compétent
La compétence d’un administrateur n’est pas prescrite par la loi[103], sauf pour les États qui ont rendu obligatoire le comité d’audit[104]. Néanmoins, la compétence se révèle une caractéristique conditionnant l’efficacité d’un conseil d’administration[105]. Plusieurs spécialistes de gouvernance d’entreprise défendent ainsi une exigence plus poussée quant à la compétence des administrateurs[106]. En l’absence de compétence, la surveillance de l’action des dirigeants se trouve fortement compromise. Par ailleurs, la prise en considération de la compétence des administrateurs s’avère également susceptible d’être source de création de valeurs[107]. Dans les entreprises où l’innovation joue un rôle crucial ou dans les jeunes entreprises, une asymétrie de connaissances peut se produire[108]. Celle-ci donne lieu à un « conflit cognitif » qui va engendrer des coûts influant sur les opportunités à saisir et la façon de les exploiter, le prix des actions et la valeur de l’entreprise[109]. Complémentairement par rapport à l’analyse économico-financière traditionnelle, l’exigence de compétence agit sur la structuration même des choix et des décisions de façon à limiter les erreurs de jugement[110].
Si une lecture comparative des codes de gouvernance[111] et des positions des organismes professionnels nord-américains et européens de gouvernance démontre que la compétence des administrateurs se trouve au centre des réflexions[112], le Canada est moins disert sur ce sujet. Bien que le droit québécois des sociétés par actions ne fasse pas référence à la compétence des administrateurs (ce qu’il a fait jusqu’en 1994, année de la réforme du Code civil du Bas Canada)[113], il n’en va pas de même du droit fédéral qui exige toujours que l’administrateur soit au moins aussi compétent qu’une « personne raisonnable[114] ». De plus, la jurisprudence canadienne et la jurisprudence québécoise fixent encore à l’heure actuelle des standards très bas en matière de compétence des administrateurs. Rien n’oblige un administrateur à détenir une quelconque compétence[115], malgré les préconisations contraires des auteurs du rapport Dickerson[116]. Dans un rapport de 2003, le Sénat canadien a pourtant énoncé que les chances de réussite des sociétés sont plus élevées lorsque les conseils d’administration sont composés de personnes ayant des antécédents variés[117]. En droite ligne, une des recommandations du rapport du groupe de travail présidé par Guylaine Saucier a insisté en 2001 sur le caractère fondamental du choix des « bons » administrateurs[118]. De plus, la Canadian Coalition for Good Gouvernance (CCGG) (ou Coalition canadienne pour une bonne gouvernance) a affirmé, dans ses lignes directrices publiées en 2010, qu’il fallait veiller à ce que les administrateurs soient compétents et bien informés, l’administrateur compétent devant être un administrateur de qualité, c’est-à-dire un administrateur intègre, ayant des connaissances, une expérience des affaires et de la motivation[119]. Enfin, le Règlement 58-201 sur l’information concernant les pratiques en matière de gouvernance[120] recommande aux sociétés cotées la création de différents comités, dont le comité de candidature (ou de nomination)[121]. Dans l’article 3.14 de l’Instruction générale 58-201, le comité des candidatures doit considérer « a) les compétences et les aptitudes que le conseil juge nécessaire de posséder dans son ensemble ; b) les compétences et les aptitudes que le conseil juge que chaque administrateur actuel possède ; c) les compétences et les aptitudes que chaque nouveau candidat apportera au conseil[122] ».
La compétence des membres du conseil d’administration ne doit donc pas être négligée dans la question de l’encadrement de l’activisme dur des hedge funds. La multiplication des lignes directrices définissant les règles de conduite des administrateurs, l’implantation de formations au profit des futurs membres de conseils d’administration proposées dans le contexte d’organismes parapublics ou privés et le développement des pratiques d’évaluation des conseils démontrent que la compétence devient de facto une qualité de plus en plus incontournable de tout administrateur[123]. Si toutes les interrogations ne sont pas pour autant levées[124], ce mouvement est à saluer. D’une part, les études menées sur l’activisme des hedge funds aboutissent à la conclusion que ces derniers ciblent des entreprises sous-évaluées et sous-exploitées. L’incompétence des administrateurs est d’ailleurs l’argument le plus utilisé par les hedge funds pour convaincre les autres actionnaires de remplacer les membres du conseil d’administration. D’autre part, l’incompréhension des enjeux et la passivité des administrateurs ont été désignées comme l’une des causes des crises survenues depuis 2001[125]. Les rapports publiés à la suite des scandales de la Royal Bank of Scotland et de Northern Rock mettent en lumière la mauvaise gestion du risque, la pertinence critiquable de certaines décisions et, surtout, la compétence discutable des administrateurs[126].
2.1.2 Se montrer activiste
« [I]n the last decade, and especially in the past five years, boards of directors of large publicly traded corporations have begun to shed their passivity and dependence[127] » : eu égard à l’abandon progressif de la passivité du conseil d’administration, certains spécialistes recommandent à ses membres d’anticiper l’arrivée des hedge funds en prenant des mesures susceptibles d’éliminer certains dysfonctionnements[128]. Ira Millstein, spécialiste reconnu, a consacré récemment un ouvrage à la thématique des administrateurs activistes qu’il conclut de la sorte :
The solution I propose is more difficult. It is to create a new breed of activist director, one who is conscious of the effects of decision-making, who will drill deeply into a corporation’s financials and culture […], who will ask tough questions of the CEO when he or she veers off course or when the numbers include unexpected special write-downs[129].
Cet auteur ajoute ceci : « Most important, we need directors who reject the “nose in, fingers out” (NIFO) attitude that prevails in too many boards — the idea that it is only the CEO who is in charge of the corporation’s future[130]. »
Pour devenir plus activiste, tout conseil d’administration devrait :
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se séparer des mauvais administrateurs ;
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mettre en évidence les lacunes stratégiques de son entreprise en comparant ses résultats avec ceux des sociétés concurrentes ayant déjà subi une intervention activiste et rectifier les orientations stratégiques ;
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instaurer des régimes de droits ne portant pas atteinte aux droits des actionnaires en place ;
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solliciter un comité spécial d’auditeurs et d’administrateurs indépendants pour évaluer la pertinence d’une stratégie ;
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s’entourer de conseillers financiers et juridiques compétents[131].
En s’assurant d’une gestion opérationnelle efficace, le conseil d’administration serait finalement en mesure de répondre aux accusations des hedge funds faites à l’occasion de leurs campagnes activistes.
2.1.3 Établir un dialogue avec les actionnaires
Pour les spécialistes, l’absence de dialogue entre les actionnaires et les administrateurs aurait une incidence directe sur la montée en puissance de l’activisme dur des hedge funds[132] : « Companies today must be better prepared. Firms should evaluate potential activist attack themes before an activist emerges. It is more productive to engage activists and have a constructive dialogue than to attempt to evade them entirely[133]. »
Le dialogue entre les actionnaires et les administrateurs (dénommé aussi « engagement ») est une norme en expansion aux États-Unis[134], dans certains États européens (dont le Royaume-Uni[135]), en Afrique du Sud[136] et en Australie[137]. Cette norme s’impose au travers de pratiques de gouvernance[138], d’une logique de gérance (stewardship)[139] ou du droit « traditionnel[140] » : « Board-shareholder engagement, once seen as a European phenomenon (or more accurately a UK one) has now become mainstream in many markets[141]. » Au Canada, le cabinet Davies a pu noter que le dialogue entre administrateurs et actionnaires continue de prendre de l’ampleur[142]. Le ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique a, dans le droit fil, déposé le projet de loi no C-25 en vue de réformer la Loi canadienne sur les sociétés par actions[143], et ce, avec l’objectif affiché de moderniser les communications entre les sociétés et leurs actionnaires[144]. Les organismes canadiens chargés de promouvoir les pratiques exemplaires de gouvernance, tels que la CCGG[145] ou l’Institut des administrateurs de sociétés (IAS), incitent les conseils d’administration à mettre en place des mécanismes d’interaction avec les actionnaires. L’IAS a d’ailleurs publié un guide dans le but d’aider les conseils d’administration à élaborer une approche intégrant des éléments d’interaction entre les administrateurs et les actionnaires importants[146]. L’IAS recommande notamment de s’inspirer du guide américain, publié en 2014, encadrant l’interaction entre les conseils d’administration et les actionnaires de sociétés : le Shareholder Director Exchange Protocol. Ce dernier établit une liste d’étapes à suivre pour rendre le dialogue efficace[147]. L’IAS encourage, dans ce contexte, les sociétés à adopter une approche stratégique en définissant au préalable les conditions d’une interaction directe entre administrateurs et actionnaires[148]. À ce titre, le conseil d’administration devrait déterminer les hypothèses factuelles nécessitant une interaction directe et établir le processus duquel découlera le dialogue. Ces interactions avec les actionnaires devraient s’effectuer dans le respect d’une procédure rigoureuse pour éviter la divulgation de toute information confidentielle. En parallèle, l’IAS incite les administrateurs à établir une liste des actionnaires influents et à déterminer les sujets à discuter avec eux[149].
Dans une logique activiste, les administrateurs devraient se rendre accessibles afin de permettre aux actionnaires de leur poser facilement des questions, par exemple sur les politiques de l’entreprise, sur l’action du conseil d’administration en matière de surveillance, sur la composition de l’équipe dirigeante ou sur les stratégies adoptées. Toujours en étroite collaboration avec l’équipe dirigeante, le conseil d’administration devrait maintenir un dialogue permanent et constructif avec les actionnaires en vue de justifier les politiques et les actions mises en oeuvre[150]. Il devrait aussi approuver la politique de communication et de divulgation de la société et confier sa mise en oeuvre à l’équipe de direction. De plus, il devrait examiner la place que la direction accorde aux communications avec les actionnaires. Enfin, le conseil d’administration devrait s’assurer que la direction donne aux communications la place souhaitée et que les principaux actionnaires de la société la jugent appropriée[151]. Pour renforcer l’engagement, une meilleure identification des actionnaires est parallèlement nécessaire[152]. Sur ce plan, l’adoption en Europe de la réforme de la directive sur les droits des actionnaires[153] constitue une avancée dans la bonne direction[154]. Celle-ci garantit désormais aux entreprises la possibilité d’identifier leurs actionnaires et d’obtenir des renseignements à leur sujet auprès de l’intermédiaire de la chaîne détenant les informations, qui qu’il soit.
« [T]he board of directors is — or ought to be — a central player in shareholder engagement[155] » : le dialogue est encore plus capital dans le contexte de la recrudescence des attaques des hedge funds. En effet, une des causes du succès de leur activisme résulte du soutien des autres actionnaires. Or, établir une proximité avec les actionnaires permet aux administrateurs de réduire l’asymétrie d’information dont profitent les hedge funds[156]. « Shareholder engagement aims to promote long-term success of companies[157] », et ce, outre qu’ils donnent aux membres du conseil d’administration une rétroaction sur les priorités et les préoccupations des actionnaires, qu’ils leur fournissent des signaux d’alerte et qu’ils accroissent leur confiance dans l’entreprise et sa direction[158]. Les échanges entre le conseil d’administration et les actionnaires donnent la possibilité de résoudre un problème avant qu’il ne se transforme en conflit et qu’il ne soit reproché au conseil au moment d’une campagne activiste[159] : « constructive shareholder activism simply represents the next stage of the shareholder evolution[160] ». Le renforcement des échanges doit donc être une priorité et doit être bien construit. Tout d’abord, la construction commence et le chantier est loin d’être achevé, comme en témoigne une des justifications de la proposition de révision de la directive européenne sur les droits des actionnaires : l’engagement insuffisant des actionnaires[161]. Ensuite, la réglementation contemporaine du droit des valeurs mobilières s’appuie sur un modèle de transparence où le droit fait en sorte que tous les investisseurs aient accès sur un pied d’égalité à de l’information complète, véridique et à jour[162]. Le fonctionnement efficace et intègre des marchés requiert que la transparence des opérations et la diffusion des informations soient assurées auprès de l’ensemble des investisseurs sans distinction[163]. Or, le dialogue (et la circulation des informations qu’il induit) ne doit pas conduire à favoriser la commission de comportements illégaux (abus de marché[164] ou délits d’initiés[165]) dont les hedge funds bénéficieraient : l’efficience des marchés est à ce prix et la vigilance se révèle de mise.
2.2 Renforcer l’encadrement réglementaire en matière de droit de vote
En tant que créanciers résiduels, les actionnaires supportent le risque entrepreneurial[166]. Un pouvoir important doit donc leur être donné pour des raisons d’efficacité économique. Dans cette logique, le droit de vote des actionnaires et la notion de démocratie actionnariale prennent une importance considérable. Devant l’activisme dur des hedge funds, certains spécialistes recommandent de traiter les actionnaires de manière différente et proposent de limiter le droit de vote des actionnaires court-termistes, tout en favorisant l’influence des actionnaires historiques et en défendant une vision à long terme (2.2.1). En parallèle, une réflexion est en cours sur un accroissement de la transparence entourant la participation financière des actionnaires au capital des entreprises, associé à un contrôle plus grand de l’attribution et de l’exercice du vote de ces derniers. Cette réflexion appréhende le droit des sociétés par actions conjointement avec le droit des valeurs mobilières (2.2.2).
2.2.1 Débattre sérieusement du principe « une action — une voix »
Pour endiguer l’activisme dur des hedge funds, une des solutions actuellement envisagées est d’assujettir le droit de vote des actionnaires à une durée minimale de détention d’actions et de créer une rupture d’égalité entre les actionnaires. La France est le premier pays à avoir consacré par la loi le principe de différence de traitement entre les actionnaires à long terme et ceux à court terme[167]. Le législateur français a adopté la loi dite « Florange » du 29 mars 2014[168] qui prévoit la généralisation d’un droit de vote double (automatique ou non) pour les actionnaires présents dans l’entreprise depuis au moins deux années continues. L’article 7 de cette loi, inséré dans le Code de commerce à l’article L225-123, prévoit ainsi un droit préférentiel au bénéfice des actionnaires à long terme[169] :
Un droit de vote double de celui conféré aux autres actions, eu égard à la quotité de capital social qu’elles représentent, peut être attribué, par les statuts à toutes les actions entièrement libérées pour lesquelles il sera justifié d’une inscription nominative, depuis deux ans au moins, au nom du même actionnaire […] Dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, les droits de vote double prévus au premier alinéa sont de droit, sauf clause contraire des statuts adoptée postérieurement à la promulgation de la loi no 2014-384 du 29 mars 2014 […], pour toutes les actions entièrement libérées pour lesquelles il est justifié d’une inscription nominative depuis deux ans au nom du même actionnaire[170].
D’autres pays s’intéressent à cette logique de rupture avec le principe « une action, une voix[171] », sans avoir pris toutefois une position aussi symbolique que la France[172]. Pourtant, la question est d’intérêt puisque l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a observé ceci en 2015 : « The OECD Principles do not take a position on the concept of “one share one vote”, and almost all jurisdictions permit some deviations from this concept[173]. » De même, une étude réalisée en 2007 relativement au cadre juridique de 19 pays européens et à la situation de 464 sociétés cotées a démontré que les mécanismes écartant le principe « une action, une voix » étaient de nature variable et que 44 p. 100 des sociétés de l’échantillon disposaient de tels mécanismes[174]. Au Canada, il est également fréquent de créer différentes classes d’actions avec ou sans droit de vote[175]. Beaucoup de grandes entreprises canadiennes sont des sociétés contrôlées par l’entremise d’une structure à double classe d’actions[176]. Dès 1945, la famille Molson, à l’origine de la plus vieille brasserie du Canada, a eu recours aux actions subalternes pour faciliter le financement de la société Molson, et ce, tout en conservant son contrôle et son pouvoir décisionnel[177]. À l’heure actuelle, de 20 à 25 p. 100 des sociétés qui forment l’indice composé S&P/TSX ont des actions à droit de vote multiple, alors que ce chiffre est moindre du côté américain (moins de 5 p. 100 des sociétés de l’indice boursier S&P 500 ont adopté une telle structure)[178]. Aux États-Unis, les entreprises peuvent créer des actions préférentielles ou subalternes, les dispositions étatiques de droit des sociétés qui prévoient le principe « une action, une voix » n’étant que supplétives[179]. Plusieurs décisions judiciaires confirment la légalité d’un capital-actions à classe multiple. À titre d’illustration, un juge du Delaware a reconnu l’absence d’incompatibilité entre une règle autorisant l’inégalité de traitement des actionnaires et les principes fondamentaux des sociétés par actions : « There are respectable public policy arguments that can be made for legislators and regulators to fashion statutes and regulations that require minimum holding periods, as a pre-condition to the exercise of certain rights the invocation of which impose costs on all stakeholders[180]. » Au Canada, les professeures Stephanie Ben-Ishai et Poonam Puri ont démontré que le droit a facilité l’émergence de classes d’actions multiples : « The use of dual class shares as a financing technique in Canada was facilitated by corporate statutes that permitted express deviations, in articles of incorporation or by-laws, from the common law default rule of one vote per share. The ability of corporations to make such deviations finds its roots in nineteenth-century legislation[181]. » Aujourd’hui, les lois en matière de droit des sociétés (à l’échelle tant canadienne que québécoise) prévoient expressément la possibilité d’avoir des actions privilégiées ou subalternes[182] et de mettre fin à l’égalité entre actionnaires en créant des catégories d’actions auxquelles sont rattachés des droits privilèges et des restrictions énoncés dans les statuts[183]. Récemment, lors de la réforme de son droit des sociétés par actions, le législateur québécois a introduit la possibilité pour les entreprises de mettre en place des régimes de vote inégalitaires par l’adoption d’une résolution spéciale ou par la modification des statuts[184]. S’il est interdit à une société de créer une discrimination entre des actionnaires appartenant à la même catégorie d’actions, le législateur autorise la création de distinctions entre eux dès lors qu’ils appartiennent à des catégories différentes. La Cour suprême du Canada a aussi reconnu la validité de dispositions présentes dans les statuts de société créant des régimes différents de répartition de dividendes entre les actionnaires d’une entreprise :
À mon avis, la division des actions en différentes « catégories » constitue une condition nécessaire pour pouvoir déroger à la présomption d’égalité, à la fois en ce qui concerne le droit aux dividendes et les autres droits des actionnaires. Cette règle trouve sa raison d’être dans le principe voulant que les droits des actionnaires se rattachent aux actions elles-mêmes et non aux actionnaires. Ainsi, la division des actions en différentes catégories permet d’établir une distinction entre les actions (par opposition aux actionnaires) et ensuite, de déroger à la présomption d’égalité[185].
De nos jours, la validité de restrictions au droit de vote des actionnaires est admise sur le plan juridique[186] et prend des intensités variables. Même si tous les doutes entourant la pertinence (économique et financière) et la légitimité d’introduire de telles restrictions ne sont pas levés[187], ces restrictions vont dans le sens de l’histoire[188] et s’avèrent un outil pour préserver la pérennité des entreprises[189]. Pourtant, ces restrictions se heurtent au modèle dominant et à la grogne des investisseurs institutionnels, comme l’a illustré récemment l’entreprise américaine Facebook[190]. S’appuyant sur le principe « une action, une voix[191] », le modèle dominant place l’actionnaire au centre des préoccupations, notamment celles d’ordre juridique[192].
2.2.2 Modifier les règles pour répondre au découplage
Alors que traditionnellement les prises de participation s’effectuent par l’acquisition d’actions, l’utilisation massive des produits dérivés (et d’autres techniques contractuelles) par les hedge funds est venue renouveler la réflexion sur l’attribution et l’exercice du droit de vote[193] : « [H]edge funds are often seen as the institutional expression of twenty-first-century financial derivatives, in the same way that the South Sea Company was seen as the institutional expression of the joint stock firm[194]. » Le recours à ces stratégies nouvelles, d’essence financière, a consacré le découplage (decoupling ou new vote buying[195]). En temps normal (et cette perception a dominé pendant longtemps[196]), l’intérêt juridique est proportionnel à l’exposition économique : un actionnaire dispose d’un certain nombre d’actions (intérêt juridique), lui donnant droit à un certain nombre de droits de vote, lui conférant un certain montant de dividendes et lui permettant de réaliser une plus-value en cas de revente à la hausse des actions qu’il possède (exposition économique[197]). Le découplage crée un spectre allant de l’actionnaire qui n’a aucune transaction ni actifs adossés à ses actions (pure shareholder) à l’actionnaire qui est entré dans une transaction (telle une position courte) et qui remet en cause le risque économique associé à la position sous-jacente (neutral shareholder[198]). Pour l’essentiel, le découplage consiste en une dissociation du risque économique et du droit de vote attachés à une action[199]. Il traduit l’existence d’une relation disproportionnée entre l’exposition économique et l’« intérêt juridique » d’un actionnaire.
Le découplage prend le nom de « vote vide » (empty voting) ou de propriété occulte (hidden ownership). Lorsqu’un actionnaire recourt au vote vide, son intention est de réduire son exposition économique, tout en conservant un pouvoir politique. Il y a, dans cette situation précise, découplage de risque négatif. À l’inverse, dans un cas de propriété occulte, un actionnaire possède un intérêt économique plus important que ce que laisse paraître son niveau de participation/détention au sein de la société. Il est alors question de découplage de risque positif[200]. Au Canada, l’affaire Telus[201] mettant aux prises l’entreprise de télécommunication Telus Corporation et un hedge fund a été l’occasion de mettre à jour le phénomène du vote vide[202]. Telus Corporation avait annoncé le 21 février 2012 qu’elle envisageait de supprimer la structure de son capital-actions à deux catégories d’actions par voie d’un plan d’arrangement devant être adopté à la prochaine assemblée de ses actionnaires. La proposition prévoyait que chaque action sans droit de vote serait convertie en action ordinaire, à raison d’une action pour une action si la mesure était adoptée par une majorité des deux tiers des votes des porteurs d’actions ordinaires et de ceux des porteurs d’actions sans droit de vote, votant chacun séparément en tant que catégorie. Les sociétés Institutional Shareholder Services Inc. et Glass, Lewis & Co., LLC ont, à l’époque, recommandé aux porteurs d’actions ordinaires et aux porteurs d’actions sans droit de vote de Telus de se prononcer en faveur de la proposition. Toutefois, le hedge fund Mason Capital Management LLC s’est opposé à la proposition par l’intermédiaire de sa circulaire. Ce dernier avait acquis par des instruments dérivés (des contrats d’échange d’actions à dénouement exclusivement numéraire) un pourcentage important des droits de vote liés aux actions ordinaires de Telus peu de temps après l’annonce de la proposition (20 p. 100 des actions avec droit de vote). Le hedge fund avait couvert ses positions en effectuant une vente à découvert sur ses actions, de telle sorte que son exposition économique correspondait à près de 0,20 p. 100 des actions en circulation de la société. Mason Capital Management LLC avait pour stratégie de faire échec à la proposition de regroupement des actions et de réaliser un profit lorsque l’écart entre les cours des actions avec droit de vote et des actions sans droit de vote serait rétabli. Par le passé, les actions sans droit de vote de Telus s’étaient négociées moyennant une décote par rapport à ses actions ordinaires. Après l’annonce de la proposition (puisqu’il était prévu que l’opération serait approuvée), le cours des actions des deux catégories a augmenté, mais celui des actions sans droit de vote a crû de façon plus importante pour s’approcher de celui des actions ordinaires. Or, puisque la société Mason Capital Management LLC avait vendu à découvert la plupart de ses actions de Telus, elle avait limité le montant de la perte qu’elle pouvait subir en cas d’approbation de la proposition. Toutefois, en raison du nombre d’actions sans droit de vote vendu à découvert par Mason Capital Management LLC, si les actions sans droit de vote s’étaient à nouveau négociées moyennant leur décote passée par rapport aux actions ordinaires, le bénéfice réalisé sur les actions sans droit de vote à découvert aurait dépassé la perte subie sur les actions ordinaires détenues en contrepartie. Telus a finalement renoncé à la proposition en précisant que, si les actions de Mason Capital Management LLC étaient retirées de l’équation, sa propre proposition aurait été largement approuvée par les deux catégories d’actionnaires et aurait recueilli 92,4 p. 100 de votes favorables.
Eu égard à l’hostilité du hedge fund et à sa demande de convocation d’une assemblée (celle-ci était destinée à voter une résolution pour imposer une prime (premium) aux porteurs d’actions ordinaires pour toute proposition de conversion ultérieure), Telus a saisi les tribunaux de la Colombie-Britannique. Ces derniers en ont conclu autrement, cela s’expliquant par la différence de nature entre les deux instances. Dans un premier temps, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a dû approuver le plan d’arrangement proposé par Telus. Celle-ci s’est prononcée en faveur d’une sanction du comportement du hedge fund[203]. Si cette cour a invalidé les mesures mises en oeuvre par le hedge fund pour des raisons procédurales, elle a souligné la préoccupation soulevée par l’émergence de la pratique du vote vide. Dans un obiter dictum, elle a confirmé la position des juges de première instance en reconnaissant la possibilité de refuser à un investisseur l’exercice d’un vote vide en vertu du pouvoir inhérent du juge[204]. Cette cour a parallèlement souligné les conséquences négatives de l’utilisation du vote vide sur la démocratie actionnariale. Dans un second temps, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique s’est prononcée dans une procédure distincte sur la légitimité de la convocation de l’assemblée générale par Mason Capital Management LLC. Sur ce terrain, la Cour d’appel a considéré que, en l’absence d’une réglementation prohibitive sur le vote vide, les juges ne pouvaient s’immiscer dans la gouvernance d’entreprise en privant un actionnaire de son droit de vote[205]. La Cour d’appel a admis que, même si elle reconnaissait le statut « d’actionnaire à vote vide » de Mason Capital Management LLC, elle ne pouvait déclarer comme invalide la requête de cette dernière société de convoquer une réunion des actionnaires. Le degré d’exposition au risque de Mason Capital Management LLC était sans incidence sur sa faculté de demander la convocation d’une assemblée. La Cour d’appel a ainsi rétabli la demande de Mason Capital Management LLC et a conclu que cette société n’avait enfreint aucune loi. Si la Cour d’appel s’est montrée prudente en indiquant que les tribunaux n’avaient pas l’autorité de contrôler les abus liés au vote vide[206], elle a tout de même fortement critiqué la position de Mason Capital Management LLC et envoyé un message au sujet de la question du vote vide. La décision semble indiquer que les tribunaux n’hésiteront pas à intervenir pour interdire la pratique si les circonstances le justifient[207].
La conclusion d’instruments dérivés[208] sous forme de contrats financiers permet de supprimer la proportionnalité qui existe entre les variables juridiques et économiques. Un dérivé se définit comme un instrument financier découlant d’un contrat conclu entre deux parties à des fins spéculatives ou de couverture, et portant sur un actif sous-jacent[209]. Sans définition légale, la valeur de ces instruments dépend d’autres actifs appelés « sous-jacents[210] ». Cette technique financière transfère le risque attaché à la valeur de l’actif sans nécessairement opérer le transfert de l’actif lui-même[211]. Avec les contrats financiers, l’actionnaire-propriétaire d’une action sous-jacente se prive de son utilité économique (valeurs d’échange et d’utilité) au bénéfice de sa contrepartie qui, elle, en conserve la substance juridique (droit de disposition)[212]. Il y a alors distinction entre deux types de propriété : la propriété juridique et la propriété économique[213]. L’actionnaire va utiliser un instrument dérivé pour s’affranchir de la variation du cours des actions qu’il détient (mais aussi contre des fluctuations de taux d’intérêt ou de taux de change) et couvrir ses pertes éventuelles[214], ainsi que pour développer un intérêt à la baisse de la valeur des mêmes actions afin d’en tirer un gain[215]. La conclusion d’un contrat de vente à terme[216] permettant au vendeur de fixer contractuellement le prix des titres sous-jacents à terme (future ou forward)[217] ou encore la conclusion d’une vente avec option d’achat (call)[218] ou d’un achat avec option de vente (put)[219] à un prix prédéterminé, donne la possibilité à l’actionnaire de poursuivre ces deux stratégies. Les contrats d’échange sur actions (equity swaps)[220] sont également utilisés par les hedge funds. Ces contrats encadrent l’échange à une date déterminée d’actions cotées entre deux cocontractants[221] et voient les paiements effectués par une partie au moins être fixés par référence à la valeur d’une action ou de flux financiers qui lui sont liés.
La conclusion d’instruments dérivés entraîne un règlement en espèces de la plus-value ou de la moins-value réalisée par l’une ou l’autre des parties par rapport à la valeur initiale de l’actif sous-jacent, c’est-à-dire de la différence entre la valeur de l’actif sous-jacent à la conclusion du contrat et sa valeur au terme du contrat[222]. Le risque se situe sur l’une ou sur l’autre des parties à l’opération, en fonction de la fluctuation effective du prix au cours de la vie de l’instrument dérivé[223]. La contrepartie qui accepte de verser à l’actionnaire la différence entre le prix de référence et le cours de la bourse si elle est négative couvre conséquemment le risque de l’actionnaire. L’exposition économique de l’actionnaire à l’évolution du cours de la bourse (position longue) est donc annulée par la conclusion d’une opération de couverture portant sur une quantité donnée de titres au terme de laquelle il tirera profit de la dépréciation desdits titres (position courte). Une spéculation sur la dépréciation des titres de la société est même possible dès lors que la position courte excède la position longue[224]. Au final, l’actionnaire pourra utiliser deux types de stratégies d’exposition économique : une position longue et une position courte. Dans la première, les augmentations de valeur des actifs sous-jacents sont transformées en profit et les diminutions de valeur, en perte économique ; dans la seconde, les diminutions de valeur sont transformées en profit et les augmentations, en gain économique. L’autre partie au contrat s’appuiera souvent sur une stratégie ayant pour objet de minimiser son risque et de réduire son exposition économique totale aux fluctuations de l’actif sous-jacent, et ce, en achetant un nombre d’actions équivalant à son exposition économique prévu dans le contrat[225].
Le contrat de prêt de titres dit « prêt-emprunt[226] » est une autre stratégie de découplage[227]. Contrairement à ce que sous-entend cette notion, le prêt-emprunt ne correspond pas à un simple contrat de prêt ou de location entraînant restitution. Cette opération consiste en un transfert temporaire de la propriété des titres de l’actionnaire-prêteur (représenté dans la plupart des cas par une institution financière[228]) vers l’emprunteur, avec l’obligation pour ce dernier de rendre au terme du contrat des valeurs identiques à celles qui lui ont été préalablement données[229]. Relevant de la catégorie des ventes à découvert, le prêt-emprunt s’analyse comme une convention de rachat d’actions à travers laquelle les titres achetés par une partie doivent être revendus à l’autre. Un des buts poursuivis par l’emprunteur est de réaliser une plus-value : ce dernier tentera de revendre sur les marchés les actions obtenues temporairement en espérant qu’une chute des prix s’opérera au moment où il lui faudra les racheter pour les restituer au prêteur. Cependant, le prêt-emprunt est aussi un moyen pour l’emprunteur de devenir actionnaire d’une société et d’exercer les droits économique et politique d’une action dont il n’a que la propriété temporaire sans s’exposer à un risque financier[230]. Puisque l’action sous-jacente est in fine restituée au prêteur au terme du délai fixé, seul ce dernier est soumis aux variations du marché. Après avoir exercé son droit de vote, l’emprunteur rendra les actions au prêteur sans crainte des conséquences et des risques afférents[231].
Ces situations de découplage soulèvent des questionnements juridiques[232]. Pour sa part, le législateur ne peut plus ignorer ces remises en question[233] qui se sont intensifiées avec l’accroissement de pratiques critiquables et à la limite de la légalité[234]. De plus, les pratiques de découplage ont des enjeux importants. Elles réduisent, pour certaines, la transparence de la structure de votes et des mouvements de capitaux, que cela soit concernant l’intérêt à négocier, l’ampleur des actions ordinaires en circulation ou les intérêts économiques des actionnaires[235]. De plus, la motivation des acteurs du découplage (essentiellement les hedge funds)[236] met en péril un présupposé simple : l’exercice du droit de vote se fait en vue d’accroître la valeur de l’entreprise et ne porte pas atteinte à l’intérêt commun des actionnaires. Si les hésitations sont encore nombreuses sur le choix législatif à faire[237], trois pistes se dégagent : un accroissement de la transparence, associé à un contrôle plus grand de l’attribution et de l’exercice du vote des actionnaires[238]. Alors qu’un renforcement des mesures de transparence a déjà été effectif[239], le contrôle de l’attribution du droit de vote aux actions dont le risque n’est pas couvert ainsi que de l’exercice de ce droit est encore à construire. Toutefois, d’autres solutions de rechange demeurent possibles[240].
Conclusion
Depuis quelques années, l’activisme historique fait place à un activisme d’une autre nature porté par les hedge funds : un activisme dur à visée financière. L’ampleur de ce dernier bouleverse la gouvernance d’entreprise, tant il est efficace, mondial et peu touché par les contextes économiques, financiers ou juridiques dans lesquels il évolue. Au Canada, les entreprises de toute taille et de tout secteur sont susceptibles d’être la cible de cet activisme[241] et elles le sont déjà[242]. En recourant aux outils traditionnellement privilégiés par les actionnaires-activistes, les hedge funds parviennent à faire croître la valeur actionnariale de l’entreprise ciblée dans un laps de temps réduit. Cependant, ce succès n’est pas sans conséquence. Les effets de l’activisme dur sont en réalité âprement discutés. Pour garantir l’atteinte de leurs objectifs financiers, les hedge funds pratiquent, la plupart du temps, un activisme hostile et ils n’hésitent pas à faire pression sur les administrateurs et les hauts dirigeants pour satisfaire leurs attentes. Par ailleurs, la contrepartie des mesures adoptées au profit des actionnaires s’opère au détriment des intérêts des parties prenantes de l’entreprise. En plus des méthodes controversées des hedge funds et des conséquences préjudiciables de leur intervention, l’apparition des techniques du vote vide et de la propriété occulte suscite de nouveaux débats. Il ne faut pas pour autant rejeter en bloc cette forme d’activisme ni chercher à tout prix à l’interdire. L’activisme dur revêt aussi des aspects positifs[243] qui le rapprochent d’un activisme plus constructif, soit celui qui a longtemps caractérisé les interventions des actionnaires pour faire entendre leurs voix ou promouvoir certaines causes ou valeurs.
Ainsi, l’activisme des hedge funds est là pour rester. Les juristes doivent comprendre qu’un nouveau monde de la gouvernance[244] et une approche différente du droit des sociétés par actions[245] émergent. En réponse aux questions que soulève l’activisme dur des hedge funds, les juristes (notamment canadiens) sont placés devant un défi de taille : construire une réglementation appropriée[246]. À l’heure actuelle, des solutions se dessinent même si elles demeurent, pour certaines, encore au stade de la discussion. Premièrement, la composition des conseils d’administration doit être repensée en vue de faire de la compétence une norme. Deuxièmement, les conseils d’administration devraient devenir activistes. L’instauration d’un dialogue permanent et constructif avec les actionnaires est aussi un élément clé du problème. Troisièmement, une solution proposée entend faire évoluer les règles relatives au découplage. L’encadrement renforcé du droit de vote et la transparence des opérations spéculatives sur les titres doivent être repensés pour donner aux entreprises et à leur direction la possibilité de lutter à armes égales avec les hedge funds activistes. La tâche des juristes se révèle en définitive complexe. Au-delà des aspects négatifs de l’activisme dur des hedge funds, la gouvernance d’entreprise est marquée aussi aujourd’hui non seulement par une logique boursière[247], peu remise en question par les entreprises elles-mêmes[248], mais également par un comportement ambivalent des investisseurs institutionnels[249]. Cela témoigne d’une conception dominante difficile à renverser[250], mais il faut bien commencer un jour…
Parties annexes
Remerciements
Cet article a été réalisé grâce au soutien financier du Fonds pour l’éducation et la saine gouvernance (FESG) de l’Autorité des marchés financiers (AMF) qui a permis la réalisation d’un projet de recherche intitulé « Le droit de vote des actionnaires en question » (2014-2016). Il a également bénéficié du soutien financier de la Fondation du Barreau du Québec en vertu du Programme de subvention à la recherche. Toutefois, les informations, les opinions et les avis exprimés n’engagent que la responsabilité des auteurs.
Notes
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[1]
Même actuellement certains auteurs notent que « [p]assive institutional investors are an increasingly important component of U.S. stock ownership » : Ian R. Appel, Todd A. Gormley et Donald B. Keim, « Passive Investors, Not Passive Owners », Journal of Financial Economics, vol. 121, 2016, p. 111. Dans le même sens, il a été observé que « [t]he U.S. experience, in which substantial deregulation has led to only modest increases in shareholder activism, suggests that a key explanation for institutional investors’ relative passivity is a fundamental lack of incentives » : Edward B. Rock, « Institutional Investors in Corporate Governance », (2015) University of Pennsylvania, Institute for Law and Economics Research Paper, no 14-37. Voir aussi Klaus J. Hopt, « Comparative Corporate Governance : The State of the Art and International Regulation », (2011) 59 American Journal of Comparative Law 1, 51.
-
[2]
Si l’Office québécois de la langue française traduit l’expression « hedge funds » par « fonds spéculatif », « fonds d’investissement spéculatif » ou « fonds de placement spéculatif » (Office québécois de la langue française, « Fonds spéculatif – Hedge fund », Fiche terminologique, [En ligne], [www.granddictionnaire.com/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=8387728] (28 mars 2018)), l’AMF renvoie à la notion de « fonds de couverture » (AMF, « Fonds de couverture », [En ligne], [lautorite.qc.ca/grand-public/investissements/fonds-dinvestissement/fonds-de-couverture/] (29 novembre 2017)). Pour la suite de nos propos, nous retiendrons l’expression « hedge funds ».
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[3]
À l’origine, l’activisme actionnarial des hedge funds s’est développé dans les entreprises américaines et anglaises. Les structures actionnariales éclatées ou dispersées favorisent la mise en oeuvre de cette pratique. À l’opposé, les structures actionnariales plus concentrées, telles qu’elles existent en France et dans les autres pays européens, sont moins propices à l’activisme. En Amérique du Nord, le nombre d’attaques a triplé en 2014, pour atteindre le nombre de 349 (contre 27 en 2000). Pour les chiffres nord-américains, voir : WSJNewsGraphics, WSJ Deals Team et FactSet, « WSJ-FactSet Activism Scorecard », 2014, [En ligne], [graphics.wsj.com/activism-scorecard] (29 novembre 2017) ; Yvan Allaire, « The Case For and Against Activist Hedge Funds », Institute for Governance of Private and Public Organizations, 2015, [En ligne], [igopp.org/wp-content/uploads/2015/06/IGOPP_Article_Template2014_CaseForAgainstHedgeFunds_EN_Mai2015_v3.pdf] (28 mars 2017). Pour les données européennes, voir ci-dessous.
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[4]
Concernant les interventions au sujet de Nestlé et de Danone, voir Activist Insight, « Activist Investing in Europe. A Special Report », 2017, p. 3 et 6. Aux États-Unis et au Canada, les célèbres interventions au sein des sociétés Yahoo, Pepsi ou Telus peuvent être citées. Voir I. Tchotourian et N. Koffi, préc., note introductive (*), nos 177 et suiv., p. 158 et suiv.
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[5]
Schématiquement, deux thèses s’opposent : d’un côté, un modèle outsider reposant sur un contrôle du marché des prises de contrôle (modèle de gouvernance d’entreprise qualifié d’« anglo-saxon », d’externe ou de modèle libéral) et, d’un autre côté, un modèle insider fondé sur un contrôle des parties prenantes détenant une part significative du capital comme des banques ou l’État (modèle de gouvernance d’entreprise qualifié de « rhénan », d’interne ou de partie prenante) ; pour une présentation synthétique de ces modèles, voir Thomas Clarke, International Corporate Governance : A Comparative Approach, New York, Routledge, 2007, p. 8 et suiv. Chacun de ces systèmes mobilise alors ses propres dispositifs institutionnels de gouvernance d’entreprise, dispositifs auxquels le droit appartient : Gérard Charreaux, « Vers une théorie du gouvernement des entreprises », dans Gérard Charreaux (dir.), Le gouvernement des entreprises. Corporate Governance. Théorie et faits, Paris, Economica, 1997, p. 421, à la page 427. Bien qu’en principe les structures actionnariales de type dispersé (telles qu’elles existent aux États-Unis et dans les pays anglo-saxons) favorisent l’activisme, la portée mondiale de l’activisme des hedge funds démontre que cette pratique concerne aussi les entreprises dont la structure actionnariale est concentrée (présentes en France ou au Canada). Les recherches sur les liens entre gouvernance d’entreprise, système financier et institutions juridiques ont émergé à la fin des années 90 avec les travaux fondateurs des chercheurs Rafael La Porta, Florencio Lopez-de-Silanes, Andrei Shleifer et Robert Vishny ; parmi ces travaux, voir : Rafael La Porta, Florencio Lopez-de-Silanes et Andrei Shleifer, « The Economic Consequences of Legal Origins », Journal of Economic Litterature, vol. 46, no 2, 2008, p. 285 ; Rafael La Porta, Florencio Lopez-de-Silanes et Andrei Shleifer, « What Works in Securities Laws ? », The Journal of Finance, vol. 61, no 1, 2006, p. 1 ; Rafael La Porta et autres, « Law and Finance », Journal of Political Economy, vol. 106, no 6, 1998, p. 1113 ; Rafael La Porta et autres, « Legal Determinants of External Finance », The Journal of Finance, vol. 52, no 3, 1997, p. 1131.
-
[6]
Marco Becht, Julian Franks et Jeremy Grant, « Hedge Fund Activism in Europe : Does Privacy Matter ? », dans Jennifer G. Hill et Randall S. Thomas (dir.), Research Handbook on Shareholder Power, Cheltenham, Edward Elgar Publishing, 2015, p. 116, à la page 117.
-
[7]
Michel Aglietta, Sabrina Khanniche et Sandra Rigot, Les hedge funds. Entrepreneurs ou requins de la finance ?, Paris, Perrin, 2010, p. 89.
-
[8]
Michel Albouy et Alain Schatt, « Activisme et Proxy Fight. Quand les actionnaires déclarent la guerre au management », Revue française de gestion, vol. 8, no 198-199, 2009, p. 297. Michel Albouy, « Comment concilier finance et management », Contrepoints, 18 novembre 2017, [En ligne], [www.contrepoints.org/2017/11/18/303387-concilier-finance-management] (29 novembre 2017) ; Lisa M. Fairfax, Shareholder Democracy. A Primer on Shareholder Activism and Participation, Durham, Carolina Academic Press, 2011, p. 48.
-
[9]
Selon cette théorie économique, la relation qui caractérise les rapports entre les actionnaires, les administrateurs et les dirigeants est celle de l’agence. Dans cette relation, les actionnaires (« principal ») délèguent leur pouvoir ou donnent mandat aux dirigeants (« agent ») pour assurer la gestion de leur capital. L’objectif de la gouvernance d’entreprise est alors d’élaborer des instruments permettant de gérer la relation d’agence entre dirigeants et actionnaires en en diminuant les coûts, mais aussi d’aligner leurs intérêts afin de maximiser la richesse des actionnaires. Voir : Michael C. Jensen et William H. Meckling, « Theory of the Firm : Managerial Behavior, Agency Costs and Ownership Structure », Journal of Financial Economics, vol. 3, 1976, p. 305, aux pages 308 et 309 ; Armen A. Alchian et Harold Demsetz, « Production, Information Costs, and Economic Organization », The American Economic Review, vol. 62, no 5, 1972, p. 777.
-
[10]
Adolph A. Berle et Gardner C. Means, The Modern Corporation & Private Property, 2e éd., New York, Routledge, 1991, p. 112 et suiv. Voir Mathilde Mesnard, « Société anonyme et séparation entre propriété et contrôle : au coeur des débats sur l’essor et l’évolution du capitalisme », Revue française de gouvernance d’entreprise, no 1, 2007, p. 9.
-
[11]
Robert Parrino, Richard W. Sias et Laura T. Starks, « Voting with their Feet : Institutional Ownership Changes Around Forced CEO Turnovers », Journal of Financial Economics, vol. 68, 2003, p. 3, à la page 3.
-
[12]
Min Dong et Aydin Ozkan, « Institutional Investors and Director Pay : An Empirical Study of UK Companies », Journal of Multinational Financial Management, vol. 18, 2008, p. 16 ; Michael E. Porter, « Capital Disadvantage : America’s Failing Capital Investment System », Harvard Business Review, vol. 70, no 5, 1992, p. 65 ; Samuel B. Graves et Sandra A. Waddock, « Institutional Ownership and Control : Implications for Long-Term Corporate Strategy », The Executive, vol. 4, no 1, 1990, p. 75.
-
[13]
Simon Deakin et Suzanne J. Konzelmann, « Corporate Governance after Enron : An Age of Enlightenment ? », dans John Armour et Joseph A. McCahery (dir.), After Enron. Improving Corporate Law and Modernising Securities Regulation in Europe and the US, Oxford, Hart Publishing, 2006, p. 155 ; George W. Dent Jr, « The Essential Unity of Shareholders and the Myth of Investor Short-Termism », (2010) 35 Del. J. Corp. L. 97.
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[14]
Les principales réformes sont la Sarbanes-Oxley Act of 2002, Pub. L. No. 107-204, 116 Stat. 745, et la Dodd-Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act, Pub. L. No. 111-203, 124 Stat. 1376 (2010), aux États-Unis. Au Canada, les évolutions ont été portées au niveau fédéral par la Loi canadienne sur les sociétés par actions, L.R.C. 1985, c. C-44 (ci-après « LCSA »), et au niveau provincial par la Loi sur les sociétés par actions, RLRQ, c. S-31.1 (ci-après « LSA »). Enfin, en Europe, la Directive 2007/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 concernant l’exercice de certains droits des actionnaires de sociétés cotées, J.O. L 184/17, et les rapports de la Commission européenne, Livre vert. Le cadre de la gouvernance d’entreprise dans l’UE, Doc. COM(2011) 164, et Livre vert. Le gouvernement d’entreprise dans les établissements financiers et les politiques de rémunération, Doc. COM(2010) 284, peuvent être cités.
-
[15]
Jill E. Fisch, « The Mess at Morgan : Risk, Incentives and Shareholder Empowerment », (2015) 83 U. Cin. L. Rev. 651 ; New York Stock Exchange, « Chapter 34 : Key Strategies of Activist Investors », dans NYSE : Corporate Governance Guide, Londres, White Page Ltd., 2014, p. 238, à la page 243 ; Stephen M. Bainbridge, Corporate Governance after the Financial Crisis, New York, Oxford University Press, 2012, p. 253. Julie Biron, L’activisme actionnarial : une perspective canadienne, thèse de doctorat, Montréal, Faculté de droit, Université de Montréal, 2011, p. 219 et suiv. ; Gil Yaron, « Canadian Institutional Shareholder Activism in an Era of Global Deregulation », dans Janis Sarra (dir.), Corporate Governance in Global Capital Markets, Vancouver, UBC Press, 2003, p. 111, à la page 117 ; Stephen I. Erlichman, « Canadian Institutional Investor Activism in the 21st Century : The Sleeping Giants Awaken », dans Anita I. Anand et William F. Flanagan (dir.), The Corporation in the 21st Century, Kingston, Queen’s Annual Business Law Symposium, 2003, p. 199 ; Raymonde Crête et Stéphane Rousseau, « De la passivité à l’activisme des investisseurs institutionnels au sein des corporations : le reflet de la diversité des facteurs d’influence », (1997) 42 R.D. McGill 863 ; Stéphane Rousseau, « L’influence des investisseurs institutionnels sur la régie d’entreprise au Canada », (1996) 37 C. de D. 305 ; Patricia A. Koval, « Trends in Canadian Shareholder Activism », dans The Canadian Institute, Duties and Liabilities of Officers and Directors, Toronto, Canadian Institute Publications, 1992.
-
[16]
Koussay Ammar, Le rôle des investisseurs institutionnels dans la gouvernance des sociétés cotées : le cas des sociétés égyptiennes cotées, thèse de doctorat, Bordeaux, Université Bordeaux 4, 2009.
-
[17]
Chris Pierce, « Trends in Corporate Governance », dans Richard Leblanc (dir.), The Handbook of Board Governance. A Comprehensive Guide for Public, Private, and Not-for-Profit Board Members, Hoboken, Wiley, 2016, p. 46, à la page 62.
-
[18]
Au Québec, les pouvoirs d’intervention des actionnaires sont principalement encadrés par la LSA, préc., note 14, et par la LCSA, préc., note 14. Il faut rappeler que la détention du droit de vote par un actionnaire est une condition essentielle à l’activisme : LSA, art. 179, et LCSA, art. 140 (1). Sur le pouvoir d’intervention des actionnaires en cas d’élection ou de destitution des administrateurs, voir la LSA, art. 110, 167 (3) et 144, et la LCSA, art. 106 (3) et 109 (1). Sur les propositions actionnariales, voir notamment la LSA, art. 194 et suiv., ainsi que le Règlement sur les propositions d’actionnaires, RLRQ, c. S-31.1, r. 2, et la LCSA, art. 137 et suiv. et art. 175 (4), de même que le Règlement sur les sociétés par actions de régime fédéral (2001), DORS/2001-512 (Gaz. Can. II). Sur les courses aux procurations, voir la LSA, art. 170, et le Règlement 51-102 sur les obligations d’information continue, RLRQ, c. V-1.1, r. 24, et l’annexe 51-102A5 pour le Québec. Concernant le droit fédéral, voir la LCSA, art. 149 et suiv., ainsi que le Règlement sur les sociétés par actions de régime fédéral (2001), qui régissent le processus des sollicitations de vote. Sur les recours judiciaires des actionnaires contre les administrateurs, les dirigeants et la société, voir ceux qui sont notamment prévus pour l’action oblique dans la LSA (art 445 et 446) et la LCSA (art. 239 (2)) et pour le recours en oppression dans la LSA (art. 450) et dans la LCSA (art. 241).
-
[19]
Alain Finet, Gouvernance d’entreprise : nouveaux défis financiers et non financiers, Bruxelles, De Boeck, 2009, p. 140-147. Sur la place des parties prenantes et de la RSE, voir les nombreuses références citées dans Ivan Tchotourian, « L’art de la juste équivalence en droit : discussion autour du mot “corporate” de l’expression corporate governance », R.R.J. 2015.455, 492 et suiv. ; voir aussi : Catherine Malecki, Responsabilité sociale des entreprises. Perspectives de la gouvernance d’entreprise durable, Paris, L.G.D.J., 2014, p. 21 ; Stéphane Rousseau, « La Stakeholder Theory : émergence et réception dans la gouvernance d’entreprise en Amérique du Nord », dans Claude Champaud (dir.), L’entreprise dans la société du 21e siècle, Bruxelles, Larcier, 2013, p. 111 ; Poonam Puri, « The Future of Stakeholder Interests in Corporate Governance », (2009) 48 Can. Bus. L.J. 427.
-
[20]
Sur les formes variées de cette financiarisation, voir Simon Deakin, « The Rise of Finance : What Is It, What Is Driving It, What Might Stop It ? », (2008) 30 Comp. Lab. L. & Pol’y J. 67, 67 et suiv. Voir aussi Lawrence E. Mitchell, « The Morals of the Marketplace : A Cautionary Essay for Our Time », (2009) 20 Stan. L. & Pol’y Rev. 171.
-
[21]
Roger L. Martin, « Yes, Short-Termism Really Is a Problem », Havard Business Review, 9 octobre 2015, [En ligne], [hbr.org/2015/10/yes-short-termism-really-is-a-problem] (29 novembre 2017) ; Duncan Weldon, « Is Short-Termism Wrecking the Economy ? », BBC.com, 30 juillet 2015, [En ligne], [www.bbc.com/news/business-33718644] (29 novembre 2017) ; Alfred Rappaport, « The Economics of Short-Term Performance Obsession », Financial Analysts Journal, vol. 61, no 3, 2005, p. 65, à la page 72.
-
[22]
D’autres personnages emblématiques comme Wilma Soss, première femme activiste, ou James Peck, défenseur de l’égalité des races à l’époque de l’apartheid, ont joué un rôle dans l’évolution de l’activisme. Voir Richard Marens, « Évolution du gouvernement des entreprises : l’émergence de l’activisme actionnarial au milieu du xxe siècle », Finance Contrôle Stratégie, vol. 6, no 4, 2003, p. 97, aux pages 99 et 107-110.
-
[23]
Id.
-
[24]
Sylvie Berthelot, « Les fonds spéculatifs et l’activisme actionnarial », conférence présentée dans le cadre du cours DRT-7022 « Gouvernance d’entreprise » enseigné par le professeur Ivan Tchotourian, Québec, Université Laval, 2016.
-
[25]
Erwin Eding et Bert Scholtens, « Corporate Social Responsibility and Shareholder Proposals », Corporate Social Responsability and Environmental Management, vol. 24, no 6, 2017, p. 648.
-
[26]
Louise Champoux-Paillé, Les propositions d’actionnaires. Un droit des actionnaires et un pilier de saine gouvernance, Montréal, MEDAC, 2010, [En ligne], [www.giref.uqam.ca/pdf/Etude-Louise-C.Paille-Prop.Actionnaires.pdf] (29 novembre 2017).
-
[27]
Vanessa Serret et Sylvie Berthelot, « Activisme actionnarial et responsabilité sociétale des entreprises au Canada. Analyse des résolutions soumises par les actionnaires entre 2000 et 2013 », Revue de l’organisation responsable, vol. 8, no 1, 2013, p. 17.
-
[28]
Stéphane Rousseau, « Cinq changements à suivre en 2014 – Propositions des actionnaires et élection des administrateurs », Stikeman Elliott, 30 janvier 2014, [En ligne], [www.droitcanadienfusions-acquisitions.com/2014/02/05/five-developments-to-follow-in-2014-shareholder-proposals-and-director-election/] (29 novembre 2017).
-
[29]
Noam Noked, « The Corporate Social Responsibility Report and Effective Stakeholder Engagement », Harvard Law School Forum on Corporate Governance and Financial Regulation, 28 décembre 2013, [En ligne], [corpgov.law.harvard.edu/2013/12/28/the-corporate-social-responsibility-report-and-effective-stakeholder-engagement/] (29 novembre 2017).
-
[30]
Elroy Dimson, Oğuzhan Karakas˛ et Xi Li, « Active Ownership », The Review of Financial Studies, vol. 28, no 12, 2015, p. 3225, à la page 3230. Selon une autre étude, plus de 40 p. 100 des propositions déposées et soumises pour vote en amont d’une assemblée portent sur la RSE. L’analyse d’un échantillon d’entreprises américaines pendant la période 1997-2010 démontre une hausse significative des propositions actionnariales en vue d’améliorer la transparence sur les questions en rapport avec la RSE : Giovanna Michelon, Michelle Rodrigue et Elisabetta Trevisan, « No Pressure, No Diamonds : The Role of Shareholder Activism on CSR Transparency », 2016, document de travail, [En ligne], [papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm ?abstract_id=2817276] (29 novembre 2017). Cependant, selon certains auteurs, des chiffres montrent que la propriété des titres par les investisseurs institutionnels réduit le nombre de propositions actionnariales relatives à la RSE : Silvina Rubio et Antonio B. Vazquez, « Do Institutional Investors Influence Corporate Social (Ir)responsibility ? », 2017, document de travail.
-
[31]
Jon Weinstein, Blaine Martin et Soren Meischeid, « Activism of a Different Nature : Social Investors Advocate for Change in the Proxy », The Corporate Governance Advisor, vol. 23, no 4, 2015, p. 21.
-
[32]
Carine Girard et Julien le Maux, « L’activisme et l’engagement actionnarial », Revue française de gouvernance d’entreprise, no 1, 2007, p. 113, aux pages 115-122.
-
[33]
Marcel Kahan et Edward B. Rock, « Hedge Funds in Corporate Governance and Corporate Control », dans William W. Bratton et Joseph A. McCahery (dir.), Institutional Investor Activism : Hedge Funds and Private Equity, Economics and Regulation, New York, Oxford University Press, 2015, p. 151, à la page 178.
-
[34]
Voir les propos de l’ancien président de la SEC : William H. Donaldson, Speech by SEC Chairman : 2005 CFA Institute Annual Conference, communication présentée à Philadelphie, 8 mai 2005, [En ligne], [www.sec.gov/news/speech/spch050805whd.htm] (1er avril 2018).
-
[35]
Yvan Allaire, « The Case For and Against Activist Hedge Funds », 2014, [En ligne], [igopp.org/wp-content/uploads/2015/01/Allaire-The-case-for-and-against-hedge-funds-December-27-2014-final.pdf] (29 novembre 2017).
-
[36]
Augustin Roch, Les hedge funds activistes, acteurs politiques de la mondialisation financière, 2e éd., Paris, Éditions La Bourdonnaye, 2014.
-
[37]
L’approche orientée en fonction du problème consiste à comparer les solutions apportées par les systèmes juridiques : voir H.A. Schwarz-Liebermann Von Wahlendorf, Droit comparé. Théorie générale et principes, Paris, L.G.D.J., 1978, p. 173. Sur l’origine de la méthode fonctionnelle, voir : Michele Graziadei, « The Functionalist Heritage », dans Pierre Legrand et Roderick Munday (dir.), Comparative Legal Studies : Traditions and Transisitions, Cambridge, Cambridge University Press, 2003, p. 100, aux pages 103 et suiv.
-
[38]
I. Tchotourian et N. Koffi, préc., note introductive (*), nos 147 et suiv, p. 137 et suiv.
-
[39]
Antoine Bailleux et François Ost, « Droit, contexte et interdisciplinarité : refondation d’une démarche », (2013) 70 Revue interdisciplinaire d’études juridiques 25, 44.
-
[40]
Louise Lalonde, « L’interdisciplinarité comme “contextes” : quels usages de l’autre ? », dans Georges Azzaria (dir.), Les nouveaux chantiers de la doctrine juridique, Montréal, Éditions Yvon Blais, 2016, p. 375.
-
[41]
Pierre Noreau, « Voyage épistémologique et conceptuel dans l’étude interdisciplinaire du Droit », dans Pierre Noreau (dir.), Dans le regard de l’autre. In the Eye of the Beholder, Montréal, Thémis, 2007, p. 165.
-
[42]
T. Clarke, préc., note 5, p. 113.
-
[43]
Selon l’Office québécois de la langue française, préc., note 2, un hedge fund est ainsi défini :
Fonds d’investissement habituellement considéré comme très risqué, portant principalement sur des produits à effet de levier particulièrement élevé, c’est-à-dire permettant, pour des mises limitées, d’opérer sur des montants beaucoup plus importants, mais avec des risques considérables, et dont les stratégies sont très diversifiées et différentes de celles habituellement employées par les gestionnaires de fonds de placement traditionnels.
-
[44]
Cité dans Gérard Marie Henry, Les hedge funds, Paris, Éditions Eyrolles, 2008, p. 16. Concernant la position de l’OICV, voir l’International Organization of Securities Commissions (IOSCO), Report on Funds of Hedge Funds. Final Report, 2008.
-
[45]
La « finance de l’ombre » (shadow banking) désigne le système bancaire peu réglementé existant en parallèle du système bancaire traditionnel. Voir André Prüm, À l’ombre des banques… Première Conférence annuelle Paule Gauthier, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2014.
-
[46]
Michel Aglietta et Sandra Rigot, « Le rôle spécifique des hedge funds dans la transmission du risque systémique : une contribution au débat réglementaire », dans Patrick Artus et autres (dir.), La crise des subprimes, Paris, La Documentation française, 2008, p. 229, à la page 230, note 3.
-
[47]
Saijel Kishan, « Hedge Fund Industry Growth “Unwelcome,” Says Caxton’s Law », The Quint, Bloomberg, 14 septembre 2016, [En ligne], [www.bloombergquint.com/onweb/2016/09/14/hedge-fund-industry-growth-unwelcome-says-caxton-s-andrew-law] (29 novembre 2017).
-
[48]
Les hedge funds ne sont pas totalement ignorés du droit. En droit des valeurs mobilières canadien et québécois par exemple, ils relèvent de la catégorie des fonds d’investissement prévu par l’article 5 de la Loi sur les valeurs mobilières, RLRQ, c.V-1.1. Le régulateur inclut les hedge funds dans la notion générale des fonds d’investissement ou d’organismes de placement collectif, de telle sorte qu’ils sont soumis au Règlement 81-102 sur les fonds d’investissement avec l’application de dispenses et de restrictions. Voir : Règlement 81-102 sur les fonds d’investissement, RLRQ, c. V-1.1, r. 39, art. 1 ; Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM), Avis de consultation des ACVM. Modernisation de la règlementation des produits de fonds d’investissement – Fonds alternatifs, 22 septembre 2016, p. 5.
-
[49]
M. Aglietta, S. Khanniche et S. Rigot, préc., note 7, p. 82 ; Harry McVea, « United Kingdom », dans Eddy Wymeersch (dir.), Alternative Investment Fund Regulation, Alphen aan den Rijn, Kluwer Law International, 2012, p. 343, à la page 344.
-
[50]
François-Serge Lhabitant, Hedge Funds : origine, stratégies, performance, Paris, Dunod, 2008, p. 52.
-
[51]
Ce projet s’est concrétisé par l’adoption, en décembre 2016, d’un projet de règlement abrogeant le Règlement 81-104 sur les fonds de marchés à terme, ainsi que par la modification du Règlement 81-102 sur les fonds d’investissement. Voir : ACVM, préc., note 48 ; Règlement modifiant le Règlement 81-102 sur les fonds d’investissement.
-
[52]
Pour plus de détails sur les produits dérivés et autres techniques utilisées par les hedge funds, voir section 2.2.2.
-
[53]
Dick Bryan et Michael Rafferty, Capitalism with Derivatives. A Political Economy of Financial Derivatives, Capital and Class, New York, Palgrave MacMillan, 2006, p. 98 ; Antoine Gaudemet, Les dérivés, Paris, Economica, 2010, no 25, p. 13 ; Joseph-Benjamin Mojuyé, Le droit des produits dérivés financiers (swaps, options, futures…) en France et aux États-Unis, Paris, L.G.D.J., 2005.
-
[54]
G.M. Henry, préc., note 44, p. 17.
-
[55]
Les hedge funds constituent de nouveaux arrivants sur le marché de l’art, marché dans lequel ils appliquent leurs règles de fonctionnement traditionnelles. Ils n’hésitent pas à faire des oeuvres d’art une classe d’actifs, ainsi que l’a relevé Steve Johnson, « Hedge Funds Sees Art as Exotic Asset Class », Financial Times, 15 juin 2007, [En ligne], [www.ft.com/cms/s/2/9e07df98-1b57-11dc-bc55-000b5df10621.html#axzz4CSYTXk00] (20 juillet 2016) : « The works of art within the fund will also be selected on the basis of whether they are likely to generate steady, predictable returns. The fund has signed up a roster of 10 established artists, with the help of Roy Petley, an impressionist who has sold works to several members of the British royal family. It has the right, but not the obligation, to buy these artists’ output. »
-
[56]
A. Roch, préc., note 36, p. 3.
-
[57]
Ludwig Chincarini, « Hedge Funds – An Introduction », dans Phoebus Athanassiou (dir.), Research Handbook on Hedge Funds, Private Equity and Alternative Investments, Cheltenham, Edward Elgar, 2012, p. 13, à la page 36 ; Thomas Jaeglé, L’actionnaire de court-terme dans les offres publiques, thèse de doctorat, Paris, Université Paris Descartes, 2013, p. 17.
-
[58]
John C. Coffee Jr et Darius Palia, « The Wolf at the Door : The Impact of Hedge Fund Activism on Corporate Governance », The Center for Law and Economics Studies. Columbia University School of Law, Working Paper no 521, 2015, p. 48 ; Guillaume Monarcha et Jérôme Teïletche, Les hedge funds, Paris, La Découverte, 2013, p. 14-17 ; A. Roch, préc., note 36, p. 3 ; Catherine Lubochinsky, « L’actif et le passif de l’industrie des hedge funds : un bilan favorable ? », dans Bertrand Jacquillat (dir.), Hedge Funds, Private Equity, marchés financiers : les frères ennemis ?, Paris, Presses universitaires de France, 2009, p. 61, à la page 62 ; Alon Brav et autres, « Hedge Fund Activism, Corporate Governance and Firm Performance », The Journal of Finance, vol. 63, no 4, 2008, p. 1729.
-
[59]
Fr.-S. Lhabitant, préc., note 50, p. 51.
-
[60]
En 2010, d’après une étude menée par l’IGOPP, sur 115 interventions activistes au sein de sociétés américaines, 98 d’entre elles provenaient des hedge funds. Voir Yvan Allaire, « L’activisme des fonds de couvertures et les conséquences sur la gouvernance d’entreprise », 2015, [En ligne], [igopp.org/wp-content/uploads/2015/04/Presentation_La-grande-soiree-de-la-gouvernance-version-finale-16-9_ML_v2_.pdf] (29 novembre 2017).
-
[61]
Estimé à 380, le nombre d’interventions activistes aux États-Unis a connu une hausse en 2015, puis il a subi un léger recul. En 2016, on a enregistré 231 interventions. Ces données à jour le 6 juillet 2017 ont été établies au regard des déclarations effectuées auprès de la SEC et des médias révélant une intervention activiste. Voir WSJNewsGraphics, WSJ Deals Team et FactSet, préc., note 3.
-
[62]
Les prévisions annoncent une légère baisse pour l’année 2017, due notamment au contexte économique européen, plus précisément au Brexit. Activist Insight, préc., note 4, p. 3. Voir l’article « L’investissement activiste en Europe se poursuit à un niveau record », Le Monde du droit, 13 novembre 2017, [En ligne], [www.lemondedudroit.fr/publications/248-etudes-et-documents/54511-l%E2%80%99investissement-activiste-en-europe-se-poursuit-%C3%A0-un-niveau-record.html] (29 novembre 2017).
-
[63]
Nessim Ait-Kacimi, « Comment les activistes sont devenus incontournables », Les Échos, 30 mars 2015, [En ligne], [www.lesechos.fr/30/03/2015/lesechos.fr/0204266454146_comment-les-activistes-sont-devenus-incontournables.htm] (29 novembre 2017).
-
[64]
Ce montant a été estimé pour l’année 2013. Voir « Activist Investors. Let’s Do it my Way », The Economist, 25 mai 2013, [En ligne], [www.economist.com/news/finance-and-economics/21578446-big-companies-are-being-stalked-hedge-funds-new-ideas-lets-do-it-my-way] (29 novembre 2017).
-
[65]
M. Kahan et E.B. Rock, préc., note 33, à la page 192.
-
[66]
Yannick Clerouin, « Apple, Amazon, Google… les gestionnaires vedettes sont divisés », Les Affaires, 15 novembre 2017, [En ligne], [www.lesaffaires.com/blogues/yannick-clerouin/apple-amazon-google-les-gestionnaires-vedette-sont-divises-/598745] (29 novembre 2017) ; Xavier Diaz, « Les activistes, un plus pour la gouvernance », L’AGEFI, 17 septembre 2015, [En ligne], [www.phitrustactiveinvestors.com/data//file/Les_activistes_un_plus_pour_la_gouvernance_AGEFI.pdf] (29 novembre 2017).
-
[67]
John C. Coffee Jr, « Hedge Fund Activism : A Guide for the Perplexed », Columbia Law School’s Blog on Corporations and the Capital Markets, 25 janvier 2016, [En ligne], [clsbluesky.law.columbia.edu/2016/01/25/hedge-fund-activism-a-guide-for-the-perplexed/] (29 novembre 2017) ; Martin Lipton, « Dealing with Activist Hedge Funds and Other Activist Investors », Harvard Law School Forum on Corporate Governance and Financial Regulation, 26 janvier 2017, [En ligne], [corpgov.law.harvard.edu/2017/01/26/dealing-with-activist-hedge-funds-and-other-activist-investors/] (29 novembre 2017).
-
[68]
M. Aglietta, S. Khanniche et S. Rigot, préc., note 7.
-
[69]
Brian R. Cheffins, « Hedge Fund Activism Canadian Style », (2014) 47 U.B.C.L. Rev. 1, 11 ; Na Dai, « Hedge Fund Activism and Corporate Governance », dans Mike Wright et autres (dir.), The Oxford Handbook of Corporate Governance, Oxford, Oxford Press University, 2013, p. 564, aux pages 567-570.
-
[70]
Y. Allaire, préc., note 35.
-
[71]
Id.
-
[72]
Id., p. 10. L’auteur précise que, dans 14 p. 100 des cas, l’objectif déclaré est autre et que, dans 5,2 p. 100 des cas, l’objectif n’est pas divulgué ou n’est pas clair.
-
[73]
Voir ci-dessous la section 2.2.2.
-
[74]
L’intervention des hedge funds dans la société française Pages Jaunes est un bel exemple d’un activisme dur. Voir Xavier Diaz, « Les “hedge funds” en force dans le capital de l’ex-PagesJaunes », L’AGEFI, 20 février 2014, [En ligne], [www.agefi.fr/asset-management/actualites/hebdo/20140220/hedge-funds-en-force-dans-capital-l-ex-pagesjaunes-143153] (29 novembre 2017).
-
[75]
Anita Anand et Andrew Mihalik, « Coordination and Monitoring in Changes of Control : The Controversial Role of “Wolf Packs” in Capital Markets », (2017) 54 Osgoode Hall L.J. 377.
-
[76]
L’intervention qui résulte d’une entente entre des acquéreurs comme les wolf pack se définit en principe comme une action de concert au sens du droit des valeurs mobilières. L’action de concert implique pour ceux qui l’exercent des obligations de déclarations et, à cet égard, est prise en compte dans le calcul de franchissement de seuils. Voir : Règlement 62-103 sur le système d’alerte et questions connexes touchant les offres publiques et les déclarations d’initiés, RLRQ, V-1.1, r. 34, art. 1.1 (1) ; Loi sur les valeurs mobilières, préc., note 48, art. 5.2, 112 et 115. En pratique, ces interventions tacites donnent rarement lieu à des divulgations.
-
[77]
I. Tchotourian et N. Koffi, préc., note introductive (*), no 197, p. 175 et suiv. ; J.C. Coffee Jr et D. Palia, préc., note 58, p. 40 ; Marie Tison, « Un prix de consolation pour Valeant », La Presse, 17 novembre 2014.
-
[78]
Y. Allaire, préc., note 35, p. 5 ; FTI Consulting, « 2015 Shareholder Activist Landscape. An Institutional Investor Perspective », 2015, [En ligne], [www.fticonsulting.com/~/media/Files/us-files/insights/reports/shareholder-activism-2015.pdf] (29 novembre 2017).
-
[79]
Yvan Allaire, « Les hedge funds ou le nouveau bal des prédateurs », Magazine Force, no 147, 2006, [En ligne], [www.magazineforces.com/node/320] (2 juillet 2017) ; J.C. Coffee Jr et D. Palia, préc., note 58, p. 48.
-
[80]
I. Tchotourian et N. Koffi, préc., note introductive (*), nos 167 et suiv., p. 153 et suiv.
-
[81]
Au Canada et au Québec, le droit des valeurs mobilières impose des déclarations lorsque certains seuils de détention de titres sont atteints. Voir le Règlement 62-103 sur le système d’alerte et questions connexes touchant les offres publiques et les déclarations d’initiés, préc., note 76, art. 1.1 (1). Pour plus de détails, voir Pascal De Guise, « Offres publiques », dans JurisClasseur Québec, coll. « Droit des affaires », Valeurs mobilières, fasc. 9, Montréal, LexisNexis Canada, à jour au 31 juillet 2017.
-
[82]
Les hedge funds peuvent conclure des contrats d’échange d’actions à terme (swaps), souscrire des instruments dérivés optionnels dits put ou call ou encore des contrats de prêt-emprunt. Ces contrats spéculatifs sont généralement conclus avec des investisseurs déjà actionnaires de l’entreprise mais peu engagés dans la gouvernance d’entreprise. Les enjeux de ces différents modes d’acquisition sont présentés à la section 2.2.2.
-
[83]
Michael Mueller et André Usche, « La réforme des marchés de gré à gré au Canada : vers des marchés plus résilients », Revue du système financier, décembre 2016, p. 63, à la page 64.
-
[84]
Voir la section 2.2.2 relative aux développements sur le vote vide et la propriété occulte.
-
[85]
Id.
-
[86]
Y. Allaire, préc., note 60.
-
[87]
En pratique, les situations où les hedge funds ont eu recours aux tribunaux sont rares. Cela s’explique par le fait qu’ils préfèrent rester à l’écart des systèmes juridiques traditionnels.
-
[88]
Jennifer G. Hill, « Good Activist/Bad Activist : The Rise of International Stewardship Codes », ECGI Law Working Paper no 368/2017, [En ligne], [ecgi.global/sites/default/files/working_papers/documents/3682017.pdf] (29 novembre 2017).
-
[89]
Lucian A. Bebchuk, Alon Brav et Wei Jiang, « The Long-Term Effects of Hedge Fund Activism », (2015) 115 Colum. L. Rev. 1085.
-
[90]
Id. Voir aussi Julie Biron, « Les bénéfices et les coûts de l’activisme actionnarial », (2014) 48 R.J.T. 817, 843.
-
[91]
Sur les administrateurs activistes, voir ci-dessous la section 2.1.2.
-
[92]
Wolf-Georg Ringe, The Deconstruction of Equity. Activist Shareholders, Decoupled Risk, and Corporate Governance, Oxford, Oxford University Press, 2016, p. 16 et suiv. ; Steven M. Davidoff, « A Standard Criticism of Activist Investors that No Longer Holds up », New York Times, 10 juillet 2013, p. B5.
-
[93]
Bidisha Chakrabarty, Pamela Moulton et Charles Trzcinka, « Institutional Holding Periods », Cornell University School of Hotel Administration, Working Paper, 2013, [En ligne], [scholarship.sha.cornell.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1001&context=conf] (29 novembre 2017).
-
[94]
Svea Herbst-Bayliss, « Activist Investors Get more Respect amid Strong Returns », Thomson Reuters, 17 novembre 2013, [En ligne], [www.reuters.com/article/us-investment-summit-activism/activist-investors-get-more-respect-amid-strong-returns-idUSBRE9AH02K20131118] (29 novembre 2017).
-
[95]
Wansquare, « L’activiste qui essaie d’amadouer les actionnaires », Le Figaro, 6 septembre 2017, [En ligne], [bourse.lefigaro.fr/indices-actions/actu-conseils/l-activiste-qui-essaie-d-amadouer-les-actionnaires-6182501] (9 septembre 2017).
-
[96]
M. Lipton, préc., note 67 ; J.C. Coffee Jr et D. Palia, préc., note 58 ; Y. Allaire, préc., note 35, p. 5.
-
[97]
Voir France, Assemblée nationale, « Rapport fait au nom de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi visant à redonner des perspectives à l’économie réelle et à l’emploi industriel », rapport no 1283, 17 juillet 2013, p. 7 et 28-32. Le rapport parlementaire français de la députée Clotilde Valter publié à l’occasion de l’adoption de la Loi no 2014-384 du 29 mars 2014 visant à reconquérir l’économie réelle, J.O. 1er avr. 2014, p. 6227, met également en lumière le risque supporté par les parties prenantes (p. 7) :
Ce texte a une portée symbolique extrêmement forte : parce que nombre de nos territoires ont subi des fermetures de sites qui ont été de véritables traumatismes à la fois pour les salariés, les habitants et les élus concernés, à la mesure des 750 000 emplois industriels perdus en dix ans dans notre pays, et parce que la financiarisation de notre économie met en danger nos entreprises, nos salariés, nos territoires et nos filières industrielles.
-
[98]
Y. Allaire, préc., note 60.
-
[99]
J.C. Coffee Jr et D. Palia, préc., note 58, p. 75 ; Y. Allaire, préc., note 35, p. 11. En s’intéressant de plus près à l’origine des gains de performance des entreprises, les auteurs remarquent que des rendements positifs interviennent notamment à la suite de la vente des actifs de l’entreprise et à la réduction des effectifs.
-
[100]
R. Parrino, R.W. Sias et L.T. Starks, préc., note 11.
-
[101]
Par exemple, voir Paul Martel, La société par actions au Québec. Les aspects juridiques, Montréal, Wilson & Lafleur, 2017, par. 22-1–22-33.
-
[102]
Les normes générales de conduite s’imposant aux administrateurs jouent également un rôle. Au Canada et au Québec, ces normes sont le devoir d’honnêteté et de loyauté ainsi que le devoir de prudence et diligence : pour le Québec, voir les articles 322 et 2138 du Code civil du Québec, L.Q. 1991, c. 64 ; mais aussi les dispositions de la LSA, préc., note 14, art. 119, al. 2, et de la LCSA, préc., note 14, art. 122 (1). Concernant le devoir d’honnêteté et de loyauté, deux décisions de la Cour suprême indiquent que le conseil d’administration ne devrait accorder aucun traitement préférentiel aux intérêts des actionnaires ni à ceux de toute autre partie prenante et devrait agir dans l’intérêt de la société : Magasins à rayons Peoples inc. c. Wise, 2004 CSC 68, [2004] 3 R.C.S. 461 ; BCE Inc. c. Détenteurs de débentures de 1976, 2008 CSC 69, [2008] 3 R.C.S. 560. Cette conception trouve des échos aux États-Unis, en Europe et en Australie ; pour une comparaison internationale, voir : I. Tchotourian, préc., note 19, 483 et suiv. ; Marcel Lizée, « Le principe du meilleur intérêt de la société commerciale en droit anglais et comparé », (1989) 34 R.D. McGill 653. Dans le contexte de l’activisme dur des hedge funds, toute décision préjudiciable à l’entreprise pourrait donc être considérée comme abusive. Concernant le devoir de prudence et de diligence, les administrateurs doivent agir avec la même diligence dont devrait faire preuve une personne raisonnablement prudente en pareilles circonstances. En d’autres mots, la mission du conseil d’administration est de maintenir un équilibre entre les divers intérêts des parties prenantes en assurant un processus décisionnel de qualité (Magasins à rayons Peoples inc. c. Wise ; BCE Inc. c. Détenteurs de débentures de 1976). Le devoir de prudence et de diligence est un moyen de faire obstacle à l’activisme dur des hedge funds. Un processus préjudiciable à l’entreprise qui servirait leur seul intérêt pourrait être sanctionné judiciairement. Dans le contexte de la responsabilité des administrateurs résultant d’une violation de leurs devoirs, la règle de l’appréciation commerciale pourrait aussi être opposée aux revendications des hedge funds activistes qui souhaiteraient contester les orientations stratégiques choisies par le conseil d’administration : Yvan Allaire et Stéphane Rousseau, Gouvernance et parties prenantes : l’obligation du conseil d’administration d’agir dans l’intérêt de la société, Montréal, IGOPP, 2014, p. 30.
-
[103]
Raymonde Crête et Stéphane Rousseau, Droit des sociétés par actions, 3e éd., Montréal, Thémis, 2011, p. 362-366. Au Canada, seule la loi fédérale de droit des sociétés par actions fait encore expressément référence à la compétence. Les tribunaux canadiens estiment généralement qu’il ne faut pas en déduire un devoir de compétence objectif.
-
[104]
Aux États-Unis et au Canada, si la nécessité des compétences financières est généralement admise, les exigences relatives à l’expertise financière varient. Aux États-Unis, les sociétés cotées sont tenues d’indiquer si au moins un membre de leur comité de vérification est un « expert financier du comité de vérification » : Sarbanes-Oxley Act of 2002, préc., note 14, art. 407 ; Securities and Exchange Commission (SEC), Release no. 33-8177 (2003). Alors que la définition de l’expression « expert financier du comité » a fait l’objet de vives controverses, la SEC a proposé une définition large : SEC, Final Rule : Disclosure Required by Sections 406 and 407 of the Sarbanes-Oxley Act of 2002, no 33-8177 (2003). Au Canada, selon le Règlement 52-110 sur le comité d’audit, RLRQ, c. V-1.1, r. 28, art. 4.2, les sociétés cotées doivent seulement indiquer, pour chacun des membres du comité, la formation ou l’expérience qui répond à certaines qualités exigées. L’article 3.1 de ce règlement prévoit que le comité d’audit doit être composé uniquement de personnes possédant des « compétences financières ». Au sein de ce comité, les administrateurs doivent être en mesure de lire et de comprendre un jeu d’états financiers.
-
[105]
Richard Leblanc, « Director Independence, Competency, and Behavior », dans R. Leblanc (dir.), préc., note 17, p. 161, à la page 171.
-
[106]
En droit canadien, voir Richard Leblanc et James Gillies, Inside the Boardroom : How Boards Really Work and the Coming Revolution in Corporate Governance, Toronto, Wiley, 2005, p. 147. En droit français, voir Pierre Bézard, « La compétence et le devoir des dirigeants sociaux en droit français », (1989) 10 Journées de la Société de législation comparée 529.
-
[107]
Les faits nouveaux en ce qui concerne l’approche comportementale (Behavioural Law and Economics) apportent une autre lecture quant à la mission du conseil d’administration. Loin d’être une simple chambre disciplinaire et de ne procéder qu’à une surveillance (monitoring), le conseil d’administration est un lieu d’apprentissage permettant de construire de nouvelles opportunités de création de valeurs et d’offrir une meilleure compréhension des enjeux stratégiques : Peter Wirtz, Les meilleures pratiques de gouvernance d’entreprise, Paris, La Découverte, 2008, p. 102 et suiv. Pour une revue de littérature, voir : Lynn A. Stout, « On the Proper Motives of Corporate Directors (or, Why You Don’t Want to Invite Homo Economicus to Join your Board) », (2003) 28 Del. J. Corp. L. 1 ; Donald C. Langevoort, « The Human Nature of Corporate Boards : Law, Norms, and the Unintended Consequences of Independence and Accountability », (2001) 89 Geo. L.J. 797 ; Christine Jolls, Cass R. Sunstein et Richard Thaler, « A Behavioral Approach to Law and Economics », (1998) 50 Stanford L. Rev. 1471.
-
[108]
Peter Wirtz, « Compétences, conflits et création de valeur : vers une approche intégrée de la gouvernance », dans Gérard Charreaux et Peter Wirtz (dir.), Gouvernance des entreprises. Nouvelles perspectives, Paris, Economica, 2006, p. 145, à la page 151.
-
[109]
Kathleen R. Conner et C.K. Prahalad, « A Resource-Based Theory of the Firm : Knowledge versus Opportunism », Organization Science, vol. 7, no 5, 1996, p. 477.
-
[110]
Gérard Charreaux, « Droit et gouvernance : l’apport du courant comportemental », dans Véronique Magnier (dir.), La gouvernance des sociétés cotées face à la crise. Pour une meilleure protection de l’intérêt social, Paris, L.G.D.J., 2010, p. 223, no 58, aux pages 244 et suiv.
-
[111]
En 2005, la Commission européenne, Livre vert : Le cadre de la gouvernance d’entreprise dans l’UE, Bruxelles, 2011, considérant 16, p. 53, a relevé en ce sens que, « [c]oncernant les qualifications des administrateurs, la plupart des codes de gouvernement d’entreprise insistent sur la nécessité que des personnes qualifiées siègent au conseil, tout en reconnaissant que la définition des qualifications adéquates devrait être laissée à l’appréciation de la société elle-même ».
-
[112]
Ivan Tchotourian, avec la collab. de Jean-Christophe Bernier, Devoir de prudence et de diligence des administrateurs et RSE, Montréal, Éditions Yvon Blais, 2014, nos 166 et suiv., p. 251 et suiv.
-
[113]
P. Martel, préc., note 101, par. 23-37 ; Marc Giguère, Les devoirs des dirigeants de sociétés par actions, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 1967, p. 54.
-
[114]
LCSA, préc., note 14, art. 122 (1) b).
-
[115]
R. Crête et S. Rousseau, préc., note 103, no 741, p. 340. Si un administrateur de société par actions se présente avec une expertise particulière dans un domaine et qu’il a été choisi pour cela, il devra alors en faire bénéficier la société du mieux qu’il peut : Brazilian Rubber Plantations & Estates Ltd., Re, [1911] 1 Ch 425 (ChD).
-
[116]
Robert W.V. Dickerson, Leon Getz et John L. Howard, Propositions pour un nouveau droit des corporations commerciales canadiennes, vol. 1, Ottawa, Information Canada, 1971, no 242, p. 92 :
L’obligation imposée par l’article 9.19 (1) b) est exactement la même que celle imposée par la common law à tout professionnel. Il n’y a pourtant pas de signes que cela a tari la source des avocats, comptables, architectes, chirurgiens ou autres. De plus c’est de toute façon un bien piètre réconfort pour un actionnaire de savoir qu’il existe un vaste réservoir de personnes de compétence très moyenne qui, d’après la loi actuelle, ont la charge de gérer son investissement.
-
[117]
Sénat du Canada, Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, Après « la tempête du siècle » : rétablir la confiance des investisseurs, juin 2003, p. 8 (E. Leo Kolber).
-
[118]
Comité mixte sur la gouvernance d’entreprise, Au-delà de la conformité, la gouvernance. Rapport final, Toronto, Institut canadien des comptables agréés, 2001, p. 15.
-
[119]
Coalition canadienne pour la bonne gouvernance (CCGG), Building High Performance Boards, Toronto, 2013, p. 9.
-
[120]
Règlement 58-101 sur l’information concernant les pratiques en matière de gouvernance, RLRQ, c. V-1.1, r. 32.
-
[121]
Instruction générale 58-201 relative à la gouvernance, art. 3.10 et suiv., [En ligne], [lautorite.qc.ca/fileadmin/lautorite/reglementation/valeurs-mobilieres/58-201/2005-06-30/2005juin30-58-201-ig-vadmin-fr.pdf] (29 novembre 2017).
-
[122]
Id., art. 3.14.
-
[123]
I. Tchotourian, préc., note 112, no 172, p. 265.
-
[124]
Il en va ainsi, par exemple, du contenu du droit canadien lui-même (voir ci-dessus la section 2.2.1) ou des divergences existantes dans les pratiques d’évaluation des travaux du conseil d’administration (divergences sur les personnes évaluées, sur la portée de la diffusion des résultats et sur les formes d’évaluation).
-
[125]
Stéphane Rousseau, « Gouvernance d’entreprise et analyse économique du droit : quelle perspective financière ? », dans V. Magnier (dir.), préc., note 110, p. 201 ; Henry J. Gregory (dir.), Report of the Task Force of the ABA Section of Business Law Corporate Governance Committee on Delineation of Governance Roles & Responsibilities, 2009, p. 14, [En ligne], [blenderlaw.umlaw.net/wp-content/uploads/2009/08/abataskforcereport.pdf] (29 novembre 2017).
-
[126]
Financial Services Authority, The Failure of the Royal Bank of Scotland. Financial Authority Board Report, Londres, Financial Services Authority, 2011, p. 387, 400, 401 et 410 ; David Walker, A Review of Corporate Governance in UK Banks and other Financial Industry Entities. Final Recommendations, Londres, HM Treasury, 2009, par. 4.2 et 4.3 et 6.10 ; United Kingdom, The House of Commons Treasury Committee, Banking Crisis : Dealing with the Failure of the UK Banks, Seventh Report of Session 2008-09, par. 22-27, 78 et 79.
-
[127]
Paul W. MacAvoy et Ira M. Millstein, « The Active Board of Directors and its Effects on the Performance of the Large Publicly Traded Corporation », Journal of Applied Corporate Finance, vol. 11, no 4, 1999, p. 8, à la page 8.
-
[128]
Yvan Allaire, Mihaela Firsirotu et François Dauphin, On Becoming an “Activist” Board …In the Age of Activist Shareholders, Montréal, IGOPP, 2017 ; Yvan Allaire et Mihaela Firsirotu, « On Becoming an Activist Board ! Sketch of a Corporate Governance that Creates Value », 2013, [En ligne], [igopp.org/wp-content/uploads/2014/04/allaire_and_firsirotu-on_becoming_an_activist_board-october_10.pdf] (29 novembre 2017) ; Aaron J. Atkinson et Bradley A. Freelan, « Activisme actionnarial : guide des administrateurs », 30 novembre 2016, [En ligne], [www.fasken.com/fr/knowledgehub/2016/11/directorshandbookshareholderactivism-20161130] (29 novembre 2017) ; Gérard Bérubé, « Un C.A. activiste », Le Devoir, 8 décembre 2016, [En ligne], [www.ledevoir.com/economie/actualites-economiques/486548/perspectives] (29 novembre 2017) ; Diane Bérard, « Et si 2017 était l’année des administrateurs activistes ? », Les Affaires, 4 janvier 2017, [En ligne], [www.lesaffaires.com/blogues/diane-berard/2017-sera-t-elle-l-annee-des-administrateurs-activistes/592524] (29 novembre 2017).
-
[129]
Ira M. Millstein, The Activist Director. Lessons from the Boardroom and the Future of the Corporation, New York, Columbia University Press, 2017, p. 181.
-
[130]
Id., p. 182.
-
[131]
Autorité des marchés financiers, Document de consultation. Un regard différent sur l’intervention des autorités en valeurs mobilières dans les mesures de défense, 2013, p. 17, [En ligne], [lautorite.qc.ca/fileadmin/lautorite/consultations/fin-2013-06/2013mars14-avis-amf-62-105-cons-publ-fr.pdf] (8 avril 2018).
-
[132]
Kathleen Rehbein, Jeanne M. Logsdon et Harry J. Van Buren III, « Corporate Responses to Shareholder Activists : Considering the Dialogue Alternative », Journal of Business Ethics, vol. 112, 2013, p. 137 ; Luc Renneboog et Peter Szilagyi, « Shareholder Engagement at European General Meetings », dans Massimo Belcredi et Guido Ferrarini (dir.), Boards and Shareholders in European Listed Companies. Facts, Context and Post-Crisis Reforms, Cambridge, Cambridge University Press, 2013, p. 315.
-
[133]
JP Morgan, The Activist Revolution. Understanding and Navigating a New World of Heightened Investor Scrutiny, Corporate Finance Advisory and Mergers & Acquisitions, 2015, p. 12.
-
[134]
The Conference Board Center Advisory Board on Corporate/Investor Engagement, Guidelines for Engagement. Research Report 1541-14-RR, 2014, p. 27 ; Marc Goldstein, Defining Engagement : An Update on the Evolving Relationship Between Shareholders, Directors and Executives, Investor Responsibility Research Center Institute (IRRC), 2014, p. 20 ; H.J. Gregory (dir.), préc., note 125, p. 14.
-
[135]
La révision du Code britannique de bonne conduite des investisseurs (UK Stewardship Code) élaborée par l’autorité de reporting financier (Financial Reporting Council) qui a eu lieu en 2014 témoigne de la valeur du dialogue entre la société et le conseil d’administration : Financial Reporting Council, UK stewardship Code, 2014, p. 23.
-
[136]
Institute of Directors in Southern Africa, King Code of Governance for South Africa, Johannesburg, Institute of Director, 2009 ; Institute of Directors in Southern Africa, CRISA. Code for Responsible Investing in South Africa, Toronto, Institut des administrateurs de sociétés, 2011.
-
[137]
Citée dans Institut des administrateurs de sociétés, Guide de l’IAS sur l’interaction entre les administrateurs et les actionnaires, 2016, p. 6.
-
[138]
Ann Yerger, « Corporate Governance by the Numbers », Harvard Law School Forum on Corporate Governance and Financial Regulation, 9 août 2016, [En ligne], [corpgov.law.harvard.edu/2016/08/09/corporate-governance-by-the-numbers/] (29 novembre 2017) (on cite le pourcentage d’entreprises de l’indice S&P 500 divulguant l’engagement auprès des investisseurs qui est passé de 6 p. 100 en 2010 à 66 p. 100 en 2016).
-
[139]
Iris H.-Y. Chiu et Dionysia Katelouzou, « From Shareholder Stewardship to Shareholder Duties : Is the Time Ripe ? », dans Hanne Birkmose (dir.), Shareholders’ Duties, Alphen-sur-le-Rhin, Wolters Kluwer, 2017.
-
[140]
H.J. Gregory (dir.), préc., note 125, p. 12.
-
[141]
Richard Fields et Anthony Goodman, « Board-Shareholder Engagement », dans R. LeBlanc (dir.), préc., note 17, p. 403, à la page 419.
-
[142]
Davies Ward Phillips & Vineberg, Rapport de Davies sur la gouvernance, 2015, p. 66.
-
[143]
Loi modifiant la Loi canadienne sur les sociétés par actions, la Loi canadienne sur les coopératives, la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif et la Loi sur la concurrence, projet de loi no C-25 (2e lecture et renvoi à un comité – 9 décembre 2016), 1re sess., 42e légis. (Can.).
-
[144]
Ivan Tchotourian, « Commentaire d’un projet ambitieux mais inachevé – Projet de loi C-25 visant à réformer la Loi canadienne sur les sociétés par actions (Partie 2) », Repères, février 2017, EYB2017REP2137 (La référence).
-
[145]
Coalition canadienne pour une bonne gouvernance, Constitution de conseils d’administration performants, p. 22 et suiv., [En ligne], [www.ccgg.ca/site/ccgg/assets/pdf/building_high_performance_boards_aug2013_v12_sept19_2013.pdf] (29 novembre 2017). La CCGG a elle-même élaboré une politique consacrée au dialogue entre conseils d’administration et actionnaires. Dans son site Web, la Coalition canadienne pour une bonne gouvernance, « Dialogue entre conseils et actionnaires », [En ligne], [www.ccgg.ca/index.cfm?pagepath=Policies/Engagement_between_Boards_and_Shareholders&id=17578&LANG=2] (8 avril 2018), précise ce qui suit concernant la politique de dialogue : « La Coalition canadienne pour une bonne gouvernance estime qu’un dialogue régulier et constructif entre les actionnaires d’un émetteur et son conseil d’administration est de la première importance. »
-
[146]
Davies Ward Phillips & Vineberg, Rapport de Davies sur la gouvernance, 2016, p. 7.
-
[147]
Andrew J. MacDougall et Robert Adamson, Cahier d’information sur les interactions avec les actionnaires. Questions que les administrateurs devraient poser, Toronto, Institut canadien des comptables agréés, 2012, p. 6 et suiv.
-
[148]
Id., p. 8.
-
[149]
Autorité des marchés financiers, préc., note 131, p. 5.
-
[150]
Merritt Moran, « Ten Strategic Building Blocks for Shareholder Activism Preparedness », Harvard Law School Forum on Corporate Governance and Financial Regulation, 20 décembre 2016, [En ligne], [corpgov.law.harvard.edu/2016/12/20/ten-strategic-building-blocks-for-shareholder-activism-preparedness/] (29 novembre 2017).
-
[151]
Chantal Rassart et Michael Rossen, À l’ordre du jour du conseil. Engagement auprès des actionnaires. Engager un dialogue constructif avec les actionnaires, 2015, p. 2, [En ligne], [www.corpgov.deloitte.ca/fr-ca/Documents/Insights/OnTheBoardsAgenda/September_2015_f.pdf] (29 novembre 2017).
-
[152]
L’identification des actionnaires est aujourd’hui un enjeu fondamental de la gouvernance d’entreprise : Bernard Field, Rapport sur les déclarations de franchissement de seuil de participation et déclaration d’intention, Paris, Autorité des marchés financiers, 2008, p. 5.
-
[153]
Directive 2007/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 concernant l’exercice de certains droits des actionnaires de sociétés cotées, préc., note 14.
-
[154]
Directive (UE) 2017/828 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 modifiant la directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l’engagement à long terme des actionnaires, J.O. L 132/1. Pour un commentaire, voir Peter Böckli et autres, « Shareholder Engagement and Identification », R.T.D.F. 2015.52.
-
[155]
Mary Jo White, Remarks at the 10th Annual Transatlantic Corporate Governance Dialogue, Washington, SEC, 3 décembre 2013.
-
[156]
Institut des administrateurs de sociétés, préc., note 137, p. 3.
-
[157]
C. Pierce, préc., note 17, à la page 62.
-
[158]
The Conference Board Center Advisory Board on Corporate/Investor Engagement, préc., note 134, p. 9 et suiv.
-
[159]
M. Moran, préc., note 150.
-
[160]
Antonino Francesco Cerminara, Shareholder Activism and Canada’s “New Corporate Norm”, mémoire de maîtrise, Toronto, University of Toronto, 2016, p. 67.
-
[161]
Commission européenne, Proposition de directive du Parlement européen et du conseil modifiant la directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l’engagement à long terme des actionnaires, et la directive 2013/34/UE en ce qui concerne certains éléments de la déclaration sur la gouvernance d’entreprise, COM(2014) 213 final, p. 5.
-
[162]
Ejan MacKaay et Stéphane Rousseau, Analyse économique du droit, 2e éd., Paris, Dalloz, 2008, no 2018, p. 559. Au Canada et au Québec, voir la synthèse de Marielle Girard et Laurence Marinier, « Notions fondamentales sur la réglementation du marché des valeurs mobilières », dans JurisClasseur Québec, coll. « Droit des affaires », Valeurs mobilières, fasc. 1, Montréal, LexisNexis Canada, à jour au 21 février 2017, nos 41 et suiv. ; voir aussi l’analyse complète de la place de la divulgation au Canada et aux États-Unis : Warren Grover et James Baillie, « Exigences en matière de divulgation », dans Consommation et corporations Canada, Avant-projet d’une loi canadienne sur le marché des valeurs mobilières, vol. 3 « Documentation de base », Ottawa, Ministre des Approvisionnements et Services Canada, 1979, p. 395.
-
[163]
Yves De Cordt et Gaëtane Schaeken Willemaers, La transparence en droit des sociétés et en droit financier, Bruxelles, Larcier, 2008, p. 8. Dans les marchés financiers, l’information n’est pas seulement une condition de la concurrence : elle est la condition principale de leur bon fonctionnement dans la mesure où les produits qui s’échangent ne sont perceptibles que par l’information qui les décrit. Au sein d’une riche littérature, voir : Jean-Baptiste Poulle, « La régulation par l’information en droit des marchés financiers », L.P.A. 2005.15.6 ; Frank B. Cross et Robert A. Prentice, « The Economic Value of Securities Regulation », (2006) 28 Cardozo L. Rev. 333 ; R. La Porta, F. Lopez de Silanes et A. Schleifer, préc., note 5 ; David L. Johnston et Kathleen Doyle Rockwell, Canadian Securities Regulation, 3e éd., Markham, LexisNexis, 2003.
-
[164]
Au Canada et au Québec, voir notamment l’article 195.2 de la Loi sur les valeurs mobilières, préc., note 48.
-
[165]
Au Canada et au Québec, voir les articles 187 à 191 de la Loi sur les valeurs mobilières, préc., note 48, l’article 131 de la LCSA, préc., note 14, les articles 322, 323, 1407, 2138 et 2146 du C.c.Q. et l’article 382.1 du Code criminel, L.R.C. 1985, c. C-46 ; voir aussi la synthèse suivante : Raymonde Crête et Jérôme Paradis, « Délits d’initiés », dans JurisClasseur Québec, coll. « Droit des affaires », Valeurs mobilières, fasc. 7, Montréal, LexisNexis Canada, à jour au 5 juin 2016.
-
[166]
Michael C. Jensen, A Theory of the Firm. Governance, Residual Claims and Organizational Forms, Cambridge, Harvard University Press, 2000 ; John C. Coffee Jr, « The Future as History : The Prospects for Global Convergence in Corporate Governance and its Implications », (1999) 93 Northwestern University Law Review 641 ; Frank H. Easterbrook et Daniel R. Fischel, The Economic Structure of Corporate Law, Cambridge, Harvard University Press, 1996 ; Eugene F. Fama et Michael C. Jensen, « Agency Problems and Residual Claims », (1983) 26 The Journal of Law and Economics 327 ; M.C. Jensen et W.H. Meckling, préc., note 9.
-
[167]
Voir également les autres dérogations prévues dans le droit français au principe « une action, une voix » au travers de dispositions statutaires, de l’émission d’actions de préférence sans droit de vote, de mesures coercitives prévoyant la suspension à titre de sanction ou pour éviter la survenance de conflits d’intérêts : Romain Dambre, Les contrats financiers sur actions. Droit français et européen des sociétés, Bruxelles, Larcier, 2016, p. 273 et suiv., no 243 et les références citées.
-
[168]
Loi no 2014-384 du 29 mars 2014 visant à reconquérir l’économie réelle, préc., note 97. Voir Alain Couret, « Le retour du débat sur le droit de vote double », J.C.P. E. 2013.1518.
-
[169]
Les statuts de la société peuvent déroger à cette disposition.
-
[170]
Code de commerce, art. L225-123. Sur les effets ambivalents de cette réforme législative, voir Christoph Van der Elst, « Do Loyalty Shares Affect the Engagement of Shareholders ? A Study of the French CAC-40 Companies », International Journal for Financial Services, 2017, p. 33, à la page 37 : « There are some indications that at the same time these shares increase the involvement of the shareholders as measured by their participation in the general meeting of shareholders. In light of the magnitude of the effects, the latter outcome of higher participation levels is of less importance. »
-
[171]
Mike Burkart et Samuel Lee, « One Share – One Vote : The Theory », Review of Finance, vol. 12, 2008, p. 1.
-
[172]
Plusieurs indices boursiers ont déjà réagi à la remise en question du principe « une action, une voix ». Depuis la fin juillet de 2017, S&P n’inclut plus dans l’indice S&P Composite 1500, les sociétés comportant différentes catégories d’actions : S&P Dow Jones Indices, « S&P Dow Jones Indices Announces Decision on Multi-Class Shares and Voting Rules », 31 juillet 2017, [En ligne], [www.prnewswire.com/news-releases/sp-dow-jones-indices-announces-decision-on-multi-class-shares-and-voting-rules-300496954.html] (29 août 2018). En outre, le FTSE Russell, [En ligne], [www.ftse.com/products/downloads/FTSE_Russell_Voting_Rights_Consultation_Next_Steps.pdf] (29 août 2018) a indiqué que les sociétés dont 5 p. 100 au moins des droits de vote ne seraient pas attachés aux capitaux flottants ne seraient plus admissibles à l’ensemble de ses indices. Par ailleurs, l’indice boursier MSCI, « Consultation on the Treatment of Unequal Voting Structures in the MSCI Equity Indexes », 2008, [En ligne], [www.msci.com/documents/1296102/8328554/Consultation_Voting+Rights.pdf/15d99336-9346-4e42-9cd3-a4a03ecff339] (29 août 2018), a annoncé récemment qu’il allait réduire le poids des sociétés comportant une double classe d’actions dans ses index. À Londres, le régulateur a émis l’idée, il y a peu de temps, d’alléger les règles de cotation en autorisant les actions à droit de vote multiple.
-
[173]
Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), Corporate Governance Factbook, Paris, OECD Publishing, 2015, p. 38. Pour des éléments statistiques comparatifs, voir Julian Franks et Colin Mayer, « Evolution of Ownership and Control around the World : The Changing Face of Capitalism », dans European Corporate Governance Institute (ECGI), Finance Working Paper no 503/2017, p. 39.
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[174]
ISS Europe, ECGI, Shearman & Sterling, Report on the Proportionality Principle in the European Union, Bruxelles, 2007 ; Commission européenne, Impact Assessment on the Proportionality between Capital and Control in the Listed Companies, Doc. SEC(2007) 1705, 2007. Sur le plan réglementaire, Corrado Malberti, « Multiple Voting Shares : A European Perspective », International Journal for Financial Services, 2017, p. 28, à la page 31, a récemment relevé la situation contrastée des pays de l’Union européenne :
Member States were almost equally divided between those that prohibited and those that allowed the issuance of multiple voting shares. More precisely, among the Member States examined in that study, Belgium, Germany, Estonia, Greece, Italy, Luxembourg, Poland, and Spain did not permit companies to issue multiple voting shares, while Denmark, Finland, France, Hungary, Ireland, the Netherlands, Sweden and the UK all allowed their companies to do so.
-
[175]
Yvan Allaire et François Dauphin, Les sièges sociaux des grandes entreprises du Québec sont-ils en péril ?, Montréal, IGOPP, 2016, p. 14, [En ligne], [igopp.org/wp-content/uploads/2016/09/IGOPP_Rapport_SiegesSociaux_FR_v6_WEB-A.pdf] (29 novembre 2017) ; Brian Frederick Smith, Ben Amoako-Adu et Madhu Kalimipalli, « Concentrated Control and Corporate Value : A Comparative Analysis of Single and Dual Class Structures in Canada », Applied Financial Economics, vol. 19, no 12, 2009, p. 955 ; Yves Bozec et Claude Laurin, « Concentration des droits de propriété, séparation entre participation au capital et contrôle des votes et performance opérationnelle des sociétés : une étude canadienne », Finance, contrôle, stratégie, vol. 7, no 2, 2004, p. 123.
-
[176]
Yvan Allaire, « Pourquoi le Canada a besoin des actions multivotantes », Lesaffaires.com, 9 mai 2016, [En ligne], [www.lesaffaires.com/blogues/yvan-allaire/pourquoi-le-canada-a-besoin-des-actions-multivotantes/587320] (29 novembre 2017).
-
[177]
Sur cet exemple, voir Stephanie Ben-Ishai et Poonam Puri, « Dual Class Shares in Canada : An Historical Analysis », (2006) 29 Dalhousie L.J. 117, 122 et suiv.
-
[178]
James Surowiecki, « Unequal Shares », The New Yorker, 28 mai 2012, [En ligne], [www.newyorker.com/magazine/2012/05/28/unequal-shares] (29 novembre 2017).
-
[179]
Historiquement, le New York Stock Exchange (NYSE) a refusé pendant longtemps d’inscrire à sa cote les entreprises dotées d’une structure à double classe d’actions. Alors qu’un nombre croissant d’entreprises mettent en place des structures de gouvernance à double classe après 1918, le NYSE annonce en 1926 que le comité chargé de l’examen des demandes d’inscription de titres examinera attentivement la question du contrôle des voix. C’est en 1940 que le NYSE adopte une règle contre la cotation des actions sans droit de vote. Cette interdiction a été abandonnée par la suite. L’autorité boursière américaine a tenté de la remettre en place à la fin des années 80, mais son projet n’a finalement pas abouti : The Business Roundtable v. Securities and Exchange Commission, 905 F.2d 406 (D.C. Cir. 1990). Pour une approche historique, voir Stephen Bainbridge, « Understanding Dual Class Stock Part I : An Historical Perspective », Stephen Bainbridge’s Journal of Law, Religion, Politics, and Culture, 9 septembre 2017, [En ligne], [www.professorbainbridge.com/professorbainbridgecom/2017/09/understanding-dual-class-stock-part-i-an-historical-perspective.html] (29 novembre 2017).
-
[180]
Mercier v. Inter-tel Corp., 2007 WL 2332454 (Del. Ch.), p. 22. Voir aussi : Groves v. Rosemound Improvement Ass’n, Inc., 413 So.2d 925, 927 (La. App. 1982) ; Providence & Worcester Co. v. Baker, 378 A.2d 121, 122-124 (Del. 1977) ; Stroh v. Blackhawk Holding Corp., 272 N.E.2d 1 (Ill. 1971).
-
[181]
S. Ben-Ishai et P. Puri, préc., note 177, 120.
-
[182]
Au Canada, les émetteurs assujettis (Loi sur les valeurs mobilières, préc., note 48, art. 5 et 68) qui possèdent deux catégories d’actions doivent respecter plusieurs textes du droit des valeurs mobilières : le Règlement 41-101 sur les obligations générales relatives au prospectus, RLRQ, v-1.1, r. 14, partie 12, l’Annexe 41-101A1 Information à fournir dans le prospectus, RLRQ, v-1.1, r. 14, annexe 41-101A1, rubrique 10.6, l’Annexe 44-101A1 sur le Prospectus simplifié (Règlement 44-101 sur le placement de titres au moyen d’un prospectus simplifié, RLRQ, V-1.1, r. 16, annexe 44-101A1, rubrique 7.7) et le Règlement 51-102 sur les obligations d’information continue, RLRQ, c. V-1.1, r. 24, partie 10.
-
[183]
LSA, préc., note 14, art. 44, et LCSA, préc., note 14, art. 6, al. 1 c) (i) et art. 24 (4) a). Depuis 1987, la Bourse de Toronto exige que les entreprises cotées ayant une structure à deux catégories d’actions fournissent une protection contre les prises de contrôle aux détenteurs d’actions sans droit de vote ou à droit de vote restreint (actions dites « subalternes »). Ces protections, souvent appelées coattail provisions, permettent aux détenteurs d’actions sans droit de vote ou à droit de vote restreint de participer à une OPA au même titre que les détenteurs d’actions à droit de vote supérieur. La Bourse de Toronto et la Bourse de croissance du TSX obligent ainsi toutes les sociétés qui veulent y inscrire leurs actions à adopter de telles protections pour les actionnaires subalternes : Guide à l’intention des sociétés de la TSX, art. 624 (1) ; « Politique 3.5 Actions subalternes », dans Guide du financement des sociétés de la Bourse de croissance TSX – Politiques, Toronto, Bourse de croissance TSX, 2015, art. 6. De manière complémentaire, la Bourse de Toronto a pris des dispositions depuis longtemps pour assurer une plus grande transparence sur les marchés boursiers en créant de nouveaux symboles pour désigner les actions conférant différents droits de vote : Parlement du Canada, Service d’information et de recherche parlementaire, « Structures à deux catégories d’actions et pratiques exemplaires en matière de gouvernance d’entreprise », par Tara Gray, PRB 05-26F, 2005, [En ligne], [www.parl.gc.ca/content/lop/researchpublications/prb0526-f.htm#11] (10 avril 2018).
-
[184]
LSA, préc., note 14, art. 44, 47, 48, 49 et 191.
-
[185]
McClurg c. Canada, [1990] 3 R.C.S. 1020, 1041 et 1042. Voir aussi l’affaire Bowater Canadian Ltd. c. R.L. Crain Inc., 1987 CanLII 4037 (ON CA) : selon cette décision, les droits sont attachés aux actions et les actions d’une même classe doivent avoir des droits égaux.
-
[186]
Des auteurs ont indiqué en ce sens que la présomption sous-tendant le principe « une action, une voix » est que les actionnaires ont un intérêt uniforme dans la maximisation de la richesse. Pourtant, cette présomption n’existe pas en pratique. L’horizon de durée d’investissement des actionnaires est différent et la maximisation de la richesse n’a pas la même signification. En réalité, les actionnaires ont des intérêts hétérogènes qui sont réduits au silence en raison de la faiblesse de leur droit de vote : Grant M. Hayden et Matthew T. Bodie, « One Share, One Vote and the False Promise of Shareholder Homogeneity », (2008) 30 Cardozo L. Rev. 445, 492-499. Pour une lecture critique de la réglementation canadienne en ce domaine, voir Philippe D’Anjou, Le choix des dispositions législatives en droit des sociétés par actions à la lumière d’une étude fondée sur l’analyse économique du droit, thèse de doctorat, Québec, Université Laval, 2017, p. 235 et suiv.
-
[187]
Au cours des dernières années, certaines grandes entreprises canadiennes ont éliminé ce type de structure d’actionnariat, situation qui a parfois donné lieu à un contentieux judiciaire (par exemple : Magna International Inc. (Re), 2010 ONSC 4123, [2010] O.J. no 3454, conf. par 2010 OSC 4685, [2010] O.J. no 3791). Au sujet des effets positifs, voir : Y. Allaire, préc., note 176 (synthèse d’études récentes) ; Julie Biron, « Les actions multivotantes », International Journal for Financial Services, 2017, p. 38, à la page 41 ; Canadian Coalition for Good Governance (CCGG), Dual Class Share Policy, p. 2 et 3, [En ligne], [www.ccgg.ca/site/ccgg/assets/pdf/dual_class_share_policy.pdf] (10 avril 2018) ; Clarence T. Hay, « Restricted Shares in Ontario », (1988) 14 Can. Bus. L.J. 257, 269, 273 et suiv. Au sujet des effets négatifs, voir : Anita Anand, « Offloading the Burden of Being Public : An Analysis of Multiple Voting Share Structures », (2016) 10 Virginia Law & Business Review 395, 401 et suiv. ; B.F. Smith, B. Amoako-Adu et M. Kalimipalli, préc., note 175, 973 ; S. Ben-Ishai et P. Puri, préc., note 177, 142 et suiv. ; Randall Morck, « The Market and the Closely Held Corporation in Canada : the Implications of Concentrated Share Ownership for Corporate Performance », Canadian Investment Review, vol. 9, no 1, 1996, p. 49 ; Daniel R. Fischel, « Organized Exchanges and the Regulation of Dual Class Common Stock », (1987) 54 U. Chi. L. Rev. 119, 145. Pour une synthèse au Canada, voir Parlement du Canada, préc., note 183.
-
[188]
Stephen M. Bainbridge, Corporation Law and Economics, New York, Foundation Press, 2002, p. 450 : « limitations on shareholder voting rights in fact are as old as the corporate form itself ».
-
[189]
Sur cette observation à propos des actions à droit de vote multiple au Canada, voir Québec, Groupe de travail sur la protection des entreprises québécoises, Le maintien et le développement des sièges sociaux au Québec, Québec, Ministère des Finances, 2014, p. 42.
-
[190]
Le 22 septembre 2017, Mark Zuckerberg a annoncé qu’il renonçait à son projet d’émettre une troisième catégorie d’actions sans droit de vote au profit des actionnaires existants. S’opposant à cette modification de la structure du capital-actions, certains actionnaires avaient engagé une action collective au motif qu’il s’agissait d’un changement significatif dans la gouvernance de Facebook. Voir Jérôme Marin, « Actionnariat de Facebook : Mark Zuckerberg renonce face à Wall Street », Le Monde, 25 septembre 2017, [En ligne], [www.lemonde.fr/pixels/article/2017/09/25/actionnariat-de-facebook-mark-zuckerberg-renonce-face-a-wall-street_5190773_4408996.html] (29 novembre 2017). Les investisseurs institutionnels font de plus en plus entendre leurs voix pour critiquer les doubles classes d’actions multiples (notamment la présence d’actions multivotantes) et requièrent plus fréquemment la présence d’une clause d’extinction (sunset clauses) définissant des circonstances qui donneront lieu à l’élimination de la classe d’actions multiple, notamment en cas de départ de l’entrepreneur/fondateur de l’entreprise.
-
[191]
Au sujet de la défense du principe de proportionnalité, voir Sanford J. Grossman et Olivier D. Hart, « One Share-One Vote and the Market for Corporate Control », Journal of Financial Economics, vol. 20, 1988, p. 175.
-
[192]
L’analyse économique du droit de vote renforce ce positionnement des actionnaires en enseignant que ces derniers (en leur qualité de « créancier résiduel ») devraient pouvoir légitimement décider des orientations stratégiques de la société dans laquelle ils ont investi. Voir note 166.
-
[193]
Julie Boyer, Les aspects juridiques des stratégies de propriété occulte et de vote vide réalisées par l’entremise des produits dérivés, mémoire de maîtrise, Montréal, Université de Montréal, 2015, p. 2 et suiv. Pour certains pourtant, le découplage n’est pas particulier aux hedge funds activistes : Dionysia Katelouzou, « Myths and Realities of Hedge Fund Activism : Some Empirical Evidence », (2013) 7 Va. L. & Bus. Rev. 459, 510.
-
[194]
D. Bryan et M. Rafferty, préc., note 53, p. 98.
-
[195]
Henry T.C. Hu et Bernard Black, « The New Vote Buying : Empty Voting and Hidden (Morphable) Ownership », (2006) 79 S. Cal. L.R. 811.
-
[196]
« Over the course of the last century, the assumption that most shareholders held full ownership mostly worked » : Henry T.C. Hu et Bernard S. Black, « Debt, Equity, and Hybrid Decoupling : Governance and Systemic Risk Implications », dans W. Bratton et J. McCahery (dir.), préc., note 33, p. 349, à la page 351.
-
[197]
Marine Le Quillec, L’assimilation des instruments financiers à terme à dénouement exclusivement monétaire, mémoire de recherche, Paris, HEC Paris et Université Paris 1 Sorbonne, 2012, p. 24.
-
[198]
Franck Partnoy, « US Hedge Fund Activism », dans J.G. Hill et R.S. Thomas, préc., note 6, p. 99, à la page 105. Pour un tour d’horizon des divers modes de découplage des droits de vote de la propriété économique dans des actions, voir Patricia Beck, « What We Talk about When We Talk about Voting : Efficiency and the Error in Empty Voting », (2016) 21 Fordham J. Corp. & Fin. L. 211.
-
[199]
Pour un résumé des raisons justifiant le découplage, voir H.T.C. Hu et B.S. Black, préc., note 195, aux pages 353 et suiv.
-
[200]
W.-G. Ringe, préc., note 92, p. 58 et suiv.
-
[201]
Telus Corporation v. CDS Clearing and Depository Services Inc., 2012 BCSC 1350 ; Telus Corporation v. Mason Capital Management LLC, 2012 BCCA 403. Voir : J. Alexander Moore, Neil Kravitz et Carol Hansell, Décision Telus sur le vote vide, Toronto, 2012, [En ligne], [www.dwpv.com/fr/Resources/Publications/2012/TELUS-Empty-Voting-Decision] (29 novembre 2017) ; Andrew Gray, « Empty Voting : Cause for Concern, but B.C. Court Will Not Intervene », Torys LLP, 15 octobre 2012, [En ligne], [www.torys.com/insights/publications/2012/10/empty-voting-cause-for-concern-but-bc-court-will-not-intervene] (29 novembre 2017). Pour des décisions américaines traitant du vote vide, voir : Deephaven Risk Arb Trading Ltd. v. UnitedGlobalCom, Inc., no Civ.A. 379-N., 2005 WL 1713067 (Del. Ch.) ; High River Ltd. Partnership v. Mylan Laboratories., Inc., 353 F. Supp. 2d 487 (M.D. Pa.).
-
[202]
Aux États-Unis, les tribunaux ont eu l’occasion à quelques reprises d’exprimer leurs craintes liées au vote vide. Dans l’affaire In re IXC Communications, Inc. v. Cincinnati Bell, Inc., 1999 WL 1009I74, p. 6 et 7 (Del. Ch.), les juges ont indiqué ce qui suit : « courts closely scrutinize vote buying because a shareholder who divorces property interest from voting interest, fails to serve the “community of interest” among all shareholders, since the “bought” shareholder votes may not reflect rational, economic self-interest arguably common to all shareholders ». Voir aussi l’affaire CSX Corp. v. Children’s Inv. Fund Management (UK) LLP, 562 F.Supp.2d 511, S.D.N.Y. 2008 (en l’espèce, le juge devait déterminer si les hedge funds qui avaient utilisé des contrats financiers sur actions pour accroître leur participation étaient soumis à l’obligation déclarative formulée par l’article 13D en raison de leur qualité de propriétaire effectif). La Nouvelle-Zélande et l’Australie ont été les premiers États à se prononcer sur la possible dérogation des pratiques de découplage à la réglementation en matière de déclaration de détention et de franchissement de seuils. Les deux ont adopté une position similaire en refusant d’assimiler les titres acquis de manière occulte par l’entremise de produits dérivés (dénouables en numéraire) ou de contrat de prêts à des détentions effectives au sens du dispositif sur les franchissements de seuils : Ithaca (Custodians) Ltd. v. Perry Corporation, [2003] 2 NZLR 216 ; Austral Coal Limited 02 (RR), [2005] ATP 20.
-
[203]
Telus Corporation v. CDS Clearing and Depository Services Inc., préc., note 201.
-
[204]
Davies Ward Phillips & Vineberg, Rapport de Davies sur la gouvernance, Montréal, Davies, 2013, p. 76.
-
[205]
Telus Corporation v. Mason Capital Management LLC, préc., note 201.
-
[206]
Selon les juges, l’article 167 de la Business Corporation Act, S.B.C. 2002, c. 57 ne fait aucunement référence à une exigence relative à la détention d’un investissement net corrélatif aux droits de vote. Voici ce que mentionne le tribunal dans l’affaire Telus Corporation v. Mason Capital Management LLC, préc., note 201, par. 77 :
The section does not refer to any particular level of net investment in a company, but only to the holding of a particular proportion of the issued voting shares. The reference to the « aggregate » shareholding simply allows the voting shares of multiple shareholders to be added together ; it does not allow the court to look behind shareholdings to determine whether the shareholding represents a « material interest in the company ».
La Cour a souligné en ce sens qu’elle n’avait pas le pouvoir de priver un actionnaire de ses droits sur le fondement d’une présomption que celui-ci se livre à des activités de vote vide et a ajouté que, dans la mesure où des cas de vote vide bouleverseraient les objectifs de la démocratie actionnariale, le recours devait s’inscrire dans la modification de la législation ou de la réglementation.
-
[207]
En ce sens, voir J.A. Moore, N. Kravitz et C. Hansell, préc., note 201.
-
[208]
Au Québec, la Loi sur les instruments dérivés, RLRQ, c. I-14.01, art. 3, définit un dérivé ou un instrument dérivé comme étant « une option, un swap, un contrat à terme, un contrat de différence ou tout autre contrat ou instrument dont le cours, la valeur ou les obligations de livraison ou de paiement sont fonction d’un élément sous-jacent, ainsi que tout autre contrat ou instrument prévu par règlement ou assimilable à un dérivé suivant des critères déterminés par règlement ». Sur cette thématique, voir Antoine Gaudemet, Contribution à l’étude juridique des dérivés, thèse de doctorat, Paris, Université Paris 2, 2008. Le nombre de dérivés et leur diversité se sont accrus au fil du temps en raison du fait qu’ils permettent d’acquérir des droits de vote à moindre coût : Jordan M. Barry, John William Hatfield et Scott Duke Kominers, « On Derivatives Markets and Social Welfare : A Theory of Empty Voting and Hidden Ownership », 2012, document de travail, p. 5, 14 (note 69), 17 et 36. En Europe, la valeur des instruments dérivés a augmenté de 24 p. 100 pour la décennie se terminant en 2008 : Eugenio De Nardis et Matteo Tonello, « Know Your Shareholders : The Use of Cash-Settled Equity Derivatives to Hide Corporate Ownership Interests », dans Director Notes, The European Series, Doc. DN-009, 2010, p. 1.
-
[209]
Lorsque l’actif sous-jacent correspond à une action, il est appelé « dérivé sur action » (equity derivative).
-
[210]
Caroline Coupet, L’attribution du droit de vote dans les sociétés, Paris, L.G.D.J, 2015, p. 234, par. 220.
-
[211]
A. Gaudemet, préc., note 53, p. 129, par. 267.
-
[212]
R. Dambre, préc., note 167, p. 121, par. 99.
-
[213]
Gauthier Blanluet, Essai sur la notion de propriété économique en droit privé français. Recherches au confluent du droit fiscal et du droit civil, Paris, L.G.D.J., 1999.
-
[214]
L’actionnaire a un intérêt qualifié de « positif ».
-
[215]
L’actionnaire a un intérêt qualifié de « négatif ». Tel est le cas des ventes avec option d’achat.
-
[216]
Pauline Pailler, La notion d’instrument financier à terme, thèse de doctorat, Paris, Université Sorbonne Paris 1, 2008.
-
[217]
L’actionnaire qui a vendu ses titres s’affranchit de tout aléa alors que, demeurant propriétaire, il exerce son droit de vote.
-
[218]
Dans cette situation, la personne qui consent une option d’« achat » (le vendeur) devra vendre ses actions à un prix préalablement fixé alors qu’elle aurait pu le vendre plus cher sur le marché. Elle aura donc intérêt à une baisse des cours sous le prix d’exercice de l’option : cette dernière ne sera pas levée, mais le vendeur encaissera la prime.
-
[219]
Selon C. Coupet, préc., note 210, p. 223, par. 237, le propriétaire des actions qui se fait consentir une option de vente sur ces droits s’affranchit de tout risque de perte : si le cours baisse, il exercera son option ; si le cours augmente, il renoncera alors à son option.
-
[220]
Alastair Hudson, The Law of Financial Derivatives, Londres, Sweet & Maxwell, 2006, par. 2-73 ; Don M. Chance, « Equity Swaps and Equity Investing », Louisiana State University Working Paper, 2003.
-
[221]
D’un point de vue juridique, la qualification de l’opération est sujette à discussion et dépend des modalités de détermination des sommes dues et des modalités de paiement : C. Coupet, préc., note 210, p. 223, 237 et suiv., par. 224.
-
[222]
A. Gaudemet, préc., note 208, p. 126.
-
[223]
M. Le Quillec, préc., note, 197, p. 15 et suiv.
-
[224]
R. Dambre, préc., note 167, p. 275, par. 244.
-
[225]
Mårten Knuts, « The Disclosure of Cash Settled Equity Derivatives. Will the Proposed Amendments Solve the Problems ? », dans Holger Fleischer, Jesper Lau Hansen et Wolf-Georg Ringe (dir.), German and Nordic Perspectives on Company Law and Capital Markets Law, Tübingen, Mohr Siebeck, 2015, p. 235, à la page 237. Par la détention directe d’actions, la contrepartie reçoit une exposition économique inverse à l’exposition sous le contrat de dérivés, ce qui crée une exposition économique combinée neutre quant aux fluctuations des actions sous-jacentes, l’actionnaire pouvant lui aussi acheter les actions visées.
-
[226]
D’autres mécanismes tels que le la vente à réméré, la pension ou le portage de titres sont utilisés par les hedge funds pour opérer des transferts temporaires de titres. Sur ces techniques, voir : C. Coupet, préc., note 210, p. 183-193 ; Frédéric Leplat (dir.), Remise en cause des concepts du droit des sociétés par les techniques de financement. Dissociation entre la qualité d’actionnaire et le risque financier, Rouen, Centre universitaire rouennais d’études juridiques, 2013, p. 15 ; Jordan M. Barry, John William Hatfield et Scott Duke Kominers, « On Derivatives Markets and Social Welfare : A Theory of Empty Voting and Hidden Ownership », (2013) 99 Virginia L.R. 1103 ; Avner Kalay et Shagun Pant, « Time Varying Voting Rights and the Private Benefits of Control », document de travail, 2009 ; Alain Couret et autres, Droit financier, 2e éd., Paris, Dalloz, 2012, p. 862 et suiv., par. 1158 et suiv.
-
[227]
Aux États-Unis, approximativement 20 p. 100 des actions en circulation de la majorité des grandes entreprises cotées sont facilement empruntables : David Marais, « Decoupling Voting Rights from Economic Interest : The Case of Empty and Negative Voting », (2015) 18 Trinity C.L. Rev. 180, 186 et suiv.
-
[228]
Le prêt de titres est un service souvent offert par les grandes institutions financières. Ces investisseurs institutionnels détiennent un nombre important de titres de sociétés dans leur portefeuille dont certains peuvent rester longtemps inactifs. Il est donc aisé pour un investisseur de contracter un prêt de titres auprès de ces institutions. Ces contrats étant conclus à titre onéreux, les institutions financières ont trouvé dans ces transactions un moyen de se faire rémunérer sans effort particulier. La question s’est donc posée quant au rôle joué par les institutions financières. Si une éventuelle responsabilité a été discutée à plusieurs reprises devant les tribunaux, elle n’a pas été consacrée par le législateur ou par le juge, notamment en raison de la liberté contractuelle dont jouissent les parties à un tel contrat : J. Boyer, préc., note 193, p. 19 et suiv.
-
[229]
A. Couret et autres, préc., note 226, p. 872, par. 1171.
-
[230]
Id., p. 875, par. 1176, pour d’autres utilités.
-
[231]
Fr. Leplat (dir.), préc., note 226, p. 17.
-
[232]
Sur les doutes concernant la portée des droits visés par les situations de découplage, voir Henry T.C. Hu et Bernard S. Black, « Debt, Equity, and Hybrid Decoupling : Governance and Systemic Risk Implications », dans William W. Bratton et Joseph A. McCahery (dir.), Institutional Investor Activism : Hedge Funds and Private Equity, Economics and Regulation, Oxford, Oxford University Press, 2015, p. 349, aux pages 362 et suiv. Sur l’état de la législation en Europe et aux États-Unis concernant l’utilisation de dérivés pour éviter d’avoir à divulguer des intérêts dans les grandes entreprises publiques, tout en y accumulant furtivement des participations, voir E. De Nardis and M. Tonello, préc., note 208.
-
[233]
Il en va ainsi des attaques de vente à découvert (short-sale attack) qui sont devenues une préoccupation pour les juristes canadiens eu égard à leur rapprochement avec la notion de manipulation de marché ; sur cette qualification des opérations de vente à découvert en Europe, voir R. Dambre, préc., note 167, p. 428 et suiv., par. 390 et suiv. ; pour le Canada, voir l’article 195.2 de la Loi sur les valeurs mobilières, préc., note 48. Un article du quotidien Le Devoir a par exemple dénoncé les opérations de vente à découvert par lesquelles un investisseur à long terme joue contre ses intérêts en prêtant ses titres à un emprunteur qui va les vendre : Claude Chiasson, « Doit-on bannir les ventes à découvert ? », Le Devoir, 4 novembre 2008, [En ligne], [www.ledevoir.com/opinion/chroniques/214045/doit-on-bannir-les-ventes-a-decouvert] (29 novembre 2017). Au travers d’une attaque coordonnée, des hedge funds activistes prennent une position courte sur des biens sous-jacents (les actions d’une société) non détenus par le donneur d’ordre, puis tentent de faire baisser le cours desdites actions par la diffusion d’informations négatives. Par la suite, ces hedge funds rachètent une quantité plus importante d’actions à un court plus bas, le profit étant réalisé lorsque les cours remontent à un niveau normal.
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[234]
Les législateurs se sont longtemps refusés à adopter des règles en la matière, et il en va encore ainsi pour certaines thématiques. Par exemple, en matière de vote vide, des experts ont relevé que « the focus on “empty voting” has generated a lot of attention outside the US, as it has inside the US, but ultimately there has been little or no policy change » : Fr. Partnoy, préc., note 198, à la page 110. En ce qui concerne la législation au Québec dans le même domaine, elle est inexistante. La notion de vote vide ne se trouve nulle part. Aucun projet de loi ou de règlement n’existe. L’observation est sensiblement la même pour l’Ontario et la Colombie-Britannique. À l’automne 2017, la CCGG a publié une intéressante position dans laquelle cette organisation s’oppose fermement au phénomène de découplage car étant contraire à la notion de démocratie actionnariale. La CCGG demande au législateur Canadien de rendre le découplage illégal dans un futur proche et l’appelle dès maintenant à agir pour restreindre cette pratique et pour partager son opinion par le biais d’amicus curiae dans certaines affaires judiciaires. Voir : CCGG, « Empty Voting Position Statement », 2017, [En ligne], [www.ccgg.ca/site/ccgg/assets/pdf/empty_voting_position_-_template_public-1.pdf] (13 août 2018). Cependant, le droit des valeurs mobilières impose une double divulgation qui intéresse le vote vide. D’une part, l’article 4.1 du Règlement 55-104 sur les exigences et dispenses de déclaration d’initié, RLRQ, c. V-1.1, r. 31, impose une déclaration à un initié assujetti lorsqu’il conclut une convention ou un accord qui a pour effet de modifier, directement ou indirectement, le risque financier auquel l’initié assujetti s’expose par rapport à l’émetteur assujetti. D’autre part, le Règlement 62-103 sur le système d’alerte et questions connexes touchant les offres publiques et les déclarations d’initiés, préc., note 76, modifié en 2016, prévoit une obligation de divulgation lorsque l’acquéreur ou un allié est partie à une convention ayant pour effet de modifier, directement ou indirectement, le risque financier auquel est exposé l’acquéreur relativement aux titres de la catégorie à laquelle se rapporte une déclaration.
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[235]
Michael C. Schouten, « The Case for Mandatory Ownership Disclosure », (2009) 15 Stan. J.L. Bus. & Fin. 127, 165 et suiv.
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[236]
Des études relèvent qu’il est peu probable que des réformes réglementaires concernant des règles de divulgation plus strictes en matière de découplage influent sur la motivation des hedge funds à devenir activistes : D. Katelouzou, préc., note 193, 510.
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[237]
Voir P. Beck, préc., note 198, qui refuse toutefois des changements législatifs qui imposeraient plus de transparence et insiste plutôt sur la nécessité de modifier les règlements des sociétés pour que tous les propriétaires véritables soient tenus, dans un délai spécifié avant le vote des actionnaires, de divulguer toutes leurs formes de découplage à la date du vote afin que les votes découplés soient exclus.
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[238]
Paul Ali, Ian Ramsay et Benjamin Saunders, « Securities Lending, Empty Voting and Corporate Governance », (2014) 8 Law and Financial Markets Review 326, 334 et suiv. ; Wolf-Georg Ringe, « Hedge Funds and Risk Decoupling : The Empty Voting Problem in the European Union », (2013) 36 Seattle U.L. Rev. 1027, 1074 et suiv.
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[239]
À titre d’exemple, le dispositif canadien de déclaration de franchissement de seuil n’ignore pas les montées au capital-actions d’une société cotée par l’entremise d’instruments dérivés. Les contrats d’échanges d’actions à dénouement physique ou numéraire sont couverts par la législation canadienne (Loi sur les valeurs mobilières, préc., note 48, art. 89.2 et 89.3). Dans leur modification au Règlement 62-104 sur les offres publiques d’achat et de rachat, RLRQ, c. V-1.1, r. 35, et au Règlement 62-103 sur le système d’alerte et questions connexes touchant les offres publiques et déclarations d’initiés, préc., note 76, les ACVM ont cependant exclu du calcul du franchissement du seuil les actions sous-jacentes aux dérivés réglés en espèces. Pour ce qui est de la cession temporaire d’actions ou du prêt de titres, les règles ont clarifié les obligations de déclaration à propos des titres. Ceux-ci ne sont pas soumis à déclaration à condition que l’emprunteur s’en départisse dans un délai de trois jours et qu’il n’exerce pas les droits de vote rattachés.
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[240]
Sur ces solutions de rechange ainsi que sur les positions des États et des organisations internationales et suprarégionales à leur propos, voir : W.-G. Ringe, préc., note 92, p. 143 et suiv. ; J. Boyer, préc., note 193, p. 93 et suiv. ; David Skeel, « Behind the Hedge. In the Untamed World of Hedge Funds, Rigged Deals and Manipulated Markets Help the Wealthy Thrive while Ordinary Investors Wither », Legal Affairs, 2005, [En ligne], [www.legalaffairs.org/issues/November-December-2005/feature_skeel_novdec05.msp] (29 novembre 2017) ; Shaun Martin et Frank Partnoy, « Encumbered Shares », (2005) University of Illinois Law Review 775, 793.
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[241]
A.J. Atkinson et B.A. Freelan, préc., note 128, p. 5. Voir aussi David Ryan, « Why Canada is an Activist Investor’s Paradise », The Huffington Post, 25 juin 2014, [En ligne], [www.huffingtonpost.ca/david-ryan/activistinvestors_b_5526809.html] (29 novembre 2017).
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[242]
Goodmans LLP, « Activist Investing in Canadian Companies », Toronto, 2016, [En ligne], [www.goodmans.ca/files/file/docs/Goodmans%20Activist%20Investing%20May%202016%20-%20NC.pdf] (29 novembre 2017) ; Stephen Griggs, « Why Do Activists Like Canada so much ? », dans Activist Investing. An Annual Review of Trends in Shareholder Activism, 2014, p. 33, [En ligne], [www.activistinsight.com/research/Activist%20Insight%20Annual%20Review%202014-final%20web%20pdf.pdf] (29 novembre 2017).
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[243]
L’argument traditionnellement avancé est celui de l’amélioration de l’efficience des marchés : M. Aglietta, S. Khanniche et S. Rigot, préc., note 7, p. 125 et suiv. La question de l’utilité de cet activisme n’est plus balayée du revers de la main : Le Monde Économie, « Les fonds “activistes” sont-ils utiles aux entreprises ? », 29 octobre 2015, [En ligne], [www.lemonde.fr/economie/article/2015/10/29/les-fonds-activistes-sont-ilsutiles-aux-entreprises_4799434_3234.html] (29 novembre 2017). Pour un exemple d’effet positif de cet activisme au Canada, voir le cas du Canadian Pacific Railway : François Dauphin et Yvan Allaire, « A “Successful” Case of Activism at the Canadian Pacific Railway : Lessons in Corporate Governance », Harvard Law School Forum on Corporate Governance and Financial Regulation, 23 décembre 2016, [En ligne], [corpgov.law.harvard.edu/2016/12/23/a-successful-case-of-activism-at-the-canadian-pacific-railway-lessons-in-corporate-governance/] (29 novembre 2017).
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[244]
Mark Zenner et autres, The Activist Revolution : Understanding and Navigating a New World of Heightened Investor Scrutiny, JP Morgan, 2015, p. 7, [En ligne], [www.jpmorgan.com/jpmpdf/1320693986586.pdf] (29 novembre 2017).
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[245]
A.Fr. Cerminara, préc., note 160, p. 66.
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[246]
Gérard Rameix, « Les défis de la régulation des hedge funds », Revue d’économie financière, vol. 93, 2008, p. 239.
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[247]
Pour une sévère critique de cette orientation, voir Didier Danet, « Misère de la corporate governance », (2008) 22 Revue internationale de droit économique 407.
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[248]
Jonathan Bailey et autres, Short-termism : Insights from Business Leaders. Findings from a Global Survey of Business Leaders Commissioned by McKinsey & Company and CPP Investment Board, 2014, p. 9.
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[249]
Pour des illustrations récentes de comportements court-termistes d’investisseurs institutionnels, voir Andrew Ross Sorkin, « “Shareholder Democracy” Can Mask Abuses », The New York Times, 25 février 2013, [En ligne], [dealbook.nytimes.com/2013/02/25/shareholder-democracy-can-mask-abuses/] (29 novembre 2017). Dans des travaux consacrés à la participation des investisseurs institutionnels à la bonne gouvernance des entreprises, l’OCDE a relevé que, même si certains d’entre eux sont des actionnaires à long terme, « a number of large institutional investors are not acting in this way » : Organisation for Economic Co-operation and Development (OECD), The Role of Institutional Investors in Promoting Good Corporate Governance, Paris, OECD Publishing, 2011, p. 15, [En ligne], [www.oecd.org/daf/ca/49081553.pdf] (5 juin 2018). Cette ambivalence est renforcée par le contenu de certaines règles juridiques touchant la gouvernance d’entreprise. Il en va ainsi, par exemple, de la conception juridique canadienne quant à l’exercice du droit de vote par les actionnaires. Ce dernier peut avoir lieu sans tenir compte de l’intérêt général de la société et peut même aller à son encontre : Beatty v. North-West Transportation, [1886] 12 R.C.S. 598. Cette conception, qui existe en droit anglais, permet à un actionnaire de veiller de la manière la plus égoïste qu’il soit à la protection de ses intérêts : Greenwell v. Porter, [1902] 1 Ch. 530 (G.-B.). À la différence des administrateurs, les actionnaires sont donc titulaires d’un droit individuel qu’ils peuvent utiliser dans leurs intérêts propres sans souci d’un objectif valable pour l’entreprise. Voir : Julie Biron, « Pouvoirs des actionnaires », dans JurisClasseur Québec, coll. « Droits des affaires », Droit des sociétés, fasc. 12, Montréal, LexisNexis Canada, à jour au 27 août 2013, no 7 ; Franklin W. Wegenast, The Law of Canadian Companies, Toronto, Burroughs, 1931, p. 316.
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[250]
Jesse M. Fried, « The Uneasy Case for Favoring Long-term Shareholders », (2015) 124 Yale L.J. 1554.