Chronique bibliographique

Pierre-Claude Lafond, L’accès à la justice civile au Québec. Portrait général, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2012, 391 p., ISBN 978-2-89635-896-4.[Notice]

  • Sylvette Guillemard

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  • Sylvette Guillemard
    Université Laval

Tout le monde connaît les préoccupations de Pierre-Claude Lafond à propos des justiciables, en particulier des plus faibles ou des plus vulnérables d’entre eux. Ses travaux en droit de la consommation et ses études sur les actions collectives en sont des preuves éloquentes. L’ouvrage commenté ici dresse un portrait de l’accès à la justice civile. Le portrait, envisagé sous différents angles, est complet sans être innovateur. L’auteur livre lui-même l’avertissement dès la première page : « [L’ouvrage] ne prétend pas soumettre des idées entièrement nouvelles ou les résultats d’enquêtes inédites. Sa force et son utilité résident surtout dans l’effort de traitement et de rassemblement des informations disponibles. » Les propos de l’auteur ne sont en effet la plupart du temps ni novateurs ni très prospectifs. Il donne le ton en décrivant sa démarche comme « une oeuvre de synthèse ». Il a bien atteint son but puisque l’ouvrage « rassembl[e] des éléments de connaissance sur [le] sujet […] [et donne] une vue générale, une idée d’ensemble » de l’accès à la justice à l’heure actuelle au Québec. Pour autant, le parti pris synthétique ne s’oppose pas ici à un effort analytique. Il faut ajouter qu’en l’occurrence la synthèse et l’analyse n’empêchent pas une attitude pragmatique : la « préoccupation [de l’auteur] de demeurer concret et pratique domine ». L’ouvrage est divisé en quatre parties. La première porte sur l’accès à la justice stricto sensu. Il semble plus facile de le définir par la négative que par ce qu’il est. En effet, l’accès à la justice n’est pas l’accès aux tribunaux. L’accès à la justice se distingue également de l’efficacité judiciaire. Mais, au fait, qu’est-ce que la justice ? Il serait bon de comprendre ce dont on parle. Pierre-Claude Lafond réussit à synthétiser en sept pages les diverses acceptions de cette notion si indéfinissable. Bien sûr, il ne s’agit que de résumés de divers points de vue sur ce concept protéiforme par excellence, mais l’auteur utilisant là aussi la même technique par la négative – la justice n’est pas l’équité, la justice n’est pas l’égalité, la justice n’est pas le droit –, le lecteur saura au moins ce que n’est pas la justice. Pendant que nous sommes dans les définitions des concepts et des termes, mentionnons que Pierre-Claude Lafond en profite pour nous faire réfléchir sur les notions de conflits, différends, litiges, etc., comme l’ont déjà fait plusieurs auteurs. Autre question importante, s’il en est, vu le sujet du livre : qu’entend-on par l’expression « accès à la justice » ? Pour Pierre-Claude Lafond, il s’agit de « permettre à tous les citoyens de faire valoir leurs droits et de régler leurs conflits, de toutes les manières ». Une fois ce décor planté, l’auteur nous entraîne au coeur du système judiciaire actuel. Il le décrit, bien évidemment, mais il passe également en revue tous les reproches qui sont adressés à la justice étatique, « incarnée par les tribunaux, les juges et les avocats ». Les justiciables affichent une désaffection réelle envers les tribunaux. Et pourtant, ceux-ci sont occupés, même encombrés, comme jamais. Osons ici une analogie avec une question environnementale d’actualité. La planète Terre est aux prises avec un sérieux problème de réchauffement climatique. Et pourtant, des vagues de froid sibérien inhabituelles accablent régulièrement le Québec. Dans les deux cas, les affirmations comportent en elles-mêmes une contradiction évidente. Cela est dû au fait que, dans les deux cas, on a affaire à un syllogisme tronqué, dont il manque la proposition centrale. La température anormalement élevée fait fondre les glaces de l’Arctique qui dérivent vers le sud, créant ainsi un environnement …

Parties annexes