Volume 48, numéro 1-2, 2007
Sommaire (14 articles)
-
Présentation
-
La constitutionnalisation du droit du travail : un nouveau paradigme
Christian Brunelle, Michel Coutu et Gilles Trudeau
p. 5–42
RésuméFR :
La Charte des droits et libertés de la personne du Québec et la Charte canadienne des droits et libertés exercent aujourd’hui un effet structurant sur le droit du travail. Inspirés du droit international, ces textes à valeur constitutionnelle ont des incidences bien concrètes sur l’ensemble des relations de travail, que celles-ci soient individuelles ou collectives ou encore qu’elles mettent en présence un employeur du secteur public ou privé. Ce nouveau phénomène de constitutionnalisation du droit du travail entraîne sur la discipline un triple effet (un effet de modernisation, un effet d’uniformisation et un effet de complexification) qui touche directement toutes les institutions du monde du travail (tels les employeurs, les syndicats, les instances juridictionnelles spécialisées dans le domaine du travail), les appelant ainsi à se redéfinir.
EN :
The Quebec Charter of Human Rights and Freedoms and the Canadian Charter of Rights and Freedoms now exercise a lasting effect upon Labour Law today. These quasi-constitutional and constitutional texts, inspired by international law, have a very definite impact upon all labour relations, whether they be individual or collective, or involve public or private sector employers. This new phenomenon of « constitutionalized » Labour Law exercises on this branch of the law a triple (modernizing, standardizing and complexifying) effect that directly impacts all labour institutions (namely employers, unions, and legal authorities specialized in the field of labour), beckoning them to redefine aspects of their modus operandi.
-
Labour and the “Real” Constitution
Harry W. Arthurs
p. 43–64
RésuméEN :
While Canada’s formal constitution does not mention labour or employment law, and while jurisprudence has long established the primacy of provincial jurisdiction in this field, labour’s constitutional rights have been the subject of extensive recent litigation and scholarship. This article reviews attempts to use the provisions of the Canadian Charter of Rights and Freedoms to protect labour’s interests and to advance the cause of equality in the workplace. It then explores how Canada’s constitutional architecture has tended to frustrate the interests of unions and workers. And finally, it proposes that labour’s interests will largely be determined not by the formal constitution but by the “real constitution” — the structure of its economy. While the “real constitution” generally disfavours labour’s rights and interests, like the formal constitution it is vague and leaves ample room for challenge and for change.
FR :
Même si la constitution officielle du Canada ne fait aucunement mention du droit du travail ou de l’emploi, et quoique la jurisprudence ait depuis longtemps établi la prépondérance de la compétence provinciale dans ce domaine, les droits constitutionnels des syndicats et des travailleurs ont récemment fait l’objet de nombreux litiges et d’un examen approfondi dans la doctrine. Cet article passe en revue les tentatives de se servir des dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés afin de protéger les intérêts des syndicats et des travailleurs et de faire progresser la cause de l’égalité en milieu de travail. Il explore ensuite la manière dont l’architecture constitutionnelle du Canada a eu tendance à contrecarrer les intérêts des syndicats et des travailleurs. En dernier lieu, il suggère que les intérêts des syndicats et des travailleurs seront tranchés en grande partie non pas par la constitution officielle mais bien par la « véritable constitution », soit la structure de son économie. Bien que la « véritable constitution » soit généralement défavorable aux droits et intérêts des syndicats et des travailleurs, à l’instar de la constitution officielle, elle est vague et laisse ample place à l’évolution et pour faire valoir des oppositions.
-
La loi et l’accès à la syndicalisation de certains travailleurs non salariés vulnérables : une relation pathologique ?
Urwana Coiquaud
p. 65–92
RésuméFR :
À la lumière des récents développements judiciaires, l’objectif de l’auteure est d’examiner la nature et l’origine des difficultés éprouvées par certains travailleurs non salariés vulnérables dans l’accès à la syndicalisation. À partir de l’analyse de trois situations de travail dites vulnérables, l’auteure démontre que la loi ordinaire joue un rôle moteur dans l’exclusion de l’accès à la syndicalisation des travailleurs vulnérables. L’interprétation restrictive livrée par la Cour suprême du Canada à l’égard de l’article 2 d) de la Charte canadienne des droits et libertés ne permet pas de juguler efficacement cette trajectoire du législateur. Il faut donc envisager une protection renforcée de la liberté d’association garantie constitutionnellement au moyen d’une interprétation plus large et inspirée du droit international. Parallèlement, il s’agit de considérer l’ensemble des moyens non traditionnels offerts sur la scène nationale et internationale pour offrir l’accès à la liberté d’association et assurer une protection efficace à ces travailleurs vulnérables.
EN :
In light of recent judicial developments, the author seeks to examine the nature and origin of difficulties experienced by various vulnerable non-salaried workers in their efforts to access labour unions. Based upon the analysis of three working scenarios deemed to be vulnerable, the author demonstrates how the general law plays a key-role in the exclusion of vulnerable workers from accessing unions. The restrictive interpretation of subsection 2 d) of the Canadian Charter of Rights and Freedoms handed down by the Supreme Court of Canada does not make it possible to effectively put a check on this orientation of the legislator. It therefore becomes necessary to contemplate reinforced protection of the constitutionally guaranteed freedom of association via a broader and more inspired interpretation of international law. Likewise, one must consider the variety of non-traditional means available on the national and international scene offering access to freedom of association and ensuring effective protection for vulnerable workers.
-
La « constitutionnalisation rampante » du droit du travail français
Antoine Jeammaud
p. 93–119
RésuméFR :
Le texte de la Constitution française de 1958 ne recèle ni garantie de « droits fondamentaux », ni énoncé normatif traitant en substance du travail salarié. Mais les différentes branches de l’ordre juridique de la République ont été affectées par un processus jurisprudentiel de constitutionnalisation à deux composantes : la mise en évidence d’un « bloc de constitutionnalité » débordant le seul texte de la Constitution et l’affirmation de son emprise sur l’ensemble des rapports juridiques, y compris des rapports privés. Le dessin des bases constitutionnelles du droit du travail est, pour l’essentiel, à porter au crédit du Conseil constitutionnel, dont les décisions manifestent l’incidence complexe de ces normes supérieures sur la législation du travail. Cette autre action des normes constitutionnelles qu’est l’appréhension des relations du travail elles-mêmes apparaît dans des décisions des juridictions judiciaires, en particulier dans des arrêts de la Cour de cassation.
EN :
The text of the 1958 French Constitution does not contain any guarantee of « basic rights » nor any normative statement essentially addressing the issue of salaried labour. Nonetheless, various branches the Republic’s legal apparatus have been influenced by a jurisprudential process of dual-component constitutionalization : Emphasis on a « unity of constitutional issues » extending beyond the sole wording of the Constitution and the assertion of the unity’s influence on all, including private, legal relationships. The organization of the constitutional foundations of Labour Law may mainly be attributed to the Constitutional Council whose decisions illustrate the complex impact of these overriding standards on labour legislation. Another such manifestation of constitutional standards is found in the depicting of labour relations per se as may be found in court of justice rulings, especially in final decisions handed down by the Court of Cassation.
-
La répartition constitutionnelle des compétences entre la loi et les accords collectifs de travail en droit français
Bertrand Mathieu
p. 121–136
RésuméFR :
L’articulation entre la loi et les accords collectifs de travail repose en droit français sur le principe constitutionnel de participation. L’évolution du système normatif est caractérisée par un développement de la part du contrat. Au système traditionnel de mise en œuvre de la loi par les accords collectifs, s’ajoutent un renforcement des exigences liées au respect des conventions par le législateur et une plus grande liberté des partenaires sociaux quant à la détermination de la substance des accords. Enfin, une réforme législative est engagée pour renforcer le rôle des partenaires sociaux dans l’élaboration des lois relatives au droit du travail.
EN :
Under French law, the ongoing relationship between law and collective working agreements is grounded in the constitutional principle of participation. Changes in the normative system issue from evolution in contract law. Besides traditional implementation by the coming into force of legislation via collective agreements, the legislator has, in addition, reinforced requirements pertaining to compliance with contractual agreements and enhanced freedom for entrepreneurial associates to determine the substance of agreements. Lastly, legislative reform has been undertaken to strengthen the role of entrepreneurial associates in the making of legislation pertaining to Labour Law.
-
A Struggle for Democracy in the Workplace : The Possibilities and Limits of the Constitutionalization of Labour and Employment Law in Brazil
Maximiliano Nagl Garcez
p. 137–152
RésuméEN :
Workplace relations in developing countries are characterized as being traditionally authoritarian. But severe violation of human rights in the workplace can also be found in the most developed countries, and therefore modern society is finding itself faced with a sad reality : a universal situation of the vulnerability and fragility of human rights in the workplace.
Through the weakening of state institutions and the corresponding strengthening of the economic power spheres within the context of globalization, the survival of democracy in everyday life is threatened by transnational corporations, especially considering the lack of instruments to appropriately punish them. The human rights movement in Brazil has focused on the violation of human rights perpetrated by governments, yet it has not been so critical or outspoken regarding violations committed by major corporations. Defending the implementation of human rights in the workplace is an effort to counteract the dehumanization of worker-citizens by giving them more space for self-determination. It is essential that the principle of human dignity, already enshrined in the Brazilian Constitution, becomes one of the main pillars of Labour and Employment Law. The article analyzes how the constitutionalization of Labour and Employment Law in Brazil has been used to tackle the above mentioned problems.
FR :
Les relations en milieu de travail dans les pays en développement sont traditionnellement caractérisées d’autoritaires. Or, des violations graves des droits de la personne se produisent également en milieu de travail dans la plupart des pays développés, et, en conséquence, la société moderne est confrontée à une triste réalité, soit la condition universelle de vulnérabilité et de fragilité des droits de la personne dans le milieu de travail.
En conséquence de l’affaiblissement de l’appareil étatique et du renforcement correspondant des zones de puissance économique dans le cadre de la mondialisation, la survie de la démocracie dans la vie quotidienne est menacée par les sociétés transnationales, particulièrement compte tenu de l’inexistence de textes permettant de sanctionner convenablement leurs transgressions. Le mouvement des droits de la personne au Brésil est axé sur les violations des droits humains perpétrées par les gouvernements mais ne s’est guère érigé contre les violations commises par des sociétés d’envergure. Défendre la mise en œuvre des droits de la personne dans le milieu du travail, c’est déployer des efforts afin de contrecarrer la deshumanisation des travailleurs-citoyens en leur accordant davantage de latitude en vue de l’autodétermination. Il est essentiel que le principe de la dignité humaine, pourtant déjà enchâssé dans la Constitution brésilienne, devienne l’un des principaux piliers du droit du travail et de l’emploi. L’article analyse la manière dont la constitutionnalisation du droit du travail et de l’emploi au Brésil a permis de s’attaquer aux problèmes susmentionnés.
-
La constitutionnalisation du droit du travail : une menace ou une opportunité pour les rapports collectifs de travail ?
Guylaine Vallée et Dalia Gesualdi-Fecteau
p. 153–187
RésuméFR :
Le droit du travail se compose d’une pluralité de sources émanant du droit étatique et du milieu de travail. Sa spécificité tient à la manière de combiner ces sources en conférant une légitimité particulière aux sources issues de la négociation collective. Les auteures suggèrent que cette toile de fond permet de comprendre comment se manifeste empiriquement le processus de constitutionnalisation du droit des rapports collectifs du travail et d’anticiper ses effets juridiques sur le rapport qu’entretiennent les institutions des rapports collectifs du travail avec l’ensemble du droit instaurant des protections d’ordre public. Les tribunaux (notamment la Cour suprême du Canada dans l’affaire Parry Sound) avaient graduellement reconnu le rôle important de ces institutions dans la mise en œuvre des droits de la personne et, plus généralement, d’autres normes issues du droit étatique. Bien que cette approche ne fasse pas l’unanimité — en témoignent l’arrêt de la Cour suprême dans l’affaire Isidore Garon et la jurisprudence des tribunaux inférieurs québécois, qui est analysée dans le présent article —, les auteures estiment que l’approche en question est porteuse d’un renouvellement des principes d’articulation des sources du droit du travail qui s’appuie toujours sur le rôle central des institutions collectives. C’est en ce sens que le processus de constitutionnalisation, loin d’être une menace, s’inscrirait dans la continuité de l’histoire du droit du travail.
EN :
Labour and Employment Law is the product of multiple sources whose roots into the state law and into the law of the work place. The specific nature of this branch of the law originates in the way its sources combine and give specific legitimacy to ground rules that emerge from collective bargaining. The authors suggest that this background makes it possible to understand how the constitutionalization process of the law of collective labour relations empirically manifests itself, and to anticipate its legal effects upon the relationships between institutions of collective labour relations and the body of law forming the bedrock of public order. The courts (and most specifically the Supreme Court of Canada in the Parry Sound case) have gradually recognized the important role of these institutions in the implementation of human rights and, more generally, of other rules issuing from the state law. While this approach has not been unanimously recognized — consider the Supreme Court ruling in the case of Isidore Garon and other decisions emanating from lower Quebec courts analyzed in this paper — the authors consider that the approach portends a renewal of the interactions of Labour and Employment Law sources, which are always grounded upon the central role of collective institutions. It is in this sense that the constitutionalization process, far from being a threat to the unfolding history of Labour and Employment Law, is actually a part and parcel thereof.
-
Le droit de congédier un employé physiquement ou psychologiquement inapte : revu et corrigé par le droit à l’égalité et le droit au travail
Dominic Roux et Anne-Marie Laflamme
p. 189–213
RésuméFR :
Jusqu’à la fin des années 90, il était acquis qu’un employeur pouvait congédier un employé pour un motif d’absentéisme lié à l’inaptitude physique ou psychologique, dans la mesure où les deux conditions suivantes étaient réunies : d’une part, l’existence d’un taux d’absentéisme anormalement élevé et, d’autre part, l’impossibilité pour l’employé de fournir sa prestation normale de travail dans un avenir rapproché. L’évolution jurisprudentielle du droit à l’égalité et de son corollaire, l’obligation d’accommodement raisonnable, a radicalement changé les règles applicables en cette matière. Les auteurs analysent ici cet effet de « constitutionnalisation » sur le droit de l’employeur de congédier un employé incapable de fournir la prestation de travail pour laquelle il a été engagé.
EN :
Until the very end of the 1990s, it was accepted that an employer could dismiss an employee owing to absenteeism issuing from physical or psychological unfitness but only insofar as the following two conditions came together : On one hand, an abnormally high level of absenteeism and on the other, the employee’s total incapacity to perform ordinary working tasks in the foreseeable future. Since then, the evolution in court rulings on equality and its corollary, the duty to make reasonable accommodations, has radically changed the rules applicable to this issue. In this paper, the authors analyze this « constitutionalization » effect on the employer’s right to dismiss an employee who is unable to perform the work for which he or she was hired.
-
Le droit de retour au travail et l’obligation d’accommodement : le régime de réparation des lésions professionnelles peut-il résister à l’envahisseur ?
Anne-Marie Laflamme
p. 215–247
RésuméFR :
En 1985, le législateur québécois se montrait avant-gardiste en conférant au travailleur victime d’une lésion professionnelle un droit de retour au travail chez son employeur. La même année, la Cour suprême du Canada déclarait que le droit à l’égalité impose à l’employeur une obligation d’accommodement ; or, ce concept a évolué de façon telle que les employés handicapés se sont vu reconnaître des droits relatifs au maintien en emploi qui dépassent dorénavant ceux qui étaient prévus dans le régime de réparation des lésions professionnelles. Jusqu’à présent, la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) et la Commission des lésions professionnelles (CLP) sont demeurées hermétiques à l’intégration de cette norme, car elles jugent que le régime de réparation des lésions professionnelles constitue un ensemble normatif autonome, qui comporte son propre processus d’accommodement légal. L’auteure soutient que cette interprétation ne respecte pas le caractère prééminent du droit à l’égalité ni la jurisprudence de la Cour suprême qui reconnaît aux tribunaux administratifs le pouvoir et le devoir d’en assurer le respect.
EN :
In 1985, the Québec legislator struck an avant-gardist position by conferring upon workers, victims of occupational injury, a right of returning to work for their employers. That same year, the Supreme Court of Canada declared that the right to equality imposes upon the employer an obligation of accommodation ; yet since then this concept has evolved in such a way that handicapped employees have been conferred with rights for remaining on the job that go well beyond entitlements that were provided under the occupational injury compensation plan. To date, the Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST — the Quebec Worker’s Compensation Commission [Translation]) and the Commission des lésions professionnelles (CLP — the Occupational Injury Commission [Translation]) have remained non-committal regarding the integration of this standard because they deem that the occupational compensation plan is an autonomous set of standards that self-incorporates its own legal accommodation process. The author concludes that this interpretation does not respect the pre-eminent character of the right to equality nor the rulings of the Supreme Court, which recognize administrative courts’ power and duty to ensure respect for the foregoing.
-
La promotion des droits de la personne influe-t-elle sur l’évolution des plaintes portant sur le devoir syndical de juste représentation au Québec ? (1978-2005)
Marie-Josée Legault et Philippe Bergeron
p. 249–280
RésuméFR :
Contrepartie du monopole de représentation syndicale, le devoir de juste représentation s’impose aux syndicats du Québec en vertu du Code du travail depuis 1978. Parallèlement, à la faveur de la promulgation des lois et des chartes des droits de la personne au Québec depuis les années 70, la promotion des droits de la personne fait craindre à certains observateurs les effets interactifs de deux ensembles juridiques très différents (droits de la personne et droit des rapports collectifs de travail) et, entre autres, l’effet perturbateur d’une logique dite d’intérêts individuels. Les auteurs étudient ici empiriquement l’évolution du recours pour manquement au devoir de juste représentation en faisant une revue de toutes les décisions rendues en vertu de l’article 47.3 du Code du travail. S’ils ne peuvent constater que les recours fondés sur une condition protégée par les lois sur les droits de la personne augmentent, en revanche, la jurisprudence en matière de devoir de juste représentation amène les auteurs à s’interroger quant à la faible protection de la norme d’égalité dans le champ du droit au travail que permet l’application de l’article 47.3. L’arrêt Parry Sound rendu en 2003 pourrait cependant changer la donne.
EN :
As a counter-balance to trade unions’ representative monopoly, Québec unions have since 1978 been held answerable to the duty of even-handed representation. Likewise, owing to the enactment of Québec human rights statutes and charters since the 1970s, the promotion of human rights has led some observers to fear the interactive effects of two very different fields of legal intervention (human rights and group relationships based upon Labour Law), and also, the disruptive effects of logical reasonings centred on individual interests. As such, the authors empirically delve into the evolution of recourses for neglect of one’s duty for providing even-handed representation by reviewing all the rulings handed down under subsection 47.3 of the Labour Code. While they fall short of observing that recourses based upon a condition protected by human rights legislation are increasing, they nonetheless note that precedents regarding the duty to even-handed representation have led them to question the weak protection afforded to the standard of equality in the field of labour law that permits the enforcement of subsection 47.3. The Parry Sound decision handed down in 2003 could, however, usher in the era of a reverse trend.
-
La liberté d’expression au travail et l’obligation de loyauté du salarié : étude empirique de l’incidence des chartes
Mélanie Samson et Christian Brunelle
p. 281–321
RésuméFR :
Au cours des dernières années, les salariés ont semblé plus nombreux à critiquer leur employeur sur la place publique. Faut-il voir dans l’augmentation du nombre de salariés dénonciateurs le signe d’une pénétration croissante du champ du droit du travail par la liberté d’expression, venue ainsi modifier l’étendue de l’obligation de loyauté du salarié ? En vue de répondre à cette question, les auteurs ont constitué un échantillon de décisions rendues à partir de 1976 — année de l’entrée en vigueur de la Charte des droits et libertés de la personne — jusqu’en 2006, décisions laissant voir le confit potentiel entre l’obligation de loyauté et la liberté d’expression de la personne salariée. Les décisions comprises dans l’échantillon ont fait l’objet d’un classement selon différents critères. Le texte qui suit expose les résultats de l’analyse. Il appert que la hausse notable du nombre de salariés dénonciateurs ne s’explique pas surtout par l’élévation de la liberté d’expression au rang de valeur constitutionnelle. D’une part, même depuis l’entrée en vigueur des chartes québécoise et canadienne, la jurisprudence demeure très stricte à l’endroit des salariés dénonciateurs. D’autre part, les salariés qui se voient reprocher un manquement à l’obligation de loyauté pour avoir critiqué publiquement leur employeur sont encore peu enclins à plaider leur liberté d’expression, tandis que les instances juridictionnelles qui ont à décider de leur sort se révèlent relativement peu portées à prendre en considération cette garantie fondamentale. Les auteurs considèrent que les plaideurs devraient mieux intégrer la garantie de la liberté d’expression à leur argumentation de façon à mettre en place les conditions nécessaires au développement d’une jurisprudence axée davantage sur les droits de la personne au travail et empreinte des valeurs fondamentales qui y sont sous-jacentes.
EN :
Over the past years, salaried workers seemed to have become more numerous in criticizing their employers’ publicly. Should one interpret this increase in the number of outspoken employees as a sign of growing penetration of freedom of speech into the field of Labour Law, thereby altering the scope of the salaried worker’s obligation of loyalty ? In answer to this question, the authors have brought together a sampling of decisions handed down from 1976 — the year the Charter of Human Rights and Freedoms came into force — up to the year 2006, which sheds light on the potential conflict opposing salaried workers’ obligation of loyalty versus their freedom of speech. The decisions included in the sampling were classified according to various criteria. The ensuing paper explains the results of their analysis. It would seem that the considerable increase in the volume of salaried workers’ outspokenness can certainly not be explained by the elevating of freedom of speech to the rank of a constitutional value. On the one hand, even since the coming into force of the Quebec and Canadian charters, court rulings remain quite strict with regard to salaried-worker outspokenness. While on the other, salaried workers who are held answerable for neglect in their obligation of loyalty for having publicly spoken out against their employer, remain hardly predisposed to plead their freedom of speech, yet the courts of law that must decide on their outcome are not really prone to taking this fundamental guarantee into consideration. The authors believe that plaintiffs should better integrate the guarantee of freedom of speech into their argumentation so as to constitute the requisite conditions for the development of case law centred more on human rights in the workplace and imbued with the fundamental values underlying such rights.
-
Épilogue. La « constitutionnalisation » du droit du travail : perte ou salut de son âme ?
-
Livres reçus