FR :
Le droit québécois a traditionnellement voulu préserver le libre choix des personnes en s’abstenant d’imposer aux conjoints de fait les droits et obligations des époux mariés. Jusqu’à très récemment, il était possible de croire que la situation allait changer sous l’impulsion d’un mouvement doctrinal et jurisprudentiel prônant, au nom de la protection du conjoint économiquement défavorisé et de la non-discrimination, l’assimilation des conjoints de fait aux époux mariés ou unis civilement quant aux effets patrimoniaux de leur union. Cependant, dans l’affaire Walsh, la Cour suprême du Canada consacre un revirement majeur de la jurisprudence en confirmant la validité, au regard de la Charte canadienne des droits et libertés, de l’exclusion des conjoints de fait d’un régime législatif de partage automatique des biens familiaux. Les auteurs estiment que l’approche résolument autonomiste de la Cour suprême manque de nuance et ils invitent à poursuivre le débat social sur l’opportunité de prévoir un cadre juridique protectionnel contraignant pour les conjoints de fait. Sans évacuer toute idée de respect de l’autonomie individuelle, ils avancent qu’on ne peut occulter le problème de la précarité financière des familles monoparentales dans un contexte d’augmentation des ruptures familiales. Or la charge d’enfants constitue un des facteurs déterminants de précarité économique postséparation. L’objectif de protection est donc pressant dans ces cas et sa réalisation passe, selon les auteurs, par l’application aux conjoints de fait de certains droits et d’obligations, qui sont actuellement réservés aux couples mariés ou unis civilement, dès lors qu’il y a charge d’enfant.
EN :
Traditionally, Québec law has sought to preserve individual free choice by abstaining from imposing the obligations of married couples on unmarried spouses. Until recently, one would have thought a change in this situation to be possible owing to a shift in doctrine and case-law where to protect an economically disadvantaged spouse and prevent discrimination, an assimilation of unmarried spouses as married or civilly united couples would be favoured as regards the patrimonial effects of their union. Yet, in the Walsh case, the Supreme Court of Canada did a major reversal of precedent, as regards the Canadian Charter of Rights and Freedoms by confirming the validity of excluding unmarried spouses from a legislative scheme for the automatic sharing of family property. The authors consider that the Supreme Court’s approach, which is resolutely autonomic, lacks in subtlety and in turn, they call for a continued social debate on the opportunity for implementing a protective legal framework more restrictive for unmarried spouses. Without completely abandoning the idea of individual autonomy, they maintain that society cannot dismiss the problem of financial insecurity experienced by single-parent families in a social environment of increasingly broken families. As such, responsibility for children constitutes one of the determining economic insecurity factors in post-separation households. The issue of protection is therefore an urgent one in such cases and may only be resolved — according to the authors — by applying to unmarried spouses certain rights and obligations that are currently reserved for marriage and civil union, once there is a dependent child.