Résumés
Résumé
Les décisions de tout État de droit s'inscrivent généralement dans un contexte juridique global où l'arbitraire et la discrimination sont systématiquement dénoncés et sanctionnés et où la population s'attend des acteurs politiques qu'ils agissent avec un minimum de rationalité et d'une manière conforme au droit, y compris le droit international. Le principe de précaution a été conçu pour gérer une situation d'incertitude : l'absence d'une certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour différer l'adoption de mesures de précaution, c'est-à-dire de mesures qui permettraient d'éviter le danger ou d'en atténuer les effets. Parce qu'il entend couper avec la rationalité scientifique dont il n'y a plus rien à attendre puisque, par définition, toute action s'accomplit dans un contexte d'incertitude scientifique, l'appel au principe se situe inévitablement sur le plan politique et va nécessairement opposer des valeurs et des intérêts contradictoires ; il faut une opinion publique éclairée et bien informée des principaux enjeux en cause et un forum ouvert où les diverses options peuvent être débattues. En même temps, dans la mesure où ce principe apparaît comme une approche rationnelle dans la gestion des risques, son application présuppose qu'il y a eu une analyse sérieuse et objective des risques envisageables et cette dernière relève essentiellement de l'expertise scientifique : c'est même son point de départ; on aurait donc tort de penser que le principe est une licence générale pour justifier l'arbitraire ou voiler des mesures protectionnistes. Le défi, dans la construction du principe de précaution, c'est de pouvoir intégrer des besoins contradictoires nés, d'une part, de la nécessité de protéger le droit à la libre entreprise, ainsi que l'esprit d'innovation si nécessaire au progrès technologique, et partant au développement économique, et, d'autre part, la nécessité de réduire le risque d'effets négatifs sérieux et irréversibles sur l'environnement.
Abstract
The decisions in any State governed by rule of law generally take their place within a well-defined legal framework where arbitrary initiatives and discrimination are systematically reported and sanctioned and where the general population expects political authorities to conduct themselves with a minimum of rationality and in compliance with the law, including international law. The precautionary principle was conceived for the management of an uncertain situation : the absence of absolute scientific certainty must not serve as a pretext for postponing the adoption of precautionary measures, i.e. measures that would make it possible to avoid danger or decrease its effects. Since the principle intends on breaking with scientific rationality from which nothing more is to be expected because, by definition, any action takes place in a context of scientific uncertainty, turning to the principle inevitably occurs politically and will necessarily oppose conflicting values and interests ; this requires an enlightened and well-informed public opinion as regards the main issues at stake, plus an open forum where divergent opinions may be discussed. Likewise, insofar as this principle appears to be a rational approach to risk management, its application presupposes that there has been a serious and objective analysis of the potential risks and this last factor is essentially a matter of scientific expertise : this is even its starting point ; one would be wrong to conclude, however, that the principle is a free licence for justifying arbitrariness or camouflaging protectionist measures. The challenge in implementing the precautionary principle is to integrate contradictory needs issuing, on the one hand, from the need to protect the right to free enterprise, plus innovative spirit so necessary for technological progress albeit for economic development, and on the other, the need to reduce the risk of negative and irreversible effects on the environment.