FR :
L'adoption ne peut, en principe, être prononcée qu'avec le consentement des parents d'origine. Toutefois, lorsque les parents n'ont pas assumé de fait le soin, l'entretien ou l'éducation de leur enfant depuis au moins six mois, cet enfant peut être déclaré judiciairement admissible à l'adoption, malgré le refus de ses parents. L'adoption est donc une des solutions que l'on peut envisager à l'égard des enfants abandonnés par leurs parents. Depuis quelques années, la Cour d'appel du Québec a eu l'occasion de se pencher à plusieurs reprises sur la notion d'abandon et, notamment, sur le fait de savoir si l'abandon involontaire pouvait également ouvrir la porte à l'adoption forcée. Ce problème s'est soulevé de façon particulièrement épineuse dans des cas de mères qui, d'une part, refusent de consentir à l'adoption de leur enfant, mais qui, d'autre part, ne peuvent aucunement s'en occuper elles-mêmes en raison de graves troubles psychiatriques dont elles souffrent.
Le présent article souligne le caractère d'autant plus délicat de ces questions qu'elles se situent dans un contexte légal qui ne reconnaît que l'adoption dite « fermée », c'est-à-dire l’adoption qui entraîne nécessairement une rupture totale et définitive des liens entre l'enfant et sa famille d'origine. Après avoir analysé l'origine et la mise en œuvre du mécanisme de la déclaration d'admissibilité à l'adoption, l'auteur conclut que le contentieux entourant l'adoption d'enfants abandonnés devrait être l'occasion de mener une réflexion plus large sur l’institution de l'adoption elle-même.
EN :
Generally, adoption can only be decided with the consent of the original parents. Yet when it occurs that parents have not assumed de facto the care, maintenance and education of their children for at least six months, a child may be declared judicially eligible for adoption—despites the parents' refusal. Hence, adoption is one of the solutions that may be considered in the case of children abandoned by their parents. In past years, the Quebec Court of Appeal has on several occasions examined the question of abandonment and especially regarding the fact of knowing if involuntary abandonment may also open the way to forced adoption. The problem has arisen in rather delicate circumstances under which mothers who refuse consenting to the adoption of their children, are incapable of taking care of them owing to their own serious psychiatric problems.
This article underscores the sensitive nature of these questions as they occur in a legal framework that only recognizes « closed » adoption, i.e. adoption in which there is a necessary and final severance of ties between the child and his or her original family. After analyzing the origin and implementation of the declaration of eligibility for adoption, the author concludes that the discussion on the adoption of abandoned children should become an opportunity to open the debate to a wider examination of the institution of adoption per se.