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Paula Hasting, Dominion Over Palm and Pine: A History of Canadian Aspirations in the British Caribbeans, Montréal et Kingston, McGill Queen’s University Press, 2022, 345 p.

  • Martin Crevier

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  • Martin Crevier
    Université du Québec à Montréal

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Couverture de À la (re)découverte de l’oeuvre de Camille Laurin, Volume 32, numéro 1, automne 2024, p. 7-270, Bulletin d'histoire politique

Dans les années qui suivent la Seconde Guerre mondiale, le député de Témiscouata, Jean-François Pouliot, interpelle ses collègues aux Communes à quelques reprises au sujet des territoires britanniques des Caraïbes. L’Empire se morcelle, l’effort de guerre canadien fut considérable et l’hyperpuissance américaine point. Le Canada, affirme Pouliot, devrait ainsi étendre son territoire. Pourquoi n’accaparerait-il pas la Jamaïque, par exemple, « avec son rhum, son sucre et sa mélasse ? » (p. 163). Dans Dominion Over Palm and Pine, Paula Hastings, professeure adjointe à l’Université de Toronto, montre que l’idée d’une expansion canadienne en eaux méridionales, telle que l’exprime Pouliot, n’est pas incongrue ou originale lorsque située dans une trame plus longue. En effet, de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique jusqu’au XXIe siècle, les visées canadiennes sur des territoires britanniques des Caraïbes sont récurrentes. Au cabinet fédéral en 1917, tout comme lors de la convention néo-démocrate de 2016, il est par exemple suggéré d’absorber les îles Turques-et-Caïques en les invitant à rejoindre la Nouvelle-Écosse. Les territoires caraïbéens visés par divers projets expansionnistes varient néanmoins d’une époque à une autre, tout comme les arrangements politiques proposés. Il est tour à tour question d’union douanière, de création de nouvelles provinces et de subordination toute coloniale. Ces projets expansionnistes, malgré leurs différences, sont aux yeux d’Hastings de l’ordre du même phénomène historique, celui de « l’unionisme ». Dominion Over Palm and Pine s’en veut une première histoire. Chacun des six chapitres met en lumière une période de plus ou moins une décennie où l’unionisme est particulièrement saillant, soit dans l’espace public ou dans la sphère politique. Au-delà de l’impressionnante synthèse, la grande réussite de la monographie est qu’elle ne se limite pas à une description étroite du politique. Hastings ne cherche pas non plus simplement à décrire les contours et les aléas de l’unionisme et à en expliquer les échecs. Les projets d’expansions canadiens sont plutôt inscrits dans le cadre plus large des relations asymétriques entre le Canada et les Caraïbes et situés dans le contexte des relations internationales (et intercoloniales) des deux régions ; perspectives canadiennes et caraïbéennes se croisent ainsi au fil des chapitres. Il en résulte un ouvrage thématiquement vaste qui aborde des sujets variés tels l’expansion à l’étranger des banques canadiennes, l’extraction de bauxite, les mobilisations étudiantes, le travail temporaire, la construction d’altérités raciales, ainsi que les mutations de l’Empire britannique. L’autrice fait, en ce sens, un usage cohérent de fonds d’archives conservés dans quatre pays. Les magazines et journaux cités se comptent, quant à eux, par dizaines. Quoiqu’en majorité des hommes anglodescendants, ceux qui portent l’idée expansionniste proviennent de différents horizons politiques. Dans la foulée de la Confédération, ce sont surtout d’ardents impérialistes membres du regroupement Canada First qui ont les Caraïbes dans leur mire ; à partir des années 1960, diverses formes d’expansion font l’objet de débats au sein de la nouvelle gauche. Pour les premiers, les côtes du Pacifique et de l’Arctique ne délimitent pas les frontières naturelles du pays. Le nouvel État canadien, malgré ses proportions déjà continentales, semble plutôt destiné à continuer à croître, mais vers le Sud cette fois. Si certains, tel l’ingénieur et financier montréalais Ken Patrick qui dans les années 1960 propose une association monétaire et commerciale, mettent de l’avant des plans précis, d’autres rêvent avec flou à des tropiques fantasmés. Or, les motivations des unionistes varient peu : crainte du géant américain et compétition géopolitique, nationalisme politique et économique, paternalisme racial et sentiment d’obligation humanitaire, coloniale et réformiste. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, l’objectif des unionistes est l’acquisition d’un pendant canadien aux possessions tropicales des puissances euroaméricaines, à …