Hors-dossierChronique de cinéma politique

Bataille pour l’âme du Québec (2022)

  • Jean-Philippe Carlos

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  • Jean-Philippe Carlos
    Chercheur postdoctoral, Université York

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Couverture de Le nouveau clivage idéologique du Québec au début du XXI<sup>e</sup> siècle, Volume 30, numéro 3, printemps 2023, p. 7-284, Bulletin d'histoire politique

Dire que le documentaire d’Hélène Pelletier, Bataille pour l’âme du Québec, a suscité de vives réactions est un euphémisme. Il n’y a qu’à jeter un oeil aux critiques qui lui ont été adressées les jours suivant sa diffusion, mais aussi aux débats qui ont découlé entre les tenants de diverses sensibilités intellectuelles. En offrant un survol historique de l’évolution du nationalisme québécois depuis la Révolution tranquille, et notamment de son virage identitaire entrepris au lendemain du second échec référendaire de 1995, Pelletier soulève des questions légitimes sur l’état actuel de la question nationale au Québec. Comment expliquer que le nationalisme québécois, autrefois en lutte pour la survivance et ensuite s’inscrivant dans une logique d’autodétermination partagée par d’autres peuples dominés de la planète, en serait venu à s’orienter vers un conservatisme identitaire assumé et endurcit ? Pour Pelletier et plusieurs intervenants issus du milieu universitaire et politique, l’élection de la Coalition Avenir Québec (CAQ) en 2018 et la mise de l’avant d’un discours politique populiste centré sur les intérêts de la majorité historique canadienne-française symboliseraient l’aboutissement de la régression idéologique du nationalisme québécois observable depuis le dernier quart de siècle. Nous assisterions ainsi au retour d’une certaine Grande Noirceur, notamment du point de vue de l’orientation idéologique du nationalisme québécois. En somme, la démarche intellectuelle de Pelletier s’inscrit dans la lignée de plusieurs essais publiés durant la dernière décennie qui tentaient de comprendre les tenants et aboutissants de ce retour à un nationalisme canadien-français que plusieurs qualifient de « conservateur » ou de « droite ». Soulevant des questionnements au coeur de l’actualité, le documentaire fait une large place à de grands spécialistes de la question nationale au Québec, dont Pierre Anctil, Gérard Bouchard, Jean-François Nadeau, Jacques Beauchemin et Jean-Pierre Couture, entre autres. Des intervenants plus jeunes, dont le musicien indépendantiste Émile Bilodeau et l’humoriste Manal Drissi, offrent également des témoignages montrant le fossé qui sépare les tenants de différentes variantes idéologiques du nationalisme, mais aussi entre des militants jeunes et moins jeunes. Le documentaire d’Hélène Pelletier s’amorce avec une brève présentation de la montée du néonationalisme québécois durant la Révolution tranquille. Elle estime que le nationalisme canadien-français traditionnel se structurait essentiellement dans une logique culturelle défendant le culte de la religion catholique et des ancêtres, le nouveau nationalisme québécois qui émerge durant les années 1960 arbore quant à lui un visage résolument politique et moderne. La quête vers un État québécois politiquement indépendant devient le leitmotiv d’une génération entière de militants qui souhaitent voir le Québec prendre sa place dans le concert des nations. Avec l’arrivée en scène du Parti québécois (PQ) en 1968 et de son élection en 1976, la nation québécoise semblait désormais être sur le point de s’affranchir politiquement de ses démons colonialistes et impérialistes. Pour l’historien-sociologue Gérard Bouchard, le nationalisme libéral et progressif de la Révolution tranquille inspirait de la fierté à tous les Québécois sans exception ainsi qu’une grande foi en l’avenir politique de la nation. Toutefois, cet optimisme allait frapper un mur — voire deux — lors des échecs référendaires successifs de 1980 et de 1995. Avec les deux défaites référendaires, les Québécois auraient littéralement saboté leurs chances d’accéder à la vraie autodétermination politique. Ces défaites politiques, et surtout la honte de ces deux défaites encaissées coup sur coup en l’espace de 15 ans, auraient engendré des sentiments d’amertume, d’aigreur et de frustration dans le subconscient collectif de la nation. Ces sentiments auraient ainsi contribué à forger une mentalité d’assiégé, mentalité dépassant le stade de la déprime post-référendaire observée durant la décennie 1980. Pour le sociologue Jacques Beauchemin, l’échec référendaire de 1995 aurait …

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