Dossier : Les cent ans de la CSN : éléments d’histoirePanoramas

La CSN et la condition des femmes : d’une approche de protection à un engagement actif et militant envers l’égalité[Notice]

  • Claudette Carbonneau

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  • Claudette Carbonneau
    Présidente de la CSN (2002-2011)

Le centenaire de la CSN offre une occasion unique de retracer et d’analyser la trajectoire et la contribution spécifique de la centrale à l’objectif d’égalité entre les femmes et les hommes. Ce parcours n’a rien de linéaire. Surtout, il est tributaire de nombreux facteurs : évolution de la société québécoise dans son ensemble, entrée des femmes sur le marché du travail, vision de la CSN quant à la place des femmes dans la société, influence de l’Église, évolution et organisation des effectifs féminins (syndiquées et salariées) au sein de la centrale, etc. Pour saisir correctement toute la complexité de ce cheminement, il apparaît essentiel de resituer les luttes menées par les syndicats CSN, les prises de position et les grandes revendications portées par la centrale, dans les différentes époques qui ont marqué le dernier siècle. Aussi, pour éviter tout mauvais procès consistant à juger des faits d’hier avec les yeux et les valeurs d’aujourd’hui, nous organiserons notre propos en fonction de quatre thématiques référant à certains repères historiques et à la trajectoire spécifique des femmes au sein de la centrale. La première relate la situation et la place des femmes depuis la fondation de la CTCC jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale. La seconde, qui s’étale de la Deuxième Guerre mondiale jusqu’à la fin des Trente glorieuses, témoigne des virages importants qui se dessinent à la CSN suivant une présence accrue et plus soutenue des femmes dans ses rangs. La troisième, qui va de 1973 jusqu’en 2010, fait état de l’organisation des femmes à l’intérieur de la centrale, dont elles constituent désormais la moitié des effectifs et de la jonction qui s’opère alors entre la lutte syndicale et la lutte des femmes. La dernière section est quant à elle consacrée au rôle spécifique joué par la CSN dans l’élaboration des grandes politiques publiques que le Québec va adopter à compter de 1996 pour mieux soutenir les Québécoises. La CSN est fondée en septembre 1921 sous le nom de la Confédération des travailleurs catholiques du Canada (CTCC). Il s’agit d’un syndicat confessionnel, animé par la doctrine sociale de l’Église, où seuls les catholiques peuvent être admis comme membres actifs. Chaque organisation affiliée se voit assigner un aumônier qui peut exiger, s’il le juge à propos, une approbation de l’évêque du diocèse avant qu’une résolution ne soit adoptée. Cependant, à la différence de ce qui existait avec les premiers syndicats catholiques du début des années 1900, les statuts et règlements de la CTCC affirment, dès le départ, que le but premier de l’organisation est « de surveiller et de défendre les intérêts des ouvriers ». Le congrès de fondation a pris bonne note que la CTCC n’attirerait pas d’adhérents si elle ne se souciait pas en priorité de les défendre contre le patronat. En ce sens, le congrès va aussi reconnaître l’importance du droit de grève. Les aumôniers vont toutefois s’opposer avec succès à la mise en place d’un fonds de grève, proposé dès la fondation par Alfred Charpentier, qui deviendra un des présidents importants de la centrale. En 1921, les femmes sont relativement peu nombreuses sur le marché du travail et encore moins présentes parmi les rangs des syndiqués. Elles représentent environ un cinquième de la population active du Québec et un quart des effectifs ouvriers de Montréal. Pour ce qui est du taux de syndicalisation des Québécoises, on l’évalue à 2,6 % en 1923 et à 5,6 % en 1937. Dans les couches populaires, la pauvreté est généralisée. Les conditions de vie et de logement sont déplorables, surtout dans les grandes villes. Le …

Parties annexes