Les ateliers de l'éthique
The Ethics Forum
Volume 9, numéro 3, automne 2014
Sommaire (13 articles)
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Liminaire
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Political Corruption, Democratic Theory, and Democracy
Doron Navot
p. 4–24
RésuméEN :
According to recent conceptual proposals, institutional corruption should be understood within the boundaries of the institution and its purpose. Political corruption in democracies, prominent scholars suggest, is characterized by the violation of institutional ideals or behaviors that tend to harm democratic processes and institutions. This paper rejects the idea that compromises, preferences, political agreements, or consent can be the baseline of conceptualization of political corruption. In order to improve the identification of abuse of power, the concept of political corruption should not be related directly to democratic institutions and processes; rather, it should be related to ideals whose content is independent of citizens’ preferences, institutions and processes. More specifically, I articulate the relations between political corruption and the notion of subjection, and include powerful citizens in the category of political corruption. Yet, I also suggest redefining under what conditions agents are culpable for their motivations in promoting private gain. By doing this, we better realize how democratic institutions can be the source of corruption and not just its victims. Such a redefinition, I propose finally, is the basis for the distinction between individual and institutional corruption.
FR :
Selon les propositions conceptuelles récentes, la corruption institutionnelle doit être comprise dans les limites de l’institution et de ses objectifs. D’éminents spécialistes suggèrent que la corruption politique dans les démocraties est caractérisée par la violation des idéaux ou comportements institutionnels, ce qui tend à nuire aux processus et institutions démocratiques. Cet article rejette l’idée que les compromis, les préférences, les ententes politiques ou le consentement peuvent constituer le fondement de la conceptualisation de la corruption politique. Afin d’améliorer l’identification des abus de pouvoir, le concept de corruption politique ne doit pas être relié directement aux institutions et processus démocratiques; il doit plutôt être rattaché aux idéaux dont le contenu est indépendant des préférences des citoyens ainsi que des institutions et des processus. Plus précisément, j’exprime clairement les relations qui existent entre la corruption politique et la notion d’assujettissement et inclus les citoyens puissants dans la catégorie de la corruption politique. Cependant, je suggère également de redéfinir les conditions dans lesquelles les agents peuvent être reconnus coupables pour leur motivation à favoriser le gain privé. Ce faisant, nous réalisons mieux de quelle manière les institutions démocratiques peuvent être la source de la corruption et pas seulement ses victimes. En terminant, je propose qu’une telle redéfinition constitue le fondement de la distinction entre la corruption individuelle et institutionnelle.
Dossier : La justice animale : de l’éthique à la politique
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Sous la direction de Valéry Giroux et Jean-Philippe Royer
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La justice animale : de l’éthique à la politique
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Le double sens de la communauté morale : la considérabilité morale et l’agentivité morale des autres animaux
Christiane Bailey
p. 31–67
RésuméFR :
Distinguant deux sens de « communauté morale », cet article soutient que certains animaux appartiennent à la communauté morale dans les deux sens : (1) ils sont des patients moraux dignes de considération morale directe et équivalente, mais également (2) des agents moraux au sens où ils sont capables de reconnaître, d’assumer et d’adresser aux autres des exigences minimales de bonne conduite et de savoir-vivre. Au moyen de la notion d’« attitudes réactives » développée par Peter F. Strawson, je soutiens que les animaux sociaux qui sont à la fois objets et sujets d’attitudes réactives forment des communautés morales au second sens, dans la mesure où ils se traitent mutuellement comme des individus ayant des obligations et tenus à des exigences de bonne volonté minimale dans leurs interactions interpersonnelles. Distinguant l’agentivité morale du raisonnement moral, je soutiens que la capacité de raisonner abstraitement sur les principes et les conséquences de nos actions nous imposent plus de responsabilités que n’en ont d’autres animaux, mais que cela ne fait pas nécessairement de nous des agents moraux plus compétents que d’autres animaux sociaux. Je termine en donnant un aperçu de quelques implications de ce changement de perspective en éthique animale.
EN :
This article draws the distinction between two meanings of “moral community” and maintains that certain animals belong to moral communities in both senses of the term: these animals are (1) moral patients worthy of direct and equivalent moral consideration, but also (2) moral agents in the sense that they are capable of recognizing and respecting minimal requirements of good conduct and manners as well as expecting and demanding the same from other members of their community. By way of the notion of “reactive attitudes” developed by Peter F. Strawson, I maintain that social animals who are at once objects and subjects of reactive attitudes constitute moral communities in the second sense of the term, in that they treat each other as individuals who have obligations and who are bound by the demand for a minimum of good-will in their interpersonal interactions. Distinguishing between moral agency and moral reasoning, I maintain that the capacity to reason abstractly about the principles and consequences of our actions gives us more responsibilities than other animals have, but that this does not necessarily make us more competent moral agents than other social animals. I conclude with an overview of some of the implications that this change in perspective has for animal ethics.
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In Defence of Extinctionism
Frauke Albersmeier
p. 68–88
RésuméEN :
In Zoopolis, Donaldson and Kymlicka dismiss the abolitionist, or extinctionist approach in animal rights theory as insufficient in its theoretical foundation and disproportional regarding the means it promotes to prevent domesticated animals from suffering abuse by humans. Among the consequences of their counterproposal—granting domesticated animals citizenship—is an increased pressure to justify any interference with domesticated animals’ reproductive activities. This paper attempts to give such justification with reference to domesticated animals’ specific state of vulnerability, but also takes into account the interest of the mixed society to prevent overly demanding obligations. Even while recognizing existing domesticated animals as citizens, humans might be unable to fully meet their obligation to protect the most dependent of them, and therefore might be justified in conditionally subscribing to “extinctionism” and limiting these animals’ reproduction to the point of their ultimate extinction. Therefore, rather than upholding a strict opposition between extinctionism in any form and a political framework for animal rights, out of reasonable concern for the well-being of domesticated animals in the societies they have been placed in, a qualified extinctionist approach should be incorporated into the political framework developed in Zoopolis.
FR :
Dans Zoopolis, Donaldson et Kymlicka rejettent l’approche abolitionniste, ou extinctionniste, de la théorie du droit des animaux. Ils estiment que ses fondements théoriques sont insuffisants et que les mesures qu’elle promeut pour protéger les animaux domestiques des abus des humains sont disproportionnées. Leur contre-proposition – qui accorde la citoyenneté aux animaux domestiques – a plusieurs conséquences, parmi lesquelles un renforcement de la justification de toutes les formes d’ingérence dans la reproduction des animaux domestiques. Cet article tente de justifier pareille ingérence en raison de l’état particulier de vulnérabilité des animaux domestiques, mais tient également compte du fait que la société mixte a intérêt à éviter l’établissement d’obligations trop exigeantes. Cependant, les humains peuvent accorder aux animaux domestiques existant un statut de citoyen tout en s’avérant incapables de remplir pleinement leur obligation de protéger les plus dépendants d’entre eux. Ils pourraient par conséquent être justifiés de souscrire de manière conditionnelle à « l’extinctionnisme » et limiter la reproduction de ces animaux jusqu’à leur extinction. C’est pourquoi, au lieu de maintenir une opposition stricte entre l’extinctionnisme sous toutes ses formes et l’élaboration d’un cadre politique pour le droit des animaux, l’on devrait, par souci du bien-être des animaux domestiques dans les sociétés dans lesquelles ils vivent, insérer une approche extinctionniste conditionnelle dans le cadre politique élaboré dans Zoopolis.
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Ma fille et mon chat, du droit d’avoir des enfants et un animal de compagnie
Bertrand Cassegrain
p. 89–113
RésuméFR :
Les injustices dont sont victimes aujourd’hui les animaux domestiques ont mené certains partisans des droits des animaux à défendre l’idée selon laquelle la relation entre humains et animaux domestiques était intrinsèquement injuste et qu’il ne fallait pas permettre à ces derniers de se reproduire. Tout en s’inscrivant dans une théorie des droits des animaux « abolitionniste », cet article entend montrer que, sous réserve du respect de certaines conditions, il n’est pas nécessairement condamnable sur le plan moral d’autoriser la perpétuation des animaux domestiques – en particulier des animaux de compagnie. Ainsi, (1) je tenterai de montrer que s’il est vrai, toutes choses égales par ailleurs, qu’il est moralement acceptable de mettre au monde des enfants sur la base d’un désir égoïste (parce qu’avoir des enfants enrichit nos vies), alors il l’est aussi de laisser venir au monde des animaux de compagnie pour une raison semblable. (2) Le fait d’avoir un enfant ou un animal de compagnie ne mobilisent pas nécessairement les mêmes enjeux éthiques. Je ferai valoir que malgré certaines contraintes, la vie des animaux de compagnie peut tout à fait être enviable. Enfin, (3) j’indiquerai en quoi le premier argument fournit des pistes pour penser le statut légal des animaux de compagnie.
EN :
Because of the injustices domestic animals suffer today, some animal rights theorists claim that the relationship between humans and domestic animals is intrinsically unjust, and that therefore we should not allow domestic animals to breed. I try to show in this paper that, provided that some specific conditions are respected, it is possible to allow the perpetuation of domestic animals—especially pets—while being consistent with an “abolitionist” animal rights theory. Thus, (1) I will try to show that if, all other things being equal, it is morally acceptable to have a child based on a selfish desire (because having children enrich our lives), then it is morally acceptable to have a pet for the same reason. (2) Having a child does not lead to the same ethical issues as having a pet. I will show that, despite some constraints, a pet’s life can be perfectly enjoyable. Finally, (3) I will show how the first argument can help us to think about the legal status of pets.
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Right to Place: A Political Theory of Animal Rights in Harmony with Environmental and Ecological Principles
Eleni Panagiotarakou
p. 114–139
RésuméEN :
The focus of this paper is on the “right to place” as a political theory of wild animal rights. Out of the debate between terrestrial cosmopolitans inspired by Kant and Arendt and rooted cosmopolitan animal right theorists, the right to place emerges from the fold of rooted cosmopolitanism in tandem with environmental and ecological principles. Contrary to terrestrial cosmopolitans—who favour extending citizenship rights to wild animals and advocate at the same time large-scale humanitarian interventions and unrestricted geographical mobility—I argue that the well-being of wild animals is best served by the right to place theory on account of its sovereignty model. The right to place theory advocates human non-interference in wildlife communities, opposing even humanitarian interventions, which carry the risk of unintended consequences. The right to place theory, with its emphasis on territorial sovereignty, bases its opposition to unrestricted geographical mobility on two considerations: (a) the non-generalist nature of many species and (b) the potential for abuse via human encroachment. In a broader context, the advantage of the right to place theory lies in its implicit environmental demands: human population control and sustainable lifestyles.
FR :
Le présent article porte principalement sur le « droit territorial » en tant que théorie politique des droits des animaux sauvages. Issu du débat entre théoriciens cosmopolitistes du droit animal, soit terrestres inspirés par Kant et Arendt, soit enracinés, le droit territorial trouve ses sources dans le cosmopolitisme enraciné qui va de concert avec certains principes environnementaux et écologiques. Contrairement aux cosmopolitistes terrestres, qui préconisent d’étendre les droits de citoyenneté aux animaux sauvages tout en défendant les interventions humanitaires à grande échelle et la mobilité géographique illimitée, j’estime que la théorie du droit territorial est davantage en mesure d’assurer le bien-être des animaux sauvages, grâce à son modèle basé sur la souveraineté. La théorie du droit territorial préconise la non-ingérence dans les communautés fauniques, allant jusqu’à s’opposer aux interventions humanitaires, qui risquent de provoquer des conséquences non désirées. Cette théorie, en mettant l’accent sur la souveraineté territoriale, base son opposition à la mobilité géographique illimitée sur deux considérations : (a) le caractère non généraliste de bon nombre d’espèces, et (b) le risque de mauvais traitements par empiètement humain. Dans un contexte plus large, l’intérêt de la théorie du droit territorial réside dans ses exigences environnementales implicites : le contrôle de la population humaine et l’adoption de modes de vie durables.
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L’État libéral peut-il intervenir pour protéger les animaux? Défis et limites du libéralisme politique
Andrée-Anne Cormier
p. 140–161
RésuméFR :
Cet article explore la question des implications de l’exclusion des animaux de la catégorie des sujets de justice dans le cadre du libéralisme politique de John Rawls. Plus spécifiquement, j’examine et critique les lectures de Ruth Abbey et de Robert Garner. Abbey suggère que le libéralisme politique est incompatible avec la thèse selon laquelle nous avons des devoirs moraux universels envers les animaux. Garner, pour sa part, avance que la théorie de Rawls n’autorise pas l’État libéral à adopter des mesures de protection des animaux. Dans cet article, je démontre que ces lectures sont erronées, car elles sont fondées sur des interprétations du libéralisme politique qui ne sont pas plausibles. Je soutiens, d’une part, que le libéralisme politique est neutre eu égard à la question de la nature de nos devoirs moraux envers les animaux et, d’autre part, qu’il permet de justifier une gamme considérable d’interventions étatiques visant la protection des animaux. Je suggère donc que la tension entre le libéralisme politique et l’éthique animale est moins forte que ne l’affirment ces auteurs. Enfin, j’identifie des stratégies possibles, cohérentes avec le cadre théorique rawlsien, pour élargir la sphère des sujets de justice de manière à y intégrer les animaux.
EN :
What are the implications of John Rawls’s Political Liberalism for animal ethics? In this paper, I examine Ruth Abbey’s and Robert Garner’s answers to this question. Abbey claims that Political Liberalism is incompatible with the view that there exist universal moral duties toward animals. Garner contends that Rawls’s theory cannot justify state interventions designed to protect animals. I show that these readings are based on implausible interpretations of Rawls’s theory. I argue, on the one hand, that Political Liberalism is neutral with respect to the question of the nature of our moral duties toward animals and, on the other hand, that the theory can potentially justify a significant range of state interventions in the interest of animals. This indicates that the tension between Rawls’s theory and animal ethics is less sharp than Abbey and Garner suggest. Finally, I identify possible strategies, consistent with the Rawlsian framework, for including animals among the subjects of justice.
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The Priority of Suffering Over Life. How to Accommodate Animal Welfare and Religious Slaughter
Federico Zuolo
p. 162–183
RésuméEN :
Most contemporary Western laws regarding the treatment of animals in livestock farming and animal slaughter are primarily concerned with the principle that animal suffering during slaughter should be minimized, but that animal life may be taken for legitimate human purposes. This principle seems to be widely shared, intuitively appealing and capable of striking a good compromise between competing interests. But is this principle consistent? And how can it be normatively grounded? In this paper I discuss critically this principle (the priority of the minimization of animal suffering over animals’ right to life). I argue that this principle can be justified on the ground of respect for the value commitment toward animal welfare, which is held by many people. The advantage of this perspective is its inclusiveness: it can justify without contradiction the principle at stake and allow for the admissibility of religious slaughter while promoting animals’ interest in not suffering. This justification also has the advantage of being compatible with the cultural and religious pluralism of contemporary societies.
FR :
La plupart des lois contemporaines portant sur le traitement des animaux, leur élevage et les techniques d’abattage en usage en Occident se préoccupent principalement du principe selon lequel la souffrance des animaux doit être minimisée durant l’abattage, mais reconnaissent que les animaux peuvent être tués à des fins humaines légitimes. Ce principe semble être largement accepté par la société, séduisant intuitivement et susceptible de constituer un bon compromis entre des intérêts concurrents. Mais ce principe est-il cohérent? Et quel peut être son fondement normatif? Dans cet article, j’aborde ce principe de manière critique (la priorité de la minimisation de la souffrance animale sur le droit à la vie des animaux). J’affirme que ce principe peut être justifié dans le cadre du respect de l’engagement envers le bien-être des animaux, lequel est soutenu par de nombreuses personnes. L’avantage de cette perspective est son caractère inclusif : elle permet de justifier de manière non contradictoire le principe en question et rend acceptable l’abattage rituel tout en faisant la promotion de l’intérêt des animaux à la non-souffrance. Cette justification présente également l’avantage d’être compatible avec le pluralisme culturel et religieux qui caractérise les sociétés contemporaines.
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Grounding Animal Rights in Mutual Advantage Contractarianism
Matthew Taylor
p. 184–207
RésuméEN :
Contrary to critics and advocates of contractarianism alike, I argue that mutual advantage contractarianism entails rights and protections for animals. In section one I outline the criteria that must be met in order for an individual to qualify for moral rights on the contractarian view. I then introduce an alternative form of ‘rights,’ which I call ‘protectorate status,’ from which an individual can receive protections indirectly. In section two I suggest guidelines for assigning animal rights based on two ways of categorizing animals. On the basis of the categorization according to benefit derived, I argue that animals used for companionship, security, hunting assistance, transportation, entertainment, medical service, nourishment, or clothing will tend to qualify for basic rights against starvation, predation, and disease. On the basis of the categorization according to species, I argue that, on top of the basic rights above, dogs tend to qualify for rights against abuse, and against frivolous medical experimentation, as well as further negotiated rights. Cows have the basic rights against starvation, predation, and disease, but squirrels and bears have no rights. In section three I argue that some animals qualify for protectorate status, which would establish various protections for different animals, but would also generally prohibit cruelty towards animals.
FR :
Contrairement à certains critiques ou défenseurs du contractualisme, j’affirme que le contractualisme à avantages réciproques peut assurer droits et protections aux animaux. Dans la première section, je décris les critères que, d’un point de vue contractualiste, un individu doit satisfaire pour pouvoir bénéficier de droits moraux. J’introduis ensuite une autre forme de « droits », que j’appelle « protectorat », qui permet à un individu de bénéficier indirectement de certaines protections. Dans la deuxième section, je propose des directives pour accorder des droits aux animaux en fonction d’un double mode de catégorisation. La première catégorisation serait établie d’après les avantages procurés par l’animal; ainsi les animaux de compagnie, de garde, de chasse, de transport, de divertissement, ou assurant des services de santé, d’alimentation ou d’habillement devraient se voir accorder des droits fondamentaux contre la famine, la prédation et la maladie. Selon la seconde catégorisation, établie d’après l’espèce, les chiens devraient bénéficier de droits les protégeant des mauvais traitements et des expérimentations médicales inutiles, ainsi que d’autres droits négociés. Les vaches jouissent ainsi des droits fondamentaux qui les protègent de la famine, de la prédation et de la maladie, mais les écureuils et les ours n’ont pas de droits. Dans la troisième section, j’explique que certains animaux devraient bénéficier d’un statut de protectorat, qui accorderait des protections diverses à différents animaux, mais qui défendrait de façon générale toute cruauté envers les animaux.
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Animal Ethics and Politics Beyond the Social Contract
Alan Reynolds
p. 208–222
RésuméEN :
This paper is divided into three sections. First, I describe the wide plurality of views on issues of animal ethics, showing that our disagreements here are deep and profound. This fact of reasonable pluralism about animal ethics presents a political problem. According to the dominant liberal tradition of political philosophy, it is impermissible for one faction of people to impose its values upon another faction of people who reasonably reject those values. Instead, we are obligated to justify our political actions to each other using reasons that everyone can accept. Thus, in the second section I suggest that our condition of reasonable pluralism inspires us to turn toward some form of contractarianism. The social contract tradition emerged precisely as an attempt to think about how a society characterized by deep moral disagreement could nonetheless agree about the basic principles of justice. I will show, in this section, that although the social contract tradition would seem to contain the best tools for thinking about how to deal with moral disagreement, it fails to help us think through the important issues of animal ethics. In the concluding section, I suggest some ways in which political philosophy might move beyond contractarianism when thinking about this issue, including embracing an agonistic style of politics.
FR :
Cet article est divisé en trois sections. Tout d’abord, je décris la grande pluralité des opinions existant sur les questions de l’éthique animale, montrant que nos désaccords sur le sujet sont profonds. Cette réalité du pluralisme raisonnable en matière d’éthique animale pose un problème politique. Selon la tradition libérale dominante de la philosophie politique, une faction de personnes ne peut imposer ses valeurs à une autre faction qui rejette raisonnablement ces valeurs. Au lieu de cela, nous sommes obligés de justifier nos actions politiques en utilisant des raisons que tout le monde peut accepter. Ainsi, dans la seconde section, je suggère que notre condition de pluralisme raisonnable nous mène à une forme de contractualisme. La tradition du contrat social est justement apparue comme une tentative de réfléchir à la façon dont une société caractérisée par un profond désaccord moral peut néanmoins s’entendre sur les principes fondamentaux de la justice. Dans cette section, je montre que, bien que la tradition du contrat social semble offrir les meilleurs outils pour définir la manière de traiter le désaccord moral, elle ne parvient pas à nous aider à réfléchir aux questions essentielles de l’éthique animale. Dans la dernière section, je suggère quelques façons susceptibles de permettre à la philosophie politique de dépasser le contractualisme dans sa réflexion sur cette question, ceci comprenant l’adoption d’un style de politique agonistique.
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De l’étranger au familier : structure analogique de l’éthique animale
Jérôme Ravat
p. 223–237
RésuméFR :
Cet article vise à souligner la place centrale qu’occupe l’analogie au sein de l’éthique animale, à la fois d’un point de vue descriptif, explicatif et normatif. Nous montrons que l’analogie joue un rôle décisif dans la compréhension du statut moral de l’animal, puisqu’elle permet d’éclairer ce qui est moins connu (les animaux non humains) à partir de ce qui est plus connu (les animaux humains). Nous soulignerons le fait que l’analogie revêt deux fonctions significatives : une fonction critique (elle permet de remettre en cause l’exploitation et la domination de l’animal) et une fonction intégratrice (elle légitime une extension des principes moraux en dehors du champ humain). Nous montrons également que l’analogie, en vertu de sa dimension interprétative, suscite également de nombreux désaccords, et produit des représentations morales divergentes de l’animal.
EN :
This paper aims at emphasizing the key role played by analogy in animal ethics, from a descriptive, explicative, and normative point of view. I show that analogy is decisive for the understanding of animals’ moral status, since it can shed light on the unknown (non-human animals) thanks to what is known (human animals). I will emphasize that analogy has two significant functions: a critical function (it helps to question the exploitation and domination of animals) and an integrative function (it legitimates the extension of moral principles beyond the human field). Furthermore, I demonstrate that analogy, because of its interpretative dimension, begets many disagreements and produces divergent moral conceptions of animals.
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Defending the Defenceless: Speciesism, Animal Liberation, and Consistency in Applied Ethics
Lisa A. Kemmerer
p. 238–253
RésuméEN :
This article explores whether or not animal activists who engage in violence might legitimately be labelled “terrorists.” To this end, I examine common assumptions concerning the use of pre-emptive counter-violence in order to defend the comparatively defenceless. Through the use of casuistry, this essay compares specific hypothetical instances of killing comparatively defenceless individuals, beginning with scenarios that offer a clear general consensus, moving to more controversial cases. This indicates that contemporary violence on behalf of animal liberation, often assumed to be rash and radical, is actually quite restrained. The intent of this paper is not to make claims as to how liberationists ought to behave, but rather to highlight egregious inconsistencies in our attitudes toward violence on behalf of those who are comparatively defenceless.
FR :
Cet article vise à déterminer si les activistes animaliers qui se livrent à des actes violents doivent légitimement ou non être taxés de « terroristes ». À cette fin, j’examine les idées courantes relatives à l’utilisation de la violence préventive dans le but de défendre des êtres qui sont relativement sans défense. À l’aide de la casuistique, cet essai compare des exemples hypothétiques spécifiques de meurtres d’individus relativement sans défense, en commençant avec des scénarios qui offrent un consensus général clair, pour passer ensuite à des cas plus controversés. Cette recherche montre que la violence contemporaine perpétrée au nom de la libération des animaux, que l’on considère souvent comme étant téméraire et radicale, est en fait assez retenue. L’objectif de cet article ne consiste pas à prendre position au sujet de la façon dont les libérationnistes devraient se comporter, mais plutôt à mettre en évidence les incohérences flagrantes de nos attitudes face à la violence perpétrée au nom des êtres qui sont relativement sans défense.